Intervention de André Chassaigne

Séance en hémicycle du 6 décembre 2012 à 9h30
Mieux protéger les indications géographiques et les noms des collectivités territoriales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Cet article précise qu'« on entend par indications géographiques des indications qui servent à identifier un produit comme étant originaire du territoire d'un État membre ou d'une région ou localité de ce territoire, dans les cas où une qualité, réputation ou autre caractéristique déterminée du produit peut être attribuée essentiellement à cette origine géographique ». Il faut insister sur la fin de cette phrase : « dans les cas où une qualité, réputation ou autre caractéristique déterminée du produit peut être attribuée essentiellement à cette origine géographique ».

Le système européen de protection des indications géographiques mis en place en 1992 est plus contraignant. Il comprend deux types d'indication géographique : les AOP, appellations d'origine protégée, dont le lien avec le territoire est très fort, et les IGP, indications géographiques protégées, dont le lien avec le territoire est plus lâche.

Je rappelle également que l'article 36 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, anciennement article 30 du traité instituant la Communauté économique européenne, autorise les États membres à mettre en place une protection nationale pour les dénominations justifiées par la protection de la propriété commerciale. Cet article contient la précision suivante : « Toutefois, ces interdictions ou restrictions ne doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée dans le commerce entre les États membres. »

L'attribution d'une dénomination repose non seulement sur le lien avec l'origine, mais également sur des critères qualitatifs qui figurent dans un cahier des charges contrôlé par un organisme indépendant. Des différents alinéas de cet article 36 découle en effet le cahier des charges, un dispositif qui permet de bien encadrer l'attribution d'une indication géographique protégée.

En ce qui me concerne, je souhaite une nouvelle fois appeler votre attention sur deux points qui apparaissent dans le règlement du Conseil du 20 mars 2006, à l'article 14. Certes, cet article vise les produits alimentaires, mais on peut le prendre en compte puisque nous nous proposons d'étendre la protection aux produits non alimentaires et tout particulièrement aux produits manufacturés.

Le premier point concerne la dénomination antérieure, c'est-à-dire la prise en compte de la préexistence de dénominations qui sont une réalité avant même l'enregistrement dans la dénomination d'indication géographiquement protégée. L'article 14 est extrêmement clair à cet égard puisqu'il dispose : « Dans le respect du droit communautaire, l'usage d'une marque […] acquise par l'usage de bonne foi sur le territoire communautaire […] avant la date de protection de l'appellation d'origine ou de l'indication géographique dans le pays d'origine […] peut se produire nonobstant l'enregistrement d'une appellation d'origine ou d'une indication géographique… » J'insiste sur la fin de la phrase : « nonobstant l'enregistrement d'une appellation d'origine ou d'une indication géographique. »

Je veux insister sur la dénomination antérieure en m'appuyant sur un exemple précis, qui n'est que superficiellement connu du grand public, mais qui l'est désormais certainement de nombreux députés. L'appellation laguiole, qui est très ancienne, se décline en de nombreuses marques. La première a été déposée à Thiers en 1868. Elle s'est développée dans la ville de Thiers, et ce bien avant que ne se stabilise un point d'accroche, depuis 1985 seulement, au village de Laguiole à la suite de l'achat d'une forge à Thiers. Il ne se fabriquait plus de couteaux depuis longtemps à Laguiole. Il existe actuellement cent soixante marques laguiole et 400 salariés du bassin coutelier de Thiers travaillent pour cette marque. Le laguiole français est fabriqué à 80 % à Thiers et il est, pour partie, vendu dans les boutiques du village du même nom. C'est dire l'inquiétude des artisans et des PME face au risque que représenterait pour eux une IGP laguiole limitée au village de Laguiole.

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