Intervention de Éric Ciotti

Réunion du 28 novembre 2012 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Ciotti :

Je m'associe aux propos de notre rapporteur, en tant que cosignataire, avec Philippe Goujon, de cette proposition de loi. Celle-ci vise à mieux assurer la protection des policiers et des gendarmes dans l'exercice de leurs missions.

Les policiers et les gendarmes exercent des missions extrêmement difficiles. Or, depuis quelques années, ils sont de plus en plus souvent confrontés à des délinquants n'hésitant pas à utiliser des méthodes de guerre, et en particulier des armes de gros calibre. Ces dix derniers mois, plus de 11 000 policiers et gendarmes ont été blessés pour la défense des libertés publiques et de la sécurité, soit 38 par jour en moyenne.

Force est de constater que lorsqu'il s'agit de faire usage de leurs armes à feu, les policiers et les gendarmes ne sont pas soumis aux mêmes règles. Contrairement aux gendarmes et aux douaniers qui sont libres d'y recourir dans des conditions limitatives et après des sommations verbales, les policiers ne sont autorisés à faire usage de leur arme qu'en réponse à une agression de même nature, c'est-à-dire dans le cas strict de la légitime défense. Ils se voient donc appliquer le droit commun.

Tout le monde se souvient de l'incompréhensible qualification d'homicide volontaire retenue à l'encontre d'un policier par le parquet de Bobigny après le décès, lors d'une intervention à Noisy-le-Sec, le 21 avril 2012, d'un homme recherché pour des vols à main armée. Ce malfaiteur, délinquant multiréitérant, très violent, connu pour avoir été le plus jeune incarcéré de France, avait, lors de sa fuite, jeté au sol une réplique à l'identique de grenade quadrillée. Il avait ensuite pointé son revolver sur le policier, qui avait réagi en faisant usage de son arme de service. Le gardien de la paix auteur du tir fut placé en garde à vue, présenté au parquet et mis en examen du chef d'homicide volontaire. Cette décision judiciaire avait suscité une profonde émotion parmi les policiers et les syndicats de police, qui avaient organisé de nombreuses manifestations d'un bout à l'autre du pays.

Ma conviction est que la représentation nationale doit offrir aux fonctionnaires de police le cadre juridique le plus protecteur pour leurs interventions opérationnelles. Il en va du lien de confiance entre nos forces de sécurité et la population.

Tel est l'esprit de cette proposition de loi. Si elle tire tous les enseignements utiles du rapport Guyomar pour améliorer la protection fonctionnelle des policiers et des gendarmes, elle comble aussi une de ses lacunes manifestes en revenant sur le cadre légal de l'usage d'une arme à feu par les policiers. Nous ne pouvons pas, par facilité, faire comme si le problème n'existait pas ; notre législation doit être adaptée. Il s'agit de donner aux policiers l'autorisation de faire usage de leur arme lorsqu'ils se sentent menacés ou pour sommer, dans certaines conditions limitatives, des suspects armés de s'arrêter.

L'objectif de cette harmonisation des conditions de déploiement de la force armée par les fonctionnaires des services actifs de la police sur celles en vigueur pour les gendarmes est d'améliorer l'efficacité de l'action des policiers et de faciliter la conduite d'opérations communes entre la police nationale et la gendarmerie nationale, dans l'esprit de la loi d'août 2009.

Le but n'est évidemment pas de réclamer l'impunité pour les forces de sécurité ; il est de renforcer la protection pénale de celles-ci. Le dispositif proposé offre toutes les garanties procédurales pour que l'autorité judiciaire puisse enquêter sur les circonstances dans lesquelles l'usage de l'arme de service n'aurait pas été strictement proportionné à la menace.

Comme pour le débat parlementaire sur la lutte contre le terrorisme, cette question de la doctrine d'emploi de la force armée par la police devrait être traitée sans esprit partisan et sans climat de suspicion à l'égard des forces de l'ordre. Les fonctionnaires de police attendent de nous une réponse efficace et rapide, car la situation actuelle fragilise leur action.

Tels sont les motifs qui nous conduisent, mes chers collègues, à vous demander d'adopter cette proposition de loi.

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