Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la problématique de l'accueil et de l'habitat des gens du voyage fait partie des enjeux auxquels les élus locaux sont confrontés chaque jour, lorsqu'il s'agit d'assurer une cohabitation harmonieuse entre les différents modes de vie de populations diverses.
Au moment d'aborder ce sujet, notre action de législateur doit être guidée par deux exigences principales. En premier lieu, nous devons appréhender les évolutions de notre société, afin d'adapter au mieux la législation aux réalités de notre temps. Il s'agit, non pas de nous en tenir à des préceptes théoriques, éloignés des véritables problèmes et préoccupations de nos concitoyens, mais bien d'analyser avec pragmatisme la réalité des situations rencontrées sur le terrain. La plupart d'entre nous connaissent cette réalité, pour exercer ou avoir exercé des mandats locaux.
Phénomène récent, apparu il y a vingtaine d'années environ, le développement des grands passages est la conséquence inévitable d'une évolution du mode de vie des gens du voyage, de l'itinérance vers la sédentarité. Cette semi-sédentarité, que la Cour des comptes qualifie, dans son rapport, d'« ancrage territorial » se traduit, pour une part croissante des gens du voyage, par des déplacements occasionnels, que l'on appelle donc « grands passages », lors de rassemblements traditionnels, ou supposés cultuels, organisés le plus souvent pendant la saison estivale.
Face à ce mouvement de semi-sédentarisation, et ainsi que l'avait observé la mission d'information chargée d'évaluer le dispositif relatif à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, la logique sous-tendant la loi du 5 juillet 2000 apparaît « moins pertinente, dans la mesure où elle vise à développer les aires permanentes d'accueil, afin de répondre aux besoins de familles voyageant tout au long de l'année ». Confondant encore largement aires d'accueil et aires de grand passage, la loi n'a d'ailleurs pris en compte la problématique des grands passages que de façon partielle et progressive. Or, nous sommes tous d'accord pour reconnaître que l'accueil de quelques véhicules et caravanes n'est en rien comparable à l'afflux de plusieurs dizaines ou même centaines de véhicules qui se produit lors de grands rassemblements.
Aujourd'hui, les collectivités territoriales chargées de répondre aux besoins de déplacement des gens du voyage dans le cas de grands passages, sont confrontées à un cadre juridique à la fois complexe et difficile à mettre en oeuvre. Il est évident que, pour les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale désignés par les schémas départementaux, la prise en charge de ces événements représente un coût excessif, souvent disproportionné par rapport à leurs moyens financiers et humains.
Le nombre d'aires de grand passage prévu par département étant plus limité que celui des aires d'accueil, la charge d'investissement que représente la création d'une aire adaptée, les contraintes liées à l'afflux des personnes et des véhicules, sont souvent perçues comme une injustice, lorsque des communes de même taille ne sont pas soumises à une telle obligation, dans un même département. Concrètement, cela se traduit par une faible proportion des aires de grand passage réalisées, comparativement aux aires d'accueil ; les chiffres, rappelés tout à l'heure par notre collègue Lamblin, le montraient parfaitement.
Au-delà de l'existence ou non de ces aires spécifiques, toute commune peut se trouver confrontée aux grands passages lorsque des groupes importants stationnent sur son territoire. Là encore, l'installation des gens du voyage, en particulier lorsqu'elle n'a pas fait l'objet d'une réelle préparation en amont, peut être objectivement source de difficultés.
Ainsi, parce que la question des terrains de grand passage pose d'abord et avant tout un problème d'ordre public, le groupe UDI accueille favorablement la proposition des auteurs de ce texte qui vise à mettre un terme à l'ambiguïté des dispositions législatives en matière de grands passages.
Nous partageons cette volonté d'établir une stricte distinction entre l'accueil temporaire, qui doit rester de la responsabilité des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale, et la gestion des grands passages, qui ne peut être assurée que par l'État,…