Vous avez parfaitement raison, madame la Présidente, de rappeler ce point de procédure : si la proposition de résolution européenne est adoptée, elle sera effectivement examinée en commission des Affaires étrangères dans un deuxième temps.
Je ne cache pas ma surprise face à la position du groupe SRC – auquel j'appartiens, cela n'aura échappé à personne. Peut-être n'ai-je pas suffisamment pris soin d'expliquer devant lui le sens de ma proposition ? J'en ai tout de même parlé en réunion de groupe et, une fois passé l'effet de surprise, je n'ai pas noté de rejet ou d'objections, pas même de la part du président du groupe, qui préside par ailleurs le groupe d'amitié France-Chine de l'Assemblée nationale.
Nous nous retrouvons dans une position courante lorsqu'il est question de la Chine mais je ne propose pas là d'ouvrir un débat international sur les relations que nous devons entretenir avec la Chine. Notre collègue Philip Cordery, dont j'ai compris qu'il s'apprêtait à voter contre, n'a manifestement pas lu précisément notre proposition de résolution ; je l'invite à le faire – elle n'est pas très longue –, ce qui le conduira peut-être à se ressaisir.
Parlons franchement. Tous les pays européens sont gênés car ils sont favorables au respect des droits humains aux Tibet mais ne savent pas comment se positionner par rapport à la Chine pour ne pas fragiliser leurs économies nationales respectives. C'est précisément pourquoi nous suggérons qu'ils travaillent en commun, ce qui s'inscrit bien dans le cadre européen. Nos amis allemands sont parfois plus courageux que nous ; il leur arrive d'adopter des positions plus fermes que les nôtres – soyons désagréables, rappelons qu'Angela Merkel a reçu le dalaï-lama –, alors que leurs échanges commerciaux avec la Chine sont plus développés.
Le sens de notre démarche est donc de demander à l'Union européenne de se muscler et d'intervenir vis-à-vis de la Chine, d'égal à égal, pour que ses États membres ne soient plus obligés de formuler craintivement, chacun de leur côté, quelques petites remontrances.
Je le répète, notre proposition est plutôt pondérée et équilibrée, elle rapporte des faits que personne ne conteste et qu'il est de notre devoir d'évoquer. Il ne s'agit pas d'agresser ou de dénoncer le gouvernement chinois. Les Tibétains souhaitent renouer le dialogue – nous en avons discuté avec Lobsang Sangay, le premier ministre de l'Administration centrale, lorsque le groupe d'études l'a rencontré – et l'Union européenne a l'envergure pour jouer le rôle d'intercesseur. Notre démarche consiste donc à demander à l'Union européenne qu'elle désigne un représentant spécial pour le Tibet ou au moins, parce que nous n'en sommes pas tout à fait là, qu'elle confie au représentant spécial pour les droits de l'homme la charge de se saisir de cette question, avec trois objectifs : promouvoir une coordination politique en faveur des droits humains des Tibétains ; rétablir et soutenir le dialogue entre le gouvernement de la République populaire de Chine et les émissaires reconnus du dalaï-lama, et non pas l'Administration centrale tibétaine, ce qui aurait pu être considéré comme une provocation ; appuyer l'action de la communauté tibétaine en exil, notamment en Inde et au Népal, et en direction de la jeunesse, qui connaît des difficultés.
J'appelle par conséquent mes collègues – en l'occurrence mes camarades – à revoir leur positionnement vis-à-vis de cette proposition de résolution, qui n'a rien de révolutionnaire ou d'agressif. Si l'Union européenne se saisit du dossier et parle d'une seule voix avec les autorités chinoises, qui ont connaissance de nos débats, elle pourra améliorer le rapport de force et faire avancer les choses, ce qui contribuera à sa politique étrangère et de sécurité commune.