Votre première question a fait l’objet de beaucoup de commentaires de presse et d’interrogations, parfois au sein même du Parlement.
Il y a tout d’abord des actions que l’on ne voit pas, tout simplement parce qu’elles ont été couronnées de succès. Tous les jours, nous procédons à des arrestations, à la mise hors d’état de nuire de terroristes qui, pour l’essentiel, appartiennent aux filières de combattants étrangers. Depuis le 25 janvier, nous avons ainsi procédé à l’arrestation de vingt personnes, en tout point du territoire national ; elles étaient engagées dans des filières organisées, détenaient des armes et des munitions pouvant occasionner des dégâts importants, communiquaient entre elles par Internet, envisageaient de commettre des attentats. Ces vingt arrestations ont abouti, en l’espace de treize jours, à une dizaine de mises en examen, à sept incarcérations et à une mise sous contrôle judiciaire. Du démantèlement de ces filières et de la judiciarisation de la situation de leurs membres – essentiellement des combattants étrangers, mais pas seulement –, on n’en parle jamais !
Cette action continue, quotidienne, a pourtant conduit à la mise hors d’état de nuire d’un grand nombre d’acteurs et permis d’éviter beaucoup d’attentats. Alors, quand j’entends dire que l’on a privilégié telle filière plutôt que telle autre pour des raisons qui tiendraient à un défaut d’analyse, je voudrais que l’on réalise la masse de sujets à traiter et l’extrême mobilisation des services malgré un contexte de pénurie de moyens humains et technologiques – que nous nous employons, de façon très volontariste, à corriger. Voilà ce qu’est la réalité !
Deuxièmement, je le répète, ce n’est pas parce qu’on collecte des informations qu’on les analyse bien. En matière de lutte contre le terrorisme, il faut procéder à une analyse fine, c’est-à-dire croiser les approches : l’expertise, excellente, de la DGSI, avec les retours du renseignement territorial, tout en procédant au recrutement d’analystes et de traducteurs – pour analyser les interceptions. Il convient de le faire rapidement en recrutant sur titres plutôt que par voie de concours, de manière à être opérationnels le plus vite possible ; c’est ce à quoi je m’emploie. Il faut aussi recourir à d’autres compétences – des universitaires, des intellectuels, des diplomates – afin d’affiner, par leurs regards croisés, les analyses de manière à définir les cibles à surveiller plus attentivement.
Voilà ce que nous souhaitons faire : accroître les moyens, procéder à des recrutements, ouvrir nos services à d’autres compétences et à d’autres disciplines, tout en valorisant les actions de démantèlement des filières existantes.
S’agissant du milieu pénitentiaire, le Premier ministre a annoncé la création de 950 postes, qui se répartiront entre l’administration pénitentiaire, la protection judiciaire de la jeunesse et les juridictions. L’objectif est de mieux armer les juridictions, notamment le parquet antiterroriste, de faire en sorte que la protection judiciaire de la jeunesse puisse prévenir le passage à l’acte et de donner à l’administration pénitentiaire les moyens de faire face à la radicalisation en prison. Il importe aussi de renforcer le renseignement pénitentiaire, actuellement composé de quelques unités seulement, pour faire face à un phénomène en rapide expansion du fait de la judiciarisation des personnes susceptibles de commettre des aces terroristes. Nous avons intégré au sein de l’UCLAT certaines de ces compétences, de manière qu’elle puisse disposer d’une vision transversale de la question terroriste, incluant les informations obtenues en prison. Cet effort sera encore intensifié grâce au plan annoncé le 22 janvier par le Premier ministre.