Intervention de François Rebsamen

Séance en hémicycle du 28 mai 2015 à 21h30
Dialogue social et emploi — Après l'article 19

François Rebsamen, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social :

Cette tendance à la hausse va incontestablement se poursuivre en 2015, et sûrement dans les années à venir, en raison d’une meilleure connaissance de ce dispositif par les assurés et les médecins.

Certes, des critères de gravité sont attachés à cette reconnaissance spécifique par les comités, mais ceux-ci sont indispensables pour éviter que toutes les pathologies, quelles qu’elles soient, même mineures, puissent faire l’objet d’un examen qui allonge les délais de reconnaissance de l’ensemble des pathologies professionnelles.

J’ajoute, puisqu’il en a été question, que prévoir un taux différencié pour des maladies psychiques n’est pas la bonne solution. Cela engendrerait des problèmes d’équité – cela a été dit par Mme Bechtel – entre les salariés atteints d’une pathologie psychique et ceux atteints d’une pathologie physique. Inutile de rappeler les taux : 20 % pour une main coupée et 15 ou 10 % pour d’autres cas. Je ne parle pas d’autres maladies professionnelles comme l’arthrose ou les lombalgies.

La création d’un tableau de maladies professionnelles est donc également une piste à écarter aujourd’hui, car elle n’est pas adaptée aux maladies psychiques. Elle crée en effet, que vous le vouliez ou non, un lien automatique entre l’accomplissement de certaines tâches et la survenue de la maladie, ce qui n’est pas adapté au syndrome d’épuisement professionnel, car celui-ci repose essentiellement sur les conditions dans lesquelles le travail a été accompli – c’est du reste bien là la difficulté majeure pour caractériser le burn-out.

On cite souvent – je tiens à le redire ici, car tout cela figurera au compte rendu – l’exemple de la Suède, dont on fait un modèle en matière de reconnaissance du burn-out. En fait – et je remercie la direction générale du travail des éléments concrets qui m’ont été communiqués –, ce système est moins favorable que le système de reconnaissance actuellement en vigueur en France. En effet, la reconnaissance n’y est possible que si l’état de la victime est stabilisé, ce qui peut prendre plusieurs années pour des pathologies psychiques – dans ce domaine, je sais aussi de quoi je parle.

De plus, le taux de reconnaissance des maladies professionnelles n’est que de 15 % en Suède, contre près de 50 % en France. Par ailleurs, d’après les données européennes, le nombre de reconnaissances en Suède est en constante diminution depuis 2007, alors qu’il est en constante augmentation en France, grâce aux mesures qui ont été prises.

L’amendement que je présente préserve de ces écueils et facilite la reconnaissance d’affections psychiques par voie complémentaire, comme cela a été évoqué, qui demeure la plus adaptée et passe par une consécration au niveau législatif. C’est, d’une certaine manière, ce que nous faisons.

D’autres mesures, qui ne relèvent pas de la loi, vont dans le même sens. Je pense notamment à la composition des comités appelés à se prononcer sur la reconnaissance du burn-out : elle intégrera, si besoin, des médecins psychiatres lorsque sont examinés des cas potentiels de burn-out. Dans le domaine de la psychiatrie, ces questions sont très complexes – ce n’est pas à vous que je vais l’apprendre.

La priorité du Gouvernement reste cependant aujourd’hui le renforcement de la prévention, ce qui ne dispense pas pour autant de tout ce que je viens d’évoquer. Les partenaires sociaux, je l’ai rappelé tout à l’heure, l’ont reconnu.

Des instructions ont été données pour assouplir encore les conditions de reconnaissance – cela fera plaisir à M. Hamon et, je n’en doute pas, à toute l’Assemblée – de telle sorte que le seuil de 25 % ne soit plus un handicap insurmontable. Les partenaires sociaux ont, du reste, émis également des recommandations pour que les commissions puissent plus facilement – car c’est ainsi que l’on avance – reconnaître l’origine professionnelle des pathologies psychiques, en prenant en compte plusieurs éléments car, nous l’avons dit nous-mêmes, ce phénomène est multifactoriel, lié à la charge de travail, à l’attitude, à la relation à la hiérarchie – cela peut exister –, au soutien ou à l’absence de soutien des collègues, et à des formes de violence psychique.

Pour toutes ces raisons et en écoutant tout ce qui a été dit, je ne souhaite pas, même si j’en comprends l’intérêt, que soit donnée une suite favorable à l’amendement de M. Sebaoun, mais j’invite l’Assemblée à voter celui de M. Hamon, identique à celui du Gouvernement.

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