Intervention de Joël Giraud

Séance en hémicycle du 12 mars 2015 à 9h30
Droit d'option départemental — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJoël Giraud :

La justice ne s’y est d’ailleurs pas trompée, comme beaucoup d’autres services, en conservant son rattachement à la cour d’appel de Grenoble. Voilà donc un département qui dépend, selon l’administration, d’une région ou d’une autre, ce qui est assez étonnant. Plaisanterie mise à part, quelques années plus tard, il suffit de regarder l’état de l’unique route nationale entre les Hautes-Alpes et l’Isère, la RN 85 entre Gap et Grenoble, pour voir que le chemin de char qu’elle est devenue démontre l’abandon des politiques publiques sur un territoire qui aurait gardé sa cohérence en étant rattaché à la région voisine.

Nous pensions donc naïvement qu’au-delà des modifications de la loi du 16 janvier 2015, les erreurs géographiques, climatiques, économiques et sociales du découpage initial des régions auraient pu être corrigées. Elles le pourraient l’être si l’on assouplissait le droit d’option.

Or s’il est vrai que le mécanisme que nous proposons aujourd’hui ne trouve à s’appliquer à cette spécificité locale que je viens de décrire, il vise justement à éviter de fixer les choses, en permettant aux départements de choisir leur région de rattachement.

Si d’aucuns opposent à notre proposition de loi qu’elle intervient moins de deux mois après l’adoption de la loi de réforme des régions, j’objecterai qu’il apparaît nécessaire de légiférer dès maintenant, afin de ne pas créer des situations permanentes et des droits acquis pour les différents échelons. Comme l’a dit notre excellent rapporteur, ne vaut-il pas mieux éviter les erreurs avant que l’encre ne soit totalement sèche ?

Ainsi, l’objet de notre proposition de loi est d’assouplir le mécanisme dit du « droit d’option départemental », en permettant à un département de quitter sa région d’origine pour rejoindre une autre région contiguë, ceci en modifiant l’article 3 de la loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.

L’assouplissement vise à substituer à la condition des trois cinquièmes des suffrages exprimés un mécanisme de majorité absolue des suffrages, suffisant pour permettre à un département de changer de région. Mais cet adoucissement est limité, la majorité devant être recueillie dans les trois assemblées délibérantes, soit le département concerné mais aussi les régions de départ et d’accueil.

Nous sommes attachés à ce que la région de départ, qui est la collectivité la plus touchée par un changement de région du département, conserve le droit de donner son avis, mais dans le cadre d’un divorce par consentement mutuel ! De même, nous nous limitons au simple changement de région d’un département : nous ne souhaitons pas étendre le dispositif aux fusions de communes, départements ou régions.

Enfin, nous souhaitons que cette possibilité soit ouverte une seule fois, mais qu’elle ne soit pas nécessairement contenue dans un délai. Nous ne voulons pas permettre un va-et-vient continu du département d’une région à une autre, ceci afin d’assurer une stabilité des collectivités territoriales. Pour autant, nous pensons que ce droit d’option doit pouvoir intervenir après le 1er mars 2019. En effet, si nous considérons qu’un département doit pouvoir choisir librement sa région de rattachement, loin de nous l’idée de lui permettre de changer sans cesse de région au gré des fluctuations politiques. La stabilité administrative et territoriale est un élément nécessaire de l’organisation de la République, et nous y tenons. Toutefois, la négation de volontés locales n’est pas acceptable.

Ainsi, vous l’aurez compris, nous ne souhaitons pas remettre en cause tout l’équilibre de la loi relative à la délimitation des régions. Nous souhaitons simplement faciliter le choix des départements quant à leur région de rattachement.

Nous avons entendu la volonté du Gouvernement, par la création de grandes régions, de s’adapter aux réalités géographiques et à l’Europe des régions, ainsi que de limiter les dépenses publiques des collectivités territoriales. Mais le découpage suggéré par le Gouvernement se superpose au découpage territorial en prenant en compte les périmètres administratifs des régions existantes. Un autre découpage, plus satisfaisant, tenant compte des identités locales et de l’unité géographique des territoires concernés, aurait pu être retenu. La volonté d’encourager le vivre-ensemble des habitants d’un territoire favorise de fait un développement économique et humain renforcé, gage d’un territoire florissant à long terme.

Il apparaît également nécessaire de prendre en compte la volonté des habitants d’un territoire et de leurs représentants. Le rattachement à une région est un élément important de l’organisation politique et administrative, et le sentiment de rattachement des habitants d’un département à une région l’est tout autant.

On l’a rappelé, le Gouvernement n’a pas toujours été défavorable à ces propositions et s’en est remis à la représentation nationale pour faire droit aux souhaits de nos concitoyens. À différentes reprises, devant les deux assemblées parlementaires, le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, et le secrétaire d’État chargé de la réforme territoriale, André Vallini, en accord avec le Premier ministre, s’en sont remis à la sagesse des sénateurs puis des députés quant à la détermination de la majorité nécessaire et suffisante pour permettre à un département de choisir sa région de rattachement.

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