Intervention de Bertrand Fragonard

Réunion du 15 novembre 2012 à 9h30
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Bertrand Fragonard, président délégué du Haut Conseil de la famille :

J'attends les signaux du Gouvernement sur la politique familiale. L'augmentation de l'ARS, qui porte sur 400 millions d'euros, en est un. Si elle ne se traduit pas par une modification structurelle, elle constitue une bonne opération, car elle a permis, pour un montant limité, de cibler les classes moyennes avec un impact significatif – soit 700 ou 1 000 euros de plus au mois de septembre pour des familles de deux ou trois enfants. Un deuxième signal implicite a porté sur le quotient familial, que l'on veut légèrement réduire, sans le réformer en profondeur. Lorsqu'il avait évoqué le sujet lors de sa campagne électorale, le Président de la République avait d'ailleurs précisé qu'il le conserverait tout en le plafonnant à 2 000 euros.

Je rappelle à cet égard que ce plafonnement existe depuis 1981, que le Conseil constitutionnel a reconnu sa validité et que son niveau a plus ou moins été élevé ou réduit selon que le gouvernement était de droite ou de gauche. Or, le quotient familial correspond aujourd'hui à celui prévalant sous le gouvernement de Lionel Jospin actualisé en fonction de l'inflation. On observe donc une grande continuité dans ce domaine : la mesure prise ne modifie pas véritablement la politique familiale.

Il en va différemment de la question de savoir ce que l'on fait du statut fiscal − s'agissant non seulement du quotient familial, mais aussi du quotient conjugal, grand oublié du débat politique. De même que de celle touchant à la variation des prestations familiales en fonction de la taille de la famille, de l'âge des enfants ou du revenu.

Sur la taille de la famille, nous poursuivons depuis 1945 une politique constante tendant à accroître l'aide totale en fonction du nombre d'enfants, ce qui me paraît bien. En 1981, alors que la gauche était porteuse de l'idée de l'égalité des allocations familiales quel que soit le rang, le Gouvernement s'y est assez vite refusé et le débat n'a quasiment plus jamais reparu. De même, si M. Sarkozy avait évoqué l'idée d'une allocation au premier enfant lors de sa campagne de 2007, après son élection, le débat a été clos. Quel gouvernement serait prêt en effet à consacrer un budget de 2,5 milliards pour donner 60 euros à toutes les familles d'un enfant alors qu'un enfant sur cinq vit dans une famille pauvre ?

D'ailleurs, l'un des rares votes du HCF a été que, dans la conjoncture actuelle, il n'était pas prioritaire de retenir cette mesure. Cela veut bien dire qu'elle ne verra pas le jour.

En ce qui concerne l'âge, la politique conduite s'inscrit également dans la continuité, en faveur des familles jeunes. À la fois parce que cela incite celles-ci à avoir d'autres enfants et pour favoriser la compatibilité entre la vie professionnelle des femmes et leur vie privée. Or, les signaux adressés par le Président de la République dans sa campagne électorale vont dans le même sens, qu'il s'agisse de la volonté de renforcer l'école maternelle pour les tout-petits – où l'on a perdu 150 000 places en onze ans – ou d'amplifier l'effort en faveur des équipements d'accueil du jeune enfant (EAJE). Mais là encore, il faudra trouver les financements.

Pour ce qui est des revenus, il n'y a eu, en dehors de la mesure sur le quotient familial, aucune mesure de structure annoncée par le Gouvernement. Ce chantier n'a donc pas été ouvert. Je rappelle que lorsque certains responsables de l'ancienne majorité ont évoqué l'idée de placer les allocations familiales sous conditions de ressources, ils ont été très vite rappelés à l'ordre.

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