Madame la Présidente, mes chers collègues, je vous propose d'examiner le programme européen en matière de migration publié le 13 mai dernier par la Commission européenne. L'an passé, l'immigration irrégulière aux portes de l'Union a atteint un chiffre record de 240 000 personnes contre 85 000 en 2008 ; le nombre de morts se montant lui au chiffre inédit et inouï de 4 000.
Cette vague migratoire est sans précédent depuis un siècle et est due pour une large part à l'effondrement de trois États, la Syrie, l'Irak, la Libye et à la déstabilisation djihadiste meurtrière qui sévit dans une grande partie de l'Afrique.
La Méditerranée ne peut se transformer en cimetière marin mais doit au contraire demeurer une mer de civilisation comme elle l'est depuis trente siècles. À cet égard, Homère dans l'Odyssée nous rappelle à la fragilité des êtres humains aux prises avec l'adversité de la vie et des éléments naturels : « Douce est la terre quand elle parait aux yeux des naufragés ».
Dans sa communication présentée le 13 mai puis précisée la semaine dernière le 27 mai, la Commission européenne semble relever le défi humain, humanitaire et de sécurité auquel elle est confrontée. Elle devra mener cette bataille sur trois fronts simultanément :
- le front humanitaire de sauvetage des migrants,
- le front de l'accueil des réfugiés,
- le front stratégique et géopolitique afin de stabiliser un environnement moyen-oriental et maghrébin extrêmement agité.
S'agissant du front humanitaire et du sauvetage des vies en mer, rappelons que, en vertu des articles 67 et 77 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), les frontières extérieures de l'Union sont gérées conjointement par les États membres et l'UE, par le biais notamment de l'Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures (Frontex).
Nonobstant cette européanisation de la gestion des frontières, l'Agence Frontex, créée en octobre 2004 a seulement une fonction d'appui. Il revient donc aux États d'assurer les contrôles opérationnels courants. L'opération Triton est coordonnée par Frontex a été décidée le 24 septembre 2014.
L'Agenda en matière de migration présenté par la Commission européenne fait état d'un nouveau plan opérationnel pour le sauvetage des vies en mer. Il s'agit d'une réponse immédiate de l'UE aux drames survenus en mer Méditerranée pour lesquels il faut absolument éviter qu'ils se reproduisent.
Comparée à l'opération « Mare Nostrum », l'opération Triton souffre de nombreuses lacunes que le plan Juncker veut combler.
La première tient à la nature même de l'opération Triton. En effet, cette opération conjointe est une opération uniquement de surveillance des frontières extérieures de l'espace Schengen en mer Méditerranée. La mission principale n'est donc pas de sauver des vies.
La deuxième lacune réside dans l'étendue géographique de l'opération Triton puisque celle-ci est limitée à 30 miles nautiques au large des côtes italiennes et maltaises, contre 100 miles nautiques pour l'opération « Mare Nostrum ». Le nombre de routes empruntées par les migrants effectivement surveillées et donc le nombre de vies susceptibles d'être sauvées sont donc relativement restreints.
Dans le cadre de l'opération Triton, l'Agence Frontex souffre également d'un manque criant de moyens. L'Agence elle-même a admis que ses ressources étaient adaptées à son mandat, qui consiste à contrôler les frontières de l'UE mais pas à surveiller les 2,5 millions de km2 de la Méditerranée.
De manière immédiate, la Commission propose le triplement des capacités et des ressources disponibles en 2015 et 2016 pour les opérations conjointes Triton et Poséidon de Frontex, avec l'adoption d'un budget rectificatif pour 2015.
Ce point est notable, car malgré les déclarations rassurantes de ces dernières semaines, aucun moyen financier n'était disponible pour poursuivre les actions, comme nous l'avait d'ailleurs signalé notre collègue européen, Président de la commission des Budgets du Parlement européen et entendu par notre commission ces dernières semaines au sujet des ressources propres de l'Union.
Elle a également pris acte, le 27 mai 2015 du nouveau plan opérationnel de l'opération Triton. Ce dernier étend la zone géographique couverte à celle couverte par l'ancienne opération « Mare Nostrum ».
