Intervention de Marisol Touraine

Séance en hémicycle du 28 novembre 2012 à 15h00
Suspension du conditionnement alimentaire contenant du bisphénol a — Discussion générale

Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé :

Mesdames, messieurs les députés, je vous remercie tous pour la qualité de vos interventions et pour le consensus qui se fait jour au-delà des différentes appréciations, d'ailleurs tout à fait légitimes compte tenu de l'importance du sujet auquel nous sommes confrontés et de la relative incertitude qui pesait, au cours des années passées, sur la nécessité de prendre à bras-le-corps cette question. Aujourd'hui, tout le monde est conscient qu'il est nécessaire d'aller plus loin.

Monsieur Door, je vous remercie du soutien de votre groupe à cette proposition de loi. Vous avez raison d'indiquer – plusieurs voix se sont élevées en ce sens et nous aurons l'occasion d'en discuter lors de l'examen des articles – que nous devons en même temps agir pour garantir l'innocuité des produits ou des matériaux qui viendront remplacer ceux qui contiennent du bisphénol A. Nous sommes au début d'un processus. D'autres substances sont déjà mises en cause. Il va falloir aller plus loin et garantir l'innocuité des substituts que nous proposons. C'est parce que nous savons que des produits à l'innocuité avérée existent et sont déjà utilisés par de nombreux industriels que nous pouvons nous engager résolument dans la voie qui est aujourd'hui proposée. Un amendement du rapporteur, adopté en commission, prévoit que le Gouvernement devra remettre au Parlement, avant le 1er juillet 2014, un rapport sur l'innocuité des substituts. C'est là un élément important.

Monsieur Pancher, je salue la mobilisation de l'UDI en soutien à cette proposition de loi. Il est évidemment important de garantir l'indépendance des agences. Le Gouvernement s'attache à garantir la transparence. À cet égard, je veux indiquer à la représentation nationale qu'une charte de l'expertise est en cours de rédaction.

Monsieur Roumegas, j'entends bien le débat que vous posez. Pour vous, au fond, puisque nous savons que, dans un certain nombre de domaines, des produits à l'innocuité avérée sont disponibles, puisque le débat a été engagé depuis déjà un certain temps et que les parlementaires se sont mobilisés pour faire interdire le bisphénol A dans les contenants alimentaires, pourquoi ne pas aller plus vite et avancer la date de l'interdiction ? Certains de vos collègues, comme Jean-Louis Bricout et Annick Le Loch, sont intervenus exactement en sens inverse.

Nous avons trouvé une date permettant aux entreprises de s'adapter. En effet, il ne suffit pas de dire qu'il existe un produit de substitution. Ce produit doit pouvoir être incorporé dans des contenants, fabriqué et mis sur le marché. Un point d'équilibre avait été proposé par le rapporteur dans la proposition de loi initiale. Nous propos simplement de maintenir le même délai. On peut regretter que nous ayons perdu du temps au cours des derniers mois mais nous devons maintenant indiquer clairement l'objectif, le cap – il ne s'agit pas de tergiverser – tout en prévenant les entreprises qu'elles ont deux ans pour réaliser les transformations nécessaires.

Monsieur Bricout, madame Le Loch, un grand nombre d'entreprises ont déjà commencé à travailler, elle ont été alertées par le lancement des travaux parlementaires. Aujourd'hui, à part pour certains aliments très spécifiques pour lesquels il est encore difficile de trouver le produit qui permettra de remplacer le bisphénol A, les entreprises savent comment aller plus loin.

À cet égard, je rejoins ceux d'entre vous qui ont mis l'accent sur le fait qu'il pouvait être valorisant de mettre en avant des produits sans bisphénol A. Les premières entreprises qui arriveront sur le marché avec de tels produits auront un avantage compétitif. Espérons que ce seront des entreprises françaises plutôt que des entreprises de pays ayant engagé la recherche plus tôt et ayant pris des mesures d'interdiction plus rapidement.

Je vous rassure, monsieur Roumegas, l'on ne va pas laisser sur le marché des biberons contenant du bisphénol A susceptible de porter atteinte à la santé. Il y a deux échéances. Le 1er janvier 2013, il n'y aura plus de biberons avec du bisphénol A. Nous complétons d'ailleurs la proposition de loi pour éviter une situation assez étrange due au fait que, juridiquement, les choses étaient écrites de façon un peu compliquée et que personne n'avait vu le problème. Il n'est pas question qu'il puisse y avoir des biberons avec bisphénol A dans les maternités alors qu'on ne pourrait plus en vendre dans les grandes surfaces et les pharmacies. Il ne doit plus y en avoir du tout.

Je remercie Marc Dolez du soutien qu'il a apporté au texte au nom de son groupe. Nous sommes tous d'accord sur le fait qu'il faudra aller plus loin dans la lutte contre les substances cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques. Telle est la volonté du Gouvernement.

Monsieur Hutin, vous avez rappelé de façon brillante l'historique de cette proposition de loi, le combat dans lequel elle s'inscrit, la nécessité d'être tenace tout en étant réaliste par rapport à la réalité industrielle, parce qu'il s'agit au fond de notre sécurité à tous, de la sécurité de nos concitoyens. Compte tenu des combats que vous avez malheureusement eus à mener par ailleurs, vous êtes mieux placé que quiconque pour savoir que certains produits qui apparaissaient comme inoffensifs se sont révélés catastrophiques. Mais je vous remercie aussi du ton mesuré que vous avez employé pour présenter la situation du bisphénol A.

Je vous remercie de vous être pleinement impliqué, d'avoir expliqué qu'il était nécessaire d'avoir des règles claires et qu'il n'était pas possible d'exporter des produits que nous interdirions sur le sol français. Un tel système n'offrirait d'ailleurs aucune garantie à nos entreprises parce que d'autres pays européens vont adopter très rapidement la même législation. Quant à exporter en dehors de l'Europe ce dont nous ne voulons pas, ce ne serait ni défendable ni acceptable. Ce qui n'est pas bon pour notre pays ne peut évidemment être considéré comme bon pour d'autres.

Madame Laclais, je salue votre engagement, en tant que maire et en tant que mère. Effectivement, comme je l'ai déjà souligné, l'absence de produits toxiques peut être une chance pour la filière industrielle française. C'est vraiment un atout dont nous devons nous servir.

Le délai de deux ans prévu par le texte paraît aujourd'hui suffisant pour permettre aux entreprises d'adapter leurs parcours industriels. Elles ont d'ailleurs commencé à travailler en ce sens. Nous avons donc aujourd'hui, grâce à l'implication de tous, la possibilité de nous engager fortement à la fois pour la santé de nos concitoyens et pour le renouveau et la sécurité de nos entreprises. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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