Je vous remercie de me donner l'occasion de m'exprimer devant vous. Délégué interarmées aux réserves auprès du général d'armée Pierre de Villiers, chef d'état-major des armées, je mesure l'honneur et l'opportunité de cet échange direct avec votre commission et la représentation nationale.
Vous le savez, les armées sont là pour défendre la France et les Français. À l'extérieur – la défense de l'avant –, plus de 20 000 militaires sont aujourd'hui déployés hors de la métropole, au profit de vingt-six opérations qui se déroulent sur quatre continents, dans les airs et sur tous les océans. En métropole, les armées assurent depuis de nombreuses années, de façon permanente, récurrente ou occasionnelle, de multiples missions. Après le 11 janvier dernier, elles ont encore répondu présentes lorsque le Président de la République a décidé de mettre en oeuvre le contrat de protection. Depuis le déclenchement de l'opération Sentinelle – qui mobilise 10 000 soldats –, pas moins de 250 réservistes y ont participé en continu. Ce chiffre apparaît à la fois important compte tenu des contraintes spécifiques des réservistes et limité au regard de l'effort massif demandé aux armées. Au cours de l'année dernière, quelque 240 réservistes ont été projetés en opérations extérieures (OPEX), totalisant plus de 21 000 jours d'activité. Plus largement, les armées comptent aujourd'hui 27 600 réservistes, dont 1 800 en moyenne sont en service quotidiennement.
Quelques jours seulement après les terribles attentats qui ont touché notre pays, lors de ses voeux aux armées, le Président de la République tenait les propos suivants : « Il y a les militaires d'active, il y a aussi les réservistes. (...) Je souhaite donc que les dispositifs sur l'emploi des réserves soient améliorés pour permettre à tous ceux qui ont une compétence d'apporter à nos forces tout ce qu'ils peuvent offrir à la Nation. Ces échanges profitent à tous ; aux entreprises, dont sont issus ces réservistes ; aux armées qui sont enrichies par cet apport ; et bien sûr aux intéressés eux-mêmes qui vivent dans les armées une expérience inoubliable. » Dans le contexte actuel qui conjugue des engagements soutenus et multiples sur les théâtres d'opérations extérieures et une menace terroriste visant directement notre territoire et nos concitoyens, ces mots soulignent les attentes du chef des armées vis-à-vis de la réserve.
Face à ces constats, quelle contribution fixer et attendre de la réserve dans la conduite de nos opérations et de nos missions permanentes sur les théâtres extérieurs et surtout sur le sol national ? Quelles ambitions et moyens faut-il lui donner pour répondre aux attentes du Président de la République et au besoin de défendre notre pays ? Pour répondre à ces questions, j'aborderai quatre points : la réserve s'inscrit dans l'héritage et la continuité des valeurs républicaines de l'an II et de la conscription ; les réservistes font aujourd'hui partie intégrante des armées, directions et services et sont indispensables au fonctionnement et à la tenue de leur contrat opérationnel ; s'il s'est révélé adapté, notre système peut encore être consolidé ; enfin, nous pouvons nous donner une ambition forte et réaliste pour la réserve à la condition d'allier volonté et moyens.
En France, la réserve militaire apparaît après la guerre franco-allemande de 1870. Alors que la France néglige la mise en place de véritables réserves, la Prusse organise, dès 1860, un système très efficace. C'est donc après la chute du Second Empire que sont institués, par la loi du 27 juillet 1872, les principes fondamentaux des réserves, qui restent d'actualité jusqu'en 1999. À l'origine, les obligations militaires des citoyens français comprennent un service national qui dure cinq ans dans l'armée d'active, quatre ans dans la réserve de l'armée d'active, cinq ans dans l'armée territoriale et six ans dans la réserve de l'armée territoriale. Différentes lois ont modifié le texte fondateur du 27 juillet 1872, mais ses principes n'ont jamais été remis en cause. Ainsi, si les modalités et la durée de service dans les réserves ont varié avec le temps, la conception des réserves entre la loi de 1872 et celle du 22 octobre 1999 est marquée par une continuité certaine.
