Comme la présidente, je considère que l'étiquetage est fondamental pour la confiance des consommateurs et qu'à ce titre les règles doivent être précises et rigoureusement appliquées. L'exemple que vous avez rappelé du yaourt appelé « Bio » alors qu'il ne l'était pas montre bien que ce signe de qualité doit être protégé. Ce qui vaut pour le bio vaut d'ailleurs pour tous les autres signes de qualité.
S'agissant de la mixité des exploitations, je ne crois pas que l'agriculture intensive soit conciliable avec l'agriculture bio. En revanche, je pense qu'il est possible d'associer cette dernière avec une agriculture raisonnée qui, sans être bio, est engagée dans une démarche de qualité.
Pour justifier l'interdiction de la mixité, la Commission européenne nous explique qu'elle réduira considérablement les risques de contamination mais c'est un leurre puisqu'une exploitation bio est, dans l'immense majorité des cas, entourée par des exploitations pratiquant l'agriculture conventionnelle.
Je suis favorable au maintien de la mixité pour des raisons pragmatiques : l'interdire brutalement risquerait d'entraver la conversion des exploitations alors même que la consommation de produits bio augmente. Je pense au contraire qu'il faut encourager cette conversion et ne pas multiplier les contraintes sur les producteurs.
Toutefois, à terme, il est préférable que les exploitations soient 100 % bio mais ce ne sera possible qu'une fois le marché du bio devenu mature. La mixité des exploitations pourrait alors être supprimée à l'issue de la période de conversion ou d'une période plus longue à définir.
S'agissant des semences, la Commission propose de supprimer, au 31 décembre 2021, la possibilité pour les agriculteurs bio d'utiliser des semences non bio non traitées. Toutefois, pour que cette mesure ait un sens et puisse être appliquée sans entraîner une chute de la production, encore faut-il qu'à cette date, toutes les semences pour toutes les variétés soient disponibles en bio, ce qui exige un considérable effort en matière de recherche, notamment via les financements du FEADER.
Je le répète, un mécanisme de contrôle crédible est fondamental pour la confiance des consommateurs. La Commission européenne propose de supprimer l'obligation de contrôle annuel pour ne conserver qu'un système de contrôle basé sur l'analyse des risques. Plus une exploitation apparaît risquée, plus elle sera contrôlée. Inversement, plus elle a fait la preuve de son sérieux, moins elle le sera. Or, je ne crois pas que les deux systèmes de contrôle soient incompatibles et d'ailleurs, les organismes de contrôle les appliquent aujourd'hui concomitamment, doublant l'obligation de contrôle physique annuel par des contrôles inopinés. Pour vivre ces contrôles, en tant qu'exploitant bio, je considère qu'ils sécurisent le consommateur mais également le producteur qui, une fois le contrôle passé, est rassuré sur la qualité de production et peut la mettre en avant. C'est pour cette raison qu'il les réclame, alors même qu'il paie directement les organismes privés de contrôle (en France du moins, car en Europe du nord, les organismes sont publics).
Je considère important, pour la confiance du consommateur, que les produits bio importés respectent les mêmes règles que les produits européens. La proposition de règlement, en exigeant, pour ces produits, la conformité des règles de production et non plus une simple équivalence, va donc dans le bon sens. Bien sûr, il ne faudrait pas qu'en imposant les règles européennes aux produits importés, cette mesure déprime la production dans les pays tiers, qui peuvent être des pays en développement. C'est pourquoi une période de transition est prévue afin de leur permettre de s'adapter.
S'agissant du « triage à façon », il est interdit à l'agriculteur d'échanger les graines qu'il a récoltées, lorsqu'elles sont protégées par un brevet, mais pas de les utiliser lui-même sur sa propre exploitation. L'article 6 de la loi no 2014-315 du 11 mars 2014 renforçant la lutte contre la contrefaçon a même précisé que « cette utilisation ne constitue pas une contrefaçon ». Cette question concerne toutefois l'ensemble des agriculteurs et pas seulement les agriculteurs bio, et elle n'est pas traitée en tant que telle dans la proposition de règlement.
D'une manière générale, je reconnais que les règles européennes sont complexes mais elles sont nécessaires. En effet, même si, dans l'idéal, il faudrait rapprocher la production de la consommation et limiter les transports de produits bio, je rappelle que la France ne produit que 75 % des produits bio qu'elle consomme et l'Allemagne encore moins – sans que j'ai plus d'information sur une éventuelle crise de la production dans ce pays. La réalité de la circulation des produits bio dans l'Union européenne exige des règles harmonisées.
A l'issue de ce débat, la commission des Affaires européennes a adopté la proposition de résolution ci-après, puis a approuvé la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la production biologique et à l'étiquetage des produits biologiques, modifiant le règlement (UE) du Parlement européen et du Conseil [règlement sur les contrôles officiels] et abrogeant le règlement (CE) no 8342007 du Conseil (COM(2014) 180 final - E 9240).