Intervention de Pascale Boistard

Réunion du 17 février 2015 à 17h00
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Pascale Boistard, secrétaire d'état chargée des Droits des femmes, auprès de la ministre des Affaires sociales, de la santé et des droits des femmes :

Madame la présidente, mesdames les députées, monsieur le député, je vous remercie de m'avoir invitée à vous présenter l'action du Gouvernement en matière de droits des femmes. Comme vous le savez, il s'agit d'une politique menée de façon transversale, c'est-à-dire à la fois mise en oeuvre par chacune des administrations concernées et intégrée à l'ensemble des politiques publiques initiées par le Gouvernement. Notre rôle consistera à accompagner les différents ministères sur ces questions, afin de veiller à ce que certains principes – je pense notamment à l'égalité professionnelle – progressent régulièrement.

Entre septembre et octobre 2014, nous avons tenu des conférences sur l'égalité entre les femmes et les hommes qui nous ont donné l'occasion d'auditionner chaque ministère et de faire le point sur les politiques publiques, ainsi que sur la mise en oeuvre des objectifs assignés aux administrations. Ces conférences aboutiront à une phase de restitution et de bilan, mais aussi à la détermination de nouveaux objectifs pour les deux années à venir.

Le premier objectif consiste en la mise en application de la loi du 4 août 2014, qui touche à tous les sujets relatifs à l'égalité entre les femmes et les hommes. Nous avons à coeur de mettre en oeuvre cette loi que vous avez votée : huit décrets d'application, soit environ la moitié de ceux qui devront être pris au total, ont été publiés à ce jour. Nous accompagnons les ministères concernés dans l'écriture de ces décrets, dont nous sommes cosignataires. Il est important qu'après les riches débats auxquels l'examen de cette loi a donné lieu à l'Assemblée nationale et au Sénat, les Françaises et les Français puissent se rendre compte de la mise en oeuvre effective des dispositions votées par les parlementaires. Pour mener notre action, nous pouvons nous appuyer sur un réseau présent dans chaque région et chaque département, celui des délégations régionales et départementales aux droits des femmes et à l'égalité, dont les représentants sont chargés de mettre en oeuvre nos politiques publiques sur le terrain. J'ai décidé, lors de l'élaboration du dernier budget, de maintenir le niveau des crédits alloués à ces délégations, afin qu'elles puissent continuer à mettre en oeuvre les projets et dispositifs déjà adoptés, dans un objectif de continuité des politiques publiques.

Nous effectuons également, comme la loi du 4 août 2014 nous y autorise, des expérimentations dans différents domaines : je pense notamment au dispositif du téléphone grand danger ou à la mise en oeuvre expérimentale dans vingt départements, depuis octobre dernier, de la garantie contre les impayés de pension alimentaire (GIPA), consistant en un relais pris par la caisse d'allocations familiales (CAF) lorsque le débiteur de la pension est défaillant dans le versement de celle-ci – les enseignements qui seront tirés de cette expérimentation ayant vocation à permettre la mise en oeuvre généralisée du dispositif.

Notre action est guidée par des axes forts. Il s'agit d'abord de l'égalité professionnelle, pour laquelle la loi du 4 août a fixé des objectifs chiffrés et un calendrier très précis pour la prise de responsabilités des femmes dans les conseils d'administration – je pense notamment à l'objectif de 40 % à l'horizon 2017 pour les entreprises cotées en bourse, mais aussi à l'obligation d'intégrer au dialogue social ayant lieu au sein des entreprises et des branches professionnelles un débat sur l'inégalité salariale, dont le taux n'est toujours pas descendu sous les 25 %, ce qui constitue un problème auquel nous devons nous attaquer afin de le réduire de manière significative.

Nous avons également élaboré un plan de lutte contre les violences. Le 25 novembre dernier, nous avons eu l'occasion de réaffirmer notre détermination à lutter contre ces violences et à développer des dispositifs permettant aux femmes d'être mieux accompagnées, et le plus vite possible, lorsqu'elles se déclarent victimes de violences, mais aussi des dispositifs annexes permettant de les mettre à l'abri. En matière d'hébergement d'urgence, nous avons créé 598 places sur les 1 650 constituant l'objectif présidentiel et, en termes qualitatifs, nous nous efforçons de faire en sorte que ces places soient créées dans des lieux réservés aux femmes. Nous travaillons également à la formation des personnels : ainsi avons-nous oeuvré, l'année dernière, à l'amélioration de la formation des sages-femmes, car le contact au cours de la grossesse avec ces personnels très qualifiés et bien formés à la problématique des violences conjugales est souvent l'occasion de révéler des violences dont certaines femmes ont été victimes par le passé – et sont parfois encore victimes au cours de leur grossesse. Une partie du travail à accomplir consiste à créer des relations de plus en plus étroites entre la justice, la police et d'autres acteurs tout aussi indispensables.

Nous avons à coeur de mener notre action sur l'ensemble des territoires. De ce point de vue, en matière de violences faites aux femmes, j'ai tenu en fin d'année 2014 à donner les moyens nécessaires à la constitution d'une nouvelle enquête VIRAGE (violences et rapports de genre), mesurant très précisément les violences faites aux femmes et détaillant les mécanismes de violence ainsi que leur impact sur les femmes. Cette enquête n'était initialement prévue que pour le territoire métropolitain, mais George Pau-Langevin et moi-même avons cosigné un courrier exprimant notre volonté de la voir s'effectuer également dans les territoires d'outre-mer. La dernière enquête datait de plus de dix ans, et nous avions besoin de nouvelles données afin d'adapter et éventuellement de perfectionner les outils à notre disposition pour combattre ce fléau que sont les violences faites aux femmes.

La loi du 4 août 2014 prévoit également la lutte contre les stéréotypes. Il y a quelques jours, le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a rendu une délibération ayant pour objet d'une part la mise en oeuvre de préconisations à l'intention des chaînes de télévision et d'autres médias, tendant à une meilleure représentation des femmes expertes ou journalistes dans l'espace médiatique, d'autre part l'expression de recommandations visant à lutter contre les stéréotypes propagés par les fictions et d'autres émissions, selon lesquels les femmes devraient être cantonnées à certaines fonctions, mais aussi contre la diffusion de certains propos sexistes tendant à généraliser l'idée selon laquelle les femmes doivent occuper un rôle secondaire dans la société.

Le sujet de l'interruption volontaire de grossesse (IVG) a été évoqué en novembre 2014 dans l'hémicycle de cette assemblée, ainsi qu'au mois de janvier dernier, lors de l'anniversaire de la loi Veil. Si l'IVG a connu récemment de nouvelles avancées, nous avons aussi la volonté de faire en sorte que l'éducation à la sexualité dans le cadre scolaire, prévue par une circulaire de 2003, soit bien appliquée dans l'enseignement public, et que le sujet de la connaissance de l'autre fournisse l'occasion de faire passer le message du nécessaire respect entre les femmes et les hommes.

En septembre dernier, j'ai porté la voix de la France à l'Organisation des Nations Unies (ONU) au sujet des questions relatives à la contraception et à l'interruption volontaire de grossesse. Je me rendrai à nouveau à l'ONU le 9 mars prochain, afin de témoigner de la volonté de la France de continuer de progresser sur ces questions, mais aussi sur celle des mutilations sexuelles, qui font encore de nombreuses victimes.

Nous souhaitons investir de nouveaux axes, notamment celui de la présence des femmes dans l'espace public. À l'occasion de l'événement que constituent les 24 heures du sport féminin, plusieurs associations m'ont fait remarquer que si 35 % des garçons abandonnaient toute activité physique à l'âge de quatorze ans, ce chiffre s'élevait à 45 % pour les filles. Plus inquiétant, il est prouvé que les jeunes filles se contraignent d'elles-mêmes à disparaître de l'espace public à partir du même âge, en raison du harcèlement et des manifestations de sexisme dont elles font l'objet. Nous avons donc mis en place une expérimentation portant le nom de « marches exploratoires », en collaboration avec les mairies qui se sont déclarées volontaires : cela consiste pour les femmes vivant en milieu urbain à parcourir leur quartier à pied, avec des élus locaux et des membres de l'association France Médiation, afin d'identifier, sur le plan urbanistique et en termes de présence humaine, ce qui pourrait leur permettre de se réapproprier l'espace public. Cet aspect est fondamental en ce qu'il touche à la liberté des femmes.

En matière de transports, nous avons mis en place au mois de janvier dernier un groupe de travail, menant des réflexions en lien avec le ministère de l'intérieur, le ministère des transports et tous les représentants de ce secteur, afin de déterminer par quels moyens nous pourrions développer les réflexes citoyens, car il est trop fréquent que des actes de violences envers les femmes ne donnent lieu à aucune réaction de la part des personnes qui y assistent. Nous devons mobiliser la société, car ces violences sont inacceptables, et travailler à la formation des acteurs concernés et à l'élaboration de quelques dispositifs simples et accessibles, afin que toutes et tous se sentent plus en sécurité dans les transports. Les phénomènes sur lesquels nous souhaitons agir ne sont pas forcément nouveaux, et ce n'est parfois que grâce à l'action de certains acteurs de la société civile, qui nous alertent sur certains points, que nous entendons parler de ce qui restait naguère ignoré. Évidemment, nous sommes extrêmement mobilisés sur tous ces sujets.

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