Le réserviste est un soldat mobilisable pour compléter les effectifs de l'active ou pour constituer des unités de réserve. Afin que les réservistes restent opérationnels, ils sont astreints à de multiples – et longues – périodes d'exercices, pendant de nombreuses années. Ces citoyens français servent donc par obligation civique et peuvent être mobilisés pour partir à la guerre. Par la masse qu'elle représente, la mobilisation de la réserve permet de renforcer l'armée d'active et de faire face aux menaces les plus fortes. Elle s'inscrit dans l'esprit de la levée en masse de l'an II et de nos valeurs républicaines : l'appel à tous les citoyens réunis pour défendre la patrie.
Dans les années 1990, l'évolution du contexte stratégique, la suspension du service national, le resserrement du format et la professionnalisation de nos forces armées conduisent à repenser et à adapter la réserve. La loi du 22 octobre 1999, modifiée par celle du 18 avril 2006, en transforme profondément le concept : d'une réserve de masse mobilisable, corollaire de la conscription et destinée à la défense du territoire national, la France passe à une réserve d'emploi qui a pour objet de renforcer en permanence les capacités des forces armées, dont elle est une des composantes, et d'entretenir l'esprit de défense et le lien de l'armée avec la Nation. Dans un contexte de forte tension sur les effectifs, cette réserve d'emploi sélectionnée, reposant sur le volontariat, démontre rapidement sa nécessité, tant sur le territoire national que sur les théâtres extérieurs.
La réserve s'inscrit dans un parcours citoyen qui débute avec l'enseignement de défense et se poursuit avec la participation au recensement et aux journées défense et citoyenneté (JDC), la préparation militaire et le volontariat. Ce parcours continu permet à tout Français ou Française d'exercer son droit à contribuer à la défense de la Nation. La réserve est désormais organisée en deux volets : une réserve opérationnelle – comprenant des volontaires et, en fonction des besoins des armées, d'anciens militaires soumis à l'obligation de disponibilité pendant cinq ans à l'issue de leur lien au service – et une réserve citoyenne regroupant les autres réservistes. Les militaires en réserve de disponibilité, dont l'aptitude est supposée être vérifiée régulièrement, peuvent être appelés en renfort par voie de décret si le nombre des réservistes volontaires s'avère insuffisant et si les circonstances l'exigent. Cette disposition n'a, pour l'instant, jamais été appliquée. La réserve citoyenne, composée de collaborateurs bénévoles du service public, a plus particulièrement pour objet d'entretenir l'esprit de défense. En outre, la loi a instauré un véritable statut du réserviste et prévu des protections spécifiques vis-à-vis de l'employeur : ainsi, à condition d'avoir déposé un préavis d'un mois, le réserviste peut s'absenter de son poste cinq jours ouvrés par an pour ses activités dans la réserve, sans que son employeur puisse le refuser. Notons toutefois que la mise en oeuvre de l'opération Sentinelle a révélé des difficultés en cette matière.
Plus de vingt ans après le projet « Réserves 2000 » et quinze ans après le vote de la loi, que représentent aujourd'hui les réserves ? La réserve citoyenne, dont l'effectif croît régulièrement, a atteint 2 300 personnes ; la réserve opérationnelle de premier niveau est forte de plus de 27 600 volontaires, mais reste néanmoins éloignée de l'objectif de 40 000 fixé en 2009. Après avoir décru régulièrement depuis 2008 – année où il a culminé à 33 672 –, son effectif semble se stabiliser. La réserve de deuxième niveau – ou réserve de disponibilité – compte environ 89 000 anciens militaires.
