Intervention de Pascal Cherki

Séance en hémicycle du 13 février 2015 à 21h45
Croissance activité et égalité des chances économiques — Article 72

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Cherki :

Je pense que le Gouvernement aura à coeur de donner un avis favorable à cet amendement extrêmement important. Le ministre n’a-t-il pas, en effet, prononcé cette parole d’évangile : « Il faut renvoyer aux élus la liberté de ce qui est bon pour eux ». C’est peut-être la phrase la plus importante que vous ayez dite au long de ce débat relatif au travail dominical et aux zones touristiques internationales, monsieur le ministre. Je suis totalement d’accord avec vous.

Je regrette d’ailleurs l’absence de M. Lamour qui déplorait que l’inaction, ces cinq dernières années, de Bertrand Delanoë et Anne Hidalgo ait conduit l’État à intervenir. Est-ce que cette « inaction » nous a si mal réussi ? Nous parlons beaucoup des touristes mais n’oublions pas que nous sommes élus de la nation, choisis par nos concitoyens dans nos circonscriptions pour représenter les intérêts de la nation et de ceux qui nous font confiance. Nous ne sommes pas là pour les accabler. Est-ce que l’extrême prudence dont nous avons fait preuve ne nous a pas réussi ? Que je sache, malgré des circonstances nationales sur lesquelles nous n’avons pas pu peser suffisamment, nous avons tout de même réussi à conserver Paris à gauche, tout comme beaucoup d’autres villes. Si nous avions adopté les idées libérales qu’on nous propose, comme la généralisation du travail du dimanche, peut-être le résultat aurait-il été différent.

Je voudrais dire à tous ces conseilleurs qui ne sont pas les payeurs qu’un élu local doit arbitrer en permanence entre l’intérêt général et les intérêts économiques. Nous souhaitons être le coeur d’une grande métropole économique et dynamique tout en respectant les aspirations de nos habitants à une certaine qualité de vie. Monsieur le ministre, laisser les élus décider, c’est les laisser prendre leurs responsabilités. Notre collègue Christophe Caresche, qui est l’un de vos plus ardents supporters, n’a-t-il pas lui-même rappelé que Paris était la première destination touristique du monde pour les courts séjours ? A-t-il été prouvé que nous étions à ce point incapables de développer le tourisme et s’attacher la confiance des habitants pour que, par un privilège régalien, un fait du prince, vous décidiez, au XXIe siècle de nous retirer cette responsabilité ?

Cet amendement tend à ce que les zones touristiques internationales soient créées à l’initiative du maire de la ville ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale. C’est à nous de prendre la responsabilité de les créer ou non. Il est évident qu’ensuite, elles pourront être délimitées ou modifiées par le préfet de région, car la position de l’État nous importe énormément, mais l’initiative doit en revenir au maire ou au président de l’EPCI, et le préfet doit délimiter ou modifier ces zones après avis. Et qui doit donner cet avis ? En premier lieu, le conseil municipal, parce qu’il est normal que l’assemblée municipale du territoire où sera créée cette zone puisse se prononcer.

Il faut également solliciter l’avis des syndicats d’employeurs et de salariés intéressés. Pourquoi ? Parce que, et je vous le dis avec beaucoup d’émotion, monsieur le ministre, la gauche, jusqu’à présent, a toujours eu pour principe de discuter avec toutes les forces vives économiques. Si nous avons réalisé des avancées sociales, c’est parce que nous avons pris le temps de discuter avec les forces politiques qui composent la majorité parlementaire mais aussi avec les organisations syndicales. À ma connaissance, les grandes lois du Front populaire n’ont pas été faites contre les syndicats mais en accompagnement de la dynamique sociale, portée aussi par les syndicats. En 1981, les grandes lois sociales de la gauche n’ont pas été faites contre les syndicats mais portées aussi par les organisations syndicales dont je n’ai pas entendu dire qu’elles étaient contre la retraite à 60 ans et à 65 ans à taux plein, ni contre la cinquième semaine de congés payés. Les 35 heures, même si elles ont pu soulever des débats quant à leurs modalités, ont été décidées, sur le principe, par une majorité parlementaire de gauche, avec l’accord et l’encouragement des syndicats.

Malheureusement, avec qui le Gouvernement discute-t-il depuis le début ? Avec les patrons des grandes enseignes !

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