Intervention de Marylise Lebranchu

Séance en hémicycle du 18 février 2015 à 21h30
Nouvelle organisation territoriale de la république — Article 2

Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique :

Je suis naturellement défavorable à ces amendements. Il y avait environ une dizaine de schémas avant ce texte, voire davantage dans certaines régions. Nous sommes convenus avec beaucoup d’élus, aussi bien régionaux, départementaux que des intercommunalités, que très souvent cela prenait beaucoup de temps pour peu de rendement, même si ce mot n’est pas adapté à l’action publique. Quand nous avons réfléchi à la façon de donner à la région un pouvoir économique fort, il nous a semblé que c’était en lui permettant de déterminer les grandes orientations. Dans le schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation des entreprises, les régions choisiront des secteurs à renforcer. En Bretagne, monsieur Le Fur, on peut ainsi prendre l’exemple des biotechnologies marines, dont le secteur a été intégré dans un tel schéma. Vous connaissez le succès de Goëmar.

Cela suppose de prendre des décisions sur des laboratoires de recherche, des pépinières d’entreprises, des incubateurs des applications de pôles de compétitivité, parce que l’on ne peut pas tout faire et que, à un moment donné, on décide que tel ou tel secteur a besoin d’un appui particulier. On peut très bien dresser, par région, des listes de choix de stratégie économique et de développement. On peut choisir de mettre l’accent sur l’enseignement supérieur, la recherche, la recherche-développement, le prototypage, l’accompagnement des entreprises, les relations entre les grandes et les petites entreprises, soit de tout ce qui a été imaginé à un moment de l’histoire des pôles de compétitivité. Il s’agit de définir une stratégie.

Un schéma, ce n’est pas un dispositif avec des plots et une carte pour guide, mais de la stratégie de développement et des choix à faire parce que nous y sommes obligés. Aujourd’hui, il peut s’agir de nanotechnologies, ailleurs de biotechnologies ou encore de matériaux intelligents – je pense, entre autres, à Roanne où se développe la recherche sur les colorations de textiles. À un moment donné, on a décidé de mettre le paquet sur une niche d’innovation intéressante, ce qui permet de passer de la recherche fondamentale à la recherche-développement en se rapprochant de l’entreprise. Pour avoir été comme beaucoup d’entre vous dans une entreprise pour voir comment cela se passait à ce propos, je peux témoigner que chacun était content d’être mis en relation avec le laboratoire adéquat, puis avec la salle blanche pour les prototypages, avant de fabriquer les pièces – au vrai sens du terme et non à l’emporte-pièce – dans le cadre d’un process industriel.

Un schéma, c’est aussi le choix de typologies d’aides directes : faut-il aider les entreprises quel que soit le secteur ? Doit-on faire attention à la concurrence ? Faut-il orienter les aides vers les secteurs en difficulté, en expansion ou en devenir, ou vers telle ou telle niche ? La concentration de tel ou tel type d’aide ne risque-t-il pas de déstabiliser le champ d’application du dispositif ? Bref, il y a énormément de questions à se poser, en lien avec les organisations patronales, les schémas régionaux de coopération intercommunale, les élus locaux, des chefs d’entreprise – qu’il s’agisse de PME, de TPE, d’entreprises émergentes, de start-up et j’en passe.

Je pense qu’on peut se mettre d’accord sur ce que sont un schéma de développement économique et une stratégie adaptée dans une perspective d’internationalisation, y compris dans des régions que certains connaissent bien ici. Certes, on a fait le reproche à cette notion d’internationalisation parce que des régions allaient dans tous les pays, mais c’est pourquoi il faut choisir des cibles en fonction des secteurs prioritaires choisis. Tout cela passe par la mutualisation, par la recherche de marchés, par l’accompagnement des entreprises à travers des conventions, ce qui suppose de rationaliser et de prévoir les moyens nécessaires. En effet, que s’est-il passé partout en France à la fin du XXe siècle, notamment dans les années 1990 et 2000 ? On a fait le choix de l’économie de la connaissance et de l’économie des services, oubliant la production industrielle. Dans le cadre du partage international du travail, on a estimé que celle-ci relevait d’autres pays, et on a eu tort. Nous en revenons donc à un équilibre entre service et production industrielle et à de véritables stratégies. Si on veut faire de nos régions des pôles forts, voilà vers quoi il faut aller.

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