Eh bien, je vais maintenant présenter notre association, l'Assemblée des blessés, des familles et des collectifs contre les violences policières, qui rassemble plus d'une dizaine de personnes blessées ou mutilées par la police à la suite de tirs de Flash-Ball ou de lanceurs de balle de défense (LBD) à hauteur de tête. Manifestants, supporters de football, habitants de quartiers populaires, nous venons de toute la France. Nos objectifs sont simples : soutenir les personnes blessées par la police ; partager et diffuser nos expériences en matière tant médicale que juridique, médiatique et politique ; lancer des initiatives communes ; se soutenir mutuellement en cas de procès de policiers mis en cause ; participer aux luttes en cours. Une interrogation nous unit : avec l'augmentation continue des blessés au Flash-Ball et LBD, combien serons-nous demain ?
Ces armes que sont le Flash-Ball et le LBD ont été mises à disposition des policiers en deux temps.
Le Flash-Ball Super-Pro a été mis en circulation à partir de 1995, à l'initiative de Claude Guéant. Se manipulant comme un pistolet, à une main, il a été fourni aux unités d'élite, dans une perspective de lutte contre le terrorisme et de répression des braquages. Très rapidement, il a été généralisé, dans les quartiers populaires en particulier – en 1999, un homme a perdu un oeil dans une cité de banlieue parisienne.
À partir de 2007, est expérimenté le LBD 40, arme de catégorie A – arme à feu à usage militaire – plus précise et plus puissante que le Flash-Ball Super-Pro. Il est doté d'un viseur Eotech, technologie militaire permettant de viser précisément sa cible.
Progressivement, l'usage de ces armes est allé de la périphérie vers le centre : réservées initialement aux « classes dangereuses », aux populations des quartiers, elles ont été expérimentées lors de manifestations lycéennes. En novembre 2007, à Nantes, à l'occasion d'une manifestation contre la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) – premier mouvement social un peu offensif du quinquennat Sarkozy –, le LBD 40 a ainsi été testé in vivo pour la première fois, de manière non encadrée. C'est à cette occasion que j'ai reçu une balle en caoutchouc au visage qui m'a fait perdre la vision d'un oeil.
Depuis 2007, le LBD a blessé de très nombreuses personnes. Accompagnant un processus de militarisation de la police, il a pu être utilisé aussi bien dans les cités qu'à Notre-Dame-des-Landes ou dans des manifestations syndicales ou lycéennes.
Demain, ce seront peut-être vos enfants, vos proches qui seront touchés.