La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles, s’arrêtant à l’amendement no 676 rectifié après l’article 19.
Je suis saisi de trois amendements, nos 676 rectifié , 660 et 701 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 660 et 701 sont identiques.
La parole est à M. Gérard Sebaoun, pour soutenir l’amendement no 676 rectifié .
Monsieur le président, monsieur le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, cet amendement tend à préciser une chose essentielle, notamment lorsque l’on parle du burn-out : le rôle absolument fondamental des conditions de travail. Elles sont susceptibles d’altérer et la santé physique et la santé mentale des gens qui, malheureusement, connaissent ces difficultés.
Je rappelle dans l’exposé sommaire de mon amendement l’état des lieux, et les drames nationaux que nous avons vécus dans de grandes entreprises. Mais au-delà, il ne faudrait pas confondre la notion de travail avec celle de souffrance. Le travail est tout de même constitutif de la construction des individus, et il participe à la qualité de l’économie de nos entreprises, comme nous en parlions cet après-midi.
Néanmoins, lorsque les conditions de travail ne permettent plus aux salariés d’exercer sereinement leur activité, du fait de certaines méthodes managériales, de surcharge, de perte de repères ou de reconnaissance, comme nous les connaissons, cette souffrance peut provoquer des drames.
L’idée à l’origine de cet amendement est d’introduire dans le processus d’élaboration des maladies à caractère professionnel la notion de conditions de travail délétères au point d’altérer la santé physique ou mentale d’un travailleur, et en particulier le fléau de l’épuisement professionnel, plus connu sous le nom de burn-out.
Aujourd’hui, nous faisons face à une vraie difficulté. Il existe des tableaux des maladies professionnelles bien identifiées, mais les conditions supplémentaires de reconnaissance des maladies professionnelles hors tableaux – c’est le cas de l’épuisement professionnel – sont extrêmement strictes, puisqu’une incapacité permanente de 25 % est requise. Autant dire que cette reconnaissance est très difficile.
À la lecture des préconisations que donne la CNAM pour fournir un mode d’emploi permettant la reconnaissance de la maladie professionnelle, on constate très rapidement, dans ce cas particulier, que les conditions de travail en sont un élément constitutif. C’est ce que je veux introduire dans la loi par cet amendement.
La parole est à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, pour donner l’avis du Gouvernement sur cet amendement no 676 rectifié et pour soutenir l’amendement no 660 .
Nous allons donc avoir une discussion commune sur ces trois amendements : celui de M. Sebaoun, celui de Benoît Hamon et celui du Gouvernement. Il me faut quelques instants pour présenter tout cela tranquillement, parce que ce n’est pas un petit sujet. Et ce n’est faire insulte à aucun parlementaire – je me tourne vers Mme Bechtel, qui écrit depuis longtemps sur ce sujet – de dire que nous n’allons pas régler entre nous ce soir un problème aussi complexe, profond, et sur lequel des chercheurs, des médecins, des professionnels et des experts réfléchissent depuis très longtemps, d’autant qu’il touche à la vie des gens, à leur intimité.
Permettez-moi de prendre quelques instants pour vous faire part de certaines considérations permettant d’éclairer le débat. Les partenaires sociaux travaillent aussi sur ce sujet de leur côté – j’y reviendrai – puisque nous préparons le plan santé au travail no 3, qui devrait aboutir d’ici la fin du mois de juin, et des groupes de travail ont été mis en place.
Les maladies psychiques liées au travail, et en particulier le syndrome d’épuisement professionnel, dit burn-out, sont une réalité, personne ne peut le nier. On ne peut nier non plus des choses aussi importantes que les rythmes de travail, les exigences qui pèsent sur les salariés, et l’épuisement professionnel, qui est le nom médical de ce que l’on appelle le burn-out.
C’est un sujet de santé incontestable et incontournable, il suffit de voir les sondages qui sortent. Il est donc essentiel que ces pathologies soient mieux appréhendées et mieux reconnues – je pense que c’est le sens de vos différentes interventions – et que l’on fasse mieux le lien entre leur manifestation et les conditions de travail des salariés.
C’est d’autant plus important qu’il s’agit de pathologies complexes, qui ne rentrent pas dans l’approche classique des maladies professionnelles. Par exemple, il est important d’avoir en tête que le syndrome d’épuisement professionnel – le burn-out – n’est pas officiellement classifié comme une maladie par les experts. Vous le savez, mais il vaut mieux dire les choses. C’est un ensemble de symptômes auquel on a donné le nom de syndrome d’épuisement professionnel. Je vous conseille la lecture, non pas du « Burn-out pour les nuls », mais d’un « Que sais-je ? » qui vient de paraître sur le sujet, et qui est très intéressant.
Plusieurs amendements ont été déposés, ce sont des initiatives qui ont été prises en amont…
Sourires.
Ça m’a échappé ! Je voulais saluer Mme Bechtel, qui a écrit une tribune il y a un moment, ainsi que Benoît Hamon et d’autres.
Comment mieux reconnaître le burn-out et les pathologies qui peuvent y être associées ? C’est une bonne question, et ces amendements sont le résultat d’une bonne initiative, qui montre que le débat public avance sur un sujet derrière lequel il y a de vraies souffrances individuelles. Avant d’être professionnelles, ces souffrances sont individuelles. Il est essentiel d’en débattre et d’étudier les pistes possibles, il y a une vraie attente sur ce sujet.
Je vais donc vous donner le fond de ma pensée personnelle, après la lecture de quelques ouvrages sur ce sujet. Il y a une idée séduisante, mais sur laquelle je suis réservé. Oui, je suis réservé. On pourra me sortir tous les sondages que l’on veut, je suis réservé sur l’idée qu’il suffirait de reconnaître ce syndrome en l’inscrivant comme maladie professionnelle, alors que lorsque l’on se penche sur les avis des personnalités les plus qualifiées, beaucoup de réserves ont été faites.
Pour moi, la meilleure solution, c’est de permettre une forme de reconnaissance – ou la pleine reconnaissance, nous verrons – du burn-out par des comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles. Le Gouvernement a déposé un amendement à ce projet de loi qui inscrit clairement dans le texte la reconnaissance de ces pathologies par cette voie. C’est une voie complémentaire qui prévoit des modalités de traitement des dossiers adaptées à leurs spécificités. La composition de ces comités, qui seront appelés à se prononcer sur la reconnaissance du burn-out, sera revue autant que faire se peut pour intégrer, autant que de besoin, des médecins psychiatres – ils existent, ils sont reconnus, ils ont une qualification – quand sont examinés des cas potentiels de burn-out.
Après en avoir discuté au sein du groupe de travail spécifique sur ce sujet qui a été mis en place dans le cadre du Conseil d’orientation sur les conditions de travail – puisque les partenaires sociaux y réfléchissent –, il me semble que la priorité absolue est et demeure la prévention. J’ai lancé l’élaboration d’un grand plan de santé au travail dont la présentation définitive sera faite au mois de juin – nous en avons parlé avec Michel Issindou par ailleurs –, dans un fort consensus avec les partenaires sociaux, qui se sont investis sur ses orientations. Je voudrais à cette occasion saluer leur implication, les orientations et le travail qui a été fait, et souligner l’importance de leur contribution.
J’ai installé par ailleurs un groupe de travail spécifique sur ce sujet au mois de février.
Ce groupe de travail vient de présenter un guide d’une grande qualité. La démarche, innovante, qui a été retenue et saluée par les partenaires sociaux, n’est plus uniquement réparatrice, elle est aussi préventive. Jusqu’à présent, les plans de santé au travail n’avaient qu’une vocation réparatrice. Nous allons désormais considérer le burn-out sous l’aspect de la prévention, sans naturellement abandonner la réparation.
Ce document est un outil de prévention à destination des acteurs de l’entreprise. Les partenaires sociaux, qui ont salué ce travail dans l’avis qu’ils viennent de me rendre, insistent sur le rôle central de la prévention. Ils ont élaboré un guide de prévention et c’est en partant de ce document que nous allons intervenir. Plutôt que d’inscrire une définition qui pourrait satisfaire tout le monde a priori mais aurait peu de réalité, par delà l’aspect médiatique qu’elle pourrait avoir, nous devons réfléchir à la façon dont nous pourrions traiter le burn-out de manière préventive.
Tel est le sens de l’amendement que je vous présente au nom du Gouvernement. Pardonnez-moi, monsieur le président, si j’ai été un peu long.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je dirai quelques mots sur le burn-out.
Le burn-out existe et il concerne des milliers de nos compatriotes salariés, sans distinction entre les salariés du public et ceux du privé, ni entre les fonctions qu’ils occupent. Il frappe aussi bien les travailleurs indépendants que les salariés des grandes entreprises. Tout le monde peut être exposé au burn-out.
M. le ministre vient de dire que notre priorité doit être la prévention et il a raison. Je salue à mon tour le travail qui a été réalisé par le Conseil d’orientation sur les conditions de travail, en lien avec la direction générale du travail, pour établir un guide. Ce guide est bienvenu, mais que pèsera-t-il face à l’évolution de l’organisation du travail ? Celle-ci est liée à plusieurs facteurs. Aujourd’hui les salariés sont soumis à des exigences de rentabilité à court terme de plus en plus fortes et ils sont intégrés à la performance globale de l’entreprise, ce qui fait peser sur eux des pressions très fortes. En outre, l’irruption des nouvelles technologies conduit à ce que les salariés ne se déconnectent plus de leur travail : même après avoir quitté l’entreprise, ils sont encore au travail. De telles pressions pèsent lourdement sur leur santé.
Ce guide sera sans doute utile à bon nombre de chefs d’entreprise, mais il leur faudra résister aux exigences de leurs actionnaires lorsqu’ils demanderont des modifications de l’organisation du travail qui pèsent lourdement sur les salariés.
C’est la raison pour laquelle nous avons souhaité ouvrir ce débat et je salue le travail précurseur qu’a réalisé notre collègue Marie-Françoise Bechtel sur la question du burn-out. Elle s’y intéresse et sensibilise les parlementaires depuis longtemps. Elle a raison puisqu’il s’agit d’un mal moderne du travail auquel des centaines de milliers de nos compatriotes se sentent exposés.
Deux voies existent : la première consiste à inscrire le burn-out au tableau des maladies professionnelles. Ce serait incontestablement la meilleure solution, mais il n’y a pas, aujourd’hui, de consensus entre les organisations syndicales et patronales sur le syndrome d’épuisement professionnel. On peut comprendre la position des organisations patronales, qui ne sont pas très pressées d’avancer sur ce sujet, pas plus qu’elles ne l’ont été pour établir les critères et les facteurs de la pénibilité. Mais l’absence de consensus nous empêche de procéder à l’inscription du burn-out au tableau des maladies professionnelles, ce qui relève de l’initiative des partenaires sociaux. Nous saurons dans une minute si le Gouvernement entend reprendre la main à un moment ou à un autre.
La deuxième voie, évoquée par le ministre, est la suivante : dès lors qu’une maladie n’est pas inscrite au tableau des maladies professionnelles, on peut laisser chaque personne victime d’un burn-out le soin de solliciter sa reconnaissance en tant que maladie professionnelle. Or, aujourd’hui, c’est un véritable parcours du combattant. Pourquoi ? Parce qu’il existe un seuil de 25 % d’incapacité permanente, que quasiment aucune affection psychique liée au travail ne peut atteindre.
Le résultat est qu’en France nous devons avoir 200 cas de burn-out reconnus comme maladie professionnelle, contre 11 000 en Belgique.
Je pense qu’il faut que nous avancions dans les deux voies. La proposition d’amendement du Gouvernement, à mes yeux, va dans ce sens. Elle ouvre le débat qui devrait nous permettre d’inscrire le burn-out au tableau des maladies professionnelles ou bien d’abaisser le seuil, voire le supprimer comme c’est le cas en Suède, afin que tous les cas soient éligibles, donc examinés. Ce serait un grand progrès. On demande aux entreprises de s’adapter à la mondialisation et elles le font. Il faut aussi adapter la protection des salariés.
La parole est à M Christophe Sirugue, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission sur ces trois amendements.
Je ne reviens pas sur les éléments définissant le burn-out, qui ont été très bien exposés par les trois intervenants. Je rejoins tout à fait notre collègue Benoît Hamon sur le fait que le burn-out existe et qu’il touche probablement un nombre extrêmement important de nos concitoyens.
Mais justement parce que les définitions sont difficiles, les formulations doivent être regardées avec prudence.
Je commencerai par l’amendement présenté par Gérard Sebaoun pour dire à notre collègue que si, à ce jour, le burn-out n’est pas reconnu comme une pathologie professionnelle au sens des classifications médicales, cela s’explique pour plusieurs raisons objectives.
Première raison, le phénomène du burn-out est difficile à qualifier cliniquement ; deuxième raison, il n’est pas toujours aisé de déterminer dans quelle mesure l’épuisement trouve sa source dans le milieu professionnel, ce qui est l’une des principales difficultés.
Vous avez fait référence, les uns et les autres, aux récents travaux de la commission des pathologies professionnelles du Conseil d’orientation sur les conditions de travail, qui nous permettent d’avancer dans la définition de cette pathologie et de proposer des mesures pour une meilleure prise en charge des patients qui en sont affectés.
De ce point de vue, la rédaction des amendements doit être regardée attentivement, et je me dois de dire à notre collègue Sebaoun que je préfère la rédaction des amendements identiques de notre collègue Benoît Hamon et du Gouvernement, car elle me paraît moins sujette à discussion. Nous avons eu tout à l’heure cet échange et je sais que vous allez nous répondre sur ce point, mon cher collègue. En attendant, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement et j’émets un avis favorable aux deux amendements identiques.
Je remercie le ministre pour sa franchise. Je suis très sensible au fait qu’il soit entré dans ce dossier difficile et qu’il ait essayé de nous dire franchement ce qu’il en pensait.
Nous devons en effet avancer dans le sens de la prévention. J’ai lu le document : il est en effet de qualité. La question est de savoir si les entreprises le feront leur. On ne peut pas toujours faire du normatif, il faut aussi faire de la pédagogie, ce qui n’est pas toujours facile dans notre pays. Mais en tout état de cause, prévenir vaut mieux que guérir.
En revanche, s’agissant de ce que l’on appelle la réparation, je fais miennes les observations très claires de Benoît Hamon. Pour réparer, deux voies s’offrent à nous, dont la première est l’inscription au tableau des maladies professionnelles, mais elle se heurte à des difficultés techniques. Je le reconnais, ayant moi-même essayé de rédiger un amendement en ce sens.
Mais il existe une autre voie, qui consiste à reconnaître une maladie professionnelle en dehors du tableau. C’est la voie que fixe le texte, mais qui, avouons-le, n’apporte pas grand-chose par rapport au droit existant puisqu’il est déjà possible aujourd’hui de reconnaître des difficultés psychiques en dehors du tableau des maladies professionnelles. Mais cette démarche se heurte au seuil de 25 % d’incapacité, qui est fixé par décret.
Il y aurait une manière simple d’agir et elle appartient au Gouvernement : prévoir par décret un taux différencié pour les affections psychiques directement liées aux conditions de travail. Car le seuil de 25 % est très élevé. Une main arrachée, par exemple, correspond à un taux de 20 %. Il faudrait aller très loin pour arriver à une incapacité de 25 % liée à l’épuisement professionnel.
L’amendement de l’exécutif, qui me semble un amendement d’appel, est un peu timide, mais la question doit être retravaillée.
N’oublions jamais que le burn-out n’est pas uniquement un problème de santé au travail : c’est un sujet de société, parce qu’il met en cause en profondeur le rapport au travail, dans une société où l’économie s’est largement financiarisée et où la pression sur la productivité est particulièrement forte. C’est tellement vrai que le burn-out ne concerne pas uniquement les salariés, qui représentent une part importante des victimes de cette affection, mais également les petits patrons, souvent soumis à une très forte pression – nous en rencontrons tous dans nos circonscriptions –, les médecins urgentistes, les enseignants et les agriculteurs isolés, pour lesquels des mesures ont d’ailleurs été prises dans la loi Le Foll.
Le burn-out est vraiment sujet de société. Je souhaite que la réflexion se poursuive et que nous nous engagions, peut-être grâce au dialogue social, vers des solutions plus normatives.
Chacun comprend que les éléments constitutifs d’un nouveau tableau des maladies professionnelles ne sont pas réunis. Je précise que, pour cette raison, je n’ai pas signé l’appel de Mme Bechtel, mais que j’en partage naturellement les arguments.
Je voudrais qu’on ne se paie pas de mots. Je m’explique : je ne voudrais pas que l’amendement du Gouvernement, ainsi que nos débats, ne soient, je vais le dire crûment, qu’un cache-misère.
La notion d’affection psychique liée directement au travail est une vieille histoire et nous en connaissons le continuum et les éléments constitutifs – en particulier le management. Nous avons essayé, à un moment donné, de passer de la notion de stress à une notion fourre-tout, voiture-balai : celle de risques psychosociaux.
Mais le burn- out est tout à fait différent car c’est une affection très particulière. Je vous rappelle l’exemple que j’ai cité dans mon intervention de discussion générale : j’ai rencontré récemment une salariée, âgée de 45 ans, qui n’avait jamais eu le moindre antécédent. Elle m’a dit : « À un moment, je mourais à petit feu ». C’est cela, le burn-out, la conséquence de conditions de travail qu’elle ne pouvait plus assumer. C’est cela la réalité.
Je sais évidemment qu’il existe deux voies, celle de l’inscription au tableau et celle de la reconnaissance comme maladie professionnelle, qui donne lieu, cela est avéré, à un parcours du combattant, sans oublier le seuil de 25 % qui est un frein considérable.
Aujourd’hui, quelles sont les affections psychiques reconnues par les commissions ? La dépression profonde, l’anxiété généralisée, le stress post-traumatique – je vous renvoie à un article paru dans le journal Le Monde d’aujourd’hui sur le stress post-traumatique de nos militaires confrontés aux théâtres d’opérations. Voilà la réalité. On ne s’en sortira pas avec des arguties.
J’en terminerai en disant très amicalement au ministre que le contenu de cet amendement figure déjà dans la loi, comme vient de le dire Mme Bechtel. On n’invente rien.
Je ne voudrais pas que, munis d’un passe-montagne, nous allions au-delà du problème qui nous est posé.
Ce n’est pas parce que Mme Bechtel a travaillé en « amont » que nous devons avaler des couleuvres…
Sourires.
Trêve de plaisanterie. Il s’agit d’un sujet assez lourd. J’ai moi-même rédigé plusieurs rapports budgétaires sur les risques psychosociaux, à l’époque où, malheureusement, on a déploré chez Orange un certain nombre de suicides. Ce sujet a été travaillé très sérieusement par les rapporteurs de la commission, les administrateurs et moi-même.
Je voterai ces amendements car durant mon précédent mandat j’avais essayé de faire adopter l’inscription dans la loi des maladies psychiques, mais je n’avais, malheureusement, pas été écouté. Je voterai ces amendements parce que le burn-out est une vraie maladie, qui prend des proportions importantes dans l’entreprise et doit être prise en compte.
Néanmoins, j’observe que le quatrième alinéa de l’article L. 461-1 du code de la Sécurité sociale permet de les prendre en compte. Il n’y est pas question seulement des maladies physiques, mais des maladies en général ; les maladies psychiques étant des maladies comme les autres, elles pourraient être prises en compte.
Mais je reconnais que la jurisprudence ou en tout cas l’idée que l’on s’en fait, c’est que les maladies psychiques sont un peu à part. Aussi, les inscrire dans le texte donnerait plus de poids à une reconnaissance ultérieure.
Je demeure cependant perplexe. Lorsque j’ai rédigé mon rapport, on avait fait le constat que l’on ne pouvait pas mesurer les causes et quelle était la part due au travail dans cette pathologie psychique. Beaucoup de causes peuvent survenir et s’ajouter les unes aux autres, je pense par exemple à des causes d’ordre familial.
Oui.
Un divorce peut entraîner des problèmes psychiques. Il peut y avoir des pressions dues à des problèmes de voisinage. L’accumulation de causes diverses peut provoquer une pathologie psychique importante.
Les amendements que nous examinons n’évoquent pas le mot « burn-out », monsieur Sebaoun, même si c’est ce mot que vous employez depuis tout à l’heure. Il est bien question de pathologies psychiques. Ne nous faites pas avaler des couleuvres. Aucun des amendements ne vise expressément le burn-out, qui n’existe que dans le cadre du travail.
En tout état de cause, il est aujourd’hui extrêmement difficile de le reconnaître…
Le sujet est éminemment délicat, nous en sommes tout à fait conscients. Je veux à mon tour saluer le travail de longue haleine que Mme Bechtel mène avec constance.
Vous imaginez bien que dans la mission consacrée à la médecine du travail, nous avons abordé ces sujets, que nous avons parfois assez maladroitement classés dans les risques psycho-sociaux, ce qui n’est pas tout à fait la même chose. Mais la limite entre les deux est parfois difficile à établir. Avec le burn-out, nous nous heurtons à un vrai problème de définition, et à celui de sa vérification clinique.
L’individu est une entité complexe, qui peut rencontrer des problèmes professionnels liés à un surmenage et d’autres, liés à son entourage, à sa vie, à ce que constitue la complexité d’un être humain et qui peut le conduire à une dépression.
Faites-moi la différence entre risque psycho-social, dépression et burn-out. Moi, je ne suis pas certain que cela soit aisé.
Si tous ceux qui s’occupent de ce sujet n’ont pas réussi à véritablement trancher, c’est qu’il existe une vraie difficulté. Ce n’est pas mécanique comme le fait de savoir si on a une jambe cassée ou non.
La prudence dont a fait preuve Benoît Hamon dans son amendement, cosigné par l’ensemble du groupe et soutenu par le rapporteur, est de bon aloi. Et c’est cet amendement que je soutiendrai.
Il faut souligner qu’il y a aussi des blocages politiques, dans cette affaire.
Pourquoi la reconnaissance du burn-out, qui est lié au travail, peine à réunir les partenaires sociaux ? Parce que le MEDEF ne veut que la prise en charge du burn-out relève de la branche accidents du travail-maladies professionnelles, financée à 97 % par les cotisations patronales.
Je rappelle les propos de Mme Le Callennec sur l’égalité entre les femmes et les hommes. Parfois, pour être réellement incitatif, il faut mettre en place un système financièrement incitatif. C’est valable pour la parité, c’est aussi valable pour la reconnaissance du burn-out.
Pourquoi pensons-nous qu’il faut favoriser la reconnaissance du burn-out en tant que maladie professionnelle ? Parce que nous souhaitons que ce soit la branche ATMP qui, demain, prenne en charge les conséquences du burn-out. C’est aussi pour cette raison-là. On nous dit que ce sera un coût ; mais cela représentera aussi une économie pour la branche assurance maladie. Voyons les choses sous cet angle.
J’entends que les facteurs sont multiples. Mais un certain nombre de maladies professionnelles sont elles aussi plurifactorielles. Les cancers du poumon liés au fait d’avoir travaillé dans un environnement pollué par de la poussière d’amiante peuvent aussi être liés à la consommation de tabac. Pour autant, ils sont reconnus comme maladie professionnelle. Et on ne regarde pas ce qui relève de votre consommation de tabac ou de votre exposition à l’amiante.
J’entends ces arguments. Un premier pas vient d’être fait et le débat va se poursuivre, puisqu’il y a quelques autres amendements. Deux options sont ouvertes. Je me réjouirai si demain, dans d’autres textes, à partir d’autres initiatives, le cas échéant lors d’une nouvelle lecture de ce texte ou dans le cadre du PLFSS, on franchissait une étape supplémentaire. Mais les blocages ne sont pas uniquement dus à la complexité du sujet, ce sont aussi des blocages politiques.
L’apparition du burn-out dans le langage commun traduit l’émergence d’un phénomène d’ampleur, et relativement nouveau. Il y a lieu de travailler très sérieusement, aussi bien au plan médical pour poser des diagnostics qu’au plan de la recherche des causes de ces maladies graves. Elles sont quand même principalement dues aux évolutions récentes du monde du travail. Je ne reviens pas sur que ce qui a été évoqué par Benoît Hamon : les nouvelles technologies ; les exigences de rentabilité toujours plus grandes, et sur des durées toujours plus courtes, de la part des actionnaires ; l’organisation du travail très pathogène, avec des objectifs souvent irréalistes, parfois flous ; la quantité de travail ; des horaires excessifs. Bref, tout cela doit être examiné très sérieusement de manière à prévenir ces méfaits. Pour ma part, j’insiste beaucoup sur la prévention, car c’est tout de même cela, le vrai sujet.
Cela dit, il y a bien sûr la nécessité de la réparation. De ce point de vue, je rejoins ce qui vient d’être dit concernant les maladies professionnelles et leur dédommagement. Je voterai les amendements proposés par Benoît Hamon et par vous, monsieur le ministre, parce qu’ils constituent un premier pas. J’en mesure toutefois la très grande modestie et les limites. Il est évident que ce petit pas en appelle beaucoup d’autres.
Je me félicite par ailleurs que des travaux soient déjà engagés, notamment avec le guide de la prévention, pour que l’on puisse avancer sur ces sujets.
Nous sommes appelés à une vraie réflexion sur les maladies professionnelles. S’agissant des maladies professionnelles et des accidents du travail, la législation date de la fin du XIXe siècle. Elle était peut-être très moderne à l’époque, mais elle est complètement dépassée aujourd’hui.
En cas d’accident du travail, sauf faute inexcusable, on est moins bien indemnisé aujourd’hui que pour un accident de la circulation. Ce n’est tout même pas normal, ni acceptable.
Et s’agissant de la faute inexcusable, sa première définition remonte à 1941. Elle a été complètement rénovée par la Cour de cassation en 2002.
Heureusement !
La jurisprudence évolue, mais nous, législateurs, n’évoluons pas. Pour être convenablement indemnisé en matière d’accident du travail ou de maladie professionnelle, il faut faire un procès devant le tribunal de la Sécurité sociale, alors même que la nouvelle définition fait de la simple conscience du danger le critère principal de la faute inexcusable. Celle-ci n’est plus du tout définie comme elle l’était auparavant, puisque l’employeur est a priori tenu, envers le salarié, à une obligation de sécurité de résultat. De résultat ! Tel est l’état de la jurisprudence. Il serait donc temps de se donner pour objectif une réforme en profondeur du droit des maladies professionnelles et des accidents du travail.
Ce contexte général appelle une véritable réforme qui nous permettra de reprendre le chemin de la réduction des maladies professionnelles et des accidents du travail. Si on n’augmente pas la sévérité dans ce domaine, on n’y arrivera pas.
Avec les maladies psychiques se posent la difficile question de l’imputabilité au travail et celle du taux d’incapacité : 25 %, c’est, dans un grand nombre de cas, un taux beaucoup trop élevé pour faire reconnaître la maladie psychique comme maladie professionnelle.
Si on abaisse le taux de 25 %, soyons clairs : il n’y a pas de raison de mieux traiter les maladies psychiques que les maladies somatiques. Par conséquent, il faut le baisser pour tout le monde.
