Intervention de Alain Régnier

Réunion du 2 avril 2015 à 9h00
Mission de réflexion sur l'engagement citoyen et l'appartenance républicaine

Alain Régnier, préfet, chargé de mission « Déploiement du service civique » :

Une précision au sujet de ma mission dont l'intitulé est plus précisément « Promotion de l'égalité et de la citoyenneté au ministère de l'intérieur », ce qui excède le seul déploiement du service civique. En effet, après le comité interministériel du 6 mars dernier qui a annoncé soixante mesures, le ministre a souhaité que le ministère se dote d'un haut fonctionnaire qui assure une mission de coordination transversale des actions conduites en son sein.

Historiquement, le ministère de l'Intérieur est par excellence celui de la citoyenneté. Il est chargé d'organiser toutes les élections, il régit la vie associative, élément structurant depuis une centaine d'années dans notre pays. Par ailleurs, au titre de l'article 72 de la Constitution, les préfets assurent la représentation de l'État et du Gouvernement, ils sont garants, pour l'État, des valeurs et du respect de la Constitution et des lois, et, pour le Gouvernement, de la mise en oeuvre des politiques qu'il a décidées. Cette dernière mission revêt à la fois une dimension ministérielle, au titre du ministère de l'intérieur, et interministérielle.

En ce qui concerne le ministère de l'intérieur, dans le cadre des soixante missions annoncées, notre action s'exercera dans deux dimensions : la jeunesse et tous les âges de la vie. La jeunesse est, bien entendu, concernée par le service civique et son développement au sein du ministère de l'intérieur ainsi que par un parcours citoyen qui reste à construire dans une dimension interministérielle, avec tous les départements ministériels et qui devrait aboutir dans quelques mois. Pour tous les âges de la vie, nous participerons à la définition d'une réserve citoyenne pour le ministère de l'intérieur, sachant que cela a déjà été mis en place au sein de la gendarmerie depuis plusieurs années.

Trois cents jeunes environ effectuent actuellement un service civique au ministère de l'intérieur avec une répartition par tiers au sein des préfectures, dans les forces de sécurité, de police et gendarmerie, et de la sécurité civile. À la demande du Président de la République, nous expérimentons depuis deux mois, en Lorraine, une forme de service civique adapté dans les services départementaux d'incendie et de secours avec une dimension plus opérationnelle.

Les missions, agréées par l'Agence du service civique, seront d'accompagnement, de médiation et de prévention. J'ai rencontré l'ensemble des directions du ministère dont les directeurs seront réunis par le ministre le 7 avril prochain : nous allons établir un plan de montée en charge du service civique dans ses administrations centrales, le réseau préfectoral ainsi que les établissements publics dépendants de lui. Nous impliquerons l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFFI). Enfin, nous ferons appel à des associations qui travaillent avec nous, dans le domaine de la sécurité routière, car nous souhaitons y impliquer les jeunes, et dans celui de la sécurité civile avec des opérateurs tels la Protection civile, la Croix-Rouge, l'Ordre de Malte et tous les acteurs qui collaborent régulièrement avec l'État dans ce secteur. Aujourd'hui, je dois, avec Mme Hélène Paoletti, rencontrer M. François Chérèque afin de réfléchir à nos modalités de travail et à l'évolution des missions susceptibles d'être proposées aux jeunes.

L'objectif du ministre est très ambitieux, mais par pragmatisme, nous n'avons pas déterminé de chiffres a priori car nous préférons partir de l'existant. Je visiterai les préfectures – dont la plus exemplaire est celle de Seine-Saint-Denis avec vingt jeunes intégrés dans le service civique, que nous rencontrerons ainsi que leurs tuteurs. La priorité est la mixité sociale, à laquelle nous serons très vigilants ; le ministère de l'intérieur compte d'ailleurs plus de 30 % de jeunes qui n'ont pas le baccalauréat parmi ceux qu'il accueille. Nous allons définir les objectifs et suivre le développement du programme dès à présent afin d'être prêts à la rentrée, le temps de nous coordonner avec nos partenaires. Nous anticiperons l'année 2016 car le but fixé par le Président de la République est très ambitieux puisqu'il prévoit plus de 150 000 jeunes dans les 18 mois.

Une autre dimension importante de notre action concerne le monde rural ou peu urbanisé. Nous proposerons des jeunes accomplissant leur service civique aux sous-préfectures et travaillerons avec les réseaux de communes dépendant de celles-ci. Nous voulons construire des projets avec ces jeunes qui n'ont que peu de perspectives aujourd'hui : la citoyenneté, l'égalité des chances doivent leur ouvrir des perspectives.

À l'échelon national, nous souhaitons augmenter la présence des jeunes dans les administrations publiques qui n'accueillent que 20 % des jeunes, le reste relevant du tissu associatif. Au demeurant, nous tiendrons compte de la réalité des préfectures et de celle de l'emploi dans les ministères. Il n'est pas question de substitution d'emploi et les jeunes ne seront pas appelés à des activités qui ne répondraient pas à l'esprit et à la lettre des dispositions de la loi du 10 mars 2010 relative au service civique. Depuis deux mois, dans le cadre du service civique adapté, nous conduisons en Lorraine une expérimentation au sein des services d'incendie et de secours, sans, bien entendu, que les jeunes concernés se trouvent en lieu et place des professionnels. Dans les véhicules de secours, ils sont la « quatrième personne », avec une mission d'assistance et d'observation, et ont signé un contrat de sapeur-pompier volontaire. Depuis plusieurs années, le corps des sapeurs-pompiers volontaires connaît une baisse du recrutement et a besoin d'un volume suffisant de jeunes bien formés qui s'investissent au plus près des réalités du terrain. Douze ont reçu une formation et un seulement n'a pas obtenu tous les modules – il devra les repasser. Alors que, bien souvent, des départs sont constatés dans les premiers jours, nous considérons que cette expérience est réussie ; depuis le 1er avril, les intéressés sont dans les véhicules en Meurthe-et-Moselle, dans les Vosges et dans la Meuse. Cette expérience de service civique adapté va être poursuivie pendant huit mois.

Il y a beaucoup de demandes car il est plus attractif pour des jeunes d'évoluer dans le domaine opérationnel que d'effectuer des missions prévention dans des bureaux ou des accueils. Nous resterons néanmoins vigilants sur les conditions de leur réception, de leur prise en charge et de leur encadrement. La demande du ministre est, au cours des prochains mois, de voir jusqu'où l'on peut aller en matière de mobilisation des jeunes dans des activités plus opérationnelles que ce qui leur est proposé aujourd'hui. Cependant, pour des raisons évidentes de sécurité des populations et d'eux-mêmes, il est exclu de leur confier des missions de terrain relevant de la compétence de la police ou de la gendarmerie. Nous allons explorer ces interstices de l'opérationnalité, susceptibles d'appeler plus de vocations, afin d'élargir au mieux le champ du service civique.

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