Intervention de Paul Giacobbi

Séance en hémicycle du 20 février 2015 à 15h00
Nouvelle organisation territoriale de la république — Article 7

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Giacobbi :

Je ne dirai pas que les bras m’en tombent, mais je lis parfois des choses inexactes. Vous avez des préjugés juridiques, des peurs primales et instinctives à l’encontre des langues régionales, c’est-à-dire de langues mourantes, qui ne me paraissent pas légitimes.

D’abord, l’ordonnance de Villers-Cotterêts n’a pas fait du français la langue de la nation. Relisez-la. Elle prévoit que les actes civils doivent être écrits en bon langage françois. Pour les gens, à l’époque, le langage françois, c’était ce que l’on parlait effectivement, c’est-à-dire toute une série de langues régionales. La seule vraie langue, dans l’acception de l’époque, c’était en réalité le latin. Le français n’a été considéré comme une langue que bien plus tard dans l’histoire. Ne faisons pas d’anachronisme.

Ensuite, je lis dans l’exposé sommaire que la formation des enseignants relève d’une compétence de l’État afin d’assurer un enseignement uniforme sur l’ensemble du territoire national, qui ne peut pas être décentralisée. Il va de soi que les professeurs de breton peuvent être formés à Marseille, les professeurs d’occitan à Lille et ceux de Corse à peu près n’importe où. Pourquoi pas en Bretagne pendant qu’on y est ? Ce n’est pas très raisonnable.

Enfin, il y a des problèmes concrets. Il s’agit de savoir si l’on veut que les langues régionales disparaissent ou qu’elles vivent. Moi, je fais confiance à la commission des lois, fort bien présidée et fort bien composée. Très franchement, ne balayons pas avec de tels arguments un problème essentiel. Comme je le souligne souvent, notre diplomatie soutient qu’il faut enseigner obligatoirement le kurde au Kurdistan, le tibétain au Tibet, et s’offusque que l’on veuille enseigner les langues régionales dans nos régions, ce qui est pourtant prévu dans la Constitution.

On permet enfin la promotion de la langue anglaise à l’université, et je m’en réjouis. J’ai deux fils qui ont fait une école de commerce située près de Paris, à Jouy-en-Josas. Les trois quarts de leur enseignement étaient en anglais. Ils sont à peu près bilingues, Dieu merci, grâce à leur mère, et, moi, je suis anglophone. Franchement, à partir du moment où l’on laisse une telle place à une langue qui n’est tout de même pas française, l’anglais, ce qui ne me gêne pas, pourquoi ne pas en donner une aux langues de France ?

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