S’agissant du problème spécifique du burn-out, il faut être clair : il est exclusivement imputable au travail dès lors que les conditions qui permettent de le caractériser sont réunies.
Je souhaite apporter quelques éléments supplémentaires de réflexion sur ce sujet important qui nous touche, et qui touche la société. Je partage beaucoup de choses qui ont été dites.
Monsieur Sebaoun, vous souhaitez qu’il soit tenu compte des conditions de travail susceptibles d’avoir altéré la santé physique ou mentale de la victime. Cela ne me paraît pas pertinent et je vais vous dire pourquoi.
Pour fixer le taux d’incapacité permanente, le médecin-conseil apprécie uniquement l’état de santé général de la victime et ses possibilités de reclassement et d’évolution professionnelle à venir, indépendamment de ses conditions de travail antérieures à l’origine de sa maladie ou de son accident.
En d’autres termes, pour fixer le taux d’incapacité permanente, le médecin-conseil ne prend en compte que les éléments propres à la victime dont l’état est stabilisé, tels que son âge ou la nature de son infirmité. Il ne prend pas en compte ses conditions de travail antérieures.
Cela me conduit à vous dire qu’il vaut mieux retenir mon amendement, qui est identique à celui de M. Hamon.
Mais je voudrais encore donner quelques éléments de langage, parce que c’est un sujet très important. Le Gouvernement a pris un certain nombre de mesures d’assouplissement pour améliorer la reconnaissance des affections psychiques. Il est important de le savoir. En 2012, la condition de stabilisation de l’état de victime pour reconnaître une affection en maladie professionnelle a été supprimée.
Des recommandations spécifiques à l’adresse des médecins-conseils des caisses de Sécurité sociale ainsi que pour les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles ont été rédigées en étroite collaboration avec les partenaires sociaux : dialogue social.
L’état des lieux est le suivant : ces mesures ont engendré un quadruplement du nombre de reconnaissances entre 2012 et 2014 : 90 en 2012 et 339 en 2014.
Cette tendance à la hausse va incontestablement se poursuivre en 2015, et sûrement dans les années à venir, en raison d’une meilleure connaissance de ce dispositif par les assurés et les médecins.
Certes, des critères de gravité sont attachés à cette reconnaissance spécifique par les comités, mais ceux-ci sont indispensables pour éviter que toutes les pathologies, quelles qu’elles soient, même mineures, puissent faire l’objet d’un examen qui allonge les délais de reconnaissance de l’ensemble des pathologies professionnelles.
J’ajoute, puisqu’il en a été question, que prévoir un taux différencié pour des maladies psychiques n’est pas la bonne solution. Cela engendrerait des problèmes d’équité – cela a été dit par Mme Bechtel – entre les salariés atteints d’une pathologie psychique et ceux atteints d’une pathologie physique. Inutile de rappeler les taux : 20 % pour une main coupée et 15 ou 10 % pour d’autres cas. Je ne parle pas d’autres maladies professionnelles comme l’arthrose ou les lombalgies.
La création d’un tableau de maladies professionnelles est donc également une piste à écarter aujourd’hui, car elle n’est pas adaptée aux maladies psychiques. Elle crée en effet, que vous le vouliez ou non, un lien automatique entre l’accomplissement de certaines tâches et la survenue de la maladie, ce qui n’est pas adapté au syndrome d’épuisement professionnel, car celui-ci repose essentiellement sur les conditions dans lesquelles le travail a été accompli – c’est du reste bien là la difficulté majeure pour caractériser le burn-out.
On cite souvent – je tiens à le redire ici, car tout cela figurera au compte rendu – l’exemple de la Suède, dont on fait un modèle en matière de reconnaissance du burn-out. En fait – et je remercie la direction générale du travail des éléments concrets qui m’ont été communiqués –, ce système est moins favorable que le système de reconnaissance actuellement en vigueur en France. En effet, la reconnaissance n’y est possible que si l’état de la victime est stabilisé, ce qui peut prendre plusieurs années pour des pathologies psychiques – dans ce domaine, je sais aussi de quoi je parle.
De plus, le taux de reconnaissance des maladies professionnelles n’est que de 15 % en Suède, contre près de 50 % en France. Par ailleurs, d’après les données européennes, le nombre de reconnaissances en Suède est en constante diminution depuis 2007, alors qu’il est en constante augmentation en France, grâce aux mesures qui ont été prises.
L’amendement que je présente préserve de ces écueils et facilite la reconnaissance d’affections psychiques par voie complémentaire, comme cela a été évoqué, qui demeure la plus adaptée et passe par une consécration au niveau législatif. C’est, d’une certaine manière, ce que nous faisons.
D’autres mesures, qui ne relèvent pas de la loi, vont dans le même sens. Je pense notamment à la composition des comités appelés à se prononcer sur la reconnaissance du burn-out : elle intégrera, si besoin, des médecins psychiatres lorsque sont examinés des cas potentiels de burn-out. Dans le domaine de la psychiatrie, ces questions sont très complexes – ce n’est pas à vous que je vais l’apprendre.
La priorité du Gouvernement reste cependant aujourd’hui le renforcement de la prévention, ce qui ne dispense pas pour autant de tout ce que je viens d’évoquer. Les partenaires sociaux, je l’ai rappelé tout à l’heure, l’ont reconnu.
Des instructions ont été données pour assouplir encore les conditions de reconnaissance – cela fera plaisir à M. Hamon et, je n’en doute pas, à toute l’Assemblée – de telle sorte que le seuil de 25 % ne soit plus un handicap insurmontable. Les partenaires sociaux ont, du reste, émis également des recommandations pour que les commissions puissent plus facilement – car c’est ainsi que l’on avance – reconnaître l’origine professionnelle des pathologies psychiques, en prenant en compte plusieurs éléments car, nous l’avons dit nous-mêmes, ce phénomène est multifactoriel, lié à la charge de travail, à l’attitude, à la relation à la hiérarchie – cela peut exister –, au soutien ou à l’absence de soutien des collègues, et à des formes de violence psychique.
Pour toutes ces raisons et en écoutant tout ce qui a été dit, je ne souhaite pas, même si j’en comprends l’intérêt, que soit donnée une suite favorable à l’amendement de M. Sebaoun, mais j’invite l’Assemblée à voter celui de M. Hamon, identique à celui du Gouvernement.
Merci, monsieur le ministre, de cette longue réponse. Heureusement qu’on n’attend plus la stabilisation de la maladie pour instruire le dossier, car cette stabilisation supprime l’indemnité journalière pour celui qui la percevait, ce qui pose problème. Vous avez eu raison de souligner qu’il fallait donner de la souplesse au dispositif, car sinon on ne pouvait plus rien faire.
En deuxième lieu, le Conseil d’orientation sur les conditions de travail – COCT –, dans ses recommandations, a instruit les cinq documents dont nous avons besoin : des documents qui viennent de la commission – c’est-à-dire du médecin-conseil –, du demandeur et de l’employeur, un avis motivé du médecin traitant et, je tiens à le souligner, des documents issus d’une enquête précise et chronologique sur tous les événements traumatiques, les violences, qui ont trait à la charge de travail et à l’environnement professionnel. Vous ne pouvez donc pas me dire que les conditions de travail ne sont pas prises en compte dans cette enquête de reconnaissance. Le COCT le dit très clairement.
Cela dit, je retire l’amendement no 676 rectifié au profit de l’amendement du ministre, mais je ne veux pas que l’on me fasse dire autre chose que ce que j’ai dit, à savoir que les conditions de travail sont constitutives du burn-out.
L’amendement no 676 rectifié est retiré.
La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir l’amendement no 44 deuxième rectification.
Cet amendement vise à supprimer la fiche individuelle retraçant l’exposition de chaque salarié aux facteurs de pénibilité. Remplir cette fiche est une tâche difficile, que la grande majorité des entreprises, si elles ne disposent pas d’un service des ressources humaines spécialisé, et même dédié, ne sont pas en capacité de mener à bien.
Il ne s’agit pas de remettre en cause la pénibilité et les critères de sa prévention, issus de la loi Woerth, mais de mettre en place un dispositif qui ne nécessite pas, dans les entreprises dont les métiers ont été recensés comme pénibles, d’embaucher des salariés ayant pour seule mission de remplir cette tâche.
Cet amendement simplifie également les facteurs de pénibilité pris en compte. Il inscrit dans la loi le travail de nuit, le travail en équipes successives alternantes et le travail en milieu hyperbare, qui sont les trois facteurs dont l’exposition est facile à mesurer. Tant que le Gouvernement ne sera pas parvenu à recueillir l’approbation des partenaires sociaux sur des modalités plus simples de mesure de l’exposition aux autres facteurs définis par le décret d’octobre 2014, comme la manutention manuelle, les charges pénibles, les vibrations mécaniques ou les agents chimiques, et que le législateur n’aura pas été en mesure de les apprécier, elles ne pourront pas entrer en vigueur.
Les amendements que nous allons maintenant examiner reviennent sur la notion du compte pénibilité. Celui-ci vise directement à supprimer la fiche individuelle telle qu’elle avait été imaginée.
Je me permets de vous corriger sur un point, monsieur Cherpion. Il n’existe pas de liste de métiers pénibles.
Je me suis mal exprimé : je voulais parler de « tâches » pénibles, et non de « métiers ».
S’il s’agit de tâches, on peut accepter l’expression. Il faut être en revanche très prudent avec le mot de « métier ». Il n’y a pas de liste de métiers pénibles.
Dans les travaux que nous avons engagés avec Gérard Huot et Michel de Virville, nous avons bien évidemment tenu compte de ce qui a été exprimé et la nature de cette fiche me semble avoir été en partie surinterprétée. Nous avons cependant suggéré dans notre rapport que cette fiche se mue en une déclaration conservant un caractère individuel. Je rappelle en effet qu’elle donne droit à des points qui peuvent être utilisés à des fins de formation ou de modification du poste de travail, ou encore pour pouvoir partir plus tôt en retraite, ce qui implique un suivi individuel. Il ne peut pas en être autrement.
Étant donné que nous avons simplifié la fiche individuelle en instaurant cette déclaration et que le Gouvernement a choisi de reprendre cet élément dans un des amendements que nous examinerons tout à l’heure et dont la formulation me semble beaucoup plus complète, je serais tenté de vous dire, monsieur Cherpion, que vous serez satisfait par l’objectif de l’amendement du Gouvernement.
Je vous invite donc à retirer le vôtre, à défaut de quoi j’émettrai un avis défavorable, car le dispositif est beaucoup plus complexe et ne se résume pas à la seule suppression de la fiche individuelle que vous suggérez.
M. Cherpion n’a certainement pas besoin de son Gaffiot pour savoir que nemo auditur propriam turpitudinem allegans. Lorsque vous étiez en responsabilité, vous aviez défini dix facteurs, que vous voulez aujourd’hui ramener à trois ! Je ne peux pas vous suivre dans cette démarche. Avis défavorable.
L’amendement no 44 deuxième rectification n’est pas adopté.
Il faut veiller à être compris de tous et les mots doivent être simples. C’est, et personne ne le contestera, pour combattre l’injustice devant l’espérance de vie, liée à la différence des conditions de travail ou des postes de travail, que le compte personnel de prévention de la pénibilité a été créé. Il est issu d’une longue histoire – je l’ai évoquée tout à l’heure, sans vouloir en rajouter.
Sans remonter jusqu’à M. Stoléru, je rappellerai qu’en 2003, la CFDT, dans le cadre d’un accord avec le ministre de l’époque, M. François Fillon, a affirmé la nécessité d’une compensation et – pardonnez-moi ce mot anglais –, d’un deal, d’un échange pour son soutien à une démarche sur les retraites liée à la pénibilité. Pour résumer, les partenaires sociaux ont abouti en 2008 à un document qui a été soumis à la négociation et dans lequel apparaissait pour la première fois la fiche que vous voulez aujourd’hui supprimer, monsieur Cherpion, la considérant comme responsable de tous les maux.
Si ! Vous l’avez dit. Peut-être pas vous personnellement, mais cette fiche a été utilisée comme un élément central pour dire que la pénibilité ne pouvait pas fonctionner, et pour attiser toutes les inquiétudes – dont certaines étaient du reste parfaitement justifiées, à tel point que je m’en suis fait l’écho – et toutes les peurs d’une partie du patronat, notamment des petites entreprises, devant sa complexité.
Mais qui a inventé cette complexité ? Ceux qui, en 2010 ou 2011, ont pris un décret définissant tous ces critères – c’est-à-dire l’un de mes prédécesseurs. C’est ainsi que nous nous sommes retrouvés avec cette fiche.
Il existe aujourd’hui un consensus, dont je suis tout à fait satisfait, et le rapport réalisé, notamment, sous l’égide de M. Christophe Sirugue est très intéressant. Il dit clairement que, s’il existe un consensus – qui semble se dégager –, sur le principe de la pénibilité, il faut que le même consensus s’exprime sur l’applicabilité de ce dispositif. C’est bien beau, en effet, de définir des règles, mais il faut pouvoir les appliquer. Un droit effectif pour les salariés, c’est un droit compréhensible et simple à mettre en oeuvre.
Le Gouvernement a décidé de supprimer, non pas le suivi – c’est là que réside l’incompréhension –, mais la fiche individuelle de prévention des expositions. Cette obligation ne reposera plus sur l’employeur, qui n’aura qu’à déclarer en fin d’année, à la caisse de retraite, les salariés exposés. Puisqu’il y aura un processus de reconnaissance qui sera engagé au niveau des branches, la caisse informera les salariés de leur exposition et des droits dont ils bénéficient ; il y aura donc toujours une fiche qui les informera. Les salariés ne seront pas privés de leurs droits, bien au contraire, puisque ceux-ci seront reconnus en fonction d’un principe très simple, qui – comme chacun le sait désormais – rendra applicable la prise en compte de la pénibilité dans leur situation professionnelle à travers soit des heures de formation professionnelle, soit des droits à la retraite sous la forme de points supplémentaires, soit un passage au temps partiel.
Notre objectif est donc simple : puisque vous avez complexifié, nous devons simplifier.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Nous devons simplifier la vie des entreprises, notamment les plus petites d’entre elles – heureusement que nous sommes là, permettez-moi de le dire ! –,…
…en rendant applicable un principe qui nous rassemble tous.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir le sous-amendement no 740 .
J’avais déposé un amendement sur la fiche individuelle, et je reviens sur le sujet avec ce sous-amendement à l’amendement gouvernemental qui tend à la modifier.
Bien évidemment, nous sommes satisfaits – ou plutôt moins insatisfaits – par la proposition du Gouvernement de supprimer la fiche individuelle de prévention au profit d’une approche déclarative. Le problème, c’est que lorsqu’on parle de pénibilité, on évoque – vous le dites vous-même, monsieur le ministre – un environnement physique agressif et un rythme de travail susceptible de laisser des traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé. Mais qui mieux qu’un médecin du travail peut constater cela ? L’employeur n’est pas médecin : comment voulez-vous qu’il sache si cela laissera des traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé des travailleurs ?
Je propose donc que la déclaration soit faite par les services de santé au travail, en liaison bien entendu avec l’employeur – car il s’agit de faire les choses intelligemment –, et que ces services travaillent en outre sur la prévention. En effet, le but de la reconnaissance de la pénibilité, ce n’est pas de donner des points ou des avantages, c’est que les salariés soient en bonne santé !
Pour vivre plus longtemps, c’est quand même intéressant, les avantages…
Bénéficier de droits supplémentaires à la retraite une fois qu’on est décédé, est-ce vraiment un avantage ?
Derrière tout cela, il doit donc y avoir un véritable souci de prévention.
Mon sous-amendement vise par conséquent à ce que ce soient les services de santé qui fassent la déclaration et proposent, en même temps, des moyens de prévention.
La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir le sous-amendement no 725 .
Mais si : M. le ministre vient de dire à l’instant que la déclaration serait annuelle – plus précisément, il a dit qu’elle serait faite une fois par an, ce qui revient au même. D’où ma proposition : préciser que l’employeur déclare « annuellement » les facteurs de risques professionnels. Il me semble important, si l’on veut alléger le système, de prévoir que la déclaration ne se fera qu’une fois par an.
Cela étant dit, je veux remercier M. le ministre : il a fait l’aveu que le dialogue social existait depuis Lionel Stoléru – qui a d’ailleurs été dans ma circonscription –, donc avant 2012, et qu’il avait en particulier été prévu par la loi de 2008. Je vous remercie donc, monsieur le ministre, pour cet accès de clarté et de clairvoyance.
Le sous-amendement no 736 est identique. J’imagine qu’il est défendu, monsieur Vercamer ?
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et les sous-amendements ?
Avis favorable à l’amendement du Gouvernement, d’abord parce qu’il s’agit de la déclinaison très concrète d’un des principaux axes du rapport auquel j’ai participé. Il s’agit là d’une avancée significative, dans la mesure où le dispositif proposé ne fera perdre aucun droit aux salariés en matière de prise en compte de leur exposition aux facteurs de pénibilité – permettez-moi de souligner en passant que nous n’en avons supprimé aucun, ce qui est particulièrement important. Cette mesure a en outre une vertu de simplification, puisqu’elle permettra la transmission dématérialisée des informations par les entreprises via la Caisse nationale d’assurance vieillesse – ce qui était un des effets recherchés.
J’en profite pour dire à notre collègue Sebaoun, qui m’a interrogé tout à l’heure sur une liste de cas particuliers – je parle ici, non pas des salariés qui travaillent en CDI à temps plein, mais de ceux qui ont des contrats précaires, qui sont en arrêt maladie ou des autres cas qui ont été cités –, qu’il n’y aura aucun risque que ces salariés perdent des droits. Le seul élément sur lequel il peut y avoir discussion, c’est le fait que l’information sera différée dans le temps. Je serais même tenté de dire que, pour les contrats précaires, le dispositif proposé sera plus intéressant que la situation actuelle. Pourquoi ? Pour une raison simple : jusqu’alors, le salarié qui avait six ou sept contrats dans l’année, voire plus, recevait à la fin de chacun d’entre eux une fiche individuelle, que lui donnait son employeur, et il lui revenait la tâche d’additionner l’ensemble de ses fiches pour évaluer ses droits acquis. Avec l’amendement proposé par le Gouvernement, le récapitulatif des droits acquis sera réalisé par la CNAV ; le salarié recevra donc à la fois la déclaration sur les facteurs d’exposition faite par l’employeur et le récapitulatif de ses droits. Le système sera ainsi, pour ce qui est de sa clarté, plus avantageux pour les salariés.
Pour toutes ces raisons, j’émets donc un avis favorable à l’amendement du Gouvernement.
S’agissant maintenant du sous-amendement no 740 , nous partageons tous votre souci de prévention, monsieur Vercamer. C’est tellement vrai qu’il s’agit du premier axe de préconisations du rapport auquel j’ai participé ; nous nous sommes en effet aperçus que 80 % des entreprises n’avaient pas réalisé de document unique d’évaluation des risques, ou DUER – la proportion étant encore plus élevée parmi les petites entreprises. Ces entreprises n’ont donc pas mis en place un dispositif pourtant obligatoire depuis 2001, qui est censé les protéger en cas d’accident ou de difficulté. Non qu’elles ne feraient rien en matière de prévention, mais elles ne formalisent pas leurs actions à travers le document unique d’évaluation des risques. Nous avons donc préconisé un dispositif de prévention – je vous rejoins totalement sur ce point.
Pourquoi ne puis-je cependant pas être favorable au dispositif que vous proposez ? C’est qu’il contient un risque de contentieux énorme. En effet, si c’est le chef d’entreprise qui fait la déclaration, le lien de subordination entre le salarié et le chef d’entreprise fait que le premier hésitera à aller contester ce qui aura été déclaré par le second ; mais si c’est le médecin du travail qui la fait, il n’aura aucune hésitation. Ce que vous présentez comme une protection risque donc d’engendrer un grand nombre de contentieux, et c’est pourquoi j’y suis opposé.
Quant aux sous-amendements nos 725 et 736 , j’y suis totalement défavorable, pour une raison fort simple : il se trouve que dans le cadre d’un contrat court, la déclaration doit être faite dans le mois qui suit la rupture du contrat. On ne peut donc pas indiquer qu’il s’agit d’une déclaration annuelle, puisqu’une partie des salariés auront des déclarations qui, par nature, ne le seront pas – à moins de considérer qu’il s’agit d’un simple récapitulatif, auquel cas il sera forcément annuel et il est inutile de le préciser dans le texte. Soit cette disposition ne pourra pas être appliquée, soit elle sera redondante.
Même avis que le rapporteur.
Monsieur le rapporteur, j’ai l’impression que nous parlons la même langue, mais que nous ne parlons pas de la même chose. Vous dites que grâce à la dématérialisation et à ce système simplifié, on pourra connaître les droits de chacun et qu’il reviendra à la CNAV d’accomplir cette mission. Je l’entends, mais les six ou sept points que j’avais listés tout à l’heure ne correspondaient pas du tout à la même chose.
Quand je dis que si un salarié a eu un accident du travail et qu’il a une maladie professionnelle, après trente jours, dans l’état actuel du droit, il peut demander sa fiche d’exposition pour regarder s’il n’existerait pas un lien entre les deux ; quand je dis que la fiche doit être incluse dans le dossier médical ; quand je dis qu’au-delà de trois mois, un salarié peut la réclamer ; quand je dis qu’en cas de décès, les ayants droit peuvent demander à la consulter ; quand je dis tout cela, je dis la réalité du droit. Vous me répondez : on acquiert des points. Je le sais bien, mais cela ne répond pas aux questions que j’ai posées. Nous parlons la même langue, mais nous ne disons pas la même chose ! Bref, à ce stade, le maintien de la fiche individuelle de prévention des expositions me paraît indispensable.
Je n’ai pas le même point de vue que mon collègue Sebaoun sur le sujet.
Qui a considéré que la pénibilité devait être caractérisée dès lors qu’elle provoquait une maladie avant le départ à la retraite, ce qui justifiait donc l’individualisation de l’approche ? Le patronat !
La conséquence en a été qu’à l’issue d’un dialogue avec le gouvernement de l’époque, le principe de l’individualisation a été retenu.
Aujourd’hui, nous mettons en oeuvre un principe dont on discute la complexité. Mais de quelle réalité parle-t-on ? De femmes et d’hommes qui non seulement meurent plus tôt, mais qui, parce qu’ils ont eu un métier pénible, partent en retraite avec une espérance de vie en bonne santé plus faible que celle des autres. Non seulement ils ont une retraite plus courte, mais en plus ils sont plus vite malades ou handicapés !
Voilà ce à quoi le compte pénibilité essaye d’apporter une réponse. Le ministre évoquait tout à l’heure un deal, ou en tout cas une forme de compensation. Et en effet, si le groupe socialiste s’était mobilisé dans la réforme des retraites, c’était aussi, et surtout, parce qu’il voulait que soit instauré ce compte pénibilité. Aujourd’hui, des choix politiques sont faits, et les référentiels seront construits dans les branches ; voilà qui me semble aller dans le sens d’une mise en oeuvre rapide du compte pénibilité.
Ce petit point d’histoire afin de rappeler que celui qui, au départ, a voulu l’individualisation, c’est le patronat.
J’ai porté, comme rapporteur, cette belle réforme de 2010 sur les retraites (Murmures sur divers bancs),…
…avec notamment ce volet pénibilité. C’était une belle avancée sociale, et nous continuons dans la même voie.
Je voudrais remercier de ce point de vue le ministre, qui n’a rien lâché malgré la pression du MEDEF, lequel a cherché à politiser le sujet : tout en admettant qu’il s’agissait d’une reconnaissance nécessaire, il a contesté les moyens utilisés et refusé d’aborder véritablement le sujet. Merci donc, monsieur le ministre, d’avoir résisté à cette pression, et aussi d’avoir compris que cela pouvait poser quelques problèmes, voire être un peu complexe à mettre en oeuvre pour certains métiers.
Je voudrais aussi remercier Christophe Sirugue, qui a réussi, dans le cadre de sa mission, à dénouer les noeuds qui s’étaient constitués et à surmonter le manque de dialogue. Il a conçu un système simple et, pour ma part, je me reconnais dans ce qu’il propose. Rien n’a été dénaturé : la réforme de 2010
Nouveaux murmures
est là, entière. Simplement, ce que nous n’avions pas perçu à l’origine, au moment de la création du dispositif, a été pris en compte ; les modalités pratiques ont été simplifiées, mais on n’a pas touché au fond.
C’est pourquoi je voterai avec beaucoup de conviction cet amendement.
Je souhaiterais poser une question au ministre.
Les référentiels seront établis à l’initiative des branches ; mais est-ce que les seuils qui avaient été imaginés pour les six facteurs de pénibilité qui ne sont pas encore entrés en vigueur constitueront une base pour eux ? J’ai assisté à des séances de formation de DRH sur les facteurs de pénibilité, et je peux vous dire que c’est loin d’être simple !
Prenez l’exemple des manutentions manuelles de charge : « Action ou situation concernées : lever ou porter ; pousser ou tirer ; déplacement du travailleur avec la charge ou prise de la charge au sol ou à une hauteur située au-dessus des épaules ; cumul de manutentions de charges. Charges unitaires : 13 kilogrammes, 250 kilogrammes, 10 kilogrammes ; 7,5 tonnes cumulées par jour. Durée minimale : 600 heures par an, 120 jours par an. »
Je peux prendre un autre exemple, avec les postures pénibles. Imaginez quand même, parce que cela a été examiné par les entreprises : « Maintien des bras en l’air à une hauteur située au-dessus des épaules, ou position accroupie ou à genoux, ou position du torse en torsion à 30 degrés, ou position du torse fléchie à 45 degrés. Durée minimale : 900 heures par an ». Monsieur le ministre, vous qui avez travaillé sur ces sujets, prétendument pour « avancer » sur cette question de la simplification, est-ce que cela va servir de base pour les référentiels de branche ? Parce que c’est cela qui pose une vraie difficulté ! Vous parliez des fiches individuelles. En effet, elles existaient, mais c’est l’élaboration des seuils imaginés pour la création du compte pénibilité qui pose une vraie difficulté dans les entreprises.
Je veux simplement reprendre la parole pour dire à M. le rapporteur que je ne peux pas accepter son explication sur le risque de recours. Sinon, ce serait vrai, aussi, pour l’inaptitude, pour la visite médicale de reprise du travail, pour tout. Le médecin du travail est celui qui analyse la santé du salarié. Il peut le faire dans le cadre de la pénibilité. Je ne vois donc pas en quoi il y aurait un risque spécifique de recours, et je maintiens que si nous voulons une prévention de la pénibilité, il faut que le médecin du travail soit associé à ce dispositif.
Le sous-amendement no 740 n’est pas adopté.
L’amendement no 718 rectifié est adopté et les amendements nos 238 , 239 rectifié , 240 et 179 tombent.
