Intervention de Éric Woerth

Réunion du 3 juin 2015 à 11h30
Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Woerth, rapporteur :

Au cours de nos travaux, auxquels Mmes Chabanne et Dalloz, notamment, ainsi que M.Buisine, ont pris une part assidue, nous avons rencontré et entendu nombre d'interlocuteurs, appartenant à divers organismes. Le Premier président Migaud est venu présenter le rapport de la Cour des comptes, relativement sévère à l'égard de la douane. Notre propos n'a pas été de refaire ce rapport, mais de lui apporter certains compléments ou rectifications.

La douane française évolue dans un contexte qui lui est peu favorable, car la majorité des flux de marchandises entre sur le territoire français via des ports étrangers, au premier rang desquels Rotterdam et Anvers. Ce trafic considérable, de conteneurs en particulier, échappe ainsi en partie à la douane, ce qui nous amène à considérer que bon nombre des réponses aux questions relatives à l'efficacité du contrôle douanier français sont à apporter au européen. Nous ne pouvons nous en remettre au hasard, au contrôle par échantillons, encore moins au fameux « flair » du douanier. Il nous faut recourir aux méthodes de ciblage les plus « scientifiques » possible.

Le système de ciblage Import Control System (ICS) constitue l'outil majeur dans ce domaine. Dès le mois de septembre 2015, la France imposera une déclaration sommaire de dépôt temporaire (DSDT) pour les marchandises à destination de notre territoire ayant transité par un autre pays de l'Union européenne, ce qui confortera notre capacité autonome de ciblage.

Certaines décisions de la Cour de justice de l'Union européenne nous empêchent de lutter efficacement contre la contrefaçon : c'est notamment le cas de l'arrêt Nokia Philips du 1er juillet 2011, aux termes duquel une marchandise en stand by passant par le France ne peut plus faire l'objet d'un contrôle pour contrefaçon, si bien que les saisies de contrefaçons ont connu, dans un premier temps, une baisse de 65 % entre 2011 et 2012.

Une réponse partielle a été apportée par le Gouvernement avec l'adoption de la loi du 11 mars 2014 renforçant la lutte contre la contrefaçon, qui a étendu la possibilité de placer les marchandises en retenue, jusqu'alors limitée aux marques, aux dessins et modèles ainsi qu'aux droits d'auteur, à l'ensemble des droits de propriété intellectuelle. Ce texte a également créé la procédure de destruction simplifiée qui permet d'aboutir, sous le contrôle de la douane et sous la responsabilité du titulaire du droit, à la destruction des marchandises contrefaites sans intervention judiciaire. Il conviendra certes d'évaluer l'efficacité de ces instruments juridiques, mais on observe d'ores et déjà, depuis 2014, une hausse importante des saisies de contrefaçons.

Nous nous sommes penchés sur le commerce par Internet, qui prend une ampleur croissante. Nous avons visité les locaux de la société FEDEX à Roissy et rencontré les douaniers opérant sur place ; il est très difficile à une équipe limitée à une dizaine de personnes, malgré toute leur bonne volonté, de faire face au volume quotidien des envois. Aussi estimons-nous qu'une quarantaine de recrutements seraient nécessaires, afin de porter l'effectif à cinquante : cette demande, au demeurant raisonnable, de créations de postes est la seule que vous m'entendrez formuler…

La Cour des comptes déplore que la douane concentre son action sur la contrefaçon, le tabac et les stupéfiants, au détriment de la fiscalité et en particulier de la TVA. Comme nous le soulignons dans notre rapport, les choses ne sont cependant pas si simples. Notre régime douanier de TVA à l'importation, dit « régime 42 », veut que celle-ci ne soit acquittée que dans le pays de destination, ce qui peut favoriser l'« évaporation » de TVA, faute de communication entre les services. Les Pays-Bas, quant à eux, ont remplacé ce régime par un système d'autoliquidation de la TVA, qui permet de mieux assurer les contrôles. En France, la TVA relève, selon les cas, soit de l'administration fiscale, soit de l'administration des douanes ; il faut rapprocher l'une et l'autre, afin que la douane dispose des documents et éléments nécessaires pour savoir si la TVA a été acquittée ou non.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion