Intervention de Dominique Raimbourg

Séance en hémicycle du 9 juin 2015 à 15h00
Statut accueil et habitat des gens du voyage — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Raimbourg, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République :

…avec obligation pour eux de détenir un titre d’identité, sous la forme d’une carte d’identité ou d’un passeport, soit le titre d’identité de tout un chacun. Elle prévoit également l’abrogation de l’obligation de rattachement à une commune et, partant, de l’interdiction de rattachement de plus de 3 % de gens du voyage à la même commune. C’est donc la fin d’un statut administratif particulier. Nous faisons le pari, qui sera à mon avis réussi, que spontanément les aires d’accueil des gens du voyage ne seront occupées que par des gens du voyage, parce que c’est ainsi que les choses se passent depuis des années – non sans difficultés parfois. Pour l’instant, il n’y a pas eu de concurrence entre des sédentaires qui voudraient s’installer dans les aires réservées aux gens du voyage et ceux-ci. C’est ce pari optimiste sur une bonne façon de vivre ensemble que je vous propose d’adopter.

Le deuxième volet concerne la réactivation des lois Besson de 1990 et de 2000 dans trois directions. La première, c’est de rappeler que l’obligation qui pèse sur les communes de 5 000 habitants de construire une aire d’accueil des gens du voyage n’a, à ce jour, pas été complètement appliquée. Sur les 41 500 emplacements qui devaient être construits, seulement 30 000 environ l’ont été. L’exécution est à hauteur de 65 % pour les aires et de 50 % pour les terrains de grand passage. Il convient d’aller jusqu’au bout de cette obligation et que, quinze ans après son vote, la loi soit appliquée, car c’est le b.a.-ba de la vie en République.

Évidemment, certains me reprochent de mettre à la charge des communes de nouvelles obligations. Cela est faux. Les communes avaient le devoir d’organiser cette implantation et de construire ces aires jusqu’au 31 décembre 2008. Un fonds spécial de concours de l’État était prévu. Celles qui n’ont pas construit l’aire qu’elles devaient construire sont dans le meilleur des cas en retard, quand elles ne font pas preuve, parfois, d’une réticence qui ne s’apparente pas à la bonne foi, pour dire les choses avec un euphémisme que j’espère délicat. Le préfet aura désormais le pouvoir de consigner dans le budget de la commune les sommes nécessaires à la construction d’un espace d’accueil. Des garde-fous ont toutefois été mis en place, puisque deux mises en demeure préalables seront nécessaires. Cette disposition vient simplement rappeler cette maxime très simple en République, selon laquelle la loi doit être appliquée partout : en l’espèce, les aires d’accueil exigées doivent être créées.

Deuxième élément : pour donner toute leur force aux schémas départementaux, dont la Cour des comptes considère qu’ils n’ont pas toute la vigueur nécessaire, un mécanisme a été prévu dans la loi, qui n’est en fait que le rappel de ce qui était initialement prévu par la loi Besson. La commune peut choisir de créer une aire d’accueil, un terrain de grand passage ou un terrain familial pour répondre aux évolutions du mode de vie des gens du voyage et au fait que de plus en plus d’entre eux se sédentarisent.

Enfin, cette réactivation de la loi Besson vise à renforcer la nécessité pour les gens du voyage de respecter leurs obligations, dès lors que les sédentaires ont fait le nécessaire pour se doter des capacités d’accueil nécessaires. Dans ce cas, des pouvoirs supplémentaires sont donnés au préfet par le biais de dispositions juridiques sur lesquelles nous reviendrons en détail lorsque nous examinerons les amendements. L’arrêté de mise en demeure, qui fait obligation aux contrevenants stationnant en dehors des aires prévues de cesser ce stationnement irrégulier, aura une durée de validité prorogée de sept jours. Nous avons emprunté à diverses sources pour composer ce mécanisme, qui avait été initialement pensé par l’opposition avant d’être repris dans une réflexion commune avec le ministère – je remercie d’ailleurs tous les interlocuteurs qui ont favorisé notre travail. Ce mécanisme devrait donner satisfaction.

Pour conclure, sans me pousser du col, cette loi essaie de répondre à la question la plus noble dans l’art de la politique : faire vivre ensemble des gens qui vivent de façon différente et qui ont parfois des intérêts différents. Modestement, à son niveau, cette proposition de loi tente d’apporter sa contribution. Puisse-t-elle être le premier temps d’un travail d’accompagnement qui ne cessera pas, une fois qu’elle sera votée, mais qu’il faudra reprendre en permanence. Elle aura, assurément, marqué une avancée.

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