Je vais faire court, monsieur le président, parce que tout le monde connaît l’objectif, et je crois que tout le monde est d’accord. Cet amendement, à la suite de tout ce qui a été dit et au rapport de Christophe Sirugue, Gérard Huot et Michel de Virville, a pour objet de permettre à des référentiels de branche homologués de déterminer l’exposition de certains facteurs pénibles. Et, pour ces facteurs, je le redis, il n’y aura plus de mesures individuelles à accomplir, et les employeurs seront réputés de bonne foi dès lors qu’ils appliqueront le référentiel homologué par l’administration – c’est là le caractère d’opposabilité du référentiel. C’est une simplification majeure, et ce n’est pas sans raison qu’elle a été saluée comme telle par les partenaires sociaux.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir le sous-amendement no 737 .
Monsieur le ministre, nous souhaitons supprimer le mot « métiers » qui figure dans votre amendement. Sinon, cela reviendrait à recréer une sorte de régime spécial. Et M. le rapporteur a dit d’ailleurs tout à l’heure lui-même que nous ne pouvions pas retenir ce mot, que l’on n’avait mis nulle part – on pourra se reporter au compte rendu. Et voici que nous revoyons le mot « métiers ». Des dispositifs sont recréés pour des métiers. On peut comprendre qu’il y en ait pour des postes de travail, pour des situations de travail, mais pas pour des métiers.
La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir le sous-amendement no 726 .
La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir le sous-amendement no 728 .
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir le sous-amendement no 738 .
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir le sous-amendement no 735 .
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et les sous-amendements ?
Cet amendement du Gouvernement est celui qui permet la mise en place des référentiels de branche opposables. Si nous voulons simplifier, il faut que nous permettions de recourir à ces référentiels de branche, déjà prévus par la loi. La différence, qui n’est pas des moindres, c’est qu’aux termes de l’amendement, ils seront opposables.
Madame Le Callennec, j’ai entendu vingt fois l’exemple que vous avez évoqué, en assistant aux assemblées générales de tout un tas d’organisations patronales dans mon département ou dans d’autres secteurs. Le développement de ces référentiels de branches permettra de couvrir les dix facteurs qui concernent la branche, s’il y en a dix, mais il peut y en avoir moins, en facilitant grandement l’interprétation, avec des facteurs extrêmement faciles à décliner. Je les appelle, pour ma part, les facteurs binaires : le salarié travaille-t-il de nuit ou pas ? en milieu hyperbare ou pas ? en travail posté ou pas ? Même le facteur chaleur pourra être décliné : le travailleur est-il exposé à une température de plus de trente degrés ou pas ? Ce sont là ce que j’appelle des facteurs binaires, en ce sens qu’ils sont faciles à identifier.
Et puis il y a des facteurs plus complexes. Vous avez raison, madame Le Callennec, de dire que les postures sont des facteurs compliqués. C’est de ce point de vue qu’il est intéressant de disposer de référentiels de branche, qui vont pouvoir nous donner une définition de certaines de ces activités par rapport à ces postures qui sont mentionnées. Je pense que c’est un élément de simplification extrêmement important.
C’est pourquoi j’émets un avis très favorable sur l’amendement du Gouvernement.
En ce qui concerne les sous-amendements, je suis assez d’accord avec ce que dit M. Vercamer, qui est d’ailleurs aussi l’objet d’un amendement de M. Cherpion. Il ne faut pas se tromper : le terme « métiers », soyons très clairs, ne veut pas dire que nous allons vers une reconnaissance de métiers pénibles – je l’ai dit tout à l’heure.
D’ailleurs, deux éléments offrent, de ce point de vue, une sécurité. Le premier, c’est le fait que nous avons proposé d’intégrer le volet pénibilité dans le DUER, dans lequel il est question de groupe homogène d’exposition, et c’est cette référence-là qui me paraît devoir être retenue. Le deuxième élément, c’est, je le rappelle, qu’il faut, pour que les référentiels soient opposables, qu’ils soient homologués. Et pour qu’ils soient homologués, il faut que le ministre du travail et ses services considèrent que le référentiel proposé est en effet compatible avec ce qui est décidé par le législateur. Allons jusqu’au bout et disons-le tout à fait clairement : ce qui est décidé par le législateur, ce n’est pas de mettre en place de nouveaux régimes spéciaux. En l’occurrence, la notion de « métiers » ne doit pas s’entendre au sens de catégorie, elle est retenue parce qu’il se peut qu’une branche professionnelle considère qu’il n’y a pas de distinction possible en ce qui concerne l’un de ses métiers, mais cela ne veut pas dire que tous les métiers pourront être classifiés de ce point de vue. En tout cas, je ne m’imagine pas que le ministère puisse valider quelque chose de cette nature.
En ce qui concerne les derniers sous-amendements, relatifs aux accords collectifs de branche et aux négociations au niveau de la branche, entendons-nous bien : le référentiel professionnel de branche intervient en l’absence d’accord collectif de branche étendu. La distinction doit être faite. Je pense, pour ma part, que la négociation est essentielle, et c’est à défaut d’accord collectif de branche étendu qu’intervient le référentiel. Cela me paraît devoir être souligné.
Je suis donc défavorable à ces sous-amendements.
Même avis que le rapporteur, monsieur le président.
Sourires.
La première s’adresse au ministre. Étant donné les contraintes auxquelles nous sommes soumis en termes de temps, il est urgent de publier les décrets des six facteurs de risque qui restent. C’est un premier questionnement.
J’en viens à ma deuxième question, en remerciant le rapporteur Christophe Sirugue d’avoir rappelé que des référentiels de branche avaient été intégrés dans la loi retraite, à l’initiative du Gouvernement – c’est alors votre collègue Marisol Touraine qui siégeait au banc, monsieur le ministre. Ils n’étaient pas opposables, ils le deviennent aujourd’hui. Ma question binaire est donc la suivante : si, pour des raisons qui m’échappent, il n’y a pas de référentiels de branche, qu’il ne peut donc y avoir de référentiel homologué, que fait-on ?
Je remercie le rapporteur d’avoir précisé sa pensée sur la question des métiers. Il faut quand même être conscient, quand il est question de ce compte pénibilité, de l’image que l’on donne aujourd’hui de certains métiers dans notre pays. Vous savez que, dans le bâtiment, dans l’industrie, les entrepreneurs ont fait d’énormes efforts pour valoriser certains métiers, mais si nous continuons de les associer à des images dévalorisantes, à en donner l’image de métiers pénibles, ou exercés sur des postes pénibles, nous ne trouverons plus de salariés pour les exercer. J’appelle donc votre attention sur cette notion de compte de pénibilité, à laquelle je préfère vraiment celles de qualité de vie au travail, de conditions de vie au travail, d’amélioration des conditions de travail.
Vous nous dites qu’il y aura un référentiel de branche qui devra être homologué par le ministre, mais vous nous avez dit tout à l’heure qu’il y avait 700 branches. Alors concrètement, monsieur le ministre, comment allez-vous vous en sortir ?
La première question posée par M. Sebaoun s’adresse au ministre, et je me garderai bien de répondre à sa place.
La deuxième question m’était plus directement adressée. En gros, il s’agissait de savoir ce qui se passait en l’absence de référentiel. Eh bien, les choses sont claires : les décrets actuellement en vigueur s’appliquent. Il est donc de la responsabilité des branches professionnelles de savoir si elles jouent le jeu à l’égard des entreprises de la branche. Et je suis tenté de vous dire que nous n’imaginons pas que l’on nous ait expliqué que le dispositif était impossible à mettre en oeuvre pour, ensuite, défendre à ce point ceux qui auraient la volonté de ne pas le mettre en oeuvre, ce qui reviendrait à mettre les entreprises de leur branche dans une situation impossible, alors même que les référentiels de branche sont possibles.
S’il n’y a pas de référentiels de branche homologués, cela ne supprime donc pas les décrets qui existent, et la mise en place du compte pénibilité se fera dans un cas comme dans l’autre.
Des éléments de réponse ont été donnés par le rapporteur, je n’y reviens pas. Les référentiels, puisque la question a été posée, c’est pour tous les facteurs, et quand il n’y en a pas, les décrets s’appliquent.
Quant aux métiers, je vois bien quel piège est tendu derrière cette question : « Ah, ça y est, ils vont recréer des régimes spéciaux ! » Vous n’aviez cependant envisagé, pour votre part, que des régimes individuels ingérables. Nous voulons, nous, passer de l’individuel ingérable à un collectif gérable. C’est important, et c’est le rôle des référentiels de branche. Ce qui importe et ce qui est visé, c’est la description réelle des situations de travail dans lesquelles se trouve le salarié, et il en est, excusez-moi de vous le dire, qui créent des inégalités insupportables, des inégalités sociales et des inégalités d’espérance de vie. La question n’est pas celle d’une qualification donnée, il s’agit d’examiner concrètement ce qui se fait, comment on vit et dans quelle situation on se trouve.
En outre, ces référentiels prendront en compte les mesures de protection individuelles. C’est cela, la différence. Prenons l’exemple du bruit. Peu importe le niveau, on peut changer le seuil, ce n’est pas le problème, mais si vous prenez une mesure de protection, avec le port d’un casque – pas uniquement, comme je l’ai entendu, de bouchons –, il s’agit d’une mesure individuelle de protection. Il ne s’agit donc pas d’instaurer un « régime spécial ». La même logique vaut pour le port de charges : l’employeur en tient compte.
En réalité, nous sommes d’accord, et les entrepreneurs savent très bien quelles situations de travail sont pénibles. Pourquoi ? Parce que, lorsque des salariés sont proches de la retraite, cela fait longtemps qu’ils n’effectuent plus les mêmes tâches pénibles, quelles qu’aient été celles-ci. Vous ne comptez pas de ripeurs de soixante-trois ans, vous ne comptez plus, parce qu’ils ont des problèmes physiques, de coffreurs et de carreleurs parmi les salariés âgés de soixante-trois ans, et vous comptez moins de maçons et de couvreurs. Tout le monde le sait, surtout dans le secteur du bâtiment. D’ailleurs, dans ce secteur, ils sont très contents, parce que l’OPPBTP, l’organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics, fera un bon référentiel de branche.
Voilà ce que je voulais vous dire.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de reconnaître que des entreprises font d’énormes efforts pour améliorer la qualité de vie et les conditions de travail de leurs salariés. Je vous rappelle néanmoins qu’il existe une cotisation, à laquelle sont soumises toutes les entreprises, pour ce compte pénibilité ; il existe aussi une cotisation additionnelle dans les entreprises où il y a des salariés exposés. On pourrait donc imaginer un bonus pour les entreprises qui font de réels efforts.
Le sous-amendement no 735 n’est pas adopté.
L’amendement no 720 rectifié est adopté.
J’espère, à présent que nous sommes à peu près tous d’accord, que nous pourrons avancer vite. Cet amendement affirme que le fait, pour un employeur, d’avoir déclaré l’exposition d’un travailleur à des facteurs de pénibilité ne constitue pas une présomption de manquement à son obligation de sécurité de résultat. Le but est de clarifier la situation, afin d’éviter toute ambiguïté. On ne peut présumer qu’un employeur a manqué à son obligation d’assurer la sécurité et de protéger la santé des travailleurs du seul fait qu’il ait déclaré l’exposition de l’un de ses salariés. C’est donc un amendement de sécurisation juridique.
L’amendement no 719 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 215 .
Permettez-moi de revenir à la question du compte pénibilité. J’ai entendu beaucoup de choses, car cela fait maintenant deux heures que j’écoute patiemment ce qui est dit dans cet hémicycle. Vous devriez, monsieur le ministre, avoir plus de constance.
Mais nous en avons !
Vous nous reprochez d’être à l’origine des difficultés d’application du compte pénibilité. Je vous rappelle qu’à l’occasion de la réforme des retraites adoptées par la précédente majorité, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, nous avions commencé à travailler sur la notion de pénibilité. En aucun cas, nous n’avons bâti une usine à gaz telle que celle que vous avez réalisée ! La preuve, c’est que le génial dispositif prévu par la loi du 20 janvier 2014 censée garantir l’avenir et la justice du système de retraites aurait dû s’appliquer une année après la promulgation de la loi, mais vous nous avez dit – et le Premier ministre l’a reconnu lui-même devant le Sénat il n’y a pas très longtemps – qu’il était impraticable.
Partant de là, il faut admettre que l’impossibilité d’appliquer le compte pénibilité que vous avez conçu relève de votre propre responsabilité. Nous avons repoussé à juillet 2016 l’application de ce dispositif : la belle affaire !
Mais je vous garantis qu’en juillet 2016, les référentiels de branche ne seront pas tous terminés ! Vous avez pris en exemple, monsieur le ministre, la profession de coffreur : dans les métiers du bâtiment, il y a beaucoup de métiers différents. Ne serait-ce que dans la maçonnerie, il y a au moins une quinzaine de métiers différents : faudra-t-il élaborer quinze référentiels différents ?
Cet amendement est extrêmement grave, car il vise à supprimer le compte pénibilité.
Pourtant la prise en compte de la pénibilité est inscrite dans l’histoire. Permettez-moi de vous donner quelques explications sur ce point. La pénibilité ne remonte pas aux mesures que vous avez prises ; elle remonte à l’époque de Lionel Stoléru. Celui-ci avait reconnu par arrêté une quarantaine de professions comme étant pénibles. La définition des bénéficiaires de ce système était extraordinairement courte : tous ceux qui avaient exercé pendant quinze ans l’un des métiers définis comme pénibles avaient le droit de partir plus tôt en retraite.
Ah oui, c’était simple ! Le problème, c’est que cela a contribué ni plus ni moins qu’à la mise en place des régimes spéciaux ; les coûts ont explosé, et ce n’est qu’en 1981 qu’une solution a été trouvée, avec la retraite à 60 ans.
Par la suite, les débats sur la pénibilité ont repris en 2000 entre les partenaires sociaux. Pendant sept années, ces débats se sont poursuivis, sans aboutir à un accord, non pas parce qu’organisations patronales et organisations syndicales étaient en désaccord, mais parce qu’à l’intérieur des branches professionnelles, celles des services et celles de l’industrie s’opposaient, les unes accusant les autres de vouloir les faire payer à leur place.
Ce n’est pas nouveau !
C’est ensuite que le dispositif que vous évoquez a été mis en place. Madame Dalloz, arrêtez de prétendre que le dispositif prévu par la précédente majorité était extraordinaire, alors qu’il ne concernait que 5 000 personnes ! Il nous a donc fallu, dans un souci de justice sociale, revenir sur la question de la pénibilité au moment du débat sur les retraites.
De plus, sauf erreur de ma part, la position que vous défendez par cet amendement n’est pas celle de votre groupe. Si le groupe UMP entend supprimer le compte pénibilité, alors il faut le dire ! Monsieur Cherpion, puisque vous représentez le groupe UMP dans ce débat, je vous le demande clairement : votre groupe politique est-il favorable à la suppression du compte pénibilité ?
Même avis. Je partage l’analyse de M. le rapporteur ; j’ajoute qu’il y a eu un important rendez-vous manqué. M. le rapporteur a rappelé l’histoire du compte pénibilité, mais il n’a pas pu tout développer. Pour ma part, je ne m’y attarderai pas, mais je tiens à rappeler qu’en 2003, François Fillon s’était engagé, dans son accord avec la CFDT qui avait fait beaucoup de bruit à l’époque, à prendre en compte la pénibilité. Or dix ans plus tard, rien ne s’est passé : 5 000 personnes à peine sont concernées.
Comme l’a rappelé M. le rapporteur, beaucoup de gens éminents ont travaillé sur la pénibilité, notamment Yves Struillou, auteur en 2003 d’un rapport important. Xavier Bertrand a ensuite, par amendement, introduit la pénibilité dans notre droit. Par la suite, la majorité au pouvoir a introduit les dix facteurs de risque que nous avons repris.
Mais nous avons changé de paradigme, madame Dalloz : votre logique était celle de la réparation médicale, et concernait un peu plus de 6 000 cas. Nous sommes passés à un compte personnel de prévention de la pénibilité : le mot prévention est essentiel. Certes, il est difficile à mettre en oeuvre ; certes, il faut s’atteler à la tâche ; il n’en demeure pas moins que nous sommes passés d’un filtre aux mailles tellement serrées que personne, ou presque, ne pouvait s’y inscrire, à un régime plus général qui concerne chaque salarié. J’espère que ce dernier système trouvera bientôt son aboutissement.
L’amendement no 215 n’est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements, nos 106 rectifié , 177 et 178 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 106 rectifié et 177 sont identiques.
La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement no 106 rectifié .
L’amendement no 106 rectifié est retiré.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 177 .
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 178 .
Je suis saisi d’un amendement no 717 rectifié qui fait l’objet de deux sous-amendements identiques, nos 730 et 739 .
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement.
Je vais expliquer cet amendement à grands traits, pour que tout le monde comprenne de quoi il s’agit. Il vise à moduler les taux applicables aux cotisations spécifiques, et à abaisser le délai de recours. En résumé, ce compte a été créé pour combattre l’injustice devant l’espérance de vie : cela a été rappelé. L’un des éléments centraux de ce dispositif assure la responsabilité financière des entreprises, par un mécanisme de cotisation. Ce mécanisme vise à inciter les entreprises à multiplier les actions de prévention pour sortir leurs salariés des postes les plus exposés à la pénibilité, ce qui les conduirait à payer moins de cotisations. Payer moins de cotisations, cela intéresse tout le monde.
Le Gouvernement propose également d’abaisser le délai de prescription de l’action individuelle du salarié de trois à deux ans. L’effectivité des recours est en effet accrue si ceux-ci interviennent peu de temps après l’exposition contestée.
La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir le sous-amendement no 730 .
Ce sous-amendement reprend une recommandation d’un excellent rapport, le rapport Sirugue-Huot : ramener de cinq à trois ans le délai de contrôle des caisses. Pour concrétiser cette préconisation, il fallait faire vite : le rapport a été remis cette semaine ; il est aujourd’hui à l’étude : j’imagine bien que M. Sirugue, pas plus que nous, n’a eu le temps d’y travailler.
Par ailleurs, je trouve que les propos tenus tout à l’heure par M. Sirugue sont intolérables : je ne pense pas qu’un seul parlementaire, qu’il siège sur les bancs de droite, de gauche, du milieu ou d’ailleurs, s’oppose à la prise en compte des problèmes liés à la pénibilité et à la santé au travail. Chacun, dans cet hémicycle, à un moment ou à un autre, de façon certes différente, a apporté sa pierre, notamment en commission des affaires sociales, pour construire un édifice commun. Un édifice, cela ne se construit pas en un jour : il faut des bases ; or c’est nous qui avons jeté ces fondations par une loi que vous n’avez d’ailleurs pas votée.
Tout à l’heure, monsieur Issindou a avoué qu’il n’avait pas voté la loi de 2011 ; il reconnaissait pourtant qu’elle n’était pas dénuée d’intérêt. Il y a des moments, dans la vie, où on peut se tromper ; il y a des moments, dans la vie, où l’on fait des choix ; les choix de tous les députés présents ici sont respectables. Nous avons toujours pris en compte les problèmes humains. Il ne faut pas lancer des débats stériles pour savoir si c’est en 2003, en 2005 ou en 2008 que tout a commencé : le vrai problème, c’est la santé des gens au travail.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 739 .
Ce sous-amendement reprend effectivement une préconisation du rapport Sirugue. Je me souviens qu’à l’époque, l’on avait avancé le raisonnement suivant : puisque cinq ans d’arriérés représentent un montant très lourd, il faut réduire la durée entre les contrôles des caisses, pour éviter des pénalités très lourdes pour les entreprises.
Pour les raisons qui ont déjà été évoquées, avis favorable aux sous-amendements identiques nos 730 et 739 , ainsi qu’à l’amendement no 717 rectifié du Gouvernement.
J’ai bien montré, monsieur Cherpion, en retraçant la généalogie de ce dispositif, que chacun avait participé à son élaboration. Simplement, je réagissais à la proposition, faite par l’une de nos collègues, de supprimer le compte pénibilité. Je continuerais à réagir à de telles propositions, que cela vous plaise ou non, car demander la suppression du compte pénibilité revient à refuser de reconnaître que dans certains métiers, certaines professions, ceux qui partent à la retraite ont moins d’années à vivre en bonne santé : c’est cela, la réalité ! Je me devais de relever cet amendement qui se contentait de demander la suppression du compte pénibilité.
J’invite chacun à se ressaisir et à revenir à l’esprit qui nous anime depuis le début.
Vous avez raison, il faut que le rapporteur se ressaisisse : il s’énerve trop facilement.
Les sous-amendements défendus par nos collègues reprennent une proposition du rapport de Christophe Sirugue : ramener de cinq à trois ans le délai de prescription de l’action de contrôle de la CARSAT, la Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail. L’avis du Gouvernement est donc favorable.
Quelques mots sur le compte personnel de prévention de la pénibilité. Parmi tous les amendements déposés, les amendements nos 718 rectifié , 720 rectifié et 719 ne nous posent pas de problème. En revanche, nous sommes très préoccupés par l’amendement no 717 rectifié , que j’ai déjà brièvement évoqué dans mon intervention, d’abord parce que nous trouvons qu’il est très dommageable de réduire de trois à deux ans le délai accordé au salarié pour agir en justice si nécessaire. Ensuite, concernant la méthode employée pour moduler les cotisations des employeurs servant à financer le fonds de financement des droits liés à ce compte, la loi a fixé, pour l’heure, deux assiettes de cotisation, l’une comprise entre 0,3 % et 0,8 %, l’autre entre 0,6 % et 1,6 % des salaires versés aux personnes concernées.
Avec cet amendement, vous décidez d’inscrire dans la loi une baisse de ces cotisations en ramenant la première assiette à 0,1 % et la seconde à 0,2 %. Vous abaissez donc durablement, puisque c’est dans la loi, le taux de cotisation, qui est désormais extrêmement bas et vous portez ainsi atteinte aux moyens financiers permettant la mise en oeuvre du fameux compte de pénibilité que vous défendez. La responsabilisation dont vous parliez à l’instant, monsieur le ministre, je ne la vois pas. Au contraire, je vois là des signes invitant à beaucoup de laxisme.
Nous voterons donc contre cet amendement sur lequel, monsieur le président, le groupe GDR demande un scrutin public.
S’agissant de la prescription, je partage l’avis de Mme Fraysse : je ne comprends pas pourquoi le délai est ramené de trois à deux ans. Pour ce qui est des taux proposés, indépendamment de leur niveau eux-mêmes, il me semble, sauf erreur de ma part, qu’ils viennent réparer une erreur contenue dans le décret publié, puisque les pourcentages fixés par la loi n’avaient pas été repris par celui-ci. C’est en tout cas ma lecture.
Sur l’amendement no 717 rectifié , je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole à Mme Isabelle Le Callennec.
Toutes les entreprises cotiseront pour ces comptes pénibilité, y compris celles qui n’ont aucun salarié exposé. Inutile de vous dire que cette disposition continue à faire réagir les entreprises n’ayant pas de salariés exposés, car elles prennent cela pour une injustice.
Dans l’exposé sommaire, monsieur le ministre, il est écrit que le coût du dispositif sera de 500 millions d’euros en 2020, 2 milliards en 2030, 2,5 milliards en 2040. Puis vous nous annoncez la modulation à la baisse des taux applicables aux deux assiettes de cotisations servant à constituer les recettes du fonds – Mme Fraysse vient de l’évoquer. Ces évaluations – 500 millions d’euros, 2 milliards, 2,5 milliards – tiennent-elles compte de la modulation des taux ? Par ailleurs, est-on certain que ces fonds financeront bien les droits ouverts – la formation, le temps partiel, le départ à la retraite anticipée –, et peut-on un instant imaginer qu’ils pourraient être utilisés pour l’amélioration des conditions de travail ? Il y aurait là une vraie logique.
Je ne comprends pas pourquoi nous raccourcissons le délai de prescription des actions sur les droits liés au compte pénibilité, alors qu’il a été fixé très récemment – dans le cadre de la loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites. Je ne peux pas m’empêcher de le comparer avec un autre délai de prescription que je connais : celui d’une action d’un bailleur contre son locataire pour récupérer des loyers, qui est de cinq ans. Pourquoi l’action d’un salarié sur un droit lié au compte pénibilité devrait-elle être soumise à un délai de deux ans ?
Je me permets de comparer ce délai à ceux adoptés récemment dans le cadre de la loi sur la sécurisation de l’emploi. Conformément à l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, le délai de prescription d’une action liée aux salaires est passé de cinq à trois ans. Pour ce qui concerne les autres actions liées au contrat de travail, ce délai est de deux ans. Mais il me semble que la plupart des droits liés au compte pénibilité s’acquièrent année par année. Par conséquent, ils sont plus facilement assimilables à un salaire. Pourquoi ne pas en rester à un délai de trois ans ? Ce serait plus clair et plus simple.
Certes, il est écrit dans l’exposé sommaire de l’amendement que l’effectivité des recours est accrue si ceux-ci interviennent peu de temps après l’exposition contestée. Mais cela me paraît extrêmement contestable : d’abord, dès lors que le recours est recevable, son effectivité peut être la même ; ensuite, puisque nous sommes juste après la Pentecôte, je rappelle que l’ouvrier de la vingt-cinquième heure doit avoir le même salaire que celui de la première.
Il est important d’expliquer la raison de la réduction de trois à deux ans du délai de prescription, disposition qui faisait partie des préconisations de notre rapport. Il s’agit du délai de prescription de l’action individuelle du salarié, qui court à compter de la réception des informations de la CNAV sur sa situation d’exposition aux facteurs de pénibilité. Passer d’un délai de trois à deux ans ne change rien, pour une raison simple : si un salarié n’a pas contesté les éléments contenus dans sa fiche deux ans après sa réception, je ne vois pas pourquoi il le ferait au bout de trois ans.
Pourquoi avons-nous fixé un délai de deux ans ? Et je m’adresse notamment ici à ceux qui proposaient, par amendement ou sous-amendement, un délai d’un an. Nous l’avons ramené à deux ans parce que, en additionnant tous les délais de recours possibles – le délai de deux mois après le rejet de la réclamation par l’employeur, le délai de réponse de six mois s’appliquant à la caisse et tous les délais supplémentaires –, nous parvenons à un total de quinze mois. Ce total nous a paru compatible avec les vingt-quatre mois que nous avons fixés. Ce n’est en rien une diminution des possibilités de recours mais c’est plutôt du pragmatisme : s’agissant des situations d’exposition à des facteurs de pénibilité, le recours est d’autant plus effectif qu’il intervient peu de temps après l’exposition contestée. Objectivement, c’est davantage dans l’intérêt du salarié.
Je mets aux voix l’amendement no 717 rectifié , tel qu’il a été sous-amendé.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants: 24 Nombre de suffrages exprimés: 24 Majorité absolue: 13 Pour l’adoption: 18 contre: 6 (L’amendement no 717 rectifié est adopté.)
La parole est à M. Gérard Sebaoun, pour soutenir l’amendement no 673 rectifié .
Je pense que cet amendement pourra être recevable car il reprend simplement les préconisations du rapport Verkindt sur les CHSCT : il vise à permettre au médecin du travail qui assiste avec voix consultative à ce comité de se faire remplacer par un membre du service de santé au travail ayant compétence en la matière.