Parallèlement à ces propositions, la France et plusieurs autres États membres s'emploient à déployer des moyens supplémentaires (navire, avions). La France s'est engagée, à l'issue du Conseil Européen du 23 avril 2015, à doubler sa contribution à l'opération Triton. L'Agence dispose actuellement de 51 équipements techniques et de 121 personnes.
Dans son Agenda, la Commission européenne a insisté sur le rôle essentiel des garde-côtes dans le sauvetage des vies humaines et le maintien de la sécurité des frontières maritimes. L'Assemblée Nationale, à la suite des travaux de notre commission, a adopté une résolution le 28 mars 2015 rappelant son soutien, à moyen terme, à la création d'un corps européen de gardes-frontières.
La Commission européenne souhaite parvenir à une exploitation optimale des trois systèmes d'information à grande échelle de l'Union (le système d'information sur les visas, Eurodac et le système d'information Schengen). L'initiative « Frontières intelligentes » prévoit la création d'un registre de tous les mouvements transfrontières des ressortissants de pays tiers, dans le strict respect du principe de proportionnalité. La Commission européenne entend présenter une proposition révisée d'ici au début de l'année 2016. Elle appelle également à ce que les règles d'engagement adoptées pour l'opération Triton soient considérées comme le modèle des actions futures sur l'ensemble de la frontière maritime et terrestre extérieure.
Sur le front de l'accueil des migrants dans l'union européenne, il est nécessaire, à court terme, de mettre en place un mécanisme de relocalisation et un programme de réinstallation.
Suite à l'afflux massif de migrants, la capacité d'accueil et les centres de traitement des dossiers des États membres situés en première ligne – la Grèce et l'Italie – sont proches de la saturation. C'est pour répondre à cette situation d'urgence que la Commission européenne propose, pour la première fois, d'activer le mécanisme de l'article 78§3 prévu par le TFUE.
Il s'agirait de mettre en place un mécanisme temporaire de relocalisation permettant le transfert des demandeurs d'asile « ayant manifestement besoin d'une protection internationale », d'Italie et de Grèce, vers les autres États membres.
Ainsi, durant les deux prochaines années, 40 000 personnes seraient relocalisées de ces deux États vers les autres États membres dont 24 000 personnes en provenance d'Italie et 16 000 en provenance de Grèce.
Pour entrer en vigueur, cette proposition de décision de la Commission devra être votée à la majorité qualifiée du Conseil, après consultation du Parlement européen.
Si le mot « quota » n'a été énoncé que verbalement lors de la présentation de la communication du 13 mai et ne se trouve pas dans le document officiel, les mécanismes qui seront mis en oeuvre relèvent d'une logique proche, à savoir d'un pourcentage déterminé et autorisé.
Toutefois, comme l'a précisé le Gouvernement français, il est inapproprié de parler, sans plus de précisions, de « quotas de migrants », termes qui ont été trop rapidement relayés dans la presse.
D'une part, la répartition envisagée concerne les demandeurs d'asile qui ont de fortes chances de se voir accorder le statut de réfugié, et non les migrants économiques en situation irrégulière.
D'autre part, il ne s'agit pas de quotas, puisque comme l'a précisé la Commission dans un communiqué de presse et comme le soutenait la France, un quota serait une limitation du nombre de demandeurs d'asile. C'est pour cette raison que le Gouvernement français a préféré parler d'une « répartition solidaire » et a rappelé, à juste titre, que l'asile est un droit et que les demandes d'asile ne peuvent en aucun cas être traitées sur la base d'un mécanisme de quotas. Sur ce point, il est donc nécessaire d'être précis et de prendre des précautions quant aux termes employés.
La solidarité est indissociable d'une plus grande responsabilité des pays de première entrée.
Une telle démarche de solidarité doit émaner de tous les États de l'Union, qu'ils soient ou non directement exposés à l'afflux de migrants. Cela est primordial. Il est inacceptable que 75 % des demandeurs d'asile soient accueillis dans seulement cinq États membres : l'Allemagne, la Suède, l'Italie, la France et le Royaume-Uni.
La solidarité européenne doit cependant s'accompagner d'une réelle responsabilité et responsabilisation des pays situés en première ligne auxquels il appartient de distinguer entre les migrants qui ont un réel besoin de protection et les migrants économiques, en situation irrégulière.
