En m’interrogeant sur l’article 1er, je m’interroge sur l’ensemble du texte. Je disais tout à l’heure que la prise en compte de la vulnérabilité et de la fragilité étaient des éléments essentiels pour apprécier le degré de civilisation d’un pays. Dans ces conditions, un certain nombre de dispositions figurant dans ce texte m’inquiètent, soit parce qu’ils préparent d’autres évolutions – on a parlé de loi « étape » – soit parce qu’ils sont inquiétants en eux-mêmes.
Ma première inquiétude a trait aux directives anticipées. Avec la loi Leonetti, nous avions, me semble-t-il, trouvé un bon équilibre. Je crains que nous ne le rompions, tout d’abord parce que l’on abandonne l’idée selon laquelle ces directives doivent obligatoirement être réexaminées par leurs auteurs tous les trois ans, ensuite et surtout parce que l’on transforme ces directives en autant d’obligations pour le médecin, qui devient l’exécutant d’une décision prise bien plus tôt et sans dialogue entre le médecin et le malade. Enfin, on rompt le pacte de confiance qui doit exister entre l’un et l’autre.
D’autre part, ces directives deviennent en réalité un formulaire – c’est d’ailleurs le terme que Mme la ministre elle-même utilise. Il faudra donc remplir ce formulaire et y cocher des cases : tout cela nous éloigne de l’humanité qui devrait guider l’ensemble de nos décisions.
La deuxième ligne jaune sur laquelle je tiens à insister concerne l’assimilation de l’alimentation et de la ventilation à des traitements. J’estime qu’une telle assimilation est redoutable. En transformant le fait de s’alimenter ou de respirer en traitements, on suppose que ceux-ci peuvent être interrompus pour donner la mort. À mon sens, je le répète, cette évolution est redoutable et j’espère que nos débats contribueront à l’éviter.