L’amendement no 673 rectifié , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Nous avons déjà évoqué le sujet du burn-out, je ne vais donc pas y revenir. Nous proposons qu’un rapport soit remis au 1er septembre. On nous objecte que le délai est peut-être un peu court : nous pouvons envisager de le reporter de quelques mois. L’objectif est d’avancer, d’une part, sur l’inscription des affections psychiques au tableau des maladies professionnelles et, d’autre part, sur l’amélioration de la prise en charge par la voie complémentaire des maladies qui n’y sont pas inscrites. L’hypothèse d’une remise en cause du taux de 25 % d’incapacité a été évoquée et c’est un premier pas.
Ce rapport doit servir à éclairer les futurs travaux de l’Assemblée nationale. En outre, je n’ai pas eu le temps de rappeler tout à l’heure qu’à la faveur du débat sur la pénibilité, nous avons pu mesurer combien ce sujet avait été jugé complexe et difficile. Nous sommes pourtant parvenus à lui apporter une réponse. J’entends les mêmes types d’arguments aujourd’hui sur la question du burn-out : ce serait complexe et difficile. Il me semble que nous avons tous les éléments pour avancer plus vite sur le burn-out que nous l’avons fait sur la pénibilité.
Vous connaissez encore mieux que nous le fonctionnement parlementaire, monsieur Hamon. Il ne paraît pas pertinent de demander un rapport pour septembre 2015, alors que le projet de loi sera adopté, dans le meilleur des cas, en juillet, si tout va bien et si le Gouvernement recourt au 49-3.
Sourires.
Objectivement, même avec la meilleure volonté du monde et les meilleurs collaborateurs dont le ministre pourrait s’entourer, il paraît impossible d’avoir une évaluation à cette date. L’échéance de juin 2016 me paraît plus pertinente.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et les sous-amendements ?
Premièrement, l’amendement no 660 du Gouvernement et l’amendement identique no 701 présenté par M. Hamon peuvent être considérés comme une première étape importante dans la reconnaissance du burn-out comme maladie professionnelle. Un rapport permettra d’étudier les autres voies de reconnaissance de cette pathologie, mais la proposition de M. Hamon pose un problème de délai. Sous-réserve de l’adoption du sous-amendement no 732 de M. Cherpion, qui vise à reporter la date de remise du rapport, j’émettrai un avis favorable.
S’agissant des trois autres sous-amendements, j’émets un avis défavorable.
Même avis.
Le sous-amendement no 732 est adopté.
L’amendement no 335 , sous-amendé, est adopté.
La parole est à Mme Valérie Corre, première oratrice inscrite sur l’article 20.
Avec l’article 20 de ce projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi, nous allons mettre un terme à la précarité qui accompagne depuis longtemps le statut d’intermittent du spectacle. Par l’adoption de cette disposition, nous pouvons enfin reconnaître dans la loi la spécificité des métiers du spectacle et la nécessité de pérenniser les règles qui leur sont applicables, tout en restant dans le cadre de la solidarité interprofessionnelle. Enfin, par le vote de cet article, nous garantissons à ces professionnels la pérennité de leur métier et la reconnaissance de l’État pour leurs contributions au développement de la culture, et donc au rayonnement de la France.
Concrètement, cet article intègre dans la loi les annexes VIII et X de la convention d’assurance chômage, garantissant ainsi de la visibilité et de la stabilité aux professionnels du spectacle. En cohérence avec ce projet de loi, il contribue au dialogue social dans la mesure où il permettra de ne plus voir ce statut menacé de disparaître à chaque négociation, simplement par jeu politique.
Au contraire, l’article 20 a été renforcé par les amendements adoptés au cours de son examen en commission des affaires culturelles et de l’éducation, et je salue à cette occasion le grand travail fourni par notre rapporteur pour avis, Jean-Patrick Gille. Notre commission des affaires culturelles et de l’éducation a donc placé l’article 20, et donc l’avenir de ce régime spécifique d’indemnisation des intermittents entre les mains des partenaires sociaux, et ce à travers l’instauration d’une procédure inédite de négociation en deux temps, mêlant organisations représentatives de salariés et d’employeurs, mais aussi représentants des professions du spectacle. Il s’agit donc d’un vrai progrès social pour l’ensemble des professionnels du spectacle, pour l’industrie culturelle mais surtout pour notre conception d’un dialogue social moins conflictuel, plus juste et plus apaisé.
La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
Nous en arrivons, effectivement, à la discussion de l’article 20. Je voudrais que nous prenions collectivement la mesure de ce que nous allons vivre, à cet instant, dans l’hémicycle, à travers la consécration législative de l’existence de règles spécifiques pour l’indemnisation chômage des intermittents contenues dans les annexes VIII et X de la convention UNEDIC. Je dis cela parce que, pour suivre ce dossier depuis longtemps, je sais que nous allons enfin inscrire dans la loi, ce que le comité de suivi – que nous avions créé lors du précédent conflit, en 2003, avec Étienne Pinte, Noël Mamère, Jean-Pierre Brard, sans oublier l’incontournable Jack Ralite – n’avait pu, à l’époque, obtenir.
Oui.
De ce fait, je voudrais, après Valérie Corre, saluer l’investissement tout particulier du rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, Jean-Patrick Gille, que nous avions, d’ailleurs, investi de cette mission dès le début de la législature quand, avec Catherine Lemorton, nous avions décidé de la création d’une mission d’information commune à la commission des affaires sociales et à la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
De ce fait, nous allons, en ce moment précis, au-delà de la consécration législative des annexes VIII et X, mettre en place une forme de délégation de négociation au niveau interprofessionnel vers le niveau professionnel, et ainsi faire en sorte qu’employeurs et salariés du secteur ne soient pas exclus de la renégociation des annexes lors de chaque renégociation de la convention UNEDIC.
C’est la pérennisation du comité d’experts, ô combien nécessaire, et, enfin, la redéfinition des listes d’emplois ouvrant droit au recours à ce qu’on appelle le CDDU, le contrat à durée déterminée d’usage. Nous allons donc, plus que jamais, affirmer la nécessité que les règles spécifiques d’indemnisation chômage des intermittents s’inscrivent dans la solidarité interprofessionnelle et assurent stabilité et sécurité dans la loi de la République.
En juin 2014, suite à des manifestations de professionnels de l’audiovisuel et du spectacle, qui menaçaient d’annuler de nombreux festivals d’été, le Premier ministre avait confié une mission à trois personnalités, dont notre collègue Jean-Patrick Gille. Le Premier ministre, qui ne rate plus une occasion d’affirmer qu’il aime la culture, avait fait siennes trois propositions, qui sont aujourd’hui traduites dans cet article 20.
Il s’agit de la sanctuarisation du dispositif particulier d’indemnisation du chômage, les fameuses annexes VIII et X, qui sont uniques en Europe ; de la définition de nouvelles règles de négociation – car les partenaires sociaux représentants du spectacle et de l’audiovisuel négocieront les paramètres propres au régime d’indemnisation des intermittents, et notamment les modalités de calcul des droits ; de la création d’un fonds de développement de l’emploi culturel, abondé par l’État, pour ne pas appliquer aux intermittents, vous vous en souvenez, le différé d’indemnisation qui s’appliquait aux autres salariés dans la convention UNEDIC.
Alors, avec cet article 20, si je comprends bien, le Gouvernement permet à un secteur professionnel d’élaborer ses propres règles, en marge des négociations interprofessionnelles. Cela crée un précédent, et ne règle en rien la question de la définition du champ de l’intermittence. En outre, cet article ne nous dit absolument rien sur le niveau d’abondement du fonds de développement de l’emploi culturel.
Nous en venons aux amendements.
Puisque je préside la séance, je ne puis défendre l’amendement no 10 tendant à la suppression de l’article 20. Cet amendement est retiré.
L’amendement no 10 est retiré.
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, pour soutenir l’amendement no 583 .
L’amendement no 583 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte, pour soutenir l’amendement no 655 .
Cet amendement permet d’évoquer la situation, très préoccupante et très problématique, depuis de nombreuses années, de celles qu’on appelle les « matermittentes ». Vous savez qu’actuellement, les intermittentes respectant la législation sur le congé maternité se trouvent souvent privées de ressources financières pendant la durée de ce congé pourtant évidemment obligatoire et nécessaire. Il s’agit donc là d’une discrimination qui doit absolument cesser.
Pour veiller à la prise en compte de l’objectif d’égalité entre les femmes et les hommes et de cette situation particulière des « matermittentes » dans le cadre des négociations, l’amendement que je présente propose de compléter l’article 20 afin de rappeler les dispositions prévues par la loi du 27 mai 2008 concernant l’interdiction de toute discrimination directe ou indirecte en raison de la grossesse ou de la maternité.
Il s’agit, comme vous l’avez rappelé, de la question des « matermittentes ». Je rappelle qu’en commission, nous avons déjà adopté un amendement de Mme Attard sur le sujet. Je comprends parfaitement la philosophie de votre amendement, qui consiste à dire qu’il faut résoudre cette question des « matermittentes ». Elles ne doivent pas être victimes de discriminations directes ou indirectes, ce qui est le cas en raison de complexités administratives qui sont en voie de résorption. Un décret a été modifié pour passer de 200 à 150 heures, et une circulaire diffusée auprès des services sociaux. Je pense que ce n’est pas encore tout à fait suffisant. Mais l’examen en commission, comme des travaux antérieurs, ont permis d’engager ce processus.
Mais si on peut en partager le principe, votre amendement pose problème, justement parce que ce principe général, applicable à toutes les femmes, est déjà inscrit dans la loi.
Il n’y a pas de raison d’insérer ici un principe déjà inscrit dans la loi, à un niveau supérieur. Les « matermittentes » peuvent déjà se prévaloir de loi de 2008 : il n’est donc pas nécessaire de légiférer à nouveau sur ce point puisqu’il est totalement satisfait.
Très bien !
Je vous invite, madame Carrey-Conte, à retirer votre amendement, en vous indiquant d’ores et déjà que j’émettrai un avis favorable sur un autre amendement, à la fin de cet article, demandant un rapport sur la situation des « matermittentes ». Il faut en effet s’assurer que le processus d’amélioration qui est déjà en cours est bien suivi d’effet.
Même avis.
Je suis désolée mais je ne vais pas retirer cet amendement, parce que je crois vraiment qu’il y aurait un intérêt à passer de l’écriture de la loi à une nouvelle section dans le code du travail, car cela devrait donner un signal clair à l’ensemble des acteurs concernés que sont Pôle emploi, l’UNEDIC, mais aussi les partenaires sociaux et la Caisse primaire d’assurance maladie. Cela permettrait aux partenaires sociaux d’avoir un levier supplémentaire pour avancer sur cette question. Je crois que cela ne coûte pas grand-chose, et que cela peut constituer un point d’appui supplémentaire pour résoudre cette question qui, encore une fois, dure depuis très longtemps.
La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
Je voudrais vraiment persuader notre collègue Fanélie Carrey-Conte parce que, pour avoir présidé les travaux de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, repris ensuite par la commission des affaires sociales et par son rapporteur Christophe Sirugue, je peux témoigner que nous avons vraiment consacré un temps de discussion approfondi à la question des « matermittentes ». Nous sommes allés jusqu’à adopter, et cela a été rappelé à l’instant par Jean-Patrick Gille, un amendement de notre collègue Isabelle Attard.
Je ne voudrais donc pas, si vous ne retiriez pas votre amendement, que, compte tenu de l’avis défavorable donné, nous votions contre et qu’il ressorte de notre échange que nous n’avons pas traité, à l’article 20, le problème des « matermittentes ». C’est pour cette raison que je me suis permis de prendre la parole, parce que ce problème est traité, et bien traité. Et il n’est pas nouveau.
Le président Bloche est toujours très convaincant. Comme je sais qu’en plus, un autre amendement, examiné ultérieurement, recevra un avis favorable, je veux bien le retirer. Mais ce qui est vraiment important, c’est que nous puissions continuer à avancer sur cette question, y compris au-delà de l’aspect législatif, dans le travail avec les partenaires sociaux et les différents partenaires impliqués.
L’amendement no 655 est retiré.
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement no 468 .
Le président Bloche a rappelé les quatre points qui figurent à cet article. Les deux premiers sont la sanctuarisation dans la loi des annexes VIII et X, point central qui a permis d’apaiser le conflit que nous avons connu au printemps dernier, et le nouveau mode de négociation créant une articulation entre le niveau interprofessionnel, qui fixe un cadrage, et le niveau professionnel, qu’on aide à se constituer.
Madame Le Callennec, je ne vous ai pas répondu tout à l’heure lorsque vous vous interrogiez. Je crois qu’un des enjeux du scénario de sortie de crise que nous avons proposé est de responsabiliser les acteurs au niveau professionnel. Or, jusqu’à présent, nous avions un dispositif dans lequel, finalement, les personnes directement concernées, salariés et employeurs du spectacle vivant et enregistré, n’étaient pas consultées sur les décisions qui étaient prises. Or celles-ci étaient très importantes pour elles puisqu’elles déterminaient, notamment pour les comédiens et pour les artistes-interprètes, leur vie quotidienne. Nous avons donc organisé cela.
Le troisième point qui nous a permis de sortir de cette crise a été d’objectiver les choses en créant un comité d’experts, qui a permis une modélisation du système, à partir de 10 000 cas concrets. Il nous a permis de disposer d’un diagnostic et d’études partagés, et de mesurer les effets produits par des variations des paramètres. Les débats qu’il nous reste, finalement, à traiter ici en séance – ceux qui se sont déroulés en commission des affaires culturelles et de l’éducation, puis en commission des affaires sociales, ont fait l’objet d’un large consensus – concernent le rôle du comité d’experts, qu’il faut préciser.
Je propose des amendements qui vont dans le sens d’une clarification et d’une simplification, et qui consistent à pérenniser ce comité d’experts que nous avons mis en place au cours de la concertation qui a eu lieu au semestre dernier. Ce comité est composé de statisticiens, de l’État, de l’UNEDIC, de Pôle emploi, et d’Audiens, qui est le système qui suit toutes les prestations sociales des salariés du spectacle. La formulation retenue dans le texte initial invitait les organisations professionnelles et interprofessionnelles à désigner des personnalités : je pense que cela semait le trouble. Je propose simplement que ce soit l’État qui désigne, par décret, plusieurs personnalités qualifiées. Bien évidemment, le décret précisera que cela se fera après concertation des milieux professionnels et interprofessionnels.
Favorable.
L’amendement no 468 est adopté.
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement no 470 . S’agit-il de la même idée ?
Sourires.
Il ne s’agit pas tout à fait du même sujet. Lors de l’examen en commission des affaires culturelles et de l’éducation, nous avions adopté un amendement qui n’avait pas pu être adopté par la commission des affaires sociales. À la demande du Gouvernement, nous avions accepté de le revoir. L’idée est que ce comité d’experts sera non pas une nouvelle structure ou un comité qui sanctionnerait les propositions qui seront faites, mais bien un groupe d’appui technique. Nous avons voulu spécifier, dans la nouvelle rédaction de cet amendement, qu’il doit étudier toutes les demandes faites par le secteur professionnel.
L’une des clés du conflit, c’est que, comme l’a rappelé le président Bloche, des propositions avaient été faites par la plateforme, la CGT spectacle, par la Coordination des intermittents et précaires, sans être jamais étudiées ni évaluées. Nous apportons au secteur professionnel la garantie qu’il aura un groupe d’appui bien à lui et indépendant de l’UNEDIC, même si elle y participe fortement, et que toutes ses demandes seront évaluées, puisqu’il s’agira de son groupe d’appui technique, de son groupe d’expertise. En même temps, l’interprofessionnel pourra, elle aussi, le solliciter. Nous sommes, à mon sens, parvenus à une rédaction satisfaisante, même si j’attends le verdict du Gouvernement…
Puisque le rapporteur attend l’avis du Gouvernement…Avis très favorable !
L’amendement no 470 est adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 454 rectifié et 614 rectifié .
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement no 454 rectifié .
C’est un amendement rédactionnel. Nous venons de modifier l’alinéa 11 qui comporte désormais trois phrases au lieu de deux. L’amendement précédent a remplacé le mot « avis », qui risquait de laisser penser que ce comité pouvait être censeur des propositions faites, par le mot plus simple d’« évaluation ». Cet amendement vise donc à harmoniser la rédaction de l’alinéa 11 en remplaçant également « avis » par « évaluation » dans sa dernière phrase.
La parole est à M. Christophe Sirugue, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 614 rectifié .
Les amendements identiques nos 454 rectifié et 614 rectifié , acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 330 .
L’alinéa 14 de cet article prévoit que les organisations représentatives d’employeurs et de salariés des professions du spectacle renouvellent la liste des emplois autorisés à faire l’objet de contrats à durée déterminée d’usage – CDDU. Toutefois, les principales organisations syndicales des professions intermittentes du spectacle ont souligné devant nous que ces listes sont contraires à la directive européenne 99700, qui récuse le recours au CDDU sur le seul motif que l’emploi concerné serait inscrit sur une telle liste. Comme l’a d’ailleurs confirmé la Cour de cassation, c’est la nature de l’activité qui doit pouvoir justifier le recours ou non au CDDU. C’est pour ces raisons que nous avons déposé cet amendement qui propose de substituer à la notion de métier celle de nature de l’activité.
Cet amendement avait été retiré en commission afin d’être retravaillé. Je comprends aussi bien sa philosophie que les arguments défendus et l’objectif recherché. Cependant, je pense que votre amendement ne répond pas à l’objectif que vous visez – et que je partage – qui consiste à dire que ce n’est pas parce qu’un emploi est dans la liste annexée aux conventions collectives que l’on peut l’utiliser en CDDU ; mais qu’il faut d’abord qu’il réponde à l’exigence d’être un CDD. Or, dans ce que vous proposez, l’activité doit déjà être prise en compte. Cela ne répond donc pas à votre objectif. C’est pourquoi je vous suggère de retirer votre amendement. Pour vous y encourager, sachez que je donnerai un avis favorable à l’amendement no 332 , qui me paraît mieux répondre à la question que vous essayez de résoudre.
Je vois l’écueil que souligne M. Gille et j’accepte donc de retirer mon amendement.
L’amendement no 330 est retiré.
Vous gardez la parole, madame Fraysse, pour soutenir l’amendement no 332 .
Cet amendement vise à réduire la précarité induite par un recours parfois abusif aux contrats à durée déterminée d’usage. Nous proposons, avant le réexamen de la liste des emplois ouvrant droit à un CDDU, que les organisations représentatives au niveau professionnel, de salariés et d’employeurs, négocient les conditions de recours au CDDU. Ces négociations permettraient notamment d’évaluer dans quelle mesure la notion de nature de l’activité pourrait être pleinement intégrée dans l’appréciation des métiers ouvrant droit au CDDU. C’est toujours la même préoccupation.
C’est en effet le même sujet, mais la rédaction est cette fois plus complexe. Au cours de l’examen en commission, nous avions fait deux préconisations, à la suite des trois points que nous venons de voir : demander à chaque branche de réexaminer la liste des emplois et encadrer le recours au CDDU. En effet, dans le code du travail, les conditions de ce recours tiennent en une ligne, si je puis dire. Il faudrait donc repréciser des points, notamment pour lutter contre les abus : les contrats d’une heure – il pourrait y avoir une négociation des partenaires sociaux pour dire qu’ils ne sont pas possibles ; ce que l’on appelle la « permittence », où, à l’opposé, des salariés font plusieurs dizaines de contrats avec le même employeur dans l’année ; la « rotomittence », qui consiste à faire tourner les salariés sur le même poste pour des contrats très courts.
Il est vrai que le Gouvernement avait dit que la négociation pouvait se faire dans le silence de la loi. Pour ma part, puisque nous y avions pensé, je suis assez satisfait de l’inscrire clairement dans la loi, d’autant que cela fait système avec le texte relatif aux listes. C’est, à mon sens, une excellente chose. Par contre, madame Fraysse, je vous demanderais de modifier un peu la rédaction et de supprimer les mots : « la politique contractuelle et notamment », car c’est très large, pour ne laisser que : « Les organisations représentatives au niveau professionnel de salariés et d’employeurs négocient avant le 30 juin 2016 les conditions de recours au contrat à durée déterminée d’usage ». Je vous propose ce sous-amendement qui préciserait la portée de votre amendement.
Je ne suis pas saisi de sous-amendement. Nous ne sommes pas en commission. Avançons.
Quel est l’avis de la commission saisie au fond ?
La commission avait émis un avis défavorable, car nous n’avions pas tous les éléments. À titre personnel, j’émets un avis favorable.
L’amendement no 332 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 333 .
Avez-vous tenu compte, monsieur le président, du sous-amendement présenté par M. Gille, que j’accepte ?
Je n’ai pas été saisi d’un sous-amendement, madame Fraysse. Nous ne sommes pas en commission, mais en séance publique, où les choses doivent être préparées. Vous avez la parole pour soutenir l’amendement no 333 .
L’amendement no 333 est retiré.
Cet amendement, que je défends notamment avec Sandrine Mazetier et Fanélie Carrey-Conte, vise à revenir sur le cas que nous avons évoqué au début du débat sur l’article 20, s’agissant de la situation des « matermittentes ». Il s’agit de demander au Gouvernement la production d’un rapport dans l’année qui suit la promulgation de la présente loi concernant la situation des artistes et techniciennes intermittentes du spectacle, notamment leurs conditions d’accès aux prestations maladie et maternité et à l’assurance chômage, lorsqu’elles sont en situation de grossesse ou de congé maternité.
Mon cher collègue, vous n’êtes pas signataire de cet amendement, vous n’étiez donc pas en mesure de le défendre.
La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte, pour soutenir l’amendement no 693 .
Il n’a pas été examiné en commission, mais comme je l’ai dit tout à l’heure, à titre personnel et comme beaucoup d’entre nous ce soir sans doute, je suis très favorable à ce rapport sur les « matermittentes ».
L’amendement no 693 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 20, amendé, est adopté.
Les articles 20 bis et 20 ter sont successivement adoptés.
Je suis saisi d’un amendement no 525 portant article additionnel après l’article 20 ter, et qui fait l’objet d’un sous-amendement no 722 .
Son signataire, M. Muet, n’est pas là, mais la commission a repris l’amendement à son compte. La parole est à M. Christophe Sirugue, rapporteur, pour le soutenir.
Cet amendement propose une dérogation au temps de travail de jeunes mineurs employés par des entreprises du secteur du spectacle. Il s’agit d’accorder une dérogation pour des jeunes concernés par une situation très particulière. Ils sont soumis à l’obligation scolaire, mais, en raison de cette obligation, ils sont tenus de respecter un temps de repos de 48 heures au minimum, ce qui leur interdit, par exemple, de se produire un samedi. L’amendement propose de réduire le temps de repos à 36 heures. J’y suis favorable, sous réserve que le sous-amendement no 722 , lequel corrige une erreur de référence, soit adopté.
Le sous-amendement no 722 est donc ainsi défendu.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Je suis favorable à l’amendement ainsi sous-amendé.
Le sous-amendement no 722 est adopté.
L’amendement no 525 , sous-amendé, est adopté.
Monsieur le rapporteur, vous avez été rapide dans votre présentation de l’amendement no 525 . Il faut bien voir que nous venons d’inverser la hiérarchie des normes, puisqu’un accord collectif peut déroger à la loi, dans cet amendement que vous avez fait voter après l’avoir repris !
S’agissant de l’amendement no 181 , le Gouvernement présente dans son texte un article qui vient créer le compte personnel d’activité. Sur le fond, l’UDI n’a pas d’avis négatif à donner : il concerne la portabilité des droits et vise à changer le paradigme que l’on connaît auprès des salariés, puisque la mobilité professionnelle est de plus en plus importante. Néanmoins, la méthode laisse à désirer. Vous n’avez pas respecté l’article 1er du code du travail, ni produit de document d’orientation comprenant les objectifs et un certain nombre d’éléments à proposer aux partenaires sociaux pour engager une négociation qui permettrait de définir ce qu’est, pour eux, le compte personnel d’activité. Vous avez déjà fixé dans la loi la norme de ce compte, sans même avoir l’avis des partenaires sociaux. C’est pourquoi nous proposons la suppression de l’article 21, de façon que les partenaires sociaux puissent en débattre et que vous puissiez le réinscrire ultérieurement dans la loi, si tant est qu’il n’y ait pas un accord interprofessionnel qui puisse être étendu sans passer par la loi.
Cet amendement vise également à supprimer cet article. Le compte personnel d’activité a été créé sans aucune concertation avec les partenaires sociaux. À ce qui a été dit par notre collègue Vercamer, j’ajouterai que la création de ce compte risque de complexifier encore plus les tâches administratives des chefs d’entreprise, de l’artisanat et du commerce de proximité, et ce en plein prétendu « choc de simplification ».
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 216 .
Je suis étonnée. Le texte traite du dialogue social, qui est d’abord, à mon sens, de la concertation. Or là, il n’y a eu aucune concertation avec les partenaires sociaux, ni aucune négociation. Vous créez, par la loi, un nouveau dispositif dont vous fixez vous-mêmes les normes, ce qui est quand même très étonnant. Vous écrivez qu’il s’impose au 1er janvier 2017. Tout va bien ! Vous inscrivez dans la loi ce qu’il doit prendre en compte. Je me pose une question, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre : avez-vous vraiment l’intention de ficher tout le monde ? Vous êtes en train de faire des fiches pour tout et sur tout le monde.
M. le rapporteur semblait dire tout à l’heure que la fiche instituée pourrait être dématérialisée : comme si le fait de dématérialiser des documents signifiait qu’on n’est pas en train de suivre tout le monde ! Franchement, si une autre tendance politique que la vôtre avait créé ce genre de dispositif, vous auriez hurlé au scandale en rappelant que le fait d’enregistrer dans un document tout ce qui concerne un salarié est une façon de le ficher.
La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, pour soutenir l’amendement no 362 .
Quand le Président de la République a annoncé, lors d’une émission de télévision, la création de ce compte personnel d’activité, je me suis demandé ce que c’était encore que ce compte supplémentaire. Il fallait déjà digérer le compte personnel de formation – ce qui n’est pas tout à fait le cas dans les régions, car il n’est pas si simple de le mettre en oeuvre concrètement –, ainsi que le fameux compte pénibilité, dont on a largement parlé. Le Président nous avait présenté cette mesure comme un droit supplémentaire pour les salariés ; pour ma part, je me suis demandé ce que cela allait vraiment apporter.
Aujourd’hui, les salariés veulent travailler dans de bonnes conditions ; ils veulent être augmentés quand l’entreprise va bien et être sécurisés quand elle va moins bien. Quant aux demandeurs d’emploi – car il faut aussi penser aux 3,6 millions de chômeurs, même si on est en train d’examiner un texte sur le dialogue social –, qu’est-ce que la création de ce compte d’activité va leur apporter ?
En revanche, monsieur le ministre, j’étais très intéressée par les débats que nous avons eus sur le CV anonyme ; aussi, je me permets à nouveau de vous proposer d’examiner avec bienveillance la proposition d’un « CV citoyen ». Ce qui compte aujourd’hui, c’est qu’un salarié puisse faire la liste de toutes les compétences professionnelles qu’il a développées dans une entreprise, afin de pouvoir les mettre en avant devant son futur employeur le jour où il quitte son entreprise ou lorsqu’il est au chômage.