Du fait de l'héritage de la conscription, la structure de la réserve opérationnelle de premier niveau est bien moins pyramidale que celle de l'armée d'active : les officiers y représentent 31 %, pour 35 % de sous-officiers et 34 % de militaires du rang. La réserve opérationnelle est employée sur tout le spectre des missions des armées, car depuis la suppression de la garde nationale en 1871, elle n'a pas de tâches assignées distinctes de celles de l'armée d'active. Pour 2014, le volume total des activités de la réserve opérationnelle s'élève à environ 670 000 journées réparties entre le renfort d'unités – 32 % – ou d'états-majors – 16 % –, les opérations extérieures – 4 % –, les opérations intérieures – 7 % –, les autres activités sur le territoire national – 23 % –, les actions de formation – 17 % – et les JDC – 1 %.
Un tiers des réservistes sont affectés en unités, essentiellement celles de réserve de l'armée de terre, les deux autres tiers servant en tant que compléments individuels au sein des armées et services, ainsi que dans l'ensemble des organismes interarmées qui emploient jusqu'à un quart des réservistes. En 2014, les réservistes opérationnels ont servi en moyenne vingt-quatre jours par an, cette moyenne comprenant aussi bien ceux qui n'ont eu aucune activité que ceux – une vingtaine de personnes – qui sont allés jusqu'au maximum légal de 210 jours.
La réserve des armées et services présente la particularité d'être très diverse, voire kaléidoscopique si on la compare à celle de la gendarmerie, d'un modèle unique. La réserve de l'armée de terre, forte de 15 500 réservistes, est répartie entre unités et compléments individuels. Les quatre-vingt-trois unités élémentaires de réserve – auxquelles il faut ajouter le vingt-quatrième régiment d'infanterie, bataillon de réserve d'Île-de-France – représentent un peu plus de la moitié des effectifs. Rattachées à des régiments et exclusivement tournées vers un emploi sur le territoire national, ces unités s'entraînent et agissent dans le cadre des missions communes de l'armée de terre (MICAT) ou d'un métier particulier : transport, circulation, maintenance, génie, renseignement. Quant aux compléments individuels – 45 % des effectifs –, ils ont vocation à servir au sein des états-majors, des grandes unités, des régiments et de l'ensemble des organismes interarmées. Les états-majors des zones de défense font particulièrement appel à des réservistes dans le cadre de l'opération Sentinelle.
La marine compte 4 700 réservistes affectés en compléments individuels qui lui permettent d'absorber les pics d'activité en optimisant les forces, lui apportent des compétences spécifiques – juridiques ou linguistiques –, et contribuent au gardiennage des unités opérationnelles et aux actions de rayonnement et de recrutement sur l'ensemble du territoire national. En cas de crise, ils participent au renforcement de la posture de sûreté – protection des implantations sensibles de la marine telles que les bases aéronavales et navales ou les stations de transmission – et de la sauvegarde maritime incluant la surveillance du littoral par la chaîne sémaphorique et le contrôle naval.
L'armée de l'air compte 4 320 réservistes, principalement employés en tant que compléments individuels dans leurs domaines de spécialité, comme le contrôle aérien ou la maintenance aéronautique. Elle compte également des unités, bien qu'en proportion moins importante que l'armée de terre. Douze unités aériennes composées chacune de dix-sept réservistes opérationnels, implantées sur des bases plates-formes disposant d'aéronefs civils légers – les Sections aéronautiques de réserve de l'armée de l'air (SARAA) –, participent à l'entraînement des unités d'active à la posture permanente de sûreté aérienne. Vingt-sept sections de réserve d'appui sont également employées à la protection des bases aériennes et des sites rattachés.
Comptant 3 050 personnes, la réserve du Service de santé des armées (SSA) est composée essentiellement d'un personnel de haute technicité dont sept dixièmes viennent du milieu civil. La moyenne d'âge de recrutement des praticiens est supérieure à quarante ans et la pyramide des grades y est inversée : deux tiers d'officiers, essentiellement des praticiens, et un tiers de sous-officiers, soignants paramédicaux et personnels administratifs. Cela explique un coût journalier supérieur à celui constaté dans les autres armées ; pourtant l'attractivité financière de cette réserve reste relative, rendant le recrutement difficile.
