Cet amendement est identique à celui de M. Lesage et concerne encore la complémentarité entre l’agriculture et la biodiversité. Si vous le permettez, je souhaiterais défendre en même temps que celui-ci, l’amendement no 955.
Je souhaite en effet supprimer le principe de complémentarité entre l’agriculture et l’environnement adopté lors de l’examen du texte en commission, et cela pour plusieurs raisons – mes collègues du groupe écologiste et moi-même avons du reste déposés plusieurs autres amendements en ce sens. Nous touchons là, en effet, aux grands principes du droit de l’environnement – le principe « éviter, réduire, compenser », le principe « pollueur-payeur » et le principe de précaution, invoqué par une profession qui n’a rien à faire dans les premières lignes de notre code de l’environnement.
Comme le précise l’exposé sommaire de mon amendement, de simples considérations logistiques et juridiques devraient suffire pour supprimer ce principe. De fait, ces principes généraux du droit de l’environnement peuvent entraîner des effets juridiques en s’imposant aux personnes publiques et privées et les directions des affaires juridiques sont souvent très promptes à nous alerter sur certains risques juridiques. Or, je doute qu’il y ait eu dans ce cas une analyse juridique. On nous rappelle souvent que nous écrivons le droit : veillons donc à ne pas écrire n’importe quoi.
Surtout, bien qu’un certain type d’agriculture – principalement, bien sûr, l’agriculture biologique – puisse avoir un rôle favorable dans la préservation de la biodiversité, reconnaître à l’ensemble de l’agriculture ce même rôle bénéfique était vraiment un non-sens, comme je l’ai déjà dit dans ma déclaration liminaire.
Je ne lancerai pas ici un débat sur l’agriculture, mais la liste des effets néfastes de l’agriculture sur la biodiversité et l’environnement est très longue – je citerai seulement les effets des pesticides sur les pollinisateurs et la pollution des milieux, la destruction des sols du fait de la culture productiviste, gavée d’intrants chimiques, le saccage des côtes bretonnes par les algues vertes à cause des nitrates déversés par l’industrie porcine et l’effondrement de la biodiversité dans les plaines de monoculture. Les exemples sont nombreux et prendre celui de l’apport de certains secteurs agricoles, comme les prairies de montagne, pour défendre l’ensemble de l’agriculture, ce n’est vraiment pas aider à la réorientation de notre modèle agricole et à la protection de la biodiversité.
Il est indispensable de supprimer ce principe ou, au minimum, d’en réduire la portée à l’agriculture biologique, comme le propose l’amendement de repli no 955. Adopter un tel principe ouvrirait en effet une boîte de Pandore : pourquoi ne pas reconnaître un lien de complémentarité entre les forêts et l’environnement – ce qui aurait plus de sens – ou entre les littoraux et l’environnement, ou même entre l’industrie et l’environnement, au motif que certaines espèces de chauves-souris aiment à nicher dans les sites industriels ?
Un tel principe n’a pas sa place ici et il est, je le répète, indispensable de le supprimer.