Mais, une fois de plus, le compte personnel d’activité n’est rien d’autre qu’un affichage, parce que le Président de la République devait absolument annoncer quelque chose, un jour, à la télévision et qu’il était à court d’arguments.
Si je résume, il y a, de la part des auteurs de ces amendements de suppression, deux points d’opposition.
Le premier consiste à dire, comme M. Lurton, que nous complexifions le dispositif.
Le second consiste à dire que nous ne respectons pas l’article L. 1 du code du travail ; c’est ce que développe M. Vercamer.
Sur le premier élément, je rappelle que ce dispositif procède d’un souhait de simplification.
En effet, nous ne créons aucun droit nouveau : nous proposons de regrouper dans ce dispositif les comptes individuels, de formation ou de pénibilité, qui ont d’ores et déjà été mis en place. De ce point de vue, je pense que cela apporte plutôt de la simplification, même s’il reviendra aux partenaires sociaux de dire comment ils entendent faire vivre ce dispositif.
Sur le second élément, je laisserai M. le ministre développer car, objectivement, c’est plus à lui qu’il revient de répondre. Je dirai tout de même que l’échange a déjà eu lieu avec les partenaires sociaux sur ce dispositif. Aujourd’hui, nous inscrivons dans la loi le principe de la mise en place du compte personnel d’activité et nous renvoyons au dialogue avec les partenaires sociaux le soin de définir deux sujets, même s’ils peuvent se pencher sur d’autres : la portabilité et la mutualisation des droits acquis.
Mais, une fois encore, il n’y a là rien de nouveau, et je répondrai à Mme Le Callennec que ce dispositif n’est pas né à l’occasion de la déclaration faite par le Président de la République. Il portait tout simplement un autre nom : cela fait des années que l’on parle de sécurisation des parcours professionnels.
Nous le savons, la période où chacun passait toute sa vie dans la même entreprise est révolue. Les parcours sont désormais hachés ; on exerce plusieurs emplois différents, avec des employeurs différents.
Pouvoir regrouper l’ensemble des éléments existants dans le compte individuel d’activité me semble être une belle avancée. Avis défavorable à ces amendements de suppression.
Je ne veux pas reprendre tout l’argumentaire fort juste que vient de développer M. le rapporteur.
Monsieur Vercamer, j’ai présenté moi-même le principe du compte personnel d’activité, inscrit dans le présent projet de loi, devant la Commission nationale de la négociation collective. Il a également été présenté devant le Haut Conseil du dialogue social et le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles – bref, les partenaires sociaux ont été informés de multiples façons. Ce que nous demandons dans l’immédiat, c’est d’en acter le principe et de renvoyer aux partenaires sociaux le soin de nous faire des propositions pour articuler tout ce que vient de rappeler le rapporteur.
Je ne sais plus qui, de Mme Dalloz ou de Mme Le Callennec, a dit : « C’est vous ! » Effectivement – et ne voyez pas d’agressivité dans mes propos –, je crois que seuls ceux qui réfléchissent depuis fort longtemps à la sécurisation des parcours professionnels pouvaient faire une telle proposition. À cet égard – pardon de dire les choses aussi crûment –, les propositions de progrès social ont toujours émané de la gauche,…
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
…qu’il s’agisse du compte épargne-temps, instauré il y a maintenant presque quinze ans, du compte personnel de formation – lequel répond d’ailleurs à l’un des arguments que vous avez développés concernant les chômeurs : le compte personnel de formation leur permettra justement de suivre des formations, ce qui n’était pas le cas précédemment –, ou du compte pénibilité.
Le problème aujourd’hui est de savoir comment on peut tous les articuler pour assurer une nouvelle forme de sécurisation des parcours professionnels. Cela s’est appelé la Sécurité sociale professionnelle ; il y a eu d’autres formulations, car la gauche porte cette idée depuis très longtemps – je pourrais presque depuis Jacques Delors et les premiers textes sur la formation tout au long de la vie. Vous devriez vous inscrire dans cette démarche plutôt que de critiquer.
Voilà ce que nous voulons faire ; les partenaires sociaux se saisiront de ces questions et je peux vous dire qu’ils se réjouissent de cette perspective.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Je voudrais simplement vous rappeler, monsieur le ministre, que lors de la précédente législature, vous n’avez voté aucun texte sur la flexisécurité, alors qu’il y en a eu.
Dès qu’il y a de la sécurité, je vote !
On peut remonter très loin mais je crois que, de chaque côté, il faut faire preuve d’un tout petit peu d’humilité.
En fait, ce que vous nous proposez aujourd’hui, c’est une coquille vide. Du reste, Jean-Claude Mailly ne s’y trompe pas, qui a dit à propos de votre texte : « C’est du vent ! » Cette coquille totalement vide arrive dans le paysage de façon impromptue. Ce à quoi nous devons tous réfléchir, c’est la flexisécurité, la sécurisation des parcours professionnels – sur ce point, on peut se retrouver sans faire preuve du même dogmatisme que vous à l’instant.
Cela étant, monsieur le ministre, puisque vous nous parlez du compte personnel de formation, je voudrais simplement vous rappeler un chiffre. Vous nous avez annoncé ici même avec beaucoup d’emphase, lors d’une séance de questions au Gouvernement, qu’au 1erjanvier, 1 million de comptes personnels de formation avaient été créés. Je vous en donne acte ; mais vous avez oublié de dire qu’à cet instant, seuls 457 sont actifs et que vous espérez en avoir 10 000 à la fin de l’année.
Les grandes réformes prennent du temps !
Si c’est vraiment cela qui doit permettre de résorber un chômage touchant 3,6 millions de personnes,…
Il y en a 3,509 millions !
…cela risque de prendre quelques années : je ne suis pas sûr que les demandeurs d’emploi attendent devant la porte aussi longtemps.
Soyons sérieux ! Créer une coquille vide, en disant : « On ne sait pas ce qu’on va mettre dedans, mais on va finir par la remplir », cela n’a strictement aucun sens.
Je vous ai déjà indiqué ce que nous allions mettre dedans !
Vous êtes à nouveau en train de nous monter un système de compte personnel – il y a des comptes de ci, des comptes de ça –,…
…mais finalement, le compte qui importe vraiment, c’est celui des demandeurs d’emploi. Passons donc aux choses sérieuses, et arrêtons de faire des usines à gaz !
Comme je respecte beaucoup Gérard Cherpion, je ne veux pas lui laisser le soin de clore ce débat !
Sourires.
Il s’était bien positionné, attendant avant de prendre la parole ; mais je ne peux pas le laisser dire que c’est juste une coquille vide. Si ce n’était que cela, cela ne susciterait pas autant de rejet de votre part !
On voit bien qu’en réalité, il est en train de se créer, à travers la réflexion que les partenaires sociaux vont mener, et à laquelle vous pouvez participer, un droit nouveau, pour créer de nouvelles possibilités, en faveur des salariés, dans le cadre de leur travail. C’est donc très important.
Vous pouvez nous brocarder, même si je vous accorde que ce n’est pas votre habitude, en parlant de 3,6 millions de chômeurs, mais je vous rappelle qu’il y en a 3,509 millions – c’est déjà suffisant !
Il y a en aura peut-être d’autres, mais n’arrondissez pas au chiffre supérieur, car tout chômeur est un échec. Il y en a 3,509 millions inscrits en catégorie A à Pôle emploi : c’est déjà suffisamment important pour que vous n’alliez pas arrondir à la centaine de milliers supérieure ! Je tenais à la dire, parce que ça compte, un chômeur de plus ; chaque personne compte, chaque salarié compte, chaque actif au chômage compte !
Notre souci aujourd’hui – et vous le savez parfaitement – est d’assurer leur formation, de leur permettre d’accéder à la formation et de sortir du cercle des insiders et des outsiders. Nous voulons donc assurer un droit nouveau, et la gauche est fière de ce qu’elle porte à cet instant !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Je voudrais tout d’abord remercier le rapporteur pour sa clairvoyance, puisqu’il nous a expliqué qu’il n’y avait rien de nouveau dans ce dispositif.
N’allons donc pas imaginer que ce dispositif est formidable ou révolutionnaire. Il est sans doute un peu excessif de notre part de dire que c’est une coquille vide, mais je vous remercie pour votre honnêteté intellectuelle, monsieur le rapporteur.
Nous considérons que l’article L. 1 du code du travail n’a pas été respecté : la présentation devant les différents comités Théodule, évoquée par le ministre, ne constitue pas une concertation préalable auprès des partenaires sociaux. L’amendement no 180 vise à offrir au Gouvernement une corde de rappel vis-à-vis des partenaires sociaux.
Cher collègue, s’il n’y a rien de nouveau, je m’étonne de vous voir vous agiter autant ! S’il n’y a rien de nouveau, pourquoi avoir déposé des amendements de suppression ? S’il n’y a rien de nouveau, il ne faut pas nous expliquer que nous méconnaissons l’article L. 1, lequel doit conduire à négocier le dispositif avec les partenaires sociaux – ce qui est le cas, au demeurant.
Je ne partage pas le sentiment qu’il n’y a rien de nouveau ; je dis simplement qu’il n’y a pas de nouveaux droits. L’élément nouveau, que vient de développer M. le ministre à l’instant, réside dans le fait de regrouper l’ensemble des droits acquis par les salariés, afin qu’ils puissent assurer la portabilité et la mutualisation de leurs droits acquis, si les partenaires sociaux le proposent ou si notre assemblée le propose, comme cela est possible. Je ne suis pas sûr que tout cela ne soit rien de nouveau ; je pense au contraire que c’est une belle avancée sociale. Avis défavorable.
Même avis.
Je voudrais tenter de vous expliquer, monsieur le rapporteur pourquoi nous nous « agitons » à propos de ce compte personnel d’activité.
Quand on essaie d’en savoir un petit peu plus, vous nous citez le compte personnel de formation et le compte pénibilité : on ne voit pas ce que cela ajoute. Ce qui m’embête, c’est que vous encombrez les partenaires sociaux de feuilles de route qui les détournent de l’essentiel.
Nous avons eu des débats très intéressants ces dernières heures sur le travail à réaliser par les partenaires sociaux, sur la démocratie sociale dans notre pays, sur le dialogue social : sur tous ces sujets très importants, on voit bien qu’on est loin du compte, si je peux m’exprimer ainsi.
Vous créez un dispositif, puis vous dites aux partenaires sociaux de s’en saisir. Ils vont donc encombrer leurs négociations de ce sujet, dont on se demande encore à quoi il va servir aux salariés et aux demandeurs d’emploi.
Je me souviens très bien de votre réponse en commission des affaires sociales, monsieur le ministre, quand je vous ai demandé ce qu’il adviendrait s’ils n’arrivaient pas à trouver un accord : vous m’avez répondu que ce n’était pas grave parce qu’on légiférerait et que le Gouvernement proposerait concrètement la création du compte personnel d’activité.
Vous ne croyez pas qu’on a mieux à faire ? Vous croyez vraiment que c’est le compte personnel d’activité qui créera le point et demi de croissance dont on a besoin pour créer des emplois et diminuer le chômage ?
Sur le principe de ce dispositif, l’intention est louable, monsieur le rapporteur. Ce qui ne nous convient pas, c’est la méthode, et elle nous convient d’autant moins que vous aviez évoqué une grande conférence sociale et que le Président de la République avait déclaré que ce type de mesure devait toujours être précédé d’une concertation avec les partenaires sociaux. Même si on peut considérer que ce dispositif n’est pas sans intérêt, et qu’il est même souhaitable dans son principe, il y a véritablement un problème de méthode dans cette affaire.
Je crois que Mme Le Callennec et M. Cherpion font là un faux procès, et pour les connaître un peu, je pense qu’en réalité ils ne sont pas en désaccord avec nous, même si on peut toujours juger que la méthode pourrait être améliorée.
L’idée est que les points inscrits sur le compte de prévention de la pénibilité soient convertibles en heures de formation, basculant alors sur le compte personnel de formation, ou bien qu’ils permettent un départ à la retraite anticipé. Le but est d’aller vers une harmonisation des dispositifs, afin de ne pas multiplier les comptes à l’infini, d’autant qu’ils ne sont pas gérés par les mêmes structures.
De ce point de vue, le rapporteur a eu raison de dire que cela ne crée pas de droits nouveaux : le but est d’aller vers une simplification et d’approfondir une démarche débouchant vers une forme de flexisécurité – soit ce que Gérard Cherpion réclamait tout à l’heure. Je crois que c’est une démarche positive.
Si le texte était plus précis, M. Richard nous reprocherait légitimement d’avancer comme des brutes, sans concertation avec les partenaires sociaux. L’idée est de réaffirmer cet objectif et de proposer aux partenaires sociaux de l’approfondir. Nous n’allons donc pas alourdir leur réflexion, mais plutôt leur fixer un cap.
L’amendement no 180 n’est pas adopté.
Le présent amendement a pour objet d’élargir le périmètre couvert par le compte personnel d’activité pour en faire un véritable outil au service du salarié. Il vise à inclure une visibilité sur les dispositifs d’épargne salariale au même titre que les droits sociaux personnels – compte pénibilité et compte personnel de formation – évoqués dans l’exposé des motifs de l’article.
Il s’agit notamment d’intégrer le compte épargne-temps au compte personnel d’activité et d’imaginer les modalités de migration des sommes accumulées grâce aux différents outils d’épargne salariale, dont le plan d’épargne entreprise, le plan d’épargne interentreprises et le plan d’épargne pour la retraite collectif, vers un compte unique au terme des périodes d’activité au service d’un employeur.
Il faut être cohérent : on ne peut pas à la fois dire qu’on laisse aux partenaires sociaux le soin de déterminer ce qu’il y aura dans le dispositif et comment il sera mis en oeuvre, et commencer à énumérer les éléments qui devront y figurer.
C’est pourquoi je vous demanderai de retirer votre amendement, en espérant que les partenaires sociaux vous entendent, faute de quoi je serai amené à émettre un avis défavorable.
Même position.
L’amendement no 540 est retiré.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 253 .
Puisque vous estimez qu’il ne faut pas supprimer le dispositif parce qu’il nous revient de lancer la négociation, monsieur le ministre, soit : je vous prends au mot. Adressez aux partenaires sociaux un document d’orientation décrivant les objectifs poursuivis et les différentes options qui leur sont ouvertes.
La flexisécurité devrait figurer au nombre de ces dernières. Le principe de la portabilité des droits a déjà été posé par un accord entre les partenaires sociaux. L’idée était de tenir compte de la mobilité professionnelle de salariés qui changent de plus en plus souvent d’entreprise et de leur donner une sécurité tout en permettant aux entreprises de s’adapter à la concurrence en améliorant leur compétitivité.
C’est pourquoi vous devriez, dans ce document d’orientation, proposer aux partenaires sociaux de réfléchir à la compétitivité des entreprises et à la flexibilité à l’occasion de leur réflexion sur la question du compte personnel d’activité et de la portabilité des droits.
Je serais tenté de faire la même réponse que précédemment : laissons-leur le soin de choisir eux-mêmes ce qu’ils entendent retenir au travers de ce compte personnel d’activité. Mais encore une fois, ne confondons pas tout : un compte personnel n’est pas un dispositif qui a vocation à organiser l’ensemble des rapports économiques dans l’entreprise. Ce n’est pas le même sujet et ce que vous proposez est un détournement de l’objet même du compte personnel d’activité.
J’imagine que leur réflexion aura à tenir compte des éléments que vous avez mentionnés, mais je ne vois pas pourquoi nous inscririons dans la loi des dispositions qui ne correspondent pas à la vocation du compte personnel d’activité, même si le contexte économique permet en effet de dire comment sera mis en oeuvre ce compte personnel d’activité.
Avis défavorable.
Ma position est la même. J’ajouterai simplement que la formation des salariés participe de la compétitivité des entreprises, monsieur Vercamer.
L’amendement no 253 n’est pas adopté.
M. Gille vient de nous expliquer que tout cela devait s’inscrire dans la perspective de la flexisécurité, et c’est là un objectif que nous partageons. C’est pourquoi nous proposons par cet amendement que la concertation prévue par l’article s’inscrive dans le cadre d’une démarche de construction d’une flexisécurité du marché du travail.
C’est le moment de vérité : souhaitez-vous vraiment qu’on aille vers la flexisécurité du travail, en accompagnement d’un certain nombre de droits acquis par les salariés ?
Même avis.
L’amendement no 15 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 310 .
En permettant le regroupement et la portabilité des comptes pénibilité, formation et épargne-temps, le compte personnel d’activité va dans le sens du progrès. Mais pour qu’il constitue une réelle avancée sociale, il faudrait qu’il prenne en compte l’ensemble des droits susceptibles d’être attachés au salarié et donc portables, notamment l’ancienneté.
À titre d’exemple, si au cours des dix dernières années un salarié a été employé en CDD par différentes entreprises, son nouvel employeur ne tiendra pas compte de cette ancienneté. À l’inverse, les salariés qui travaillent en CDI depuis dix ans dans la même entreprise bénéficieront d’un déroulement de carrière et d’une progression salariale qui prendront en compte cette ancienneté.
Pour remédier à des anomalies de ce type, nous proposons, par cet amendement, que la négociation qui pourrait s’ouvrir sur le thème du compte personnel d’activité envisage toutes les questions liées à la portabilité de certains droits afin qu’ils soient attachés à la personne du salarié et non à son emploi.
Je serais tenté de vous répondre : pourquoi pas ? J’espère que les partenaires sociaux se saisiront de ces questions, mais je ne pense pas que nous ayons à cet instant à inscrire de telles dispositions dans la loi. Avis défavorable.
Avec tout le respect que je vous dois, madame Fraysse, même réponse.
Le raisonnement de Mme Fraysse est tout à fait juste. Je pense en particulier à ces salariés de grandes entreprises publiques qui enchaînent les CDD et ne bénéficient pour cette raison d’aucune ancienneté. Je veux bien qu’on demande aux entreprises privées de faire des efforts, mais l’État devrait peut-être d’abord balayer devant sa porte.
Avec cet amendement, Mme Fraysse pose la vraie question et nous apporte un éclairage sur le dispositif. On l’a bien vu s’agissant de la formation : le système du compte a permis d’universaliser un droit à la formation qui était jusqu’alors lié à l’entreprise. Cette solution a le mérite de régler ipso facto la question de la portabilité.
L’amendement no 310 n’est pas adopté.
L’article 21 est adopté.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 22.
La parole est à M. Gilles Lurton.
Avec 140 000 stagiaires par an, dont 58 % sont demandeurs d’emploi, l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, l’AFPA, est un acteur majeur de la formation professionnelle et de l’insertion des demandeurs d’emploi et des salariés en France.
Pour ce qui me concerne, je suis très favorable à cet article 22, qui permettra de remédier à la situation dans laquelle se trouve l’AFPA depuis ces dernières années, fragilisée par une profonde évolution de son modèle économique due à la décentralisation et à l’ouverture à la concurrence de la demande publique en matière de formation professionnelle des demandeurs d’emploi.
En effet, l’AFPA doit, depuis ces dernières années, répondre à des appels d’offre, souvent passés par les conseils régionaux. Il arrive que, du fait de la concurrence d’autres organismes, elle perde certaines formations dans lesquelles elle était spécialisée et pour lesquelles elle disposait d’un matériel très coûteux ainsi que de personnels extrêmement qualifiés qui, de ce fait, se retrouvent du jour au lendemain sans activité, faute d’être transférables sur d’autres formations. C’est le cas dans ma circonscription de Saint-Malo, où l’AFPA est très performante, dotée d’ateliers très bien équipés et de formateurs hautement qualifiés.
Cet article permettra de traiter de tout ce qui relève des missions de service public de l’AFPA. Il permettra à l’État de confier à cet organisme des missions spécifiques, notamment sur les formations très spécialisées, où la concurrence ne joue pas.
Enfin, cet article permettra aussi à l’AFPA de mettre en place des formations à destination des publics les plus éloignés de l’emploi, qui nécessitent un accompagnement renforcé. Je pense notamment aux personnes handicapées, qui rencontrent encore trop de difficultés à intégrer les entreprises.
Pour toutes ces raisons, je soutiendrai, pour ce qui me concerne, l’article 22.
Je voudrais appeler l’attention de M. le ministre sur un problème qui se pose notamment dans mon département : le financement de la formation professionnelle dans le cadre des contrats aidés.
Au préalable, je rappelle que, pour tout projet de loi, nous faisons des études d’impact. Or, très souvent, ces études se limitent à la métropole : les territoires ultramarins en sont exclus. J’ai eu l’occasion de le dire à plusieurs reprises s’agissant des études nationales menées sur des sujets censés nous concerner : au mieux nous y trouvons les conditions juridiques d’applicabilité aux départements ultramarins.
Or, monsieur le ministre, vous le savez, nos départements, du fait de l’éloignement, ont des problématiques propres, complètement différentes de ce que peuvent connaître les territoires métropolitains.
Tout cela pour vous dire que les lois que vous écrivez, même les plus belles et les mieux intentionnées, peuvent poser des difficultés d’application.
Les contrats aidés, en raison du chômage massif, et les contrats « nouvelle chance » peuvent représenter une belle opportunité pour les demandeurs d’emploi outre-mer, notamment à La Réunion. Ils mettent l’accent sur la formation, mais à quoi cela sert-il si nous n’avons pas les moyens de la financer ? C’est ce qui se passe avec les contrats aidés qui, aujourd’hui, ne peuvent pas bénéficier des financements en raison de la dernière réforme de la formation professionnelle.
J’aurai l’occasion, monsieur le ministre, de vous proposer tout à l’heure un amendement visant à aborder ce problème et, surtout, lui apporter – si possible – une solution.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Puisque nous parlons de l’AFPA, il faudrait tout de même rappeler tout ce que le Gouvernement a fait, depuis l’été 2012, et je voudrais saluer le travail réalisé par Thierry Repentin en son temps, quand il était ministre délégué à la formation professionnelle et à l’apprentissage.
Le 13 décembre 2012, à Toulouse, ville que je connais bien, il avait prononcé un discours devant les personnels de l’AFPA. Il avait rappelé les actions de consolidation de l’association conduites dès l’été 2012, dès l’arrivée de cette majorité au pouvoir, notamment la consolidation du pool bancaire et le versement d’une subvention d’investissement de 20 millions d’euros. Il avait rappelé les vingt-deux conventions régionales qui avaient été signées entre Pôle emploi et l’AFPA pour faciliter l’orientation des demandeurs d’emploi : je tenais à le souligner.
L’Association pour la formation professionnelle des adultes compte 8 500 salariés, qui forment chaque année, comme l’a rappelé notre collègue M. Lurton, 140 000 stagiaires.
Cet article vise à transformer l’AFPA en établissement public industriel et commercial. On peut imaginer la motivation pour venir en aide financièrement à l’AFPA, qui a traversé – et traverse toujours – de graves difficultés, du fait d’une concurrence très forte au niveau des offres de formation. En 2012, l’AFPA avait frôlé la cessation de paiement. En 2014, elle accusait toujours un déficit de 22 millions d’euros.
Auparavant, l’AFPA bénéficiait il est vrai d’un traitement particulier sur le marché de la formation, pour la commande publique notamment. C’est désormais terminé. La transformation de cet organisme en EPIC ne suffira certainement pas à assurer la pérennité de l’AFPA, mais chacun sait qu’une réforme en profondeur reste nécessaire.
Le Gouvernement va procéder par ordonnances pour définir le service public de l’AFPA. Quelle définition donner à cette notion de service public, qui va modifier les règles de concurrence sur nos territoires ? Aujourd’hui, il me semble que l’activité de l’AFPA est à 80 % dans le secteur concurrentiel et à 20 % dans le secteur dit de missions de service public.
Il y a notamment, monsieur le ministre, dans ce que j’ai pu entendre, la formation des personnes « éloignées de l’emploi ». Est-ce à dire qu’on va spécialiser l’AFPA, voire lui donner l’exclusivité de ces publics-là ?
Je rejoins Mme la présidente de la commission des affaires sociales : moi aussi je regrette que nous n’ayons plus de délégué à la formation professionnelle dans le Gouvernement.
Sourires.
Quand on voit le travail qui reste à faire dans ce domaine-là, je pense qu’il faut davantage se pencher sur cette question que sur le compte personnel d’activité.
Madame Le Callennec, M. Repentin était ministre délégué. Par ailleurs, je vous rassure : le poste de délégué existe toujours. Mme Wargon, déléguée générale à l’emploi et à la formation professionnelle, est d’ailleurs présente parmi nous.
Moi aussi, je me félicite que le Gouvernement se propose de franchir le pas, ce qui était attendu depuis des années, pour aller vers une reconnaissance de l’AFPA en tant que service public de la formation. En revanche, monsieur Lurton, madame Le Callennec, je vais être plus critique à l ’égard de la majorité précédente, laquelle, par une lecture abusive et excessive – pour être gentil – de la directive Services, a fragilisé l’AFPA jusqu’à mettre en péril son existence, en ne voulant pas reconnaître, justement, un service public de la formation.
Je rappelle les principaux éléments du dossier. La subvention de l’AFPA est passée de 700 millions à 80 millions. Il y a eu une réduction d’effectifs d’environ 2 000 personnes. Un amendement adopté nuitamment a fait passer les services psychologiques de l’AFPA à Pôle emploi, sans prévenir personne. Il apparaît que l’AFPA n’a même plus les moyens d’entretenir son patrimoine. Enfin, pour toutes les formations, les régions doivent dorénavant passer des appels d’offres. Or l’AFPA, quoiqu’il s’agisse d’un excellent outil, n’était pas prête à affronter brutalement la concurrence. Bref, on se dirigeait vers un démembrement, pour ne pas dire une vente à la découpe – c’est cela qui était programmé.
Heureusement, M. Yves Barou, le nouveau président de l’AFPA, a redressé la barre.
Il y a eu aussi Thierry Repentin, et Jean-Marc Ayrault qui s’est efforcé, par des prêts et des aides, de trouver 200 millions pour éviter une issue fatale à l’AFPA.
Mais nous n’avions pas trouvé de solution à la question du patrimoine, ni résolu le problème des quarante-cinq formations à caractère national qui disposent de plateaux techniques de qualité.
La création d’un EPIC avec, j’imagine, l’octroi de droits spéciaux, va permettre de créer un service d’intérêt général. C’est une lecture différente de la directive Services : il s’agit de considérer que, comme je l’avais indiqué à plusieurs reprises dans des rapports, pour les publics en difficulté, en insertion, mais au premier niveau de qualification, on peut recourir à de tels outils, assimilés à des services d’intérêt général. L’autre partie relèvera quant à elle de la concurrence et du privé : c’est le schéma que propose le Gouvernement et il me paraît excellent.
Je voudrais remercier Jean-Patrick Gille pour la mansuétude avec laquelle il a parlé de ce qui avait été fait sous la précédente législature concernant l’AFPA. Effectivement, nous n’avons pas tout très bien fait et trouver un cap nouveau pour l’AFPA est une bonne chose. Jusqu’à présent, cet organisme était en train de mourir de sa belle mort ; retrouver du sens et fixer un nouveau cap en changeant son statut et en le transformant en opérateur, aux côtés de Pôle emploi, est plutôt positif.