La loi du 22 octobre 1999 a clarifié l'objet et l'organisation de la réserve militaire et fourni un véritable statut aux réservistes. Dans ce cadre, la réserve est devenue un outil indispensable aux armées, directions et services dans lesquels elle est pleinement intégrée et qui ne sauraient plus fonctionner sans elle. J'en veux pour preuve les intenses discussions dont l'attribution des budgets des réserves fait l'objet. Pourtant, ces quelques années de recul permettent de mettre en évidence les lacunes dont la réserve souffre encore, en particulier sa faible attractivité et sa difficulté à recruter.
Trois principales difficultés peuvent être relevées, les rapports de l'Assemblée nationale rejoignant nos propres observations. Tout d'abord, la réserve souffre de limitations opérationnelles. En effet, la capacité d'emploi dans les opérations ou les crises reste mesurée au moment où la diversité, la durée, la dureté et la complexité des engagements accroissent l'exigence de professionnalisme. Par ailleurs, les délais et les durées de service fixés par la loi apparaissent trop restrictifs, notamment dans le cas des opérations extérieures ou d'une crise majeure sur le territoire national, comme celle à laquelle nous sommes confrontés aujourd'hui.
La réserve connaît également des limitations budgétaires. En effet, les différentes lois de programmation militaire (LPM) depuis la suspension de la conscription ont toutes ajusté leurs ambitions aux ressources. Ainsi, s'inscrivant dans la lignée du plan « Réserves 2000 », la LPM de 1994 proposait d'atteindre 500 000 hommes à l'échéance de l'an 2000 ; celle de 1996 ramènera cet objectif à 100 000 hommes à l'échéance de 2002, celle de 2009, à 40 000 hors gendarmerie, et celle de 2013 stabilisera les effectifs autour de 27 000 hors gendarmerie.
Enfin, la réserve pâtit d'un manque relatif d'attractivité. Le dispositif actuel n'est pas encore assez efficace pour satisfaire nos besoins en engagement ; le recrutement des réservistes reste déséquilibré avec un déficit parmi les sous-officiers et surtout parmi les militaires du rang. Il reste difficile de conserver les anciens sous-officiers subalternes et les militaires du rang contractuels, confrontés au défi de la reconversion dans la vie civile. A contrario, les employeurs civils, au premier rang desquels les administrations publiques, apparaissent insuffisamment impliquées dans une question qui concerne pourtant la défense de tous les citoyens et des entreprises. Bien que l'image de la réserve reste excellente, la diversité des opportunités de volontariat offertes par la société – les pompiers, la police, la gendarmerie –, la fin du service obligatoire et la multiplication des déserts militaires contribuent à la baisse du nombre de candidats. Les activités dans la réserve peuvent se traduire par une perte financière que ne vient compenser aucune indemnité ; il est à cet égard intéressant de comparer notre système au modèle des réserves britanniques. Ces difficultés ou lacunes ne remettent pas en cause les fondements du dispositif actuel, mais exigent des solutions.
Si nous voulons aller plus loin et répondre aux attentes du Président de la République, que faut-il envisager ? Quelles ambitions et quels moyens nous permettraient de répondre aux missions et aux besoins actuels des armées ? Nous avons la conviction qu'une ambition forte mais réaliste pour la réserve est non seulement possible, mais nécessaire. Par sa souplesse et sa capacité à mobiliser des militaires professionnels à temps partiel, le dispositif actuel est globalement bien adapté à nos besoins. Il s'agit de le consolider pour disposer d'une réserve opérationnelle d'emploi intégrée aux forces armées, plus efficace et conforme aux effectifs du modèle. Pour dynamiser la réserve et mieux répondre aux défis d'aujourd'hui, trois axes d'évolution nous semblent devoir être explorés : la clarification, l'élargissement, la valorisation et l'emploi de la réserve ; la bonne prise en compte de certaines spécificités ; l'amélioration de l'employabilité des réservistes par le biais des leviers législatifs et budgétaires.
Le premier axe vise à développer l'emploi de la réserve en s'appuyant sur trois piliers complémentaires ; cette structuration ternaire, inscrite dans la loi, a démontré son efficacité. Il faut renforcer l'efficacité des unités de la réserve opérationnelle par un meilleur emploi de la disponibilité de chacun et un engagement privilégié dans les missions intérieures récurrentes, continuer à s'appuyer sur des compléments individuels et utiliser la réserve de disponibilité comme un levier supplémentaire pour faire face aux crises majeures. Il convient de clarifier dans les textes le continuum entre paix, crise majeure et mobilisation générale pour disposer d'une réelle capacité de montée en puissance de la réserve opérationnelle de premier comme de deuxième niveau. Il s'agit d'élargir le spectre d'emploi de la réserve pour qu'au-delà de sa participation à nos missions quotidiennes, elle puisse intervenir dans la crise – moins prévisible et exigeant davantage d'effectifs et de réactivité. Pour conforter la réserve dans ses missions, nous devons valoriser et accroître sa capacité d'engagement dans des missions relevant de la fonction stratégique de protection, exploiter au mieux sa connaissance des milieux et des territoires comme son niveau de formation, étudier de nouvelles pistes d'emploi – notamment dans les déserts militaires – et conserver ou acquérir des savoir-faire spécifiques ou duaux tels que la cyberdéfense, le renseignement, la médecine ou le droit. Enfin, il ne faut pas négliger le rôle que les réservistes peuvent jouer dans le renforcement de la cohésion nationale et du lien avec la Nation. Dans cette perspective, il faut notamment renforcer la participation de la réserve à certaines étapes du parcours citoyen rénové, continuer à s'appuyer sur la réserve citoyenne pour diffuser l'esprit de défense et poursuivre la participation des réserves aux préparations militaires. Je ne peux m'empêcher de citer à ce propos l'appel des maréchaux de France de 1926, signé par Joffre, Foch et Lyautey : « Instruire les officiers de réserve, c'est faire oeuvre bonne pour la France et pour les Français. »
Les exemples étrangers nous invitent à faire preuve de volontarisme, mais également de prudence. À ce stade, il reste difficile de prévoir les résultats d'une politique de dynamisation de la réserve ; en tout état de cause, intensifier le recours à cette ressource et en rajeunir les effectifs exigera plusieurs années. Nous restons et resterons dépendants du nombre et de la qualité des volontaires et, bien sûr, de l'efficacité des leviers que nous nous serons donnés. Il faut aussi éviter de mettre en concurrence le recrutement d'anciens militaires et celui de réservistes issus du civil. Ces deux ressources doivent être vues comme complémentaires, les premiers apportant leur niveau de formation et les seconds, leur expertise, leur ouverture et, pour certains, leur jeunesse. Ce sont nos besoins qui doivent in fine déterminer à qui faire appel. Un de nos défis est de faire connaître la réserve, d'y attirer nos concitoyens, de faciliter leur engagement et de les fidéliser. Ces candidats au volontariat font l'objet de nombreuses sollicitations et doivent conjuguer leur souhait de servir avec des obligations privées, familiales et professionnelles. Ces éléments plaident pour un dialogue multilatéral entre la défense, les employés et les employeurs. En effet, il nous faudra aussi convaincre le monde de l'entreprise que l'on peut proposer de nouvelles mesures dans l'intérêt de toutes les parties. Les premiers contacts montrent que la tâche ne sera pas aisée ; nous devons notamment mettre l'accent sur la responsabilité sociale des entreprises et la question de la formation.
