Intervention de Carlos Da Silva

Séance en hémicycle du 12 mars 2015 à 9h30
Droit d'option départemental — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCarlos Da Silva :

…sur ce sujet passionnant qui, je le crois comme lui, engage notre pays pour longtemps.

Au-delà de ce clin d’oeil amical, mes chers collègues, je dois vous faire part de mon étonnement et de celui d’un certain nombre de parlementaires devant cette proposition de loi du groupe RRDP visant à assouplir le mécanisme du droit d’option départemental – étonnement relatif, toutefois, car je reconnais la constance et la détermination de M. Krabal sur ce sujet.

Nous avons eu l’occasion d’échanger à de nombreuses reprises dans le cadre de l’examen de la loi de délimitation des régions, en particulier au sujet de la vôtre, monsieur Krabal, la Picardie, et du département de l’Aisne, même si, comme vous l’avez rappelé à juste raison, cette proposition de loi ne concerne pas votre seul département ni votre seule région actuelle.

Si nous n’avons pu trouver d’accord sur l’intégralité des mesures adoptées dans ce texte, je salue toutefois la constance de votre engagement.

Mais revenons un instant sur la méthode qui a guidé nos travaux tout au long de ces débats. Votre exposé des motifs le rappelle d’ailleurs très clairement, monsieur Krabal : le Président de la République et le Gouvernement ont posé une méthode pour opérer ce nouveau dessin régional : une méthode simple, précise, rigoureuse, à savoir la prise en compte des périmètres des régions telles qu’elles existent actuellement.

Sans cela, et je l’ai dit à maintes reprises, aucune réforme n’aurait été possible : impossible car jamais nous ne serions parvenus à un accord majoritaire dans notre hémicycle ; impossible car la mettre en oeuvre aurait littéralement mis à bas quarante années ou presque de politique publique régionale cohérente. Aucune carte aussi équilibrée, aussi cohérente n’aurait été adoptée par un tel nombre de parlementaires.

Une très forte majorité de Françaises et de Français se sont d’ailleurs montrés favorables aux mesures engagées, à savoir la simplification et la clarification de l’architecture territoriale de la République. Trop longtemps, des rapports fort intéressants mais aussi l’immobilisme et le conservatisme de certains ont fermé la porte à toute véritable modernisation des institutions et des territoires, alors même que les Français y étaient prêts.

Nous pouvons être fiers du travail que nous avons réalisé et que nous mettrons en oeuvre dans le cadre la loi que nous évoquons ce matin, débattue au second semestre de l’année écoulée, mais aussi des lois portées par Mme la ministre Lebranchu, qui viennent compléter cette nouvelle architecture territoriale, cette nouvelle organisation et cette nouvelle répartition des compétences.

S’agissant de la possibilité offerte à un département de rejoindre une autre région, je pense que chacun sur ces bancs a encore en mémoire nos échanges. Pour reprendre les mots de François de Rugy, coprésident du groupe Europe Écologie-Les Verts, « Sur le fond, il s’agit toujours de savoir s’il y a une volonté commune des territoires, de leurs habitants et de leurs élus de travailler ensemble ».

Aussi, dès la mise en place de la nouvelle carte, ces conditions garantiront la possibilité pour une collectivité de décider de son avenir, tout en assurant une certaine stabilité à nos collectivités – indispensable, alors que s’opère la plus grande réforme territoriale de notre pays depuis les lois de décentralisation de 1982.

Il m’est apparu très rapidement au cours du travail que j’ai réalisé en tant que rapporteur de la commission des lois que ce sujet serait particulièrement sensible. J’ai donc essayé, modestement, de réfléchir à ce qui pourrait constituer un point d’équilibre en mesure de fédérer la majorité de notre hémicycle.

Je suis parti de l’audition des conseillers régionaux. Je rappelle que j’ai reçu et écouté au moins les quatre principaux groupes politiques de chaque assemblée régionale aujourd’hui existante. À chaque fois que j’ai parlé de ce que l’on appelle improprement d’ailleurs depuis le début de ce débat le droit d’option, je vous prie de croire qu’aucun conseiller régional d’aucune formation politique n’a souhaité qu’une telle liberté ne soit donnée aux départements composant sa région. Jamais, pas une seule fois, pas une seule sensibilité politique !

Mais, s’ils considéraient donc chaque fois, avec des arguments divers, que leur région devait rester telle qu’elle était, en revanche, un grand nombre d’entre eux trouvait tout à fait cohérent que tel ou tel département limitrophe la rejoigne, exemples à l’appui ! Cela crée une légère difficulté, vous en conviendrez… Je ne sais pas si elle est juridique, mais sur le plan des principes, dès lors que l’on refuse que les départements de sa propre région aient la liberté que l’on demande pour les autres, il devient particulièrement complexe de trouver un point d’équilibre ! Cet équilibre devait être trouvé entre eux, les conseillers régionaux actuels, et nous, qui sommes en constante relation avec eux et qui, pour certains d’entre nous, exerçons ce mandat.

J’ai aussi regardé de très près l’état du droit avant que ce projet de loi ne vienne en débat au Sénat puis au sein de notre hémicycle. Jusqu’ici, un sextuple accord était nécessaire : il fallait l’accord des deux conseils régionaux et du conseil départemental concernés, et il fallait que les citoyens soient consultés par référendum avec, à chacun des trois niveaux, un vote positif à plus de 50 %, représentant à chaque fois plus de 25 % des inscrits. J’en ai conclu la même chose : cela me paraissait impossible.

J’ai regardé ensuite comment cela se passait pour d’autres types de collectivités – afin de nous en inspirer sans pour autant rechercher une identité, mon cher collègue Molac – à savoir tout ce qui concerne l’intercommunalité.

Laissons d’abord de côté les métropoles et les communautés urbaines, car les communes et les villes qui en font partie n’ont aucune possibilité de les quitter : le verrou est donc, vous en conviendrez, assez définitif ! Pour une communauté d’agglomération ou une communauté de communes donc, il faut d’abord l’accord du conseil municipal concerné, mais également l’accord de la majorité qualifiée des deux communautés de communes ou d’agglomération, représentant à chaque fois deux tiers des communes et la moitié de la population ou la moitié des communes et les deux tiers de la population. C’est donc également particulièrement verrouillé.

En outre, je ne peux vous laisser dire, monsieur Molac, que toutes les communautés de communes et toutes les communautés d’agglomération se sont constituées sur une base strictement volontaire : la preuve en est ce qui est à l’oeuvre aujourd’hui en région Île-de-France dans les départements de grande couronne.

Alors que nous étudiions l’ensemble du texte, le point d’équilibre qui m’est apparu le plus juste consistait à proposer que nous supprimions la nécessité de recourir au référendum, qui semblait être une contrainte supplémentaire.

Je me permets de rappeler à nos collègues alsaciens, dont je regrette l’absence car ils ont beaucoup participé aux débats – n’est-ce pas, cher président de la commission des lois ? –…

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