Intervention de Pierre Baillet

Réunion du 19 mai 2015 à 18h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Pierre Baillet, secrétaire permanent de l'Association internationale des maires francophones, AIMF :

Je rentre d'Erevan, où je me suis rendu pour contrôler l'avancement sur place des projets de notre association. Le secrétaire d'État à la réforme de l'État et à la simplification, M. Thierry Mandon, se trouvait sur place au même moment. L'ambassade de France a sélectionné notre projet pour l'inscrire au programme de sa visite, de sorte qu'il l'a lui-même inauguré. Voilà, me semble-t-il, un exemple récent de la manière dont l'AIMF contribue, directement et indirectement, au rayonnement de notre pays.

Notre association rassemble des collectivités territoriales et des associations internationales de collectivités territoriales francophones. Elle regroupe près de trois cents membres et apporte un appui à ces collectivités francophones. Son bureau compte trente membres, dont trois sont des représentants de villes françaises ; les trois quarts de ses membres sont des hommes et femmes du Sud ; un tiers sont des femmes. Le bureau a ceci d'original que, dans cette composition, il juge, vote et émet un avis sur l'ensemble de nos financements.

En plus de l'apport financier de la France et du ministère des affaires étrangères, le secrétariat permanent peut lever d'autres fonds. Ainsi, alors que l'AIMF reçoit 1,2 million d'euros de subventions, elle gère un budget de 7 millions d'euros. La Ville de Paris ne finance l'AIMF qu'à la condition que le ministère des affaires étrangères y contribue, car elle veut éviter toute situation qui s'apparenterait à une gestion de fait. Parmi nos contributeurs, nous comptons également les agences de l'eau ou l'Union européenne. Il y a dix jours, nous avons signé avec cette dernière un accord cadre pour sept ans ; dans un premier temps, il devrait amener à l'AIMF deux millions d'euros et il pourra être prorogé dans trois ans.

Nous levons ces fonds supplémentaires grâce aux projets que nous montons sur les fonds dédiés, ces projets attirant d'autres contributeurs. L'AIMF conduit ainsi des projets avec l'Union européenne, avec la Ville de Paris, avec les agences de bassin, avec des fondations, mais aussi bientôt, je l'espère, avec des entreprises dans le cadre de partenariats public-privé.

Depuis 2007, nous avons reçu 14 millions d'euros du ministère des affaires étrangères, 16 millions d'euros de l'Union européenne, 4 millions d'euros des agences de bassin, 5 millions d'euros de la Communauté française de Belgique, du Québec et du Canada, 10 millions d'euros de la Ville de Paris et 4 millions d'euros des villes du Nord et du Sud. Depuis huit ans, nous avons reçu également 2 millions d'euros de cotisation.

Le ratio de financement extérieur par rapport au financement proprement français s'établissait jusqu'à présent de un à trois. Pour un euro dépensé par la France, l'AIMF pouvait en employer trois. Mais la subvention versée par le ministère des affaires étrangères, qui s'élevait à 2 millions d'euros il y a quelques années, a diminué à 1,2 million d'euros. De même, la subvention versée par le ministère de l'éducation nationale est passée de 400 000 euros à 90 000 euros. La part du financement par les États se réduit donc considérablement, tandis que l'AIMF se tourne vers d'autres bailleurs. Ces efforts ne participent, hélas, que d'un jeu à somme nulle.

L'outil AIMF est au service de la France de manière discrète, notre présidente Anne Hidalgo rappelle néanmoins régulièrement qui nous sommes. Nous menons des projets dont la visibilité est extrêmement forte. À Bangangté, au Cameroun, l'AIMF a monté un projet d'un montant de 1,5 million d'euros qui s'est révélé avoir un effet structurant pour toute la région. Le ministère des affaires étrangères n'y a pas contribué financièrement, puisque les fonds employés provenaient exclusivement des agences de bassin et des collectivités territoriales.

L'AIMF apporte un appui aux postes diplomatiques en renforçant l'autonomie des collectivités territoriales, par un soutien à la gestion des finances locales ou encore par une assistance en matière d'enregistrement et de délivrance des actes d'état-civil – ce qui va dans le sens des souhaits formulés par nos autorités consulaires, qui s'appuient ainsi sur des documents plus fiables quand elles instruisent des demandes de visa. Le récent projet inauguré par M. Thierry Mandon est un autre exemple de la manière dont les actions de l'AIMF vont dans le sens de la France et de ses postes diplomatiques.

Mais nous mobilisons aussi des sociétés privées, notamment pour les projets d'adressage. Cela consiste d'abord à identifier les rues sur des plans. Pour ce faire, nous recourons aux services de la société française SPOT, de même que, au stade de l'étude, aux services de « Groupe 8 », société également française. Nous dressons ainsi des plans, nous numérotons les portes, nous enquêtons pour savoir quels habitants s'y trouvent et quelles sont leurs capacités contributives. Ces informations sont mises en réseau, informatisées et nous assurons ensuite la relance des mauvais payeurs. Les recettes des collectivités territoriales concernées s'en trouvent largement améliorées.

Tant les panneaux sur les portes que les plaques de rue sont produits par des sociétés françaises, France Emaillerie ou les signaux Girod. Les projets relatifs à l'état civil font appel à une entreprise de Mulhouse. Notre revue Raisonnance est éditée quant à elle par une entreprise établie à Angers. Des agents du ministère des finances nous apportent également leur concours pour mener à bien nos projets dans le domaine des finances locales. Sans que nous l'affichions, l'encadrement des projets de l'AIMF repose donc souvent sur un savoir-faire français.

Le secrétariat permanent de l'AIMF est constitué d'une équipe légère de huit personnes autour du secrétaire permanent. Avec 90 projets par an, nous devons recourir à une soixantaine d'experts fonctionnels du Sud pour être présent partout, y compris dans les régions les plus difficiles, comme le Nord Mali, la région des grands lacs ou la République centrafricaine.

L'AIMF est née en France, de la volonté partagée de Jacques Chirac et du maire de Québec de l'époque. L'État et la Ville de Paris furent les premiers à subventionner l'AIMF qui est ensuite devenue, en 1995, un opérateur de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF). Aujourd'hui, les subventions françaises restent un levier essentiel de notre action. Aussi les considérables baisses de crédits actuelles nous font-elles courir le risque de disparaître, car la Ville de Paris ne pourrait pas substituer son financement aux subventions de l'État sans s'exposer au reproche de la gestion de fait. Les autorités municipales surveillent donc de très près l'évolution de la part non parisienne des recettes de l'AIMF. Or, si nous n'avons plus de fonds dédiés, nous perdrons le soutien de l'Union européenne et nous nous trouverons rapidement dans une situation critique.

Qu'adviendra-t-il alors de la francophonie et de la coopération décentralisée sans l'AIMF ?

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