Visiblement, les 2 % d’emplois détruits au cours du trimestre dernier dans ces entreprises et la baisse des recettes dans près de la moitié d’entre elles ne vous suffisent pas.
Savez-vous que 86 % des patrons de TPE estiment que vous ne prenez pas en compte leurs préoccupations ? Leurs inquiétudes ne pourront que s’accroître avec la mise en place, le 1er janvier 2017, du compte personnel d’activité, au sein duquel est incorporé le compte personnel de pénibilité. La moitié des TPE ne sont pas capables de le mettre en place ! Et pour cause : l’identification des facteurs de pénibilité est compliquée à réaliser et l’individualisation de la mesure alourdit considérablement les charges administratives des entreprises qui n’ont pas les ressources suffisantes pour l’encadrer. Une telle mesure favorisera le recours aux travailleurs détachés, pour lesquels le dispositif ne s’applique pas, et affaiblira le système de protection sociale en redirigeant les cotisations patronales vers les comptes individuels.
La valorisation du personnel syndiqué détonne au regard de la précarisation grandissante de ceux qu’il est censé défendre et auxquels vous ne proposez rien, en dépit du terme « emploi » contenu dans le titre du projet de loi. Car ce n’est pas l’extension du contrat « nouvelle chance » aux chômeurs de longue durée ni la prime pour l’emploi qui enrayeront la hausse du chômage. Ces deux mesures sont en décalage avec la capacité actuelle des entreprises à recruter pour une durée de deux ans de formation.
La prime d’activité n’est qu’une addition de deux échecs, le RSA activité et la prime pour l’emploi, qui banalisent à long terme le niveau des bas salaires – mesurette que vous étendez aux jeunes de dix-huit à vingt-cinq ans, alors que le nombre de travailleurs pauvres ne cesse de croître, jusqu’à atteindre le chiffre record de 8,6 millions !
Les Français ne vous demandent par de créer des emplois, ils vous demandent de mettre en place un contexte économique et législatif favorable pour qu’ils puissent, eux, en créer.
La fiscalité et la complexité d’un droit du travail pléthorique sont les deux leviers que vous refusez de prendre à bras le corps. En effet, le taux d’imposition demeure à 32 % pour les PME et le gadget CICE n’est qu’un étendard sans efficacité réelle.
Pendant ce temps, la rupture d’égalité perdure avec les grands groupes, imposés à hauteur de 22 %. Face à ce fatras fiscal, qui propose plus de 6 000 dispositifs d’aide, seules les grandes entreprises peuvent recruter des chasseurs de primes afin de repérer les portes auxquelles il faut aller frapper. La suppression de la C3S, la contribution sociale de solidarité des sociétés, par ce gouvernement, et la « catastrophe industrielle », selon les termes de la Cour des comptes, du régime social des indépendants, le RSI, sont des handicaps supplémentaires pour les entrepreneurs, pourtant premiers employeurs de France.
Les salariés et les chefs d’entreprise ne peuvent se satisfaire de contrats gadgets, parfois subventionnés par l’argent public comme les contrats d’avenir, censés vous donner bonne conscience.
Face aux drames humains et à la désespérance qui en découle, oser écrire que ce projet de loi « s’inscrit dans la lignée des grandes lois sociales de notre pays » illustre bien le fossé grandissant entre les solutions de cette gauche marketing et les attentes du monde du travail.