Moi aussi, je rejoins Jean-Patrick Gille. Il y a une continuité dans l’action : si celle de Thierry Repentin et de Jean-Marc Ayrault mérite d’être saluée, nous la poursuivons. Yves Barou et ses services ont proposé des solutions ; le Gouvernement les met en oeuvre.
Il s’agit de créer un établissement public qui permette de faire la distinction tout en maintenant l’aide financière. Je rappelle que 200 millions ont été affectés à l’AFPA ; il reste encore 40 millions à trouver. Tout n’est pas résolu, mais la création de l’EPIC permet de traiter l’un des problèmes majeurs qui s’étaient posés : la dévolution des actifs immobiliers de l’État occupés par l’AFPA, qui constituaient une gêne pour son activité concurrentielle.
Je ne veux pas entrer dans une polémique : si tout le monde se reconnaît dans l’action qui a été conduite, tant mieux. On peut le dire toutefois : les gouvernements de gauche successifs ont sauvé l’AFPA qui était en voie de démembrement en septembre 2012. Tant mieux si tout le monde en profite : il s’agit d’une vraie mission de service public de formation, cela a été rappelé.
Il faut tout de même se dire que ce n’est pas encore terminé. Par delà les missions de service public que nous sommes parvenus à définir assez précisément pour les demandeurs d’emploi de longue durée qui ont besoin de formations spécifiques, et aussi pour des formations très pointues faisant appel à des chercheurs de qualité, il reste que l’AFPA doit aussi faire face à un secteur confidentiel. Il ne faut donc pas considérer que c’est gagné : l’AFPA doit continuer à se réformer et à entrer dans le secteur concurrentiel.
Nous avançons. Le changement de statut a été bien perçu. Je l’ai présenté au conseil d’administration il y a environ trois semaines.
Il est bien que tout le monde s’y retrouve, sur tous ces bancs. Pour annoncer des mauvaises nouvelles, on est champion dans ce pays, mais quand il y a de bonnes nouvelles, elles ne font que quelques lignes dans les journaux. Si nous pouvons faire savoir que l’AFPA est sur la bonne voie et qu’elle retrouve sa place grâce à l’action que nous menons, eh bien nous en serons, je l’espère, tous satisfaits.
La parole est à M. Michel Liebgott, pour soutenir l’amendement no 695 .
L’AFPA conserve une image très positive. Il s’agit de conforter cet article, qui indique que l’AFPA participe à la formation des personnes les plus éloignées de l’emploi, en précisant qu’elle s’intéresse aussi à leur qualification, sachant que 80 % des stagiaires acquièrent un titre valable et que 60 % trouvent un emploi, ce qui est un taux particulièrement élevé.
L’amendement no 695 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
L’article 22, amendé, est adopté.
Je suis saisi d’un amendement, no 457 , portant article additionnel après l’article 22.
La parole est à Mme Monique Orphé, pour le soutenir.
Le taux de chômage à La Réunion est de 30 % en moyenne et de près de 60 % chez les jeunes, qui en majorité sont peu ou pas diplômés. La part des non-diplômés parmi les 20-24 ans s’élevait à 35 % en 2011.
Notre île est également touchée par un chômage de longue durée massif. Ainsi, à la fin de l’année 2014, 54 % des demandeurs d’emploi des DOM sont des chômeurs de longue durée.
Pour lutter contre ce chômage massif, nous nous appuyons sur le secteur marchand, mais aussi sur le secteur non-marchand, notamment sur les associations qui utilisent des contrats aidés. Ces contrats doivent comporter un volet formation, financé sur le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels. C’était le cas jusqu’en 2014. Avec la réforme, ce n’est plus le cas depuis 2015.
Le présent amendement vise à favoriser l’accès à la qualification des publics en contrat unique d’insertion dans les DOM via l’accès à la péréquation du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels. L’accès à la prise en charge des formations pour les salariés en CUI dans le cadre du contrat de professionnalisation permettrait à la fois de poursuivre le financement des formations qualifiantes pour ce public et de redynamiser l’intérêt du contrat de professionnalisation auprès des employeurs.
J’avoue, chère collègue, que votre amendement me laisse un peu perplexe. Selon son exposé sommaire, il vise à ce que les titulaires d’un contrat unique d’insertion soient considérés comme des titulaires d’un contrat de professionnalisation afin de bénéficier des financements par les organismes paritaires collecteurs agréés, les OPCA, et le FPSPP. Mais le dispositif ne propose en fait que d’élargir le contrat de professionnalisation adapté aux personnes titulaires de contrats uniques d’insertion. J’avoue donc avoir du mal à vous suivre.
Le contrat unique d’insertion est un dispositif spécifique, dont la vocation est de favoriser l’insertion professionnelle des personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières d’aides à l’emploi et fait l’objet, à ce titre, d’une aide à l’insertion professionnelle. Les publics bénéficiaires de contrats uniques d’insertion ne présentent pas forcément les mêmes caractéristiques que ceux qui peuvent prétendre à un contrat de professionnalisation. Leurs besoins de qualification et d’insertion professionnelle diffèrent, ainsi que les modalités de financement de ces deux dispositifs.
Pour satisfaire à un élément que je comprends parfaitement et à une problématique dont je dois dire que nous avons déjà parlé ensemble à plusieurs reprises, je considère néanmoins que vous utilisez un dispositif qui n’est pas adapté. Malheureusement, je suis contraint d’émettre un avis défavorable sur cet amendement.
Je suis sensible aux propos de Mme Orphé. Pour preuve que nous sommes sensibles à cette situation particulière : la modification que nous avons apportée au taux de prise en charge des emplois d’avenir à La Réunion, qui a été porté, de mémoire, à 85 %, ce qui n’est le cas en France métropolitaine.
Vous avez évoqué le problème particulier qu’est l’accès à la formation. Je ne vous rappellerai pas tout ce qui est en vigueur en France métropolitaine – fonds mutualisés, frais pédagogiques… –, mais il n’y a pas de raison que les salariés en contrats aidés, y compris à La Réunion, n’accèdent pas à la formation. Nous traiterons donc le problème que vous avez évoqué, je peux vous le dire !
Je ne sais pas s’il existe un OPCA particulier à La Réunion mais le FPSPP rappellera ce que sont les modalités de financements afin que ces derniers soient effectivement utilisés au bénéfice des publics dont vous avez parlé.
Outre une réflexion plus approfondie que je suis prêt à mener avec vous – mon ministère et mes services sont à votre disposition –, nous pourrions proposer la sanctuarisation d’enveloppes de financements spécifiques pour l’île de La Réunion, car je crois que c’est ce que vous attendez. Dans ces conditions, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
Il est vrai que des efforts ont été consentis pour La Réunion s’agissant notamment de la prise en charge du coût résiduel des contrats aidés. Cela dit, monsieur le ministre, je tiens vraiment à vous alerter : le tissu économique de La Réunion diffère de celui de la métropole en ce qu’il comporte un très grand nombre de TPE.
Le changement du financement de la formation professionnelle soulève notamment un problème avec les OPCA : apparemment, le financement diminue de ce côté. Par exemple, les OPCA finançaient les contrats aidés à hauteur de 40 millions environ ; ils récoltaient 3 millions et 38 millions provenaient du FPSPP. Ce sont donc tout de même 38 millions qui font défaut. C’est pourquoi j’ai défendu cet amendement d’appel, destiné à ce que nous essayions de trouver une solution. Je suis prête à vous rencontrer, afin de résoudre le problème de la formation, dont l’ampleur, chez nous, est préoccupante.
L’amendement no 457 est retiré.
Faire et refaire, monsieur le ministre, c’est toujours travailler, me direz-vous, mais à condition que les conséquences ne soient pas trop catastrophiques pour notre pays. Malheureusement, les récentes annonces du Premier ministre en matière d’apprentissage constituent en réalité un terrible constat d’échec des mesures qui ont été mises en oeuvre depuis le début du quinquennat.
J’ai eu à plusieurs reprises l’occasion de m’inquiéter, ici même, des effets de la politique du Gouvernement sur notre système d’apprentissage.
Dans la loi sur la refondation de l’école, le Gouvernement est revenu sur la possibilité de l’apprentissage dès 14 ans, ce qui représentait pourtant une solution probante pour certains jeunes dans l’incapacité de poursuivre un parcours scolaire classique.
Dans le cadre de la loi de finances pour 2013, la majorité a supprimé l’indemnité compensatrice de formation destinée aux entreprises, dont tout un chacun reconnaissait les effets positifs, et de nombreux autres mauvais coups ont été portés, telle la suppression du travail de nuit dans certains cas – je pense notamment à la pêche en mer. Étant de Saint-Malo, je puis vous dire que les pêcheurs ne recrutent plus aujourd’hui aucun apprenti.
En 2013, le nombre de contrats d’apprentissages signés a diminué de 8 %, puis de 4 % en 2014 ; la chute s’accentue puisqu’au premier trimestre de 2015, le recul atteint 13 %, à période comparable.
Il est donc parfois douloureux de constater que nos avertissements passés aient été corroborés par les faits.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 687 .
L’amendement no 687 est retiré.
L’article 22 bis est adopté.
L’article 23 est adopté.
Article 23
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 584 .
L’amendement no 584 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 23 bis, amendé, est adopté.
Article 23
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 585 .
L’amendement no 585 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 23 ter, amendé, est adopté.
Article 23
Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur une situation qui m’étonne un peu concernant cet article.
Le Gouvernement a présenté un amendement, no 683 , qui a reçu un avis favorable de la commission des affaires sociales mardi après-midi.
Cet amendement prévoyait un droit de communication permettant à certains agents de Pôle emploi d’accéder aux données personnelles telles que les comptes bancaires, les factures de téléphone ou de fourniture d’énergie des chômeurs suspectés de fraudes, un peu comme la caisse d’allocations familiales ou la Sécurité sociale peuvent déjà y recourir.
À la suite de l’avis favorable du rapporteur, cet amendement a été considéré comme adopté par la commission.
Je profite de cette intervention pour souligner les très mauvaises conditions de travail dans lesquelles nous discutons lorsque nous examinons les amendements dans le cadre de l’article 88 : aucun temps ne nous est laissé pour les étudier. Nous n’en avons d’ailleurs même plus le texte, puisqu’un seul recueil est distribué pour chaque groupe, ce qui nous oblige à nous contenter d’une énumération.
Le soir même, nous apprenions que le Gouvernement venait de retirer cet amendement alors que, je le répète, il avait été adopté par la commission.
Je m’interroge, monsieur le ministre – ou plutôt je vous interroge –, sur les conditions dans lesquelles cet amendement est arrivé jusqu’à nous. Dans la mesure où il a été déposé par le Gouvernement, je n’ose imaginer que vous-même ou M. le rapporteur n’en ayez pas eu connaissance avant la réunion de la commission mardi dernier. Compte tenu de l’importance et des conséquences de cet amendement gouvernemental, je n’ose pas non plus imaginer qu’il n’ait pas fait l’objet d’une coordination interministérielle.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Monsieur Lurton, vous évoquez les règles de la discussion dans le cadre de l’article 88. En l’occurrence, l’amendement a été accepté et non adopté. Les conditions d’examen des amendements sont les mêmes que sous la précédente présidence de la commission des affaires sociales, avec M. Méhaignerie.
Vous êtes un jeune député, élu depuis le mois de juin 2012, mais je peux vous assurer que le fonctionnement a toujours été le même. Je gage que ce sera également le cas lors de la prochaine législature. On n’y peut rien, c’est ainsi.
Je m’associe entièrement aux propos de mon collègue Gilles Lurton.
J’avoue que j’aimerais d’autant plus comprendre pourquoi cet amendement a été déposé puis retiré…
…qu’il s’agissait de lutter contre la fraude.
Je crois savoir que nous sommes assez majoritaires dans cet hémicycle pour penser qu’il faut en effet lutter là-contre.
Cela ne signifie pas qu’il faille stigmatiser les demandeurs d’emploi. La fraude aux indemnités chômage est minoritaire mais elle existe puisque Pôle emploi récupère chaque année une centaine de millions d’euros. La fraude est donc patente.
Cet amendement gouvernemental visait précisément à donner les moyens aux conseillers de Pôle emploi de disposer des éléments qui, une fois croisés, permettent de savoir ce qu’il en est. J’essaie donc toujours de comprendre pourquoi cet amendement, qui avait été déposé, qui était bien rédigé et certainement réfléchi, a été retiré. D’ailleurs, je n’avais pas été étonnée par le dépôt de cet amendement, car ce n’était pas la première fois que le ministre du travail se montrait sensible à la nécessité de lutter contre la fraude. Nous aimerions juste comprendre pourquoi cet amendement a été déposé puis retiré, alors qu’il était utile.
Ce serait évidemment beaucoup trop rapide de prétendre que tous les chômeurs seraient des fraudeurs et c’est surtout archi-faux, car ce comportement est ultra-minoritaire, je viens de le dire, mais il faut tout de même compter avec la notion d’équité. Il faut se mettre à la place des référents qui, au sein de Pôle emploi, ont pour mission de lutter contre la fraude : ils ont tout simplement besoin de moyens.
Qui donc, monsieur le ministre, vous a demandé de retirer cet amendement ? J’ai cru comprendre qu’il n’avait pas été suffisamment discuté mais, enfin, lutter contre la fraude et donner les moyens nécessaires à ceux qui en sont chargés cela ne souffre tout de même pas de longues discussions ! C’est une évidence ! Nous aurions donc voté cet amendement.
Madame Le Callennec, je tiens à vous éviter de faire des amalgames qui n’ont pas lieu d’être.
Sciemment ou pas – mais je ne pense pas que vous le fassiez sciemment –, vous confondez deux démarches. La première consiste à contrôler l’effectivité de la recherche d’emploi, à la suite de l’engagement pris par un demandeur d’emploi avec son conseiller. Ces vérifications sont normales ; elles figurent dans le code du travail, car telle est la loi. La seconde démarche, qui n’est absolument pas la mienne, mais que vous avez soutenue pendant de nombreuses années – peut-être pas personnellement, certes, mais vous l’avez cautionnée –, consiste, à partir d’un cas particulier, à essayer de stigmatiser l’ensemble d’un dispositif.
La fraude relève du domaine pénal ; cela n’a rien à faire dans ce texte sur le dialogue social. Voilà ma réponse.
Favorable.
Vous n’êtes pas sans savoir, monsieur le ministre, qu’il existe des référents fraude dans toutes les directions régionales de Pôle emploi.
L’amendement dont je parlais tout à l’heure a bien été écrit par quelqu’un et a été présenté par le Gouvernement. Aujourd’hui, vous semblez l’ignorer !
De surcroît, il a fait l’objet de quelques articles dans la presse. C’est dire s’il suscite des interrogations.
Peut-être, monsieur le ministre, pourriez-vous répondre qu’il n’a pas été suffisamment travaillé et que les partenaires sociaux et les organisations syndicales veulent en discuter.
Mais, au moins, que l’on, sache de quoi il retourne ! Un amendement gouvernemental, déposé pour être examiné, puis retiré, voilà qui n’est pas anodin, surtout sur un tel sujet.
Je suis d’accord : cet amendement n’existe plus, je le conçois tout à fait, mais je ne comprends pas, monsieur le ministre, pourquoi il est arrivé en commission alors que, selon vous, il n’a rien à faire dans un projet sur le dialogue social. Et pourquoi donc a-t-il reçu un avis favorable de la commission ?
L’article 23 quater, amendé, est adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 23 quater.
La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir l’amendement no 14 .
L’amendement no 14 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 96 .
L’amendement no 96 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l’amendement no 644 .
Cet amendement est le premier d’une série d’amendements visant à introduire dans le code du travail des dispositions pour lutter contre le sexisme.
Les données sont là, et elles sont terribles : 80 % des femmes salariées considèrent que, dans le monde du travail, les femmes sont régulièrement confrontées à des attitudes ou à des décisions sexistes, et 56 % des hommes, ce qui n’est pas négligeable, font le même constat ; 90 % des femmes salariées considèrent qu’il est plus facile de faire carrière lorsqu’on est un homme ; et 54 % des femmes salariées, enfin, estiment que leur carrière professionnelle a été freinée en raison de leur sexe. Ces statistiques – je pourrais en citer beaucoup d’autres – sont tirées d’une enquête réalisée il y a peu par le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Mme Marisol Touraine et Mme Pascale Boistard ont toutes deux affirmé la volonté du Gouvernement d’avancer sur ces questions. Je crois qu’il est temps d’introduire dans le code du travail – et cette loi me semble être un bon véhicule pour le faire – la condamnation des agissements et des comportements sexistes dans le monde du travail.
Autant il est assez aisé – et la loi du 27 mai 2008 le fait – de définir la notion de discrimination, autant il paraît difficile de définir la notion d’agissements sexistes.
Eh oui !
En effet, un geste qui pourra être considéré comme sexiste par les uns ne le sera pas par les autres. Donner, dans un texte de loi, une définition de la notion d’agissements sexistes me semble quasi impossible. Pour cette raison, j’émets un avis défavorable sur votre amendement.
Vous avez raison de soulever ce problème, madame Mazetier, et j’ai d’ailleurs reçu, il y a peu, des associations qui luttent contre le sexisme. Il s’agit effectivement d’une question très importante. Le sexisme n’a pas sa place dans le monde du travail, même s’il ne s’agit pas à proprement parler, comme cela vient d’être dit, d’une discrimination.
Je voudrais vous faire une proposition, madame Mazetier. La notion de sexisme n’est pas suffisamment précise – le rapporteur l’a rappelé – pour que nous puissions l’inscrire en tant que telle, comme vous le demandez, dans le code du travail. Mais j’anime, avec Patrick Kanner et Christiane Taubira un groupe de travail sur la lutte contre les discriminations, qui a déjà formulé un certain nombre de préconisations, dont treize ont été retenues. Je vous propose que ce groupe de travail, qui continue de réfléchir à ces questions, se saisisse de ce sujet et nous fasse les propositions les plus adaptées pour lutter contre ces agissements. Sur la base des propositions qui nous seront faites, nous pourrons ainsi envisager, car je n’écarte pas votre proposition, d’intégrer cette notion dans le code du travail. Mais il importe, au préalable, qu’un travail de fond soit mené.
Puisque le groupe de travail sur la lutte contre les discriminations poursuit son travail, sous la responsabilité de Jean-Christophe Sciberras, je vous propose de le faire travailler sur la question de la lutte contre le sexisme dans les entreprises et le milieu professionnel.
Je retire mon amendement, monsieur le ministre, et je prends acte de la proposition que vous venez de formuler.
Au mois de mars dernier, lorsque le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes lui a remis son rapport, intitulé Le Sexisme dans le monde du travail. Entre déni et réalité, Marisol Touraine a déclaré : « Je souhaite vous dire que ce rapport est d’une richesse rare et qu’il ne restera pas lettre morte. » Nous sommes au début de la lutte contre ce phénomène dont il va tout de même bien venir à bout.
Le sexisme, au fond, n’est pas si difficile à caractériser : le sexisme est un racisme, une discrimination en raison du sexe. Agir de manière sexiste, c’est agir de manière différenciée, selon qu’on a affaire à une femme ou à un homme. Dans la République et dans notre constitution, on reconnaît des individus libres et égaux en droits, pas des hommes ou des femmes, mais des individus, libres et égaux en droits. Les pères de la République avaient pressenti cela, même si cette idée n’était pas très mainstream à l’époque…
Nous n’en sommes donc qu’au début. J’entends parfaitement ce que vous dites, monsieur le rapporteur, et je vous remercie de votre proposition, monsieur le ministre. Tous les membres de la délégation aux droits des femmes et, au-delà, ceux du Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes seront sensibles à votre proposition. En conséquence, je retire cet amendement, mais pas l’amendement no 646 et je vous remercie d’engager cette longue marche, qui ne devrait tout de même pas prendre un siècle.
L’amendement no 644 est retiré.
Je ne sais pas si ce sera une longue marche, mais l’objet de cet amendement est de créer un contrat unique de travail à droits progressifs.
Pour faire face à la hausse dramatique du chômage et créer de nouveaux emplois, nous sommes tous convaincus qu’il faut assouplir le droit du travail, tout en préservant la protection offerte aux salariés. Telle est la vocation de ce contrat unique à droits progressifs, qui remplacerait le contrat à durée déterminée et le contrat à durée indéterminée.
Les déclarations d’embauche qui ont lieu aujourd’hui en France concernent à 80 % des contrats à durée déterminée de moins d’un mois. Cette proportion illustre bien l’échec flagrant d’un système qui a cru que la protection des salariés ne pouvait être assurée que par un droit du travail rigide et coercitif pour les entreprises. Il nous semble donc urgent d’adopter une nouvelle approche, en affirmant que les intérêts des entreprises et ceux des salariés se confondent dans la bataille pour l’emploi et le pouvoir d’achat, et qu’une plus grande flexibilité peut être positive, tant pour les uns que pour les autres. Telle est notre proposition.
Je sais qu’un certain nombre de nos collègues travaillent sur ce sujet. Il s’agit, comme sur la question du sexisme, de faire un premier pas dans ce sens.
Tout à l’heure, monsieur Richard, vous nous avez dit que l’on ne pouvait pas mettre en oeuvre le compte personnel d’activité parce qu’il n’y avait pas eu de discussion préalable avec les partenaires sociaux. Et à présent – c’est le pompon ! – vous proposez d’instaurer ce contrat unique sans aucune négociation préalable avec les partenaires sociaux, ce qui mérite d’être noté, puisque je vous rappelle qu’il n’y a eu aucun accord sur ce sujet.
Par ailleurs, il faut tout de même faire attention, car la rédaction que vous proposez reviendrait à supprimer toutes les garanties actuellement prévues pour les CDD ou les CDI. Autrement dit, votre amendement généraliserait à l’ensemble des actifs la précarité du travail. Sur cette base, je ne peux évidemment pas vous suivre. Avis défavorable.
Ce n’est pas un exercice de langue de bois, mais prétendre créer le contrat de travail unique à cette heure-là, par voie d’amendement,…
…alors que vous nous faites des leçons sur l’article L. 1 du code du travail, c’est tout de même assez surprenant !
Pour moi, il est deux principes intangibles, auxquels on ne peut toucher sans l’accord, et même l’engagement des partenaires sociaux : ce sont les 35 heures – je l’ai déjà indiqué – et le contrat de travail. Il ne peut pas être question de modifier le contrat de travail sans l’accord des partenaires sociaux, vous en conviendrez.
Il existe une spécificité bien française. Nous avons à peu près tout ce qu’il nous faut sur les étagères : des contrats de travail de toutes les formes, adaptés à toutes les situations. Et vous, vous voulez faire un contrat de travail unique. Pour ma part, je pense que c’est plutôt une chance d’avoir à notre disposition toutes ces formes de contrats de travail. Du reste, les partisans du contrat de travail unique n’ont jamais pu expliquer comment un tel contrat pourrait créer de l’emploi. Vous en conviendrez avec moi : seule la croissance crée de l’emploi. On le vérifie tous les jours, et on le vérifiera aussi dans les pays qui ont fait semblant de créer ce contrat unique.
Nous sommes dans l’opposition, pour quelques mois encore, et il s’agit d’un amendement d’appel. Nous voulons appeler les partenaires sociaux à travailler sur ce sujet.
L’amendement no 336 n’est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements, nos 258 et 705 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 258 .
Je tiens à défendre un amendement qui me paraît extrêmement important, avant que ne soit examiné l’amendement du Gouvernement qui tend à rendre facultatif le CV anonyme.
Je rappelle que le CV anonyme a été introduit par la loi sur l’égalité des chances, grâce à l’adoption d’un amendement dont j’étais l’auteur. Je rappelle aussi que François Hollande, au cours de la campagne présidentielle, avait promis sa généralisation. Si vous considérez que rendre un dispositif facultatif, c’est le généraliser, je dois vous dire que je n’ai pas la même conception que vous de la généralisation.
Pourtant, les personnes habitant les quartiers défavorisés souffrent particulièrement des discriminations, et ce n’est pas le ministre de la ville qui dira le contraire, puisque c’est l’une des priorités de la politique de la ville. Je pense à la fois aux personnes issues de l’immigration et à celles qui sont originaires des départements et territoires d’outre-mer. Le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale estime qu’un habitant ou une habitante de quartier sensible a deux fois moins de chances d’obtenir un entretien d’embauche qu’une personne résidant hors de ces zones sensibles ; et qu’une personne issue de l’immigration maghrébine a cinq fois moins de chances qu’une autre d’obtenir un entretien d’embauche.
Vous préférez supprimer cette obligation, plutôt que de travailler à sa généralisation, ou au moins à sa mise en oeuvre dans un certain nombre d’entreprises.
Mon amendement vise à rendre cette disposition facultative dans les plus petites entreprises, où elle ne serait peut-être pas adaptée, mais de la rendre obligatoire dans les entreprises de plus de 5 000 salariés.
Vous allez nous dire que c’est impossible, mais je rappelle que l’intérim est anonyme. Lorsque vous prenez un intérimaire – il y en a 500 000 à 600 000 en France –, vous ne donnez pas des critères d’âge ou de domicile, mais vous embauchez une personne qui exerce un certain type de métier, plombier par exemple. Vous ne faites même pas passer un entretien d’embauche : vous cherchez une personne qualifiée pour faire le travail que vous demandez.
Le CV anonyme existe déjà. Le rendre facultatif, cela revient en réalité à le supprimer. En effet, qui va faire un CV anonyme, à part ceux qui sont discriminés ? Au moment où vous voulez faire de la lutte contre les discriminations une cause nationale, et alors que le groupe socialiste vient de déposer une proposition de loi autorisant des actions de groupe contre les discriminations…
…vous rendez inopérant le CV anonyme ! Je trouve cela, non seulement incohérent, mais injuste pour ceux qui sont discriminés.
Sur l’amendement no 705 rectifié , je suis saisi par le groupe écologiste d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement no 705 rectifié et donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement no 258 .
La lutte indispensable contre le cancer des discriminations, qui mine la société, le Gouvernement la mène avec une détermination qui n’a d’égale que ma conviction que ces discriminations portent atteinte à notre consensus républicain et à la cohésion sociale. Je tiens à le dire avec force à cet instant.
C’est pourquoi nous avons mis en place un groupe de travail spécifique sur le sujet de la lutte contre les discriminations, avec Patrick Kanner et Christiane Taubira. Ce groupe de travail a fait un certain nombre de propositions qui nous ont été remises il y a une quinzaine de jours. J’ai d’ailleurs tiré de ce rapport treize projets de mesures.
Eh bien, savez-vous quelle est la première des mesures proposées par ce groupe de travail, qui rassemble tous les partenaires sociaux et les associations qui luttent contre les discriminations ? Supprimer le caractère systématique du CV anonyme.
Il proposé, à travers cet amendement, de supprimer non pas le CV anonyme en tant que tel, mais son caractère systématique.
