Intervention de Françoise Guégot

Séance en hémicycle du 13 mai 2015 à 15h00
Respect du principe de laïcité dans l'accueil des mineurs — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Guégot :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi que nous abordons aujourd’hui s’inscrit dans le contexte de l’affaire dite Baby Loup, qui a soulevé l’indignation de nombre de nos concitoyens et entraîné une longue procédure judiciaire de plus de quatre ans.

Sans revenir sur les détails de cette affaire, il est très clair, que, pour une très grande majorité d’entre nous, l’état du droit, s’agissant de l’application de la neutralité dans les structures de la petite enfance, est pour le moins plus qu’incertain.

Le Conseil d’État, dans un avis formulé en 2003, a rappelé les trois composantes de la laïcité, à savoir la liberté pour chacun d’avoir une pratique religieuse, le respect du pluralisme, mais non du communautarisme, et, bien sûr, la neutralité de l’État.

Dans l’application stricte du principe de laïcité, et à la suite de la multiplication des affaires liées au port du voile en milieu scolaire, la loi du 15 mars 2004 a posé un cadre juridique clair dans l’enseignement primaire et secondaire public.

Dans le domaine de la petite enfance, un vide juridique subsiste. La Cour de cassation, dans l’affaire Baby Loup, avait pourtant souligné la nécessité de préserver la liberté de pensée, de conscience et de religion à construire pour chaque enfant. Plus un enfant est jeune, plus il doit être protégé contre toute forme de prosélytisme. Il est, enfin, de la seule responsabilité et du seul choix des parents d’élever leurs enfants dans une éducation religieuse.

Réaffirmer la neutralité des services publics est ainsi plus que nécessaire dans le secteur de la petite enfance, mais, en dépit de tous ces arguments, la diversité des structures d’accueil n’est pas sans poser des problèmes, qui restent entiers. Nos débats seront sans nul doute concentrés sur cette question.

Nous avons en effet les établissements et services soumis à une obligation de neutralité dès lors qu’ils bénéficient d’une aide financière publique, les établissements qui mettent en avant un caractère religieux, les crèches familiales où les enfants sont accueillis en partie au domicile de l’assistante maternelle, mais nous avons aussi toutes les structures ou associations d’accompagnement des enfants sur le temps périscolaire.

Si je suis consciente des risques d’inconstitutionnalité liés à une frontière complexe entre l’expression des libertés individuelles et le maintien du principe de neutralité, nous ne pouvons nous satisfaire d’un texte réduit au minimum. Il est maintenant urgent d’avoir une vraie loi sur la laïcité.

Nous le savons, la loi ne règle pas tout, mais la loi sur ce sujet doit exprimer la force de notre République face à la montée croissante du communautarisme.

Je sais comme nombre d’entre vous combien ce sujet est difficile. Nous devons avoir le courage de débattre sur ce qui est acceptable dans le corpus de nos valeurs républicaines, sans démagogie ni agression contre ceux qui n’ont pas forcément les mêmes croyances que nous. La liberté d’expression nous a réunis il y a quelques mois dans une unité nationale majoritairement plébiscitée. Cependant, nos concitoyens nous attendent, aujourd’hui encore davantage qu’hier, sur notre capacité à fixer les règles. Ils mesureront notre courage politique à définir dans notre pays ce que doit être la laïcité française. Elle ne peut se satisfaire d’une forme à géométrie variable, au gré des affaires judiciaires.

Madame la secrétaire d’État, le gouvernement auquel vous appartenez a rapidement enterré le débat sur cette question dans nos universités. La proposition de notre collègue Éric Ciotti sur l’insertion de dispositions de nature à limiter le port de signes religieux dans le règlement intérieur d’une entreprise a été balayée. Pourtant, tous ces sujets concernent le quotidien des Français.

En conclusion, mes chers collègues, le groupe UMP ne s’opposera pas à cette proposition de loi, mais nous regrettons un champ trop restreint, qui semble d’ailleurs s’affaiblir de jour en jour et même d’heure en heure, et un débat réduit au minimum dans une période où nous aurions besoin de réaffirmer la laïcité comme valeur intrinsèque de notre vivre ensemble.

1 commentaire :

Le 15/05/2015 à 09:21, laïc a dit :

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l"e respect du pluralisme, mais non du communautarisme,"

Dans les cantines scolaires, le respect du communautarisme passe avant celui de la laïcité. Pourquoi dans ces conditions aller faire des lois pour le secteur privé alors que c'est l'anarchie dans le secteur public ?

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

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