C'est une obligation dès lors que l'on considère que la BPI, même si elle est publique et partenaire des autres banques, est d'abord une banque de marché fonctionnant comme les autres. Certaines banques publiques, notamment la KfW allemande, ne sont pas régulées par la BCE. La KfW est pourtant dix fois plus importante que la BPI, puisque son champ de mission couvre à la fois celui de la BPI et celui de la Caisse des dépôts. Celle-ci, d'ailleurs, n'est pas non plus régulée par la BCE, alors qu'elle ressemble à bien des égards à une banque. Être régulé par la BCE reste donc d'une certaine façon un choix, celui de fonctionner d'abord comme une banque. Ce choix reflète ce que sont nos métiers, qui sont strictement bancaires, et traduit la volonté d'avoir les meilleures pratiques et d'être établissement de place.
Quoi qu'il en soit, la BPI se voit imposer, à ce titre, des ratios de solvabilité dont les minima réglementaires augmentent depuis plusieurs années et continueront à augmenter jusqu'en 2019, pour atteindre environ 12 %. Parallèlement, elle est soumise à des exigences de rentabilité par ses actionnaires qui, pour augmenter le ratio de solvabilité, apportent des fonds propres qui ne peuvent pas baisser à proportion de l'augmentation du ratio. Cette spirale représente pour le financement de l'économie un risque, qui a été un peu masqué par le quantitative easing de la BCE mais qui est réel et qui va perdurer.
Notre chance tient à deux éléments. Tout d'abord, les exigences de rentabilité de notre actionnaire tiennent compte de nos métiers, de sorte qu'il nous demande, non pas 10 % à 12 % de retour sur fonds propres, mais 3 % à 4 %, soit le coût du capital de l'État. Aujourd'hui, il nous est possible de parvenir à ce niveau de rentabilité, grâce au second élément, qui est que nous gérons des ressources publiques. Les fonds de garantie sont en effet un amortisseur de risque considérable, donc un lisseur de résultats. La caractéristique de notre profil risque-rentabilité est ainsi d'être beaucoup plus stable que celui d'une banque et globalement un peu moins élevé. Depuis 2008, le retour sur investissement – je parle ici uniquement du financement bancaire et non de l'investissement, qui n'est pas soumis à ces contraintes – est toujours compris entre 2 % et 4 %.
Au demeurant, les métiers du financement de l'innovation et de la garantie, ne ressemblent pas à des métiers bancaires. Si l'on ne retient que le métier de prêteur, notre rentabilité est nettement plus élevée, puisqu'elle se situe autour de 6 %. Elle traduit notre volontarisme et notre discernement dans le choix des dossiers que nous finançons. C'est important, car le coût du risque est un dragon qui dort : on ne sait pas exactement quand il va se mettre à cracher du feu mais on est certain que cela va arriver. Il faut donc y être attentif, pour le bien des entreprises elles-mêmes puisque notre capacité à intervenir en dépend directement.