Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je ne surprendrai pas ma collègue Pochon en lui répondant que je ne partage pas tout à fait son analyse, ni les termes qu'elle a employés.
En référence aux propos de la ministre tout à l'heure, je ne comprends pas que l'on puisse avoir une attitude de stigmatisation lorsqu'il s'agit de mieux faire respecter l'ordre public, dans quelque domaine que ce soit.
Je ne comprends pas cette antinomie, et connaissant les auteurs de cette proposition de loi, l'ayant moi-même cosignée et étant confronté comme beaucoup d'entre vous aux frictions que font naître les relations parfois difficiles entre les gens du voyage et les riverains, je crois au contraire que cette proposition de loi est équilibrée et qu'elle apporterait une solution à des situations difficiles pour tous au quotidien. Je soutiens donc bien sûr cette proposition de loi présentée par notre collègue Didier Quentin.
Je voudrais attirer l'attention de la ministre, ainsi que du président de la commission des lois et de notre collègue Raimbourg, qui préparent visiblement des réflexions à plus long terme, sur certains sujets que j'avais essayé de porter durant la législature précédente, signe que l'on peut parfois faire preuve de constance et ne pas être entendu par les siens, c'est parfois le lot des députés de la majorité.
Se pose tout d'abord le problème des donations de terrains aux personnes faisant partie des gens du voyage qui s'y installent d'une manière parfois non conforme aux règles d'urbanisme en vigueur, et qui finissent par s'implanter dans un lieu où il est interdit de construire, ou de faire quelques travaux que ce soit, je pense aux espaces naturels ou aux espaces agricoles. C'est un problème que l'on connaît très bien dans les zones rurales comme la mienne.
Cette situation soulève deux questions.
Tout d'abord, lorsque ce genre de transaction a lieu, elle passe par une donation devant notaire. La donation échappe évidemment à l'attention du maire, qui n'est informé des déclarations d'intention d'aliéner qu'en cas de cession à titre onéreux. Lorsqu'il s'agit d'une donation, il ne peut donc diligenter une enquête ni se renseigner pour connaître le projet des donataires concernant ces terrains.
De plus, si le maire n'a pas de droit de préemption dans le cas d'une donation, la SAFER, organisme public chargé d'organiser les préemptions des terres agricoles dans nos départements, n'en a pas davantage. Dans l'hypothèse où la donation d'un tel espace agricole ou naturel pourrait représenter un intérêt pour elle, elle ne peut pas davantage, n'étant pas informée de la transmission, maintenir l'intégrité dudit espace.
Nous sommes donc confrontés à des situations ubuesques, dans lesquelles des donations se passent dans des termes que le code général des impôts ne prévoit pas, au point que l'ordre des notaires diligente parfois des enquêtes disciplinaires pour s'assurer de la bonne conformité des donations et vérifier qu'aucune somme n'a échappé à la vigilance des services fiscaux.
Ces situations aboutissent à ce que des terrains sont donnés – pour ainsi dire – à des personnes qui veulent se sédentariser. Personne ne peut aller à l'encontre de cette volonté, mais les conditions de construction des bâtiments sont illicites, et concernent des terres qui ne permettent pas de s'y implanter, d'y construire ou d'y habiter.
Il y a deux manières de régler cette question, et un certain nombre de maires de communes rurales confrontés à ce problème attendent impatiemment des solutions. La première solution serait que les maires soient informés des intentions d'aliéner sous forme de donation, c'est-à-dire à titre gracieux, comme ils le sont pour les cessions à titre onéreux. Cela leur permettrait de diligenter les enquêtes qu'ils souhaitent sur ces donations.
La seconde solution serait de donner cette même compétence aux SAFER, qui détiennent un droit de préemption sur les cessions de terres agricoles. Ainsi, ces organismes censés préserver l'espace agricole dans nos départements seraient destinataires des mêmes informations, et la puissance publique pourrait examiner cela de très près afin d'éviter toute forme de construction illégale, qui placerait les gens dans des situations difficiles.
Le problème posé par ces installations ne relève pas de la sédentarisation des gens du voyage. Le problème est l'incapacité, pour les maires, de justifier une application stricte du droit des sols sur les autres parcelles de leur propre commune après avoir constaté l'installation d'un certain nombre de personnes dans des conditions illégales sur lesquelles il est impossible de revenir.
Pour éviter ces difficultés, je suis parfaitement d'accord pour déployer les mécanismes de sédentarisation développés par certains de nos collègues, et la ministre de la réussite scolaire que vous êtes devrait se féliciter de voir les enfants retourner à l'école. Mais cela ne doit pas se faire dans des conditions qui remettent en cause le pouvoir du maire sur le droit des sols, et donc son pouvoir de police.
Je remercie le Gouvernement et la commission des lois de veiller à ce que ces deux sujets soient traités dans le texte qui ne devrait pas manquer de nous être soumis prochainement. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP.)