Au demeurant, on peut se demander pourquoi, si vous y êtes tant attachés, vous ne l’avez pas mis en oeuvre alors qu’il a été créé en 2006. Là est le problème.
Moi, je l’ai mis en oeuvre dans ma ville, à Dijon, donc je sais ce dont je parle. En 2006, à Dijon, différentes méthodes de recrutement ont été testées avec une grande entreprise. Je sais donc que le CV anonyme fonctionne pour certains postes, mais pas pour tous, ni pour toutes les entreprises. Ce n’est donc pas la seule solution ; c’est une des solutions.
En outre, depuis lors, les choses ont bien changé, et elles continueront à le faire. Petit à petit, de nouvelles méthodes de lutte contre ces discriminations sont élaborées : on peut évoquer le CV vidéo, entre autres moyens de présentation pour ceux qui sont discriminés au quotidien. Lorsque nous prendrons connaissance des informations qui vont sortir sur ce sujet, nous aurons honte pour cette République qui n’arrête pas de pratiquer des discriminations, à l’embauche et dans l’emploi, et qui ne fait pas l’effort de formation nécessaire pour lutter contre ces discriminations.
Beaucoup de mesures sont proposées ; je ne vous citerai pas les treize, mais je vous les adresserai personnellement et vous en prendrez ainsi connaissance. Et puisque la lutte contre ces discriminations peut être un objectif partagé, je vous demanderai d’accompagner ces mesures quand nous nous lancerons dans des opérations comme le testing, qui a toujours été prôné mais peu mis en pratique – nous allons le faire.
Il y aura donc beaucoup d’actions, le CV anonyme coexistera avec d’autres modes de recrutement pour lutter contre les discriminations, mais le caractère systématique aurait pu, au contraire, constituer un frein à la lutte contre la discrimination à l’embauche. J’encourage donc à le pratiquer pour certains postes, mais pas toujours et pour tous les postes. Et puis, une fois encore, si vous y teniez tant, il fallait le faire !
Il fallait le mettre en oeuvre.
Il faut se garder d’une approche trop simple sur ce sujet. Il n’y a pas d’un côté les partisans du CV anonyme obligatoire, garants de la lutte contre les discriminations et, de l’autre, ceux qui, parce qu’ils tiendraient compte de la réalité de l’évolution des modes de recrutement et des constats faits sur les dispositifs existants, seraient enclins à accepter les discriminations.
Sur cette question, nous ne pouvons nous en tenir à un débat de principe : nous devons nous adapter à la situation à laquelle nous sommes confrontés. Personne ne peut douter de la volonté partagée par tous les élus de la République qui sont ici de se battre contre les discriminations, notamment la discrimination dans l’entreprise et la discrimination à l’embauche.
Il faut aussi être réaliste : si le CV anonyme obligatoire et généralisé avait donné des résultats à ce point significatifs pour que l’on puisse le considérer comme l’outil permettant de lutter contre la discrimination, alors nous n’aurions probablement pas la réflexion qui est engagée aujourd’hui. Mais, et M. le ministre l’a dit de manière très précise, c’est un outil parmi d’autres.
Les nouvelles formes de recrutement, la manière par laquelle vous avez, aujourd’hui, à vous présenter pour un emploi – par le CV vidéo, par exemple –, tous ces développements extrêmement importants montrent bien qu’on ne peut se contenter de se cacher derrière un dispositif qui, s’il n’est pas inutile, n’est pas suffisant pour ceux qui considèrent qu’il faut se battre contre les discriminations. Il faut que nous y soyons vigilants.
J’émets donc un avis défavorable sur la proposition qui est faite par M. Vercamer – et, encore une fois, je ne suis pas pour la disparition du CV anonyme, ce n’est pas ce qui est proposé – et un avis favorable sur l’amendement du Gouvernement. Je pense que, pour la sérénité de nos débats, il faut éviter les caricatures et les procès d’intention de la part de ceux qui considèrent que, parce que nous défendons cette proposition, nous renoncerions aux fondamentaux qui doivent nous rassembler, à savoir le refus de la discrimination dans l’entreprise et à l’embauche.
Je ne veux pas déclarer a priori qu’ici, quelqu’un défendrait les discriminations, cela va de soi. Je suis tout de même surprise et préoccupée par l’amendement du Gouvernement. Celui-ci décide en effet de renoncer au dispositif du CV anonyme avant même qu’il ait été éprouvé. C’est la loi sur l’égalité des chances qui l’a instauré en 2006 mais, comme M. le ministre l’a très bien dit à M. Vercamer, jamais les décrets d’application n’ont été publiés – c’est là une vérité que personne ne peut contester.
Depuis dix ans !
C’est la responsabilité des gouvernements précédents. Il est bien dommage qu’ils n’aient pas publié les décrets d’application. Cela dit, je ne vois pas comment on peut déclarer aujourd’hui que ce système n’est pas efficace, qu’il est coûteux, voire qu’il serait éventuellement contre-productif, alors qu’il n’a pas été appliqué.
Ensuite, on nous dit qu’un groupe de travail a été mandaté. Je ne sais pas trop sur quoi ses membres ont travaillé, puisque, je le répète, le CV anonyme n’a pas été mis en oeuvre de manière suffisamment large pour que l’on puisse avoir un véritable avis sur le sujet. Il aurait été utile de publier les décrets, d’appliquer cette disposition, de l’évaluer, et éventuellement de modifier les choses si l’on pensait que c’était nécessaire.
Monsieur le ministre, il ne faut pas se cacher derrière son petit doigt : en rendant facultatif le CV anonyme, on le supprime. Il est enterré. Vous écrivez dans l’exposé des motifs de votre amendement qu’il ne peut pas constituer la seule réponse. J’en suis d’accord, même si personne n’a jamais prétendu le contraire. Est-ce une raison pour l’enterrer ? Je ne le crois pas.
C’est pourquoi je ne soutiendrai pas l’amendement du Gouvernement. Il y a des discriminations à l’embauche ; le CV anonyme est un des moyens de lutter contre elles, et je ne souhaite pas qu’on le supprime ainsi, à une heure du matin.
Au risque de vous surprendre, je vais aller dans le sens du ministre et du rapporteur. Je vous avoue que je n’ai jamais cru au CV anonyme, même quand il a été instauré. Il reste toujours un face-à-face en dernière étape d’un recrutement, et la décision se prend entre l’employeur et le salarié.
Les professionnels du recrutement, avec lesquels j’ai beaucoup discuté, expliquent que les méthodes de recrutement ont complètement changé aujourd’hui. Vous avez parlé de vidéo ; on peut aussi évoquer les réseaux sociaux. Les choses ne sont plus du tout comme avant, et il faut en tenir compte.
C’est pour cela que ces professionnels du recrutement – je pense que vous avez eu l’occasion de les entendre, monsieur le ministre – proposent ce que j’ai appelé tout à l’heure le CV citoyen. Il va dans le sens de ce que j’imagine être votre souhait par rapport au compte personnel d’activité. Ce sont des CV qui mettent en avant votre parcours professionnel, mais aussi vos engagements associatifs, vos valeurs, vos talents, et qui sont travaillés avec des professionnels, qu’ils soient de Pôle emploi ou de cabinets dont c’est le métier.
Il faut arrêter de penser que c’est le CV anonyme qui va nous permettre de lutter contre les discriminations, il faut trouver les moyens et faire évoluer nos modes de recrutement.
En revanche, monsieur le ministre, les professionnels du recrutement disent aussi que, parfois, on les oblige à discriminer : quand on leur dit que certaines offres d’emploi doivent être réservées aux jeunes ou aux seniors, ils ont le sentiment d’être hors-la-loi parce que, justement, ils discriminent par l’âge.
Ce n’est pas de ces discriminations-là qu’il est question !
Je voudrais moi aussi soutenir M. le ministre, parce que j’ai trouvé ses propos extrêmement intéressants : le CV anonyme n’est qu’un des moyens. Je veux juste vous faire part d’une expérience : à une porte de Paris, il y a un très grand bassin d’emplois avec des sièges sociaux considérables, à La Plaine Saint-Denis. En dix ans, je vous prie de croire que j’ai vu beaucoup de salariés, et j’ai vu cette population changer régulièrement, parce qu’il y a eu des accords entre les entreprises – en tout cas une grande entreprise que je connais bien –, le bassin d’emplois et la communauté d’agglomération de Plaine Commune, qui ont permis à beaucoup de jeunes – et parfois de moins jeunes – de passer les portes de l’entreprise.
Bien sûr, en dernier recours, il y a ce face-à-face, Mme Le Callennec a raison. Mais c’est cette volonté politique de la direction vis-à-vis de ce territoire qui a fait la différence, j’en suis totalement convaincu. Je soutiens donc le Gouvernement.
Je suis d’accord avec tout ce qui a été dit concernant la lutte contre les discriminations, et nous sommes tous partisans d’aller dans ce sens, mais le face-à-face qu’évoquait Mme Le Callennec est justement le problème. Comme beaucoup de nos collègues, je reçois des jeunes qui sont stigmatisés parce qu’ils habitent un certain quartier, ou parce qu’ils ont une couleur de peau particulière, un nom, ou parce que ce sont des femmes ou des handicapés. Leur problème, c’est qu’ils n’accèdent pas à cet entretien, précisément en raison de discriminations, liées en particulier à leur lieu de résidence.
Moi aussi je peux vous livrer une expérience : j’ai reçu une petite jeune, que je connaissais, qui demandait un stage. Elle est venue avec son CV, où son adresse ne figurait pas. Comme je savais où elle habitait, je le lui ai fait remarquer, et elle m’a répondu que les services qui l’avaient aidé à faire son CV lui avaient conseillé de ne pas indiquer son adresse. J’estime que c’est là une violence que vivent un certain nombre de nos jeunes aujourd’hui.
Au sein du groupe de travail, que je respecte, sont représentées des associations qui sont en contact avec ces jeunes et qui connaissent bien les problèmes qu’ils rencontrent. Il est bien beau d’être dans des bureaux, avec des théories, des schémas et plein de bonne volonté mais, si le CV anonyme est aussi un des outils, pourquoi devrait-on s’en priver ?
Je voudrais d’abord saluer la constance de mon collègue M. Vercamer, qui était l’auteur de l’amendement qui a créé le CV anonyme en 2006.
Le CV anonyme n’a pas vocation à permettre que les gens soient embauchés, mais que les uns et les autres soient auditionnés, entendus par les recruteurs. Ce dispositif doit permettre d’éviter que le CV soit jeté à la poubelle comme il peut l’être aujourd’hui, et de faire de l’égalité une réalité dans l’embauche.
La généralisation facultative que prône le ministre en employant des grands mots est-elle une bonne idée ? Je n’en suis pas certain.
Je ne trouve pas cela très courageux s’agissant d’un dispositif qui n’a jamais été mis en oeuvre, monsieur le ministre. Que le groupe de travail vous ait proposé de rendre facultatif un dispositif qui a toujours subi les foudres du monde de l’entreprise et des organisations représentatives des employeurs, alors qu’il n’a jamais été expérimenté, ne me semble pas extrêmement courageux.
Je salue l’initiative du groupe écologiste de demander un scrutin public sur l’amendement du Gouvernement, qui signe la mort du CV anonyme, alors que ce dernier répondait à une volonté forte de la représentation nationale. Il est vrai, monsieur le ministre, que le décret n’a pas été pris, mais en agissant ainsi, on méprise la représentation nationale qui, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, a voté la mise en place du CV anonyme en 2006.
Je partage les arguments de Mme Fraysse et de Mme Bouziane-Laroussi. Moi aussi, je reçois dans ma permanence un certain nombre de personnes faisant l’objet de discriminations à l’embauche. Vous l’avez très bien expliqué, madame Bouziane-Laroussi, je ne le répéterai donc pas.
Par ailleurs, je ne suis pas certaine que cet amendement ait vraiment sa place dans notre débat. Il mériterait sans doute d’être discuté dans le cadre d’un texte relatif à la lutte contre les discriminations ou à l’accès à l’emploi.
Je vous ai entendu, monsieur le ministre, expliquer que le CV anonyme n’était pas le seul outil. Nous sommes tout à fait d’accord : personne n’a dit le contraire. Mais vous reconnaissez par là qu’il en est un : pourquoi donc vouloir supprimer son caractère obligatoire aujourd’hui ?
Pour toutes ces raisons, j’ai demandé un scrutin public sur l’amendement no 705 rectifié . Nous voterons contre.
Il convient de lever certaines incompréhensions. Je veux m’adresser à Mme Fraysse, à Mme Massonneau et à ceux qui étaient, de bonne foi, à l’origine du CV anonyme, voté en mars 2006 en réponse aux émeutes de 2005.
Pour changer la loi, madame Fraysse, il faut d’abord la connaître. Afin que vous compreniez le problème, je vous lis le premier alinéa de l’article L. 1221-7 du code du travail : « Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, les informations mentionnées à l’article L. 1221-6 et communiquées par écrit par le candidat à un emploi ne peuvent être examinées que dans des conditions préservant son anonymat. » Cette disposition est systématique : elle vaut pour toutes les offres et toutes les entreprises. Vous voyez bien qu’elle est inapplicable : on ne peut pas demander à toutes les entreprises de préserver, dans tous les cas, l’anonymat de tous ceux qui postulent à toutes les offres d’emplois.
C’est d’ailleurs pour cela que cette disposition n’a pas été appliquée.
Je vous conseille de lire le code du travail : c’est intéressant, et c’est d’ailleurs ce que je fais le soir.
Sourires.
Certaines éditions comportent des commentaires visant à expliquer la démarche. Permettez-moi de les lire, afin que tout le monde soit informé : « Certaines entreprises se sont lancées dans la pratique du CV anonyme dans l’intention de favoriser le recrutement de salariés appartenant à des minorités, visibles ou non, sur la base d’une démarche volontaire et responsable. » Cette pratique a donc existé, et elle existe encore. J’ai évoqué l’expérience de ma ville avec un grand groupe suédois : je connais donc cette question. Je ne citerai pas, quant à moi, les propos de telle ou telle personne rencontrée, car nous sommes pas au café du commerce.
Je poursuis la lecture : « Un rapport publié en mars 2011 tendrait toutefois à démontrer que, contrairement à l’idée reçue, cette pratique ne donne pas les effets attendus en termes de promotion de la diversité. » Sont alors citées certaines études visant à évaluer les effets du CV anonyme. Vous ne pouvez donc pas faire comme si cette pratique n’existait pas. Il s’agit non pas de supprimer le CV anonyme, mais de permettre d’autres formes de recrutement.
Vous pourriez me dire que ce n’est pas grave car la loi ne s’applique pas toujours. Eh bien, c’est justement ce que nous voulons éviter : quand on veut l’égalité réelle, on veut l’application réelle de la loi, et c’est pourquoi nous proposons de la changer.
Cela a été dit et répété : d’autres formes de recrutement sont apparues. Madame Fraysse, vous faites comme si vous n’aviez pas connaissance de l’existence d’un groupe de travail sur cette question, qui réunit tous les partenaires sociaux et les associations.
Effectivement, certaines associations ont exprimé leur désaccord avec cette disposition. Mais, pour que tout le monde soit informé, je demanderai que l’on diffuse largement les conclusions de ce groupe de travail, qui n’est pas informel et qui a réalisé un travail sérieux, sous la responsabilité d’un DRH sérieux et de rapporteurs sérieux.
C’est un travail que nous devons prendre en compte, et dont les conclusions ont été publiées dans la presse.
L’amendement no 258 n’est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants: 20 Nombre de suffrages exprimés: 20 Majorité absolue: 11 Pour l’adoption: 12 contre: 8 (L’amendement no 705 rectifié est adopté.)
Nous allons maintenant accélérer nos débats, de manière à respecter les dispositions de notre règlement.
Le règlement s’applique à la majorité comme à l’opposition, monsieur le président !
La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir l’amendement no 339 rectifié .
La branche du travail temporaire a conclu en juillet 2013 un accord portant sur la sécurisation des parcours professionnels des salariés intérimaires. Cet accord, qui prévoit la faculté de conclure des contrats de travail à durée indéterminée, a été étendu par le ministère du travail en février 2014. Cependant, les dispositions législatives et réglementaires qui auraient dû être modifiées pour tenir compte de cette nouvelle réalité ne l’ont jamais été.
Aujourd’hui, le recours au travail temporaire se fait nécessairement à durée déterminée. La possibilité pour les entreprises de travail temporaire de conclure un contrat de travail à durée indéterminée avec leurs salariés doit donc être autorisée expressément par les textes. De même, considérant que ces salariés sont liés à leur entreprise par un contrat à durée indéterminée, ce qui sécurise leur situation professionnelle, les textes doivent préciser que les dispositions du code du travail en vigueur, qui restreignent la mise à disposition de salariés temporaires auprès des entreprises utilisatrices, ne sont pas applicables à ces salariés.
Le CDI d’intérim, qui fait l’objet de cet amendement, est le résultat d’un accord entre les partenaires sociaux.
Pour les salariés, il est un outil de sécurisation des parcours professionnels. Un CDI constitue une garantie de rémunération et une réponse à un besoin spécifique que peuvent exprimer les petites et moyennes entreprises. Sur le terrain, j’ai constaté que cela pouvait être une bonne réponse.
On constate aujourd’hui quelques incohérences d’application qui concernent le CDI d’intérim, et plus particulièrement certaines clauses de l’intérim. Si vous en êtes d’accord, monsieur Cherpion, et si vous acceptez de retirer votre amendement, nous pourrions évoquer ces questions ensemble et discuter de la manière de corriger ces imperfections, que je connais et que vous avez soulignées.
J’ai écouté votre proposition avec intérêt, monsieur le ministre, et je souhaite que nous puissions discuter de ces questions assez rapidement.
Tout à fait !
L’amendement no 339 rectifié est retiré.
Nous en venons à l’amendement no 646 de Mme Sandrine Mazetier, dont nous avons déjà débattu tout à l’heure.
Vous avez la parole, ma chère collègue.
Non, monsieur le président, nous n’avons pas encore débattu de cet amendement, qui vise à rappeler intégralement les dispositions relatives au harcèlement moral et au harcèlement sexuel dans le règlement intérieur des entreprises.
La première loi de cette législature, promulguée en août 2012, a rétabli une base juridique permettant de sanctionner le harcèlement moral ou sexuel. Or elle n’a pas du tout été transposée dans le règlement intérieur des entreprises. C’est le premier objet de cet amendement.
Son second est caduc, compte tenu du retrait de mon amendement no 644 . Il s’agissait de rappeler également, dans le règlement intérieur des entreprises, les dispositions relatives aux agissements liés à l’un des motifs de discrimination énumérés par l’article 1er de la loi du 27 mai 2008, dont font partie les agissements sexistes.
Il existe déjà des dispositions législatives caractérisant le sexisme, mais personne ne les connaît. C’est pourquoi nous avions déposé l’amendement no 644 , que j’ai retiré afin d’accompagner la démarche du Gouvernement. Cela dit, il existe une jurisprudence, certes peu abondante, sur cette question : ainsi, dans un arrêt du 18 décembre 2012, la cour d’appel de Paris reconnaît et caractérise les agissements sexistes, auxquels l’amendement no 644 visait justement à donner une définition légale.
Parmi les recommandations du rapport du Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes figuraient la codification – nous y viendrons probablement lors de la prochaine lecture –, mais aussi une mesure toute simple : la publication d’une circulaire du ministère du travail explicitant la notion d’agissement en raison du sexe et l’article 1er de la loi du 27 mai 2008.
Je maintiens donc cet amendement no 646 , dont j’espère qu’il recevra un avis favorable de la commission et du Gouvernement.
Le règlement intérieur comporte déjà la mention de l’interdiction des discriminations. Par ailleurs, je ne suis pas sûr qu’il soit nécessaire de recopier dans ce document l’ensemble des articles du code du travail. Le règlement intérieur risque de comporter tellement de dispositions qu’il deviendra illisible pour les salariés. La commission a donc donné un avis défavorable à cet amendement.
L’amendement no 646 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement no 321 .
Cet amendement vise à supprimer l’obligation de demande d’autorisation à l’inspection du travail pour les fins de contrats des salariés saisonniers protégés lorsqu’ils bénéficient de la reconduction de leur contrat.
Le droit positif actuel oblige en effet les employeurs à des procédures particulières vis-à-vis de l’inspection du travail lorsque le CDD d’un salarié protégé s’arrête, puisque l’article L. 2421-8 du code du travail oblige à constater l’absence de mesure discriminatoire au terme du CDD, ce qui est en soi tout à fait légitime et nécessaire. Mais la reconduction des contrats saisonniers peut être prévue par voie contractuelle ou conventionnelle – c’est notamment le cas dans la branche des remontées mécaniques et domaines skiables. Cette procédure ne paraît plus nécessaire. Elle n’apporte pas de garanties supplémentaires aux travailleurs saisonniers protégés.
C’est pourquoi mon collègue Joël Giraud, qui préside le Conseil national de la montagne et dont je vous prie de bien vouloir excuser l’absence, souhaite vivement l’adoption de cet amendement.
J’invite M. Schwartzenberg à retirer son amendement car, à la demande de son collègue M. Giraud, j’ai mis en place un groupe de travail sur cette question. On ne peut pas procéder à un changement avant que le groupe de travail, dont M. Giraud est membre, rende ses conclusions, ce qu’il fera très prochainement. C’est d’ailleurs ce que j’ai déjà dit à M. Giraud.
N’étant pas un spécialiste fondamentalement qualifié de la matière, j’ignorais, monsieur le ministre, que vous aviez lancé un groupe de travail.
À la demande de M. Giraud !
Il est toujours intéressant d’avoir un groupe de travail, mais la disposition visée est parfaitement inutile, superfétatoire. Or je sais votre attachement à la simplification des procédures, surtout lorsque cela ne porte pas tort aux droits des intéressés. Ce groupe de travail aura certainement l’occasion de se pencher sur d’autres problèmes connexes, sans qu’il ait besoin de se concentrer sur ce point qui me semble faire l’objet d’un consensus.
L’amendement no 321 est adopté.
Les partenaires sociaux ont mis en place, dans l’accord interprofessionnel du 11 janvier 2013, les accords de maintien dans l’emploi, à vocation défensive. Le présent amendement vient en miroir en proposant une forme offensive de maintien dans l’emploi.
L’amendement no 13 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’amendement no 95 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Je suis saisi d’un amendement, no 639 rectifié .
Monsieur le ministre, peut-on considérer qu’il est défendu ? Vous devriez être pour…
Sourires.
Je tiens à m’exprimer sur ce sujet important, monsieur le président. Je ne veux pas que l’on déstabilise davantage l’apprentissage. Il faut que les choses soient claires. La dématérialisation de la chaîne de traitement des contrats d’apprentissage, c’est très bien, mais cela se fera lorsque tout sera au point.
Je suis défavorable à cet amendement qui modifie considérablement le système actuel.
Tout à fait !
Il déséquilibre complètement le système des chambres consulaires et en particulier ce qui a été mis en place dans une loi qui m’est chère, la loi de juillet 2011.
Un tel dispositif mettrait tout par terre. Ce n’est vraiment pas le moment, alors que l’apprentissage est en chute libre, de rajouter un système qui va dématérialiser, ce qui est certes prévu dans la loi de 2011, mais aura pour conséquence de supprimer les liens avec les chambres consulaires, les chambres des métiers et les chambres d’industrie.
Exactement !
Avec un tel amendement, on perdra à coup sûr 20 000 apprentis l’année prochaine : belle réussite !
Je retire l’amendement.
L’amendement no 639 rectifié est retiré.
Je suis saisi d’un amendement no 703 de M. Ferrand, qui a été repris par la commission.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
La commission a effectivement repris cet amendement dont l’objet est de permettre aux entreprises de mobiliser tout ou partie de la part dite hors quota de leur taxe d’apprentissage pour pouvoir effectuer des donations de matériels professionnels à des centres de formation d’apprentis.
L’amendement no 703 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement no 710 rectifié .
L’amendement est défendu.
L’amendement no 710 rectifié , accepté par la commission, est adopté.
Le présent amendement vise à faciliter les possibilités d’accueil des personnes – jeunes ou demandeurs d’emploi – en contrat de professionnalisation dans plusieurs entreprises. Il encourage la souplesse et la flexibilité du travail. J’avais cru comprendre que M. le ministre était plutôt ouvert à cet amendement ; j’espère qu’il n’a pas changé d’avis ce soir.
L’amendement no 45 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 97 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’amendement no 461 est retiré.
Ces deux amendements ont pour objet d’anticiper et d’accompagner les transitions professionnelles liées à la transition énergétique.
L’amendement no 431 vise à ce qu’une concertation s’engage avec les partenaires sociaux. Ils sont invités à ouvrir une négociation sur les transitions professionnelles liées à la transition énergétique, à étendre le périmètre des instances représentatives des personnels aux enjeux environnementaux et climatiques.
L’amendement no 430 tend à mettre en oeuvre une stratégie d’anticipation en ce qui concerne l’offre de formation. Il s’agit de demander qu’un rapport soit établi afin de bâtir, dans le cadre du Conseil national à l’emploi, la formation et l’orientation professionnelles, une offre de diplômes ou de certifications correspondant aux besoins de compétences identifiées.
Même avis que la commission.
L’amendement no 431 est retiré.
L’amendement no 430 est adopté.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 183 .
Je ne sais pas si c’est l’arrivée de Mme Touraine qui est la cause de l’effervescence que l’on constate brusquement dans l’hémicycle...
Sourires.
Notre amendement vise à instaurer une expérimentation. ATD-Quart Monde s’est penché sur la situation des chômeurs de très longue durée. Nous demandons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport évaluant l’opportunité d’expérimenter dans certains territoires le financement d’emplois non solvables ou semi-solvables à destination des chômeurs de longue durée.
Jamais une entreprise ne s’engagera dans une telle expérimentation car cela n’est pas rentable ; peut-être l’économie sociale et solidaire le fera-t-elle. Si le Gouvernement ne procède pas à cette expérimentation pour essayer de remettre dans l’emploi un certain nombre de chômeurs de longue durée, on n’y arrivera pas.
L’amendement no 183 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Prévu par la loi du 13 décembre 2000 d’orientation pour l’outre-mer, modifié en 2010 avec un relèvement de l’âge de l’éligibilité, le revenu de solidarité – le RSO – a été créé spécifiquement pour les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion, ainsi que dans les territoires de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon. Sont éligibles au RSO les personnes de 55 ans et plus, et de moins de 65 ans, ayant bénéficié du RSA pendant deux ans sans interruption.
Le RSO, initialement considéré comme un dispositif de préretraite avec un montant amélioré par rapport au RSA, était justifié par la situation de l’emploi particulière en outre-mer et par les faibles perspectives d’insertion professionnelle du public visé par cette prestation.
Aujourd’hui, force est de constater que le dispositif est devenu moins attractif. Dans ces conditions, il paraît opportun de l’évaluer et d’apprécier les adaptations nécessaires à lui apporter.
Aussi, il est demandé au Gouvernement de rendre au Parlement un rapport sur l’adaptation du revenu de solidarité.
L’amendement no 459 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 520 .