Ces derniers devraient et devront alors faire l'objet d'un retour dans leur pays d'origine, notamment par voie aérienne. Il serait, par ailleurs, souhaitable que ces vols, organisés par Frontex, le soient à son initiative et non sur demande d'un État membre.
Afin de réaliser l'identification et l'enregistrement rapides des migrants et le retour pour les personnes dont la demande d'asile est refusée, l'Italie et la Grèce devront recevoir un appui de l'UE, tant financier que logistique et technique. Pour cela, la création, envisagée par la Commission, de centres d'attente (« hotspots ») peut être une réponse adaptée.
Ces centres seraient établis dans les États membres situés en première ligne et gérés conjointement, afin de permettre aussi rapidement que possible l'enregistrement et l'identification des migrants, l'examen des demandes d'asile ainsi que les retours par Frontex en concertation avec les pays de provenance. Allant dans ce sens, la Commission a publié, le 27 mai 2015, des lignes directrices qui exposent les meilleures pratiques pour relever les empreintes digitales des demandeurs de protection internationale.
Les demandeurs d'asile concernés par le mécanisme de relocalisation sont les ressortissants syriens et érythréens arrivés en Italie et en Grèce après le 15 avril 2015 et ceux qui arriveront après l'adoption de la décision par le Conseil.
Je considère comme insatisfaisant que le mécanisme de répartition d'urgence ne s'applique qu'aux flux de migrants à venir et ne prenne pas en considération les demandeurs d'asile arrivés sur les territoires italien et grec avant le 15 avril 2015, lesquels sont par ailleurs parqués dans des camps d'accueil et de rétention surpeuplés.
La répartition entre les États membres envisagée par la proposition de la Commission est réalisée sur la base d'une « clé de répartition » – c'est en cela qu'on évoque des pourcentages – qui tient compte de leur capacité d'absorption et d'intégration. Quatre éléments sont ainsi pris en compte et pondérés de manière distincte :
- la taille de la population (40 %) ;
- le PIB (40 %) ;
- le nombre de demandes d'asile reçues et de places de réinstallation déjà offertes ces cinq dernières années (10 %) ;
- le taux de chômage (10 %).
Dans la définition des facteurs à prendre en compte, la proposition de la Commission européenne est, il me semble, assez juste.
Le choix de la pondération est, en revanche, discutable.
D'une part, nous ne connaissons pas les raisons qui ont amené à définir la part de chaque critère. D'autre part, la prise en compte de l'effort déjà consenti en matière d'asile est insuffisante. Pour que la clé de répartition soit équitable, elle devra mieux prendre en compte les efforts déjà effectués par les Etats membres au regard de la protection internationale et des autres formes d'assistance déjà mises en place, telles que l'admission humanitaire.
Au terme du mécanisme de relocalisation, les quatre États qui seront le plus mis à contribution seront :
- l'Allemagne, qui devra accueillir 8 766 demandeurs d'asile,
- la France 6 752,
- l'Espagne 4 288,
- la Pologne 2 659.
Afin d'apporter une aide financière aux États membres qui acceptent de relocaliser des demandeurs d'asile, la Commission a déclaré que ces États recevront une somme forfaitaire de 6 000 euros par personne relocalisée, provenant du Fonds « Asile, migration et intégration » (FAMI), pour un coût total de 240 millions d'euros.
La Commission européenne a adopté, le 27 mai 2015, une recommandation invitant les États membres à réinstaller, sur une période de deux ans, 20 000 personnes provenant de pays tiers et dont le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a reconnu qu'elles ont manifestement besoin d'une protection internationale. Il s'agit de ressortissants de pays tiers ou d'apatrides se trouvant aujourd'hui dans des camps de réfugiés, notamment au Liban, en Jordanie ou en Turquie.
À ce titre, la France devrait accueillir 2 375 personnes dans les deux prochaines années.
Pour financer ce programme de réinstallation, le budget de l'UE fournira une aide de 50 millions d'euros supplémentaires en 2015-2016. Toutefois, rien n'a encore été précisé sur l'origine de ce financement supplémentaire.
À long terme, il est indispensable de construire une politique commune solide en matière d'asile et établir une nouvelle politique de migration légale.
Outre les actions immédiates annoncées par la Commission européenne en termes d'accueil des migrants, l'agenda européen en matière de migration contient également des engagements à long terme.
En matière d'asile, il s'agira principalement d'approfondir les règles communes qui existent déjà en la matière et de réviser le système de Dublin. En ce qui concerne l'immigration légale, la Commission a pour ambition d'améliorer le système actuel de « carte bleue » qui établit les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d'un emploi hautement qualifié.
Je crois une nouvelle fois nécessaire d'attirer l'attention sur plusieurs éléments : l'accueil d'une main d'oeuvre qualifiée et le risque d' » assèchement » des États d'origine ; la pression exercée sur les bas salaires dans les pays accueillant une main d'oeuvre étrangère en nombre. Ces questions nous préoccupent en tant que parlementaires nationaux et doivent être prises en compte par la Commission européenne.
Sur le front stratégique et géopolitique, les actions sont destinées à réduire les incitations à la migration irrégulière.
En ce qui concerne la lutte contre les passeurs et les trafiquants d'êtres humains, la Commission européenne a annoncé son souhait de « faire de ces activités peu risquées mais très rentables, des activités à haut risque et non rentables ». Cela passe par des actions immédiates et des propositions s'inscrivant dans le long terme.
L'action immédiate consiste en une opération de politique de sécurité et de défense commune (PSDC).
Dans l'immédiat, l'Agenda de la Commission européenne s'inscrit dans la continuité de la déclaration du Conseil européen du 23 avril et de la résolution du Parlement européen adoptée le 28 avril 2015, en évoquant le lancement d'une opération relevant de la PSDC visant à « repérer, capturer et détruire les embarcations utilisées », dans le respect du droit international. Il s'agissait d'une option défendue notamment par la France.
Compte tenu des drames qui surviennent quasi-quotidiennement en Méditerranée, une telle opération représente, à n'en pas douter, l'un des éléments clés de l'action de l'UE dans le domaine de la lutte contre la migration irrégulière.
L'adoption par le Conseil affaires étrangères du 18 mai 2015, du concept d'opération navale militaire PSDC, baptisée « EUNAVFOR MED », devant être conduite dans le respect du droit international et en partenariat avec les autorités libyennes, répond à cette préoccupation.
Le plan d'EUNAVFOR doit encore être approuvé au Conseil européen de fin juin mais je constate que le lancement de l'opération est sujet à plusieurs incertitudes.
La légitimation de l'action des Européens, qui souhaitent intervenir au plus près des côtes, doit passer par une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU autorisant le recours à la force au titre du chapitre VII de la Charte des Nations unies. Si la Chine soutient l'initiative, la Russie, elle, refuse le principe de destruction des navires.
D'une manière générale, l'action militaire doit-elle être la principale réponse à la vague migratoire que connait notre continent ?
Dans notre récente communication sur le Parquet Européen, nous avons rappelé que « les trafiquants et passeurs d'immigrés clandestins en méditerranée utilisent des réseaux, des comptes et des complicités analogues à ceux des autres trafiquants de grande criminalité » et que cette grande criminalité devait aussi être poursuivie par une action coordonnée et démultipliée de répression pénale comme le sont les grands trafics.
Il convient également de s'attaquer aux causes profondes des déplacements irréguliers et forcés dans les pays tiers.
Si une opération navale apparait essentielle pour enrayer ce « commerce » insupportable, une action de fond, s'attaquant aux causes qui poussent tant d'hommes, de femmes et d'enfants à choisir la voie périlleuse de la migration irrégulière, est obligatoire.
À ce titre, nous pouvons nous réjouir de la place accordée par la Commission européenne à la coopération avec les pays tiers. Il s'agit là d'un axe défendu par notre commission et par la France plus généralement.
Les actions de l'Union européenne devront être définies de concert avec nos partenaires des pays tiers, lors d'un Sommet organisé à Malte à l'automne 2015. D'ici à l'automne, elle a tout de même annoncé certaines pistes.
En matière d'aide au développement, la Commission européenne a annoncé le renforcement de son soutien aux pays qui doivent supporter le poids de l'afflux de personnes déplacées.
Cette annonce est à saluer puisque les mesures en matière de lutte contre les trafiquants d'êtres humains ne peuvent être effectives que si le développement économique des pays concernés permet de réduire les incitations au départ.
En matière de gestion des migrations, l'Agenda prévoit, de même, la création d'un centre polyvalent pilote, de prévention des départs et d'aide au retour des migrants, au Niger, d'ici la fin de l'année 2015.
Il faut désormais que l'identification et la mobilisation des financements européens nécessaires interviennent rapidement. Le Sommet international devant se tenir à Malte à l'automne avec les partenaires de l'Union africaine en offre la possibilité.
Sur le plus long terme, la Commission européenne a fait part de sa volonté de consolider le cadre de coopération bilatéral et régional existant.
À cet effet, il est prévu de renforcer le rôle, en matière de migration, des délégations de l'Union européenne dans les pays concernés. Des officiers de liaison européens seront détachés auprès des délégations dans les pays clés.
Le dernier axe d'action annoncé par la Commission européenne dans sa volonté de réduire les incitations à la migration irrégulière concerne la question du retour. Nous avons pu constater lors de nos précédents travaux que tout dépend de la mise en oeuvre des accords de réadmission conclus et de l'obtention des visas nécessaires au retour de la part des États d'origine.
La Commission européenne considère que l'Union doit veiller au respect, par les pays tiers, de l'obligation internationale qui leur incombe de reprendre en charge leurs propres ressortissants en séjour irrégulier en Europe.
Une révision de la méthode d'approche des accords de réadmission, dont la priorité sera accordée aux principaux pays d'origine des migrants en situation irrégulière, est prévue.
Une politique de retour efficace se conçoit également par l'application des règles existantes, notamment de la directive « retour ». Cette mise en oeuvre suppose un système de retour plus rapide associé au respect des procédures et des normes, permettant de garantir ainsi « un traitement humain et digne » aux personnes soumises à une mesure de retour.
Un « manuel sur le retour » composé d'orientations, de bonnes pratiques et de recommandations communes devrait procurer une aide pratique aux États membres.
La création d'un code de déontologie, qui irait au-delà d'une manuel pourrait aussi être suggérée en direction des agents participant aux actions de retour.
Nonobstant l'appui aux États membres fourni par l'agence Frontex et l'existence de règles communes relatives aux retours, l'Union européenne souffre également d'un manque de coopération opérationnelle. Il est nécessaire de renforcer le mandat de l'Agence Frontex afin de pallier cette défaillance. Une prise en charge financière est également nécessaire car cette charge est trop lourde pour les Etats situés en première ligne, comme l'ont souligné devant nous la Grèce et l'Italie.
L'Agence Frontex a, de par sa nature juridique, un rôle limité en matière de retour.
En conclusion, je dirai que ces propositions peuvent constituer un tournant.
L'Europe décide enfin d'agir dans un domaine qu'elle a délaissé et cela va être aussi le premier test politique pour la Commission européenne car le plan est loin de faire l'unanimité.
À bien des égards, l'Union européenne adopte une partie des recommandations figurant dans notre résolution sur l'immigration irrégulière de février dernier.
Notre commission a joué et continuera de jouer ce rôle d'aiguillon, de proposition et d'évaluation au service de la Représentation Nationale, de notre pays et de l'Union Européenne.
Sur ce point je ne peux que regretter que nos travaux ne reçoivent pas toujours l'écho nécessaire afin de mieux faire valoir la pertinence et la cohérence de nos positions, souvent adoptées à l'unanimité.
De façon plus globale, il est possible de dire qu'avec ces propositions utiles de l'Union européenne nous restons loin du compte.
Si 60 000 personnes sont à accueillir sur les deux prochaines années, il convient de rappeler que l'Europe a fait face en 2014 à 680 000 demandeurs d'asile.
L'Europe doit évidemment contrôler ses frontières tout en donnant une réalité aux valeurs fondatrices d'humanisme qui font sa spécificité mais l'Europe doit aussi s'efforcer d'être une vraie puissance diplomatique capable de peser sur les évolutions politiques de ces voisins méditerranéens, maghrébins et moyen-orientaux.