Monsieur le président, monsieur le rapporteur de la commission des affaires étrangères, madame la présidente de la commission des affaires européennes, mesdames, messieurs les députés, nous sommes réunis pour la première lecture du projet de loi autorisant la ratification de l’accord d’association entre l’Union européenne et la République de Moldavie, adopté par le Sénat le 3 mars dernier.
Cet accord, négocié entre janvier 2010 et juin 2013, a été paraphé le 29 novembre 2013, à Vilnius, lors du troisième sommet du Partenariat oriental de l’Union européenne, puis signé en marge du Conseil européen le 27 juin 2014. L’accord d’association avec la Moldavie s’inscrit donc dans le cadre de ce Partenariat oriental de l’Union européenne, lancé en juin 2009 dans le but de renforcer le volet oriental de la politique européenne de voisinage en direction de six anciennes républiques soviétiques : l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Biélorussie, la Géorgie, la Moldavie et l’Ukraine.
Comme vous le savez, des accords d’association similaires ont également été signés avec la Géorgie et l’Ukraine. Ils seront prochainement soumis à votre approbation. L’accord que nous examinons aujourd’hui ouvre un nouveau chapitre dans les relations entre l’Union européenne et la République de Moldavie. Il les inscrit dans un nouveau cadre juridique, mais surtout il fournit un puissant levier de modernisation et de réforme, au service de la Moldavie.
Ce saut qualitatif majeur se traduit, tout d’abord, dans les objectifs poursuivis par chacun des trois volets de l’accord. Le premier volet vise à approfondir le dialogue politique entre l’Union européenne et la Moldavie, notamment en matière de réformes intérieures et de politique étrangère et de sécurité. Ce dialogue sera fondé sur les valeurs et principes fondamentaux de l’Union européenne, et en premier lieu le respect et la promotion de la démocratie et des droits de l’homme, de l’État de droit, de la bonne gouvernance et du développement durable. L’objectif est bien de consolider la démocratie en Moldavie et d’encourager la paix et la stabilité, à l’échelle régionale comme internationale.
Le deuxième volet porte sur la création d’une zone de libre-échange complet et approfondi : je reviendrai sur chacun de ces termes. Cet accord va au-delà d’un simple accord de libre-échange « classique », et ce pour trois raisons.
La première, c’est que la libéralisation couvre la quasi-totalité des échanges commerciaux entre l’Union européenne et la Moldavie. L’ouverture du marché européen est une opportunité majeure pour la Moldavie : l’Union représentait, en 2013, 54 % de ses exportations et 45 % de ses importations. Le calendrier de diminution des droits de douane est asymétrique : cette baisse des droits sera plus rapide pour les exportations moldaves vers l’Union européenne que pour les exportations européennes vers la Moldavie, afin de tenir compte des différences de développement économique.
La deuxième raison, c’est que la libéralisation est assortie de la reprise progressive par la Moldavie d’une large part de l’acquis communautaire en matière de réglementations, normes et standards. C’est le coeur du dispositif : pour chaque domaine, l’accord décrit le périmètre et le calendrier de l’acquis à reprendre, véritable feuille de route pour les réformes. Sont concernées, de manière non-exhaustive, les normes en matière sanitaire et phytosanitaire, en matière de droit du travail et d’égalité entre les femmes et les hommes, de propriété intellectuelle et particulièrement de protection des indications géographiques.
En troisième lieu, le libre-échange est « complet et approfondi », ce qui signifie deux choses. D’une part, l’objectif de libre-échange prend en compte des considérations telles que les droits de l’homme et l’environnement. C’est le sens de l’adjectif « complet ». D’autre part, l’accord est tarifaire, car il vise à réduire les droits de douane, mais aussi non-tarifaire : il a pour but de lever l’ensemble des obstacles qui entravent le développement des échanges économiques entre l’Union européenne et la Moldavie. C’est le sens de l’adjectif « approfondi ».
Enfin, le troisième volet de l’accord prévoit des coopérations économiques et sectorielles dans vingt-huit domaines, destinées notamment à faciliter la reprise de l’acquis de l’Union. La ratification de l’accord d’association entre l’Union européenne et la Moldavie comporte un triple enjeu.
Le premier enjeu est d’apporter notre soutien à la démocratie, au développement économique et social et à la stabilité d’un voisin immédiat de l’Union. Je sais que vous êtes, dans cette assemblée, nombreux à partager cette préoccupation.
M. le rapporteur a pu le mesurer : pour les citoyens moldaves, l’Europe est avant tout synonyme d’État de droit, notamment de lutte contre la corruption, mais aussi de nouvelles perspectives. Les élections législatives du 30 novembre dernier n’ont pas remis en cause cette volonté de rapprochement européen.
La Moldavie bénéficie d’une assistance technique et financière européenne très substantielle : 561 millions d’euros pour la période 2007-2013, 131 millions en 2014, et plus de 600 millions pour la période 2014-2020. Dans le cadre de la politique européenne de voisinage, il s’agit du deuxième pays le plus aidé par habitant. L’objectif de ce soutien est d’accompagner la Moldavie dans ses efforts de réforme et de modernisation. Les progrès déjà réalisés sont importants et cet accord d’association doit également servir à marquer notre soutien continu et à amplifier cette dynamique pour répondre aux défis qui doivent encore être surmontés.
L’accord doit par ailleurs renforcer l’attractivité de la Moldavie vis-à-vis de la région séparatiste de Transnistrie, pour faciliter une solution au conflit qui soit politique, pacifique, négociée et respectueuse de l’intégrité territoriale de la Moldavie. Il doit affermir la souveraineté de la Moldavie face aux pressions externes dont elle fait l’objet.
Le deuxième enjeu est de souligner l’implication de la France dans la dimension orientale de la politique européenne de voisinage, en faveur de ses objectifs et de ses moyens, dans le contexte de la crise ukrainienne, et à quelques semaines du sommet du Partenariat oriental qui se tiendra à Riga les 21 et 22 mai prochains.
Enfin, troisième enjeu : consolider nos relations bilatérales avec l’un des pays les plus francophones d’Europe orientale. En tant que représentante du ministère de l’économie, je puis vous dire que les entreprises françaises, qui comptent parmi les principaux investisseurs dans le pays et emploient près de 4 000 personnes, croient au potentiel de la Moldavie. Elles profiteront de l’amélioration attendue de l’État de droit, du climat des affaires, de conditions d’investissement facilitées ainsi que des avancées permises par l’accord, par exemple en matière de protection des indications géographiques. La France y a, au cours de la négociation, accordé une attention particulière.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur de la commission des affaires étrangères, madame la présidente de la commission des affaires européennes, mesdames, messieurs les députés, les principales observations qu’appelle l’accord d’association entre l’Union européenne et la République de Moldavie qui fait l’objet du projet de loi aujourd’hui proposé à votre approbation. En apportant votre soutien et votre approbation à l’accord d’association entre l’Union européenne et la Moldavie, vous témoignerez de l’amitié profonde qui lie la France et la Moldavie, vous soutiendrez le développement de ce pays qui nous est cher et vous contribuerez à renforcer la stabilité et la paix aux frontières de l’Union européenne.