Intervention de Denys Robiliard

Séance en hémicycle du 14 février 2015 à 22h00
Croissance activité et égalité des chances économiques — Article 83

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDenys Robiliard, rapporteur thématique de la commission spéciale :

Cette mesure doit donc être accompagnée d’un redéploiement des moyens. Cela paraît extrêmement utile quand vous avez un rôle extrêmement important et qu’il est nécessaire de dédoubler une audience. C’est également utile lorsque le stock des affaires – on parle également de flux et de stocks dans la justice – doit être résorbé et qu’il faut gagner en rapidité. Enfin, cela s’applique à des affaires qui ne portent que sur une rupture de contrat quand on constate au stade du bureau de conciliation que l’affaire est en état d’être plaidée.

Or, tout n’est pas compliqué. Je prendrai un exemple simple, celle d’un employeur qui a adressé à son salarié une lettre de licenciement non motivée. La règle est simple : une lettre non motivée ne comporte pas de cause réelle et sérieuse de licenciement. L’employeur peut refuser d’en convenir, mais quels que soient les efforts qu’il déploiera, il ne gagnera jamais le procès, car il sera statué en droit et que la règle est claire. Dès lors, s’il s’agit du seul élément en jeu, le bureau de conciliation peut parfaitement estimer que l’examen de l’affaire ne requiert que deux juges. La décision portera en effet uniquement sur le quantum, sur les conséquences en termes d’indemnités. Tel est le type d’affaires qui me paraît pouvoir être jugée par deux conseillers.

J’en viens à la question de l’impartialité. Voilà environ dix ans, c’est-à-dire il n’y a pas si longtemps, des parties s’étaient amusées à contester l’impartialité des conseils des prud’hommes au motif que ces derniers étaient composés de syndicalistes. L’affichage syndical des conseillers contrevenait à l’exigence d’impartialité au sens de l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

La Cour de cassation a répondu qu’il n’en était rien et que la juridiction prud’homale était impartiale de par sa nature, à raison précisément de l’équilibre associant deux salariés et deux employeurs ou un salarié et un employeur : ce qui fait son impartialité est précisément son caractère paritaire. Quand on est jugé par un bureau de référé, on doit avoir affaire à une formation impartiale. Le bureau de conciliation a actuellement, même s’il en est fait trop peu usage, la possibilité de prononcer des condamnations provisionnelles, y compris des condamnations fortes portant par exemple sur un préavis, des congés payés, des salaires ou une indemnité de licenciement. Dans ce cas, c’est un vrai juge qui statue et il doit avoir la même impartialité. À deux, étant donné que l’impartialité du conseil des prud’hommes tient justement à cet équilibre entre employeurs et salariés, il est tout aussi impartial.

Affirmer que la formation restreinte n’est pas impartiale, c’est affirmer dans le même temps que le bureau de conciliation ne le serait pas et la formation de référé pas davantage. Or, elle l’est, comme l’a validé la jurisprudence. Il me semble donc que les arguments qui président aux amendements soutenus ne tiennent pas. Voilà pourquoi j’y suis défavorable.

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