Un autre outil indispensable a fait l’objet de réticences particulières, même s’il est lui aussi fondé sur le volontariat : les espaces de continuités écologiques. J’ai entendu les craintes qui se sont exprimées ; j’ai essayé de trouver une position acceptable par tous et qui, je l’espère, les apaisera. Il s’agit d’une mesure très attendue. Tout le monde se réjouit et se félicite en effet de la nouvelle définition de la biodiversité que consacre l’entame du texte. Il s’agit d’une définition dynamique rompant avec l’acception « figiste » d’une biodiversité sanctuarisée, sous cloche, au profit d’une reconnaissance des grandes lois des flux et de l’échange et d’une biodiversité en mouvement, correspondant bien à la réalité. Elle a besoin, pour exister en bonne santé écologique, de couloirs, ce qui nous a amenés à supprimer les discontinuités grâce à un outil ad hoc.
Le texte prévoit aussi des mesures visant à mieux protéger le milieu marin et encadrer les activités de la zone économique exclusive. Toutefois, il ne met pas fin au scandale du chalutage en eaux profondes, qui stérilise une partie des fonds marins et fait disparaître des espèces au cycle de vie particulièrement long dont les individus, pris au piège des filets, sont incapables de se reproduire, ce qui met en péril toute vie en eau profonde. Mme Abeille a proposé un amendement pour interdire cette pêche ; je soutiens, avec d’autres, une telle démarche, tout en persistant à croire qu’il importe de donner des perspectives aux pêcheurs. On ne peut plaider pour la préservation de la biodiversité tout en considérant d’un oeil bienveillant des pratiques violentes et stérilisantes des fonds marins ! Je vous demande donc, madame la ministre, de nous éclairer sur votre volonté de faire cesser ces pratiques et sur les perspectives de soutenir les projets de l’Union européenne en la matière, car il y a urgence.
Par ailleurs, nous élargissons la notion de paysage à la nature ordinaire, réformons les procédures des sites inscrits et reconnaissons par amendement le métier de paysagiste concepteur.
Enfin, le texte comporte un titre entièrement consacré à l’accès aux ressources énergétiques et au partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation, visant à traduire en droit français le protocole de Nagoya. Ses objectifs principaux sont la lutte contre la biopiraterie et la juste rétribution des communautés conservant des savoirs ancestraux liés à la biodiversité qui grâce à elles bénéficient à tous.
Je conclurai en saluant l’intérêt que porte le Président de la République à la biodiversité dans le contexte de la COP 21, qui ne peut en faire abstraction. La biodiversité souffre du changement climatique mais constitue aussi un moyen de le combattre, car la nature nous enseigne le caractère impératif de l’adaptation. Il nous faut en revanche, dans le contexte de mondialisation, formuler une véritable stratégie de lutte contre les espèces exotiques envahissantes.
Je remercie chaleureusement celles et ceux qui consacrent leur vie à défendre la biodiversité sur le terrain, en France ou à l’étranger, en particulier les associations de protection de la nature, qui sont à nos yeux les sentinelles de nos errements. De même, les lanceurs d’alerte ont su et savent encore, partout où s’élaborent des décisions contraires aux objectifs que nous poursuivons, faire comprendre à celles et ceux qui n’en sont pas convaincus ou qui le contestent que la biodiversité constitue une richesse pour notre pays et non une contrainte et que sa protection et sa reconquête sont créatrices d’emploi et porteuses d’un formidable espoir, susceptible de rassembler en cette période difficile et surtout de mettre en mouvement des générations de plus en plus sensibles à ces enjeux. Je compte sur vous tous, chers collègues, pour qu’à l’issue de l’examen du texte nous soyons fiers du résultat !