L’amendement no 520 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Nous disposons déjà de toutes les données. Il n’est pas nécessaire d’avoir un nouveau rapport. Je demande le retrait de l’amendement.
Même avis.
L’amendement no 458 est retiré.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 24.
La parole est à Mme Valérie Corre.
La prime d’activité instaurée par les articles 24 à 27 répond à un besoin essentiel pour les salariés en situation de reprise d’activité, de soutien et d’accompagnement dans cette transition.
En fusionnant le RSA activité et la prime pour l’emploi, la prime d’activité constitue un véritable instrument de soutien aux travailleurs modestes et de réduction des inégalités dans notre société. Mais surtout, elle corrige une terrible discrimination à l’égard des jeunes de moins de 25 ans. Lors de l’instauration du RSA en 2009, ils se sont vu imposer des critères d’attribution supplémentaires, ce qui les a exclus de fait du dispositif.
Ainsi, ceux qui étaient le plus souvent les travailleurs les plus précaires, les moins bien rémunérés, ceux qui devaient parfois mettre en péril leurs études supérieures pour travailler à temps partiel étaient écartés de cette mesure sociale.
Avec l’instauration de la prime d’activité, c’est l’ensemble des jeunes, sans discrimination liée à l’âge qui pourra bénéficier de cette mesure de justice sociale à condition de satisfaire aux critères d’attribution.
Je me réjouis de l’élargissement de la prime d’activité à l’ensemble des apprentis ou étudiants gagnant au moins 0,8 % du SMIC par an, annoncé par le Gouvernement et confirmé par le projet de loi.
Néanmoins, je souhaite que la prime d’activité, qui est un progrès pour notre société, ne soit pas néfaste pour certains. En l’occurrence, je pense aux étrangers extra-communautaires qui travaillent, remplissent une déclaration d’impôt, mais possèdent un titre de séjour depuis moins de cinq ans. Ces étrangers qui font partie des salariés les plus précaires bénéficient aujourd’hui de la prime pour l’emploi, mais seront exclus demain de la prime d’activité.
Je souhaite que les critères d’attribution de la prime d’activité pour les étrangers s’alignent sur ceux de la prime pour l’emploi ainsi que le proposait notre rapporteur dans un amendement qui a été repoussé au titre de l’article 40 de la Constitution. Il y va de la compréhension par les Français de la prime d’activité et du sens de cette réforme.
L’article 24 introduit la création d’une nouvelle prime d’activité en fusionnant le RSA activité et la prime pour l’emploi. Nous soutenons cette démarche qui tend à simplifier et, surtout, qui vise à aider prioritairement les travailleurs les plus modestes, ceux qui perçoivent entre 908 euros et 1 363 euros nets par mois.
Toutefois, comme je l’ai dit au cours de la discussion générale, nous sommes préoccupés par le fait que cette réforme se fasse à enveloppe constante, dans le cadre des 4,1 milliards d’euros actuels. Nous nous demandons comment vous allez faire pour tenir vos engagements, à savoir que les actuels bénéficiaires du RSA activité ne soient pas perdants tout en ouvrant l’accès à cette prime sous certaines conditions aux étudiants et aux apprentis, qui étaient jusqu’ici exclus du RSA activité et qui n’étaient pas concernés par l’enveloppe actuelle.
À cette occasion, je souhaite appeler l’attention sur la situation des étudiants. Car si nous ne nous opposons pas, évidemment, au fait que les étudiants répondant aux critères de cette nouvelle prime y aient accès, nous souhaitons que cela n’occulte pas les questions de fond que pose la situation globale des étudiants et auxquelles la prime d’activité n’apporte pas de réponse.
Que certains étudiants soient actuellement contraints d’être davantage des travailleurs que des étudiants est tout de même un problème. Je pense que les conditions de vie, d’études et de travail des étudiants devraient faire l’objet d’un débat, d’une réflexion approfondie et de mesures ambitieuses avant la fin de ce quinquennat.
Après la création, à l’article 21, du compte personnel d’activité, nous arrivons avec l’article 24 à la création de la prime d’activité. C’est bien, on parle beaucoup d’activité. Souhaitons qu’il y ait un effet incitatif à la création d’activité.
Je rappelle que la prime pour l’emploi avait déjà été supprimée en loi de finances rectificative pour 2014, il y a bientôt un an et il n’y avait pas de dispositif de substitution.
Au départ, la prime pour l’emploi est un droit à récupération fiscale, il est important de le rappeler ; ce n’est pas une mesure sociale.
Ce qui me pose problème, dans cette fusion, c’est que le nombre d’allocataires a fortement progressé entre juin 2013 et juin 2014 – 6 %, ce qui n’est pas anodin. La progression est plus forte pour les bénéficiaires du seul RSA activité.
Compte tenu de ces éléments, le groupe UDI et le groupe UMP étaient à l’origine plutôt favorables à une proposition qui s’orientait vers la réduction des cotisations sociales salariales. Ce n’est pas le choix que vous avez fait, car vous avez retenu l’hypothèse de la fusion des deux dispositifs.
J’ai deux incertitudes et deux questions. Premièrement, va-t-on vraiment vers une simplification ? Je n’en suis absolument pas convaincue : la simplification ne sera pas au rendez-vous, comme nous le verrons à l’occasion de deux amendements que je déposerai.
Deuxième élément : le coût. Selon Mme Fraysse, ce dispositif serait à enveloppe constante, soit 4,2 milliards d’euros estimés pour 2017. Le taux de recours actuel des deux dispositifs était d’environ 36 %. Vous avez retenu, pour construire le taux de recours estimé du futur dispositif de la prime d’activité, une hypothèse de 50 %. Que se passera-t-il si le taux de recours est supérieur ? Réduirez-vous l’accompagnement ou retrouverez-vous une enveloppe pour financer ce dispositif au-delà des 4,2 milliards d’euros ?
Cet article 24 crée la prime d’activité. On peut s’étonner que le Gouvernement se substitue à l’entreprise pour augmenter le pouvoir d’achat des salariés. C’était déjà le cas avec la PPE et déjà, à l’époque, en tant que porte-parole de ce qui était alors le groupe centriste, je m’étais vivement opposé à cette méthode.
Outre cela, vous fusionnez deux primes : la PPE, dont le versement est automatique, à partir de la déclaration au titre de l’impôt sur le revenu des personnes physiques – l’IRPP –, et le RSA activité, qui est attribué sur demande. Le taux de recours est quasiment de 100 % pour la PPE, tandis qu’il est d’environ 30 % pour le RSA activité. Or, curieusement, vous choisissez la deuxième solution : votre prime d’activité aura le même circuit que le RSA activité, c’est-à-dire celui où l’accès aux droits est le moins important.
Certes, vous estimez que vous passerez de 30 % ou 32 % à 50 %, mais qu’adviendra-t-il des 50 % qui ne bénéficieront pas de cette prime, alors qu’ils y ont droit ? Si c’est ce que vous appelez l’accès aux droits, dont vous faites une cause nationale, je ne partage pas cette option.
M. le Président de la République a annoncé cette prime comme la panacée, avec un nombre de bénéficiaires complémentaires. Mais que deviendront ceux qui perdront la PPE ?
L’article 24 crée la prime d’activité. La petite histoire retiendra qu’il a été adopté – car je suppose que vous êtes assez nombreux pour l’adopter – à deux heures du matin, en présence de Mme la ministre des affaires sociales, qui nous a rejoints, mais en l’absence du secrétaire d’État chargé du budget.
La prime d’activité est présentée comme une fusion de la prime pour l’emploi, qui concerne aujourd’hui 9 millions de foyers fiscaux et du RSA activité, qui touche quant à lui 476 000 foyers. La PPE coûte chaque année 2,5 milliards d’euros au budget de l’État et le RSA 2 milliards. Cette fusion de la prime pour l’emploi et du RSA activité n’est donc pas une petite affaire et je trouve dommage que nous soyons si peu nombreux dans l’hémicycle, à deux heures du matin, pour créer une prime d’activité qui aura forcément un impact sur les finances de notre pays.
La première de ces primes est un complément de pouvoir d’achat et la deuxième plutôt une incitation à la reprise d’un emploi ou à quelques heures de travail supplémentaires. Cette fusion ne sera donc pas anodine. Pour vous, son objectif est la reprise de l’emploi, l’incitation au travail et une amélioration du pouvoir d’achat des travailleurs modestes. Le nombre de personnes qui seront concernées est encore très flou : s’agira-t-il de 5, 6 ou 8 millions de personnes ? Il y aura des gagnants et des perdants et nous craignons que, parmi les perdants, figure à nouveau la classe moyenne.
Le coût pour les finances publiques ne sera pas neutre – on parle de 4,2 milliards d’euros en 2017, d’après vos calculs, si le taux de recours n’est que de 50 %.
Je me permets enfin de rappeler, bien que le ministre du travail soit parti, que, alors que, dans notre pays, 350 000 offres d’emploi ne sont pas pourvues, nous sommes en train de subventionner la reprise d’un travail.
Je tiens à souligner l’importance de ces articles visant à créer la prime d’activité et la pertinence des choix opérés. M. Christian Hutin s’est exprimé en ce sens lors de la discussion générale et je rappelle que nous sommes intervenus auprès du Premier ministre à propos de la nécessité d’élargir cette prime d’activité aux 18-25 ans.
Je me félicite donc des décisions prises, qui permettent un accès aux étudiants et aux apprentis qui perçoivent 0,78 SMIC, soit 900 euros net par mois.
Il s’agit, avec ce dispositif, de nous inscrire dans le volet du pacte de responsabilité consacré au soutien de la demande, dont nous avons débattu à plusieurs reprises. L’objectif est de lutter contre les bas salaires et de donner ainsi des capacités d’autonomie aux personnes, en particulier aux jeunes, aux étudiants et aux apprentis, afin qu’ils puissent prendre leur place dans la société. C’est là une importante démarche active, et même proactive en faveur de l’emploi.
Un amendement que nous avons déposé s’est cependant vu opposer l’article 40 de la Constitution. Je souhaite que la discussion sur les modalités de l’information, appuyée sur les préconisations de l’excellent rapport de M. Sirugue, fasse l’objet d’un examen attentif, afin que ce droit à l’information puisse être introduit auprès des publics bénéficiaires et que l’accès à l’emploi devienne une réussite, avec des salaires décents.
La parole est à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Nous abordons un aspect totalement différent de ceux que vous avez évoqués précédemment. La mise en place de la prime d’activité constitue la création d’une nouvelle prestation. Il s’agit, en effet, non de fusionner des prestations existantes, mais d’en créer une nouvelle.
L’enjeu de la prime d’activité est véritablement de répondre à celles et ceux qui, trop souvent, ont le sentiment de ne pas cocher les bonnes cases, c’est-à-dire qui n’ont pas de revenus assez importants pour pouvoir bénéficier des baisses fiscales qui interviendront à la rentrée de septembre et qui, en même temps, ont des revenus supérieurs à ceux qui permettent de bénéficier d’aides sociales. C’est véritablement cette catégorie de population, les Françaises et les Français qui ont des revenus modestes, qui ont quelques heures de travail ou un travail à temps plein, qui reprennent une activité en quittant le revenu de solidarité active ou qui passent d’un temps partiel à un temps plein, qu’il s’agit de soutenir et d’accompagner, et dont il s’agit de reconnaître le travail – concrètement, avec le versement d’une prime dont le niveau pourra être supérieur à 200, 250 ou 300 euros en fonction de la composition de la famille, ce qui est loin d’être négligeable.
Il ne s’agit pas, cependant, de faire de cette prime d’activité, comme je l’entends parfois dire, une réponse à toute une série de situations qui existent notre pays et que l’on voudrait toutes régler ainsi. La prime d’activité n’est pas une politique ou une prestation à destination des plus pauvres de nos concitoyens : il existe une politique en direction des plus pauvres et des précaires, qui comporte notamment le plan de lutte contre la pauvreté, dont je ne rappellerai pas le contenu.
Il ne s’agit pas davantage, pour la prime d’activité, de répondre à la situation des étudiants ou des apprentis d’une manière générale, même si – et c’est l’une des avancées très significatives de cette prestation –, pour la première fois, une mesure ne fait pas de discrimination entre les jeunes et les moins jeunes au seul motif de l’âge : dès lors qu’une personne de plus de 18 ans travaille et peut bénéficier de la prime d’activité, quel que soit son âge, elle pourra prétendre à cette prime, alors que, jusqu’à présent, aucun des dispositifs sociaux mis en place n’apportait de réponse aux 18-25 ans.
Je rappelle un chiffre très frappant : alors qu’on comptait 5 000 bénéficiaires de 18 à 25 ans du RSA activité, ce sont demain 1 million de jeunes qui pourront demander à bénéficier de la prime d’activité. Celle-ci répond donc à des situations très précises. C’est un mécanisme ambitieux, mais n’en faisons pas la réponse sociale à toutes les situations sociales qui peuvent exister dans notre pays.
Madame Dalloz, il n’y aura pas de rupture par rapport à la prime pour l’emploi, qui est un mécanisme fiscal et qui jouera donc à la fin de l’année 2015. Pour ceux qui bénéficieront de la prime d’activité, le relais se prendra naturellement à partir du mois de janvier 2016. Comme la prime d’activité porte sur les revenus de l’année précédente, il n’y aura aucune interruption.
Enfin, madame Dalloz, je n’ai pas le souvenir que, lorsque le Gouvernement a proposé la baisse des cotisations sociales salariales, vous ayez appuyé cette démarche, qui a été censurée par le Conseil constitutionnel – on peut le regretter, mais c’est un fait.
Vous proposez donc aujourd’hui une disposition qui a été censurée par le Conseil constitutionnel, saisi du reste par votre groupe. Au lieu de vous mobiliser en faveur de la prime d’activité, vous cherchez à mettre en place un dispositif que nous avions imaginé et qui a été censuré sur votre initiative. Où sont la cohérence et la logique ?
Sourires sur les bancs du groupe SRC.
En tout cas, le Gouvernement fait aujourd’hui le choix d’un dispositif innovant et important, en direction des jeunes – et des moins jeunes – qui travaillent, car il s’agit de reconnaître la valeur du travail, quelle que soit la quantité de travail et quels que soient les secteurs concernés.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 551 rectifié .
Il est défendu. Il s’agit d’un amendement important, qui tend à instaurer l’accompagnement des bénéficiaires de la prime d’activité par Pôle emploi, élément qui nous semblait manquer dans le texte. Cet amendement a reçu un avis favorable de la commission.
L’amendement no 551 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Il s’agit de faire en sorte que la prime d’activité soit incessible et insaisissable. En effet, c’est actuellement le cas pour le RSA activité, qui est accroché au RSA. Les règles d’incessibilité et d’insaisissabilité peuvent varier selon les prestations et les types de revenus, avec parfois des cessibilités et des saisies partielles.
En l’espèce, il semble ici de bonne méthode, pour sécuriser l’incitation à l’activité et ne pas reculer par rapport à ce que percevaient les bénéficiaires actuels du RSA activité, qui percevront demain la prime d’activité, de rendre cette prime d’activité incessible et insaisissable. Ce serait un signe de notre soutien à la reprise et au maintien dans l’emploi des travailleurs les plus modestes.
La parole est à M. Michel Liebgott, pour soutenir l’amendement no 699 .
Avis favorable. C’est l’esprit du texte de loi proposé et cela va encore mieux en l’écrivant.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 555 rectifié .
L’amendement no 555 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Michel Liebgott, pour soutenir l’amendement no 700 .
Avis favorable.
L’amendement tend à prévoir une campagne d’information. Or le succès de la mise en oeuvre de la prime d’activité passe par le lancement de campagnes d’information adaptées, en particulier en direction des jeunes. L’une des difficultés sera en effet d’informer les bénéficiaires potentiels de l’existence de la prime ; si ceux-ci sont d’ores et déjà allocataires des caisses d’allocations familiales, l’information leur sera donnée, mais s’ils sont jeunes et qu’ils n’ont jamais été allocataires, des campagnes d’information, en particulier des campagnes dématérialisées sur les réseaux sociaux, devront être engagées à leur intention, afin que la prime puisse toucher son public.
L’amendement no 700 est adopté.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 217 .
Nous proposons qu’un rapport d’évaluation soit remis au Parlement en juillet 2016. Notre inquiétude porte sur le fait que la Caisse nationale des allocations familiales ou, pour les salariés agricoles, la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole auront à adapter le dispositif.
La prime d’activité devra en effet être réévaluée tous les trois mois. Soyons honnêtes : je reconnais que cette disposition a un intérêt, dans la mesure où elle assurera une réactivité du dispositif par rapport aux variations de revenu. Il s’agit là d’une avancée, puisque l’on pourra adapter les choses suivant qu’il y aura eu, ou non, reprise d’activité. Mais ce qu’il serait intéressant de vérifier, c’est si les organismes concernés sont capables de faire preuve de réactivité tous les trois mois. D’où la commande d’un rapport, afin d’évaluer la situation de ces organismes au regard de cette requête.
D’abord, l’échéance au 31 juillet 2016, soit sept mois après la mise en oeuvre du dispositif, me paraît un délai bien court.
Ensuite, je n’ai aucun doute sur la réactivité de ces organismes. J’en ai d’autant moins qu’ayant eu à s’adapter et à gérer le RSA activité, ils ont fait la démonstration qu’ils étaient capables de gérer de tels dispositifs. Vu que nous travaillons avec eux, notamment avec la Caisse nationale des allocations familiales, depuis plusieurs mois et même plusieurs années, et vu que je sais qu’ils se sont d’ores et déjà organisés à cette fin, je n’ai pas d’inquiétude particulière quant à leur capacité de mener à bien cette mission.
Avis défavorable, donc.
Avis d’autant plus défavorable qu’a été adopté en commission le principe de la remise d’un rapport d’évaluation dix-huit mois après l’entrée en vigueur de la loi. Les questions que vous posez seront examinées dans ce cadre.
L’amendement no 217 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 218 .
Cet amendement vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur le financement du dispositif.
Comme le soulignait fort judicieusement le Premier président de la Cour des comptes, M. Didier Migaud, lors de son audition par la commission des finances cette semaine, les réajustements de dernière minute en fin d’année ont un effet catastrophique sur le budget, car il n’y a pas d’anticipation possible ; le projet de loi de finances rectificative se contente de noter les évolutions de l’année.
Afin d’éviter une telle situation, nous demandons que soit remis en fin d’année, avant le 31 octobre 2016, un rapport faisant le bilan du financement de trois trimestres complets de mise en oeuvre de la prime d’activité, de manière à évaluer la montée en charge d’un dispositif que vous avez souhaité idéal.
Avis défavorable : je vous renvoie à l’article 28, adopté sur mon initiative, qui satisfait votre demande.
L’amendement no 218 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Monique Orphé, pour soutenir l’amendement no 465 rectifié .
Les travailleurs non-salariés relevant du régime agricole sont soumis à une condition de revenus ; leur dernier bénéfice agricole ne doit pas dépasser un plafond correspondant à l’assiette minimum d’appel des cotisations sociales.
Or, en outre-mer, une surface agricole d’exploitation se substitue à cette assiette minimum comme seuil d’assujettissement au régime agricole. C’est pourquoi, par parallélisme avec l’assujettissement au régime agricole, ce n’est pas le montant du bénéfice agricole qui doit être retenu en outre-mer pour étudier l’éligibilité à la prime d’activité, mais c’est la surface agricole exploitée. Tel est l’objet du présent amendement.
L’amendement no 465 rectifié , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
L’article 24, amendé, est adopté.
L’article 25 est adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 557 .
L’amendement no 557 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 558 .
L’amendement no 558 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 559 .
L’amendement no 559 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 560 .
L’amendement no 560 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Dominique Lefebvre, pour soutenir l’amendement no 709 rectifié .
Cet amendement allant de pair avec le suivant, je présenterai le no 708 rectifié en même temps, monsieur le président.
Le texte prévoit la transmission à l’administration fiscale de la liste des bénéficiaires de la prime d’activité pour un éventuel bénéfice de mesures fiscales. Il se trouve que lesdits bénéficiaires ne seront pas concernés par ces mesures, qui consistent souvent en des exonérations partielles pour les titulaires de l’allocation aux adultes handicapés ou du revenu minimum d’insertion. Cette disposition étant inutile, il convient de la supprimer.
Favorable, d’autant plus que c’est l’occasion de rappeler que la prime d’activité ne sera pas soumise à l’impôt sur le revenu.
Les amendements nos 709 rectifié et 708 rectifié sont successivement adoptés.
Cet amendement vise à rendre la prime d’activité applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon dans les conditions du droit commun.
L’amendement no 678 , accepté par la commission, est adopté.
L’article 26, amendé, est adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 563 rectifié .
L’amendement no 563 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 564 .
L’amendement no 564 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 565 .
L’amendement no 565 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Le présent amendement a pour objet de ramener le délai d’adoption de l’ordonnance étendant et adaptant la prime d’activité à Mayotte de dix-huit mois à six mois après publication de la présente loi.
Il faut demander l’avis de la ministre, qui est la première concernée. Pour ma part, je ne trouverais pas inutile d’accélérer le processus.
Le Gouvernement est favorable à l’accélération du processus pour Mayotte. Avis favorable, donc.
L’amendement no 463 est adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 566 .
L’amendement no 566 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 27, amendé, est adopté.
La parole est à M. Jean-Luc Laurent, pour soutenir l’amendement no 439 .
Cet amendement concerne le nouvel article 28, qui prévoit la remise du rapport dont Mme la ministre a parlé. Nous proposons que celui-ci intègre les avis et les analyses des institutions publiques et des acteurs associatifs chargés de la mise en oeuvre de la nouvelle prime d’activité.
Je serais tenté de demander à notre collègue de retravailler l’amendement en vue d’une nouvelle lecture, car je n’arrive pas à comprendre ce que sont les « avis » des institutions souhaités.
Si l’amendement n’était pas retiré, j’y émettrais un avis défavorable. Il convient d’y retravailler ensemble.
L’amendement no 439 est retiré.
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l’amendement no 698 deuxième rectification.
Cet amendement propose de réaliser une évaluation ex post du dispositif de la prime d’activité, après consultation du Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes. Il s’agit en particulier d’en mesurer les effets sur la reprise ou l’accroissement d’activité pour les femmes. Celles-ci représentant plus de 80 % des travailleurs pauvres et l’essentiel du sous-emploi dans notre pays, la prime d’activité leur est particulièrement destinée ; il serait bon de procéder à une évaluation sexuée du dispositif.
Avis favorable, d’autant plus que les questions d’égalité entre les femmes et les hommes face à l’emploi et en matière professionnelle sont des enjeux essentiels, que ce texte doit contribuer à rappeler. Le rapport prévu devrait être l’occasion de montrer l’engagement de tous en faveur de l’égalité professionnelle.
L’amendement no 698 deuxième rectification est adopté.
L’article 28, amendé, est adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 28.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 188 .
Vu la simplicité de l’amendement présenté par Charles de Courson, je dirai qu’il est défendu, monsieur le président !
Sourires.
L’amendement no 188 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 366 rectifié .
À travers cet amendement, je propose une présentation des aides sociales à l’occasion de la journée défense et citoyenneté. Il a été repoussé par la commission, bien que j’en sois signataire.
Avis défavorable. Comme je l’ai expliqué en commission, cet amendement est intéressant, mais, pour le dire vite, il n’est pas complètement mûr et aurait besoin d’être précisé. Une réflexion technique plus approfondie serait nécessaire. On peut espérer qu’elle pourra être conduite dans les prochaines semaines, de façon à déboucher au moment de l’examen du texte par le Sénat.
À ce stade, je vous demande de bien vouloir retirer l’amendement ; à défaut, j’y émettrais un avis défavorable.
L’amendement no 366 rectifié est retiré.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 338 .
Les départements se trouvent en grande difficulté financière en raison du paiement des minima sociaux, notamment du RSA socle. Il serait temps que les partenaires sociaux et le Gouvernement se mettent autour de la table pour examiner comment préserver à la fois notre cohésion sociale et la soutenabilité financière du système de protection sociale y afférent. Je propose la tenue d’une conférence sociale afin de réfléchir à la pérennité de ces dispositifs.
Il s’agit à l’évidence d’un amendement d’appel, car son objet est à la fois vague et titanesque : organiser une conférence en vue de mettre en oeuvre une réforme systématique des minima sociaux afin de préserver la cohésion sociale dans un souci de soutenabilité financière. Le texte de l’amendement mériterait une conférence à lui tout seul !
Sourires.
Un thème aussi complexe nécessiterait bien autre chose qu’une conférence. Avis défavorable.
L’amendement no 338 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 189 .
Il s’agit d’un amendement présenté par Charles de Courson – mais il est plus simple que le précédent !
Sourires.
Il vise à demander un rapport sur la faisabilité, au regard du droit européen, de notre système fiscalo-social.
L’amendement no 189 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 347 .
Cet amendement a pour objet de demander au Gouvernement un rapport. Il s’agirait de regarder comment baisser les charges afin d’augmenter le salaire net des salariés, plutôt que verser une prime d’activité. Une possibilité pourrait être de baisser la CSG payée sur les salaires.
C’est un avis défavorable, donné, si je puis me permettre, par le Conseil constitutionnel.
L’amendement no 347 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l’amendement no 697 .
Par cet amendement, nous demandons que le Gouvernement remette un rapport sur les ressources prises en compte pour calculer la prime d’activité, exception faite de la contribution à l’éducation et à l’entretien de l’enfant, en raison de sa nature particulière.
En réalité, c’est un amendement d’appel, visant à ouvrir le débat sur la prise en compte de ce que l’on appelle en français courant la pension alimentaire. Nous sommes plutôt hostiles à une telle prise en compte dans la mesure où elle réduirait voire annulerait l’effet de la prime d’activité pour les femmes qui élèvent seules les enfants nés d’un couple désormais divorcé. Elles seraient pénalisées puisque le montant qui pourrait leur être versé au titre de la prime d’activité s’en trouverait réduit.
Il s’agit donc d’ouvrir le débat, comme je l’avais annoncé lors de la présentation de ce texte, au début de cette première lecture.
Si c’est un amendement d’appel, je m’en remets à la sagesse de mes collègues.
J’émettrai un avis favorable. La rédaction de cet amendement pourrait, certes, être améliorée mais ce sera sans doute fait lors de l’examen du projet de loi par le Sénat. L’enjeu, c’est la base ressources de cette prime d’activité, en particulier les pensions alimentaires. Il faut considérer la question du point de vue de l’équité et aussi du coût que représente l’exclusion des pensions alimentaires de cette base.
Tout cela suppose un travail. C’est la raison pour laquelle je suis favorable à l’amendement que Mme Mazetier vient de défendre.
L’amendement no 697 est adopté.
Nous avons achevé l’examen des articles du projet de loi.
Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l’ensemble du projet de loi auront lieu le mardi 2 juin après les questions au Gouvernement.
Prochaine séance, lundi 1er juin, à seize heures :
Questions sur la situation économique et financière de la zone euro ;
Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, modifiant la loi no 2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l’octroi de mer.
La séance est levée.
La séance est levée à deux heures trente-cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly