Intervention de Michaël Foessel

Réunion du 13 février 2015 à 9h00
Groupe de travail sur l'avenir des institutions

Michaël Foessel :

Indépendamment de ce qui relève de leur responsabilité propre, les partis politiques sont confrontés à la quadrature du cercle sous la Cinquième République. On leur demande d'incarner l'intérêt général, de présenter à l'élection présidentielle un candidat qui, du fait de la nature de nos institutions, est, paradoxalement, au-dessus des partis, alors que l'une des dimensions proprement démocratiques d'un parti est de représenter la division sociale. En effet, les partis politiques sont statutairement destinés, si l'on peut dire, non seulement à constituer des majorités mais à représenter au sein de diverses assemblées le fait que nos sociétés ne sont pas unies, qu'elles sont traversées de conflits sociaux et symboliques.

On a beaucoup dit, à juste titre, que l'une des raisons de la sempiternelle crise des partis était leur dépolitisation. Mais n'est-ce pas aussi qu'ils ont trop facilement renoncé à l'idée, longtemps défendue par le Parti communiste, d'être les représentants sinon d'une classe, du moins d'une partie, précisément, de la société, et au fait de mettre en scène ce conflit plutôt que de le camoufler en une sorte d'unanimisme de façade qui renvoie à la rhétorique des éléments de langage et vise à ne fâcher personne, à ne pas « prendre parti » ?

Si le Front national est le mouvement politique le plus en vogue aujourd'hui, n'est-ce pas parce qu'il a trouvé une synthèse entre le discours général et la désignation de l'ennemi ? Cette synthèse, on peut estimer, et j'estime pour ma part, que ce n'est pas la bonne ; cet ennemi, il le trouve au sein de populations déjà discriminées. Toujours est-il qu'il a réussi cette synthèse qui caractérise un parti dans un système démocrate et républicain : il prétend être national, représenter l'intérêt de tous, mais sans tomber dans le piège sémantique qui consiste à dire qu'il n'existerait pas de divisions sociales. Certes, je le répète, il place la ligne de front social à un endroit où il ne faudrait absolument pas le faire, mais il assume ce discours de la division. N'est-ce pas un élément essentiel de sa réussite actuelle ?

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