Intervention de Rémi Barthès

Réunion du 5 décembre 2012 à 9h00
Commission des affaires sociales

Rémi Barthès, coordonnateur CFE-CGC :

Dans le monde entier, les cabinets conseils qui assistent les grands groupes de l'industrie pharmaceutique conseillent de ne plus financer le risque de la recherche. Selon eux, il faudrait renoncer à la recherche interne et acheter à l'extérieur des produits, qu'on développerait en interne pour en faire des médicaments, en sous-traitant éventuellement les parties du développement les moins stratégiques.

C'est pourquoi Sanofi, qui réunit 40 % des effectifs de la pharmacie en France et 30 % des effectifs de la recherche, envisage le désengagement total du site de Toulouse et l'arrêt de la recherche sur celui de Montpellier, désormais voué au développement. Le directeur général a jugé « insuffisant » le tissu scientifique environnant ces deux villes. Quelle absurdité quand on songe à leur tradition dans les domaines scientifique, médical et pharmaceutique !

En 2009, le plan Transforming s'est traduit par l'arrêt de certaines recherches sur le site de Montpellier. La ligne oncologie a été transférée à Boston aux États-Unis et les chercheurs français ont dû se reconvertir au prix d'une formation lourde. La direction répète que la recherche n'est pas productive. C'est exact : on n'a pas laissé aux personnels le temps ni la sérénité nécessaires pour obtenir des résultats.

Faut-il citer un autre exemple de gâchis ? Aventis, qui possédait une ligne antibiothérapie particulièrement performante, l'a arrêtée. Considérant qu'il s'agissait d'un enjeu majeur de santé publique, l'ancien directeur général l'a fait démarrer à Toulouse. Alors qu'elle commence juste à donner des résultats, on veut à nouveau la fermer.

La direction prétend envisager seulement un transfert vers Lyon ou Vitry ; mais, de manière significative, elle parle désormais de recherches sur les maladies infectieuses et non plus sur les antibiothérapies. Les unités transférées vers Lyon seront intégrées à celles de Sanofi Pasteur. Nous y voyons le risque d'un abandon des recherches sur les antibiotiques, particulièrement stratégiques, puisque seules deux entreprises au monde – Sanofi et AstraZeneca – s'y consacrent encore.

La direction prétend que la recherche n'est plus productive, mais sa productivité dépend des projets qu'elle retient. Récemment, elle les sélectionnait encore sur leur potentiel et leur intérêt thérapeutique. À présent, seul prévaut le critère financier, au mépris de toute considération scientifique. Le groupe Sanofi a lancé en Asie un Lactacyd white intimate destiné à blanchir la peau des parties intimes des femmes asiatiques. En France, il a créé un joint-venture avec Coca-Cola pour commercialiser une boisson qui stimule le moral, les cheveux et la peau. Il débauche même des cadres de Coca-Cola ! Étape ultime de l'externalisation de la recherche, une opération masquée sous le nom de Sunrise vise à créer, avec des capitaux extérieurs, des start-up dédiés à un sujet, où du personnel de Sanofi pourra être détaché pendant quelques années. En fonction de leurs succès, ces entreprises seront intégrées à Sanofi ou mourront. Une société créée aux États-Unis sous le nom Warp Drive Bio, a embauché quinze chercheurs pour reprendre des travaux menés jusqu'à présent sur le site Sanofi de Francfort. Cependant, le nombre de salariés diminue dans nos services de pharmacovigilance.

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