Intervention de Renaud Riché

Réunion du 18 février 2015 à 16h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Renaud Riché, sous-directeur des chambres consulaires au service de l'action territoriale, européenne et internationale de la Direction générale des entreprises :

Monsieur le président, nous représentons en effet tous trois la direction générale des entreprises de Bercy, qui assure la tutelle sur les réseaux consulaires des chambres de commerce et d'industrie (CCI) et des chambres de métiers et de l'artisanat (CMA). Actuellement adjoint du directeur du service du développement territorial et international de la direction générale des entreprises et sous-directeur des réseaux consulaires, j'ai été conseiller au sein de cabinets ministériels au moment de l'élaboration de la loi du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, qui comportait un premier train de réformes visant notamment à renforcer le rôle des chambres de commerce et d'industrie régionales (CCIR).

Le réseau des chambres de commerce et d'industrie se retrouve dans l'actualité législative, puisque des amendements d'origine parlementaire sur ce sujet ont été déposés sur la loi NOTRe. L'un d'entre eux vise notamment à permettre, par anticipation sur les réflexions menées par la tête de réseau, la fusion au 1er janvier 2016 de certaines CCIR, notamment celles de Haute-Normandie et de Basse-Normandie. L'Assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat (APCMA) est, quant à elle, pour des raisons liées à sa taille et à son homogénéité, en avance dans ce domaine. Son président, M. Alain Griset, qui a su faire oeuvre de pédagogie et est parvenu à faire adopter un projet de réforme du réseau qui se traduira par quatre amendements à la loi NOTRe. Il s'agit, pour le réseau des CMA, d'avoir le plus rapidement possible de véritables présidents de région consulaire face aux présidents des nouvelles régions qui seront issues des réformes territoriales en cours.

Par ailleurs, il est vrai que l'examen des derniers projets de loi de finances a suscité des débats opposant, d'une part, le ministère de l'économie et des finances pour qui, les chambres de commerce étant des établissements publics de l'État financés par prélèvements obligatoires, l'État y est chez lui et, de l'autre, des dirigeants d'entreprise élus à la tête d'établissements publics qui contestent les mesures prises depuis deux ans. La direction générale des entreprises est au carrefour de ces débats : représentants de l'administration qui participe à la vie des deux réseaux consulaires, nous devons faire comprendre aux présidents de chambre que les temps ont changé et que, dès lors que l'on bénéficie de prélèvements obligatoires, il faut justifier de leur utilisation. Au demeurant, lorsqu'une CCIR signe une convention avec un conseil régional, elle remplit les indicateurs de gestion imposés par la collectivité ; il n'y a pas de raison que la même logique de fonctionnement ne s'applique pas dans les relations que le réseau entretient avec l'État.

Les deux réseaux ont une culture différente à cet égard. Les artisans sont beaucoup plus « disciplinés » que les commerçants et se considèrent davantage comme des agents publics. Les présidents des chambres de métiers et de l'artisanat ont ainsi adopté, dès 2009, un statut du personnel assez proche de celui de la fonction publique territoriale. Le recrutement des cadres supérieurs se fait sur la base d'un examen professionnel organisé par la tête de réseau, auquel participent les chefs de bureau des chambres de métiers et de l'artisanat ainsi que des universitaires. Force est de constater qu'en l'espace d'un mandat, les profils ont changé, de sorte que les relations avec les élus locaux et les préfets se sont améliorées et que les procédures d'appel d'offres et de marchés publics sont mieux respectées, comme en témoignent les résultats des programmes de contrôle organisés par le Contrôle général économique et financier et l'Inspection générale des finances (IGF). Le trésorier d'une chambre de métiers et de l'artisanat est un chef d'entreprise élu et, sans un secrétaire général compétent qui appelle son attention sur la nécessité de respecter seuils et procédures, il pourrait tomber dans certains pièges, sans mauvaise foi aucune ni esprit dolosif.

Quoi qu'il en soit, le réseau des chambres de métiers et de l'artisanat est plutôt uni derrière son président, qui a une vision claire de l'objectif qu'il souhaite atteindre et qui est conscient des responsabilités qui incombent au réseau en tant que bénéficiaire de prélèvements obligatoires. Du reste, comme les artisans craignent d'être perdants en cas de rapprochement des deux réseaux, ils mettent un point d'honneur à être pour l'État des partenaires plus conciliants que leurs cousins des chambres de commerce et d'industrie. Il est vrai cependant qu'ils disposent de ressources plus modestes. C'est pourquoi l'émotion suscitée par la mission menée par l'IGF au printemps dernier fut plus vive dans les chambres de commerce et d'industrie que dans les chambres de métiers et de l'artisanat, qui ne disposent pas de 2,3 milliards de valeurs mobilières – à la fin de l'année 2014, leur trésorerie s'élevait en effet à moins de 3 millions d'euros.

De fait, certains des propos du précédent ministre de l'économie, M. Arnaud Montebourg, avaient été perçus comme urticants par les chambres de commerce. Sa conviction, partagée du reste par l'ensemble du pôle de Bercy, était en effet que, les collectivités territoriales étant, de par la Constitution, chefs de file en matière de développement économique, les CCI et les CMA devaient se consacrer en priorité à la gestion des formalités, à l'accompagnement des entreprises et à la formation, et participer au redressement des comptes publics en ajustant leurs ressources à ces missions.

Le rapport de l'IGF a, certes, été critiqué, mais il a le mérite de s'être appuyé exclusivement sur les chiffres fournis par les deux têtes de réseau, l'Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie (ACFCI) et l'APCMA. En tout état de cause, la tête de réseau des CCI n'a pas besoin d'annoncer que la loi de finances va la contraindre à se séparer de 7 500 salariés alors que 19 % de ses agents vont partir à la retraite dans les cinq ans à venir et qu'elle va naturellement réaliser ainsi un peu plus de 250 millions d'euros d'économies.

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