Ils méprisent toutes les règles, savent que leur force, c'est leur nombre.
Lorsque deux ou trois cents caravanes arrivent sur une bretelle d'autoroute un dimanche après-midi de juillet, les pouvoirs publics doivent céder et les personnes qui prennent part à ce rassemblement peuvent s'installer où bon leur semble. Les pouvoirs publics, la gendarmerie, la police et le maire sont ridiculisés – il n'y a pas d'autre mot.
Pourquoi les pouvoirs publics sont-ils impuissants ? Parce que, comme il n'y a pas de responsable dans le groupe, ni d'organisation en amont – ces personnes ne s'étant pas annoncées –, il n'y a aucun recours possible. Et même si l'on tente un recours, celui-ci est si long à mettre en oeuvre que les gens ont tout le temps de partir avant qu'on soit intervenu. Ceux qui agissent de la sorte ont parfaitement connaissance de tout cela, et ils ne sont pas près de changer d'attitude avec les dispositions actuelles. Voilà pourquoi nous avons déposé cette proposition de loi.
Son premier objectif, Didier Quentin l'a déjà exposé : tous les rapports convergent pour dire que l'État doit avoir la responsabilité des grands passages. Il y a en effet un problème de disponibilité foncière, que j'ai déjà évoqué, mais sur lequel je veux insister ; l'État doit définir les aires dédiées à la fonction de grand passage et en assumer la gestion.
Le sénateur Hérisson a clairement montré, dans l'un de ses rapports, que la superficie nécessaire aux grands passages impose que les aires d'accueil soient situées à l'écart des centres urbains. Toutes les communes de plus de 5 000 habitants ne disposent pas d'une surface de terrain suffisante, située à proximité de la voirie, reliée au réseau, capable de supporter la circulation de véhicules relativement lourds, et non dévolue à des activités agricoles. D'autres secteurs du territoire sont davantage susceptibles de disposer de telles surfaces.
L'État, en outre, doit s'entendre avec les responsables de l'organisation de ces déplacements : c'est déjà très largement le cas, car les préfets, je l'ai dit, jouent déjà un rôle important en la matière. Par ailleurs, les responsables de ces groupes ont bien entendu l'obligation de respecter les calendriers auxquels ils se sont eux-mêmes astreints.
Le deuxième objectif de cette proposition de loi est de renforcer les moyens d'action de la puissance publique. Nous voulons, au travers de ce texte, rectifier une erreur de plume survenue dans la rédaction de la loi DALO du 5 mars 2007 – ce qui ne créera aucun problème constitutionnel. Notre proposition de loi vise à rétablir le principe selon lequel l'atteinte à la sécurité, la tranquillité et la salubrité publiques n'est pas une condition nécessaire pour obtenir l'évacuation forcée d'un terrain public situé dans une commune répondant aux obligations d'équipement en aire d'accueil.
En d'autres termes, lorsque quelques personnes se réclamant de la communauté des gens du voyage arrivent dans une commune qui possède une aire d'accueil et s'installent en dehors de celle-ci, les règles de police administrative doivent s'appliquer. C'était déjà prévu par la loi du 5 juillet 2000 et il convient donc de corriger l'erreur de plume contenue dans la loi du 5 mars 2007.
Le dernier objectif de ce texte, enfin, est de tirer les conclusions du fait que la loi Besson est en retard sur la réalité sociale d'aujourd'hui. En effet, la tendance, chez la plupart des familles appartenant à la communauté des gens du voyage est à la semi-sédentarisation, voire à la sédentarisation. Je crois en effet qu'au fil du temps, ces familles ont compris que la scolarisation de leurs enfants était un fait extrêmement important, et que, par conséquent, la semi-sédentarisation ou la sédentarisation allait dans le sens du progrès de leur condition sociale.
Nous estimons donc que le fait de construire des aires d'accueil pour des gens qui sont de moins en moins nomades et qui cherchent de plus en plus à se sédentariser, n'est pas une réponse tout à fait adaptée au problème posé. Il faut répondre à cette demande de sédentarisation et, dans l'esprit de la loi DALO, il nous semble qu'il est de la responsabilité de l'État, par l'intermédiaire du préfet, de proposer un relogement aux populations qui sont en voie de sédentarisation.
En conclusion, madame la ministre, c'est l'expérience et la lucidité qui nous amènent à faire cette proposition de loi, et en aucun cas une volonté d'ostraciser une communauté que nous respectons. Nous voulons seulement clarifier les rôles de chacun, répartir les responsabilités entre l'État et les communes ou l'intercommunalité, en fonction des moyens, et en particulier des moyens physiques, de chacun.
Cette proposition de loi, nous la faisons avec une certitude,…