Mes collègues cosignataires de ces amendements et moi-même souhaitons aborder une question difficile : la conciliation du droit de grève avec l’information due aux voyageurs, dans le domaine des transports terrestre et aérien, en cas de conflit social. Comme vous le savez, monsieur le ministre, lors du précédent quinquennat, deux lois ont été adoptées à ce sujet : l’une au début, en 2007, l’autre à la fin, en 2012 ; à l’époque, nous avions estimé qu’elles remettaient en question l’exercice du droit de grève en imposant d’en informer, même si c’est légitime, les voyageurs.
Nos amendements ne visent pas à remettre en question l’information due aux voyageurs à l’occasion des mouvements sociaux. Ils tendent à abroger certains articles du code des transports dont l’objectif est clair, les faits l’ont d’ailleurs depuis démontré : remettre en question ou entraver l’exercice du droit de grève.
Mon premier amendement concerne les dispositions issues de la loi du 19 mars 2012, dite loi Diard, relative à l’organisation du service et à l’information des passagers dans les entreprises du transport aérien. La situation actuelle est la suivante : les organisations syndicales dénoncent les effets pervers de la loi Diard, qui permet aux compagnies aériennes de remplacer les grévistes, neutralisant ainsi l’effet de la grève puisque le trafic n’est pas perturbé. Il y a donc, à l’évidence, entrave au droit de grève.
Je voudrais donner un exemple concret et récent à l’Assemblée nationale. Par décision préfectorale, le préfet délégué pour l’aéroport de Roissy a autorisé l’accès de certains personnels à la partie critique de la zone de sûreté à accès réglementé de l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle en cas de grève. J’ai ici la liste des personnels étrangers autorisés à accéder à cette partie critique. Ces personnels étrangers qui peuvent être appelés par les entreprises concernées, d’où viennent-ils ? De Turquie, d’Allemagne, de Bulgarie, de Hongrie, de Macédoine… Les compagnies peuvent donc aller les chercher pour les substituer aux grévistes. C’est une pratique inacceptable, qui s’est répandue. Cela explique que les organisations syndicales, toutes tendances confondues, demandent l’abrogation de ces dispositions.
D’ailleurs, au cours du débat parlementaire qui a eu lieu sur cette question à la fin de la précédente législature, tous les députés siégeant sur les bancs du groupe socialiste considéraient que la majorité de l’époque voulait réglementer le droit de grève « en prenant les usagers en otage, en les embarquant dans [une] galère électorale et poujadiste », pour citer les propos d’un député de l’époque. En 2007, lors des explications de vote sur la première loi que j’ai mentionnée, qui concernait les transports terrestres, notre collègue François Brottes, aujourd’hui président de la commission des affaires économiques, disait que cette loi porterait atteinte au droit de grève.