Intervention de Pierre Douillard

Réunion du 19 mars 2015 à 9h00
Commission d'enquête sur les missions et modalités du maintien de l'ordre républicain dans un contexte de respect des libertés publiques et du droit de manifestation, ainsi que de protection des personnes et des biens

Pierre Douillard, représentant de l'Assemblée des blessés, des familles et des collectifs contre les violences policières :

Eh bien, je vais maintenant présenter notre association, l'Assemblée des blessés, des familles et des collectifs contre les violences policières, qui rassemble plus d'une dizaine de personnes blessées ou mutilées par la police à la suite de tirs de Flash-Ball ou de lanceurs de balle de défense (LBD) à hauteur de tête. Manifestants, supporters de football, habitants de quartiers populaires, nous venons de toute la France. Nos objectifs sont simples : soutenir les personnes blessées par la police ; partager et diffuser nos expériences en matière tant médicale que juridique, médiatique et politique ; lancer des initiatives communes ; se soutenir mutuellement en cas de procès de policiers mis en cause ; participer aux luttes en cours. Une interrogation nous unit : avec l'augmentation continue des blessés au Flash-Ball et LBD, combien serons-nous demain ?

Ces armes que sont le Flash-Ball et le LBD ont été mises à disposition des policiers en deux temps.

Le Flash-Ball Super-Pro a été mis en circulation à partir de 1995, à l'initiative de Claude Guéant. Se manipulant comme un pistolet, à une main, il a été fourni aux unités d'élite, dans une perspective de lutte contre le terrorisme et de répression des braquages. Très rapidement, il a été généralisé, dans les quartiers populaires en particulier – en 1999, un homme a perdu un oeil dans une cité de banlieue parisienne.

À partir de 2007, est expérimenté le LBD 40, arme de catégorie A – arme à feu à usage militaire – plus précise et plus puissante que le Flash-Ball Super-Pro. Il est doté d'un viseur Eotech, technologie militaire permettant de viser précisément sa cible.

Progressivement, l'usage de ces armes est allé de la périphérie vers le centre : réservées initialement aux « classes dangereuses », aux populations des quartiers, elles ont été expérimentées lors de manifestations lycéennes. En novembre 2007, à Nantes, à l'occasion d'une manifestation contre la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) – premier mouvement social un peu offensif du quinquennat Sarkozy –, le LBD 40 a ainsi été testé in vivo pour la première fois, de manière non encadrée. C'est à cette occasion que j'ai reçu une balle en caoutchouc au visage qui m'a fait perdre la vision d'un oeil.

Depuis 2007, le LBD a blessé de très nombreuses personnes. Accompagnant un processus de militarisation de la police, il a pu être utilisé aussi bien dans les cités qu'à Notre-Dame-des-Landes ou dans des manifestations syndicales ou lycéennes.

Demain, ce seront peut-être vos enfants, vos proches qui seront touchés.

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