Intervention de Patrice Verchère

Séance en hémicycle du 10 février 2015 à 15h00
Débat sur le rapport relatif à l'activité de la délégation parlementaire au renseignement pour l'année 2014

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrice Verchère :

Permettez-moi tout d’abord de saluer le travail de la délégation parlementaire au renseignement et des propositions contenues dans le rapport d’activité pour l’année 2014 présenté par Jean-Jacques Urvoas.

Cependant, au regard des événements tragiques que nous venons de connaître, je souhaite vous interroger, messieurs les ministres, vous en particulier, monsieur le ministre de l’intérieur, sur un sujet qui pose, comme beaucoup d’autres, des problèmes de sécurité intérieure.

En effet, à l’heure actuelle, près de dix personnes, principalement des islamistes d’origine algérienne, seraient assignées à résidence. Condamnées à une interdiction définitive du territoire français, elles ne peuvent être expulsées car la Cour européenne des droits de l’homme, qu’elles ont saisie, fait barrage à une extradition vers leur pays en évoquant des risques de torture. D’une certaine manière, en refusant l’expulsion de terroristes, la CEDH fait de nos pays des sanctuaires pour ces djihadistes et met donc nos compatriotes en danger.

Dès lors, nous sommes contraints d’héberger à nos frais ces dangereux individus par des mesures d’assignation à résidence. Généralement, ces terroristes sont placés dans des petites communes rurales et vivent parmi la population qui, pas plus que les élus locaux, n’a eu son mot à dire.

À l’heure d’Internet, vous l’avez rappelé, il serait bien naïf de croire que ces terroristes se retrouvent isolés. Le cas de Djamel Beghal nous a montré que ces individus conservent une vie sociale en maintenant le contact avec la nébuleuse terroriste, voire en recevant dans leur nouvel environnement leurs camarades djihadistes. Le cas de Saïd Arif nous a quant à lui montré la facilité avec laquelle ces individus reconnus coupables d’entreprises terroristes pouvaient déjouer de telles mesures de surveillance et retourner dans la clandestinité.

Les gendarmes, peu nombreux dans ces bourgs ruraux, n’ont pas les moyens de surveiller correctement ces individus et les personnes qu’ils reçoivent. Convenons également qu’à l’heure où nos agents des services de renseignement ont à surveiller un nombre exponentiellement croissant de terroristes potentiels, ils ont bien d’autres choses à faire que de surveiller des assignés à résidence qui ne devraient même plus se trouver sur le territoire.

Monsieur le ministre, l’article 15 de la CEDH prévoit un régime dérogatoire à la Convention en cas de guerre ou de danger public menaçant la vie de la nation. Les plus hautes autorités de l’État n’ont-elles pas prononcé le mot de guerre, monsieur le ministre ? Le déploiement sans précédent, et je vous en félicite, des forces de police et des forces armées n’est-il pas suffisant pour plaider un régime dérogatoire auprès de la CEDH ?

Monsieur le ministre, le Gouvernement va-t-il faire jouer l’article 15 de la CEDH ? De même, seriez-vous prêt à faire voter, comme la Grande-Bretagne envisage de le faire, une interdiction de retour des djihadistes ressortissants, ce qui soulagerait nos services de renseignement, dont la charge de travail risque d’engendrer des défaillances ? Enfin, monsieur le ministre, soutiendrez-vous la création d’un centre de rétention spécifique ?

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