Sur le fond, le programme de stabilité est dans la continuité de la politique que mène déjà le Gouvernement – vous le reconnaissez d'ailleurs. C'est un choix de contraction, ou à tout le moins de maintien, de la dépense publique ; or, vous savez notre préférence pour un assouplissement de cette politique, qui permettrait de relancer l'économie. Les questions qui viennent d'être posées sur la croissance sont pertinentes.
Il faut surtout nous interroger aujourd'hui, je crois, sur la croissance des inégalités : les inégalités peuvent s'accroître, et le nombre de chômeurs stagner, même si le PIB recommence à croître. Les recommandations de la Commission européenne, dont vous avez dit que vous ne souhaitiez pas les suivre, poussent fréquemment à une déréglementation, et menacent même parfois notre modèle social.
Nous ne réglerons pas les problèmes de la dette et du déficit sans modifier notre architecture fiscale. Je ne rappellerai pas ici le merveilleux rapport du président de notre commission, qui était alors rapporteur général, en 2010 : il montrait que la baisse des prélèvements sur les plus aisés avait accru considérablement le niveau de la dette entre 2000 et 2010. Nous devrions aussi nous poser la question du financement de la dette : faut-il, par exemple, aller sur les marchés financiers ou bien trouver d'autres voies ? Nous en reparlerons bientôt, puisque j'aurai l'occasion de présenter prochainement le rapport sur la proposition de résolution européenne relative à la dette souveraine des États de la zone euro, déposée par le groupe GDR.
Sur la forme, j'appuie ce qu'a dit la présidente Auroi : il existe un vrai problème de légitimité démocratique. Même les parlementaires européens ont déploré la faiblesse des liens entre le Parlement, la Commission et le Conseil sur ces questions de gouvernance économique : ces questions se posent pour l'ensemble du semestre européen, pour le programme de stabilité, pour l'encadrement budgétaire, qui repose sur un article du traité interprété de façon quelque peu baroque… Le président Carrez a raison : ces questions – programme de stabilité, mais aussi stratégie nouvelle de la Banque centrale européenne par exemple – méritaient un débat en séance et un vote.
Enfin, je poserai une question ingénue. Je lis dans votre présentation du programme de stabilité que vous souhaitez conserver l'ensemble du pacte de responsabilité, et donc des 41 milliards d'allégements de prélèvements pour les entreprises. Il en reste 15 à 16 milliards pour 2016. Mais j'ai cru lire aussi que le Premier ministre était signataire, et vous-mêmes aussi peut-être, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, d'un texte d'orientation politique qui proposerait de divertir tout ou partie de ces 15 milliards pour les consacrer au soutien à la demande. Ma question est sans perfidie : pouvez-vous nous expliquer comment s'articulent les orientations du parti majoritaire et celles de l'exécutif issu de ce parti ?