Dès lors, quels moyens réunir pour faciliter le recrutement et accroître l'efficacité de la réserve ? Son niveau d'emploi se définit principalement par le budget alloué, le nombre de réservistes, leur réactivité et leur disponibilité, le volume de leur activité, leur niveau de formation et leur degré de fidélisation. Notre ambition est d'augmenter les jours de mission en valeur relative, moyenne et absolue. En effet, le déploiement en continu d'un seul réserviste pendant un an peut nécessiter plus de vingt-cinq réservistes sous contrat, le ratio entre militaires déployés et déployables n'ayant aucune commune mesure avec celui de l'active. Améliorer l'efficacité de la réserve opérationnelle pourrait passer par de nouvelles mesures, notamment législatives ou budgétaires. Ainsi, il est possible de raccourcir le préavis de rappel mais surtout d'allonger la durée de disponibilité, de rénover le dispositif de suivi et d'appel aux réserves de disponibilité, et d'augmenter l'activité et les effectifs de la réserve – et donc les financements dédiés. Il faudrait également renforcer la fidélisation des réservistes et l'attractivité de la réserve, notamment auprès des plus jeunes. Parmi les pistes, on peut songer à un intéressement – sous forme de bourses, d'une meilleure rémunération, la garantie du maintien du principe de la défiscalisation –, mais également à une rénovation des parcours, et bien sûr à la reconnaissance qui reste fondamentale. Enfin, nous devrions améliorer nos systèmes d'information en ligne en les rendant plus interactifs – l'exemple de la gendarmerie est à cet égard très positif – et équiper la réserve de disponibilité pour en faire un vrai réservoir supplémentaire. En effet, si 89 000 personnes sont potentiellement mobilisables à travers le dispositif de réserve de sécurité nationale, nous ne disposons pas aujourd'hui de l'équipement ni de l'infrastructure qui nous permettraient de les accueillir. La pertinence, l'acceptabilité, la cohérence d'ensemble et la rentabilité de ces propositions nécessiteront des études approfondies, il s'agit bien là de pistes à explorer.
Notre niveau d'engagement, le contexte actuel d'insécurité sur le territoire national confronté à la menace terroriste et la volonté politique exprimée par le Président de la République appellent à une nouvelle ambition pour la réserve. Si la loi de 1999 s'inscrit dans la continuité de ce qu'est la réserve depuis sa création, elle fournit une base solide pour en dynamiser le fonctionnement. Au-delà de la réaffirmation du « pourquoi » et du « quoi », il s'agit d'améliorer le « comment » en identifiant les leviers législatifs, budgétaires, doctrinaires ou pratiques les plus adaptés. Désormais indispensable au fonctionnement des armées, la réserve peut devenir un véritable vivier de professionnels à temps partiel, à condition d'améliorer son attractivité et son efficacité, de faciliter l'emploi des réservistes et de les fidéliser. Cependant, augmenter le nombre de volontaires demandera du temps ; la même remarque vaut pour la formation et la préparation des unités, ainsi que pour l'amélioration de la disponibilité et de la réactivité de nos structures.
Être militaire, à temps partiel ou non, exige en toutes circonstances esprit de sacrifice – pouvant aller jusqu'au sacrifice suprême –, discipline, disponibilité, loyalisme et neutralité. Devenir réserviste, c'est faire siennes les valeurs du soldat et acquérir le savoir-être indispensable à l'exercice du métier. Pour continuer à nouer notre lien avec la Nation au travers de la réserve, nous pouvons et nous devons nous donner une ambition à la fois forte et réaliste, faisant appel et répondant à l'appel des Français qui veulent aller plus loin dans leur engagement citoyen. C'est le voeu du Président de la République, en accord avec le ministre de la Défense ; c'est la volonté du chef d'état-major des armées. Nous voulons y répondre pour servir la défense de notre patrie et de nos valeurs. Les armées savent compter sur votre soutien ; vous pouvez compter sur la détermination, la volonté et la loyauté des armées.