Intervention de Dominique Bertinotti

Réunion du 27 novembre 2012 à 16h00
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des Affaires sociales et de la santé, chargée de la Famille :

Il n'y a pas de ligne de partage entre le ministère des droits des femmes et le ministère de la famille. Toutes les femmes sont concernées par les thématiques que vous évoquez, madame la présidente : petite enfance, conciliation des temps, familles monoparentales.

En raison de leur augmentation et de leur forte exposition à la pauvreté et à la précarité, les familles monoparentales constituent un sujet très important qui sera abordé lors de la conférence contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale qui se tiendra les 10 et 11 décembre. On sait que la majorité des enfants pauvres vit dans des familles monoparentales, les neuf dixième d'entre elles étant composées d'une mère et de ses enfants.

La pauvreté touche donc de plus en plus de familles monoparentales. C'est pourquoi toutes nos actions en matière de lutte contre la pauvreté et de soutien à la parentalité doivent prendre en compte ce phénomène.

J'ajoute que la précarité grandissante des retraitées est également un sujet préoccupant. Les Restos du coeur accueillent aujourd'hui des femmes dont la pension ne leur permet pas de subvenir à leurs besoins.

L'égalité entre les femmes et les hommes au sein de la famille est une conquête relativement récente. C'est seulement dans les années soixante à soixante-dix que les femmes ont obtenu le droit d'ouvrir un compte bancaire à leur nom sans l'accord de leur époux, que leur a été accordé le droit à l'autorité parentale, et qu'elles ont pu bénéficier d'un assouplissement des procédures de divorce. Au XIXe siècle, le travail était réservé aux classes les plus modestes, et les femmes des classes moyennes ou aisées vivaient l'enfermement au travers de la famille. Le XXe siècle a été celui de l'émancipation des femmes. Et aujourd'hui, de plus en plus d'hommes réclament l'égalité de traitement en matière familiale.

En effet, un mouvement s'exprime aujourd'hui pour réintroduire les hommes dans leur rôle de père. À la maison des adolescents que j'ai visitée à Toulouse samedi et qui accueille des jeunes entre onze et dix-huit ans, une des mères qui élève seule son enfant a expliqué qu'elle en était venue à s'interroger sur le fait de savoir si les femmes doivent se substituer à la défaillance du père et si celui-ci n'est pas trop souvent mis à l'écart. Le centre parental du XIXe arrondissement, que j'ai visité récemment avec Jean-Marc Ayrault, accueille de très jeunes mères avec leur compagnon.

Cette évolution ne signifie pas que les hommes assument le même volume de tâches domestiques que les femmes ou qu'ils sont exemplaires pour le versement des pensions alimentaires. Mais aujourd'hui, on constate que les gardes alternées sont en augmentation et que, dans ce cas, de plus en plus d'hommes demandent que leur soit versée une partie des prestations familiales.

Un chantier de mon ministère porte sur la petite enfance – les enfants de zéro à trois ans – et le soutien à la parentalité.

Le Gouvernement a décidé d'appréhender la question de la petite enfance, non sous l'angle chiffré des places d'accueil à pourvoir, mais sur la base d'un travail avec les territoires pour inciter les communes, les syndicats de commune, les départements, voire les régions, à se mettre autour d'une même table afin de déterminer leurs besoins à l'échelle régionale. Les parents sont associés à cette consultation citoyenne qui se déroulera jusqu'à la mi-janvier. L'objectif est que chaque région soit capable de déterminer le nombre de places d'accueil dont elle a besoin, le mode d'accueil qu'elle souhaite privilégier en fonction des territoires – coeurs de ville ou secteurs ruraux –, et l'échéancier en fonction des départements dont certains sont moins pourvus que d'autres. J'ai choisi cette démarche car nous renégocions actuellement la convention d'objectifs et de gestion de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), qui est un financeur important des collectivités locales en matière de petite enfance.

Au-delà du manque de places d'accueil, trop peu de villes pratiquent la transparence pour l'attribution des places. Un travail devra donc être mené sur les critères d'attribution. Certaines agglomérations, comme Rennes, mènent des expériences très innovantes en centralisant tous les types de demandes, de la demi-journée à la semaine de garde. En outre, certaines villes, comme Sartrouville, manquent cruellement de structures collectives. La politique de la petite enfance doit corriger ces inégalités territoriales.

Dans ce contexte, un trop grand nombre de femmes renonce à un emploi, soit parce qu'elles n'ont pas obtenu une place d'accueil, soit parce que leur salaire est insuffisant pour couvrir le coût de la garde de leur enfant. Là aussi, la politique de la petite enfance doit être un correctif des inégalités sociales.

Les demandes de soutien à la parentalité sont en augmentation, quels que soient les milieux sociaux. Ce sont souvent les femmes, y compris de milieux très défavorisés, qui prennent l'initiative de résoudre les difficultés auxquelles leurs enfants et elles-mêmes sont confrontés.

Pour conclure, la Délégation aux droits des femmes a naturellement toute sa place pour contribuer à la réflexion sur l'ensemble des sujets relatifs à la petite enfance et à la parentalité.

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