Intervention de Brigitte Allain

Réunion du 10 mars 2015 à 17h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBrigitte Allain :

La proposition de loi déposée par le groupe SRC fait un petit pas vers l'introduction d'un devoir de vigilance qui s'imposerait aux grandes entreprises, aux très grandes entreprises même, car le seuil de 5 000 salariés envisagé est dix fois supérieur à celui proposé par l'Europe.

L'initiative est exceptionnelle, certes ; elle répond aussi aux attentes de la société civile. Rappelons que 160 000 citoyens ont soutenu la démarche du groupe écologiste et que, selon un sondage CSA commandé par le Forum citoyen pour la RSE, publié mardi 27 janvier, 80 % des Français interrogés estiment que les multinationales doivent être tenues responsables juridiquement des catastrophes humaines et environnementales provoquées par leurs filiales et sous-traitants. Preuve est faite que nos concitoyens soutiennent une initiative visant la justice et l'équité et que nul n'est dupe du chantage que tentent d'exercer les multinationales qui ne cherchent qu'à conforter leur impunité. Des drames comme le Rana Plaza ne peuvent se reproduire sans conséquences pour les sociétés mères.

Si l'intention de cette proposition de loi est louable et partagée, son contenu reste très en deçà de la proposition de loi déposée par les quatre groupes de gauche il y a plus d'un an et défendue le 29 janvier dernier par ma collègue Danielle Auroi dans le cadre de la niche du groupe écologiste.

Préparé en étroite concertation avec les ONG et soutenu par 250 d'entre elles, ce texte s'inscrivait dans la droite ligne des principes directeurs fixés par les Nations unies et l'OCDE en instaurant une obligation de vigilance assortie d'une obligation de moyens pour les grands groupes. Son dépôt avait enclenché une dynamique collective comme l'ont montré les initiatives du groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Nous espérons vivement que nos débats permettront de créer les conditions d'une convergence avec le groupe majoritaire. C'est dans cette perspective que nous présenterons des amendements conjoints pour améliorer le contenu du texte actuel et lui donner davantage de force.

Les bonnes pratiques et l'adoption de principes ne suffisent pas. Il est impératif pour l'accès des victimes à la justice de mettre en place des outils permettant d'identifier les responsabilités tout au long de la chaîne de valeur. Or, ce principe de responsabilité solidaire, nous ne le retrouvons pas dans la rédaction actuelle de la proposition de loi. Son inscription dans la loi est pourtant une étape essentielle à franchir pour éviter que la responsabilité des puissants ne se dilue dans la chaîne de production. Nous avons déposé un amendement pour combler cette lacune. Madame la rapporteure, c'est la responsabilité criminelle des multinationales que nous devons faire valoir quand elle est en cause.

D'autres questions se posent. Je pense en particulier aux seuils fixés pour déterminer quelles entreprises doivent être soumises à l'obligation d'élaborer un plan de vigilance, au renvoi au Conseil d'État des modalités d'application ou encore à la définition des liens de sous-traitance. C'est en fonction des avancées qui seront apportées en commission et en séance, et donc des éventuelles convergences qui se dessineront avec la proposition de loi que nous avions déposée, que le groupe écologiste arrêtera sa position finale.

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