Intervention de Thierry Bodin

Réunion du 5 décembre 2012 à 9h00
Commission des affaires sociales

Thierry Bodin, coordonnateur CGT :

Toutes les organisations syndicales de l'entreprise sont unies car son avenir est en jeu, comme celui de l'industrie pharmaceutique française. Cette industrie de haute technologie est aussi une industrie d'avenir, qui génère des milliers d'emplois induits, auxquels la direction ne fait jamais allusion.

Conserver son indépendance est un enjeu stratégique. Où les jeunes trouveront-ils un emploi si cette industrie continue à supprimer des milliers de postes de travail ? Si les pouvoirs publics, à commencer par l'Assemblée nationale, valident la stratégie de réduction des coûts du travail, tous les groupes l'adopteront, ce qui sera une catastrophe. La restructuration vise non, comme on le prétend, à maintenir la compétitivité de la recherche, mais à augmenter la rentabilité financière du groupe. Pour s'en convaincre, il suffit de relire les déclarations de la direction en septembre 2011 ou en mai 2012, lors de l'assemblée générale des actionnaires. La loi ne devrait pas permettre qu'on supprime des emplois pour augmenter la financiarisation.

Le seul engagement pris par M. Christopher Viehbacher a été d'augmenter de manière continue les dividendes, quels que soient les résultats de l'entreprise, et de les porter à 50 % du résultat net. Son premier actionnaire étant L'Oréal, Sanofi continuera à enrichir Mme Bettencourt en cassant un potentiel scientifique et industriel de premier ordre. Au-delà des salariés du groupe, la question concerne toute la Nation.

Nous avons formulé des propositions. Quand une entreprise choisit d'augmenter le niveau des dividendes indépendamment de ses résultats économiques, elle doit aussi s'engager à maintenir des sites, des activités et des emplois, voire à assurer leur développement. Seul le travail crée des richesses. Les actionnaires de Sanofi n'ont pas placé un euro dans l'entreprise depuis des années, alors qu'ils accaparent 3,5 à 4 milliards de dividendes par an. Les élus doivent préserver le potentiel scientifique et industriel national, d'autant qu'il a été, dans le passé, financé par l'argent public, puisque l'État a pris des participations dans Sanofi, Rhône-Poulenc et Roussel-Uclaf pour les aider à se développer, et que l'industrie pharmaceutique vit des organismes payeurs telle la sécurité sociale.

Vous devez légiférer pour garantir l'avenir industriel de la France, en empêchant les suppressions d'emplois à visée boursière, sans quoi aucun texte ne permettra plus de préserver les emplois futurs. Il serait impensable que les mesures votées par le Sénat l'an dernier ne le soient pas aujourd'hui par l'Assemblée nationale.

La loi doit aussi donner plus de droits et de pouvoirs aux salariés dans les comités d'entreprise et les conseils d'administration. Elle doit obliger les entreprises à investir à proportion des bénéfices qu'elles réalisent. Pour lutter contre la financiarisation de l'économie, il faut aussi supprimer les privilèges exorbitants dont bénéficient certains dirigeants d'entreprise, dont ceux de Sanofi : retraites chapeaux, actions de performance, parachutes dorés, et tout ce qui permet d'augmenter le bénéfice net par action sans créer d'emplois.

Enfin, l'industrie pharmaceutique est stratégique pour notre pays, compte tenu des enjeux de santé publique. Notre responsabilité et la vôtre, mesdames, messieurs les députés, est de garantir l'accès de la population française – et, au-delà, mondiale – à des soins de qualité à des prix raisonnables. Il serait temps que l'État soit représenté au sein des organes de gouvernance des entreprises pharmaceutiques.

Nous sommes disponibles pour travailler avec les groupes parlementaires prêts à s'engager sur nos propositions, qui émanent de l'ensemble des organisations syndicales. L'enjeu est de taille : le plan de restructuration actuel de Sanofi est mortifère non seulement pour la recherche du groupe – les sites de Montpellier et Toulouse ne sont pas les seuls concernés, dans la mesure où ils travaillent pour les autres sites –, mais aussi pour l'avenir de l'ensemble de ses activités.

Nous prenons nos responsabilités : les salariés sont mobilisés depuis le mois de juillet et vont continuer leur action. Nous souhaitons que les députés prennent les leurs et nous aident face à une direction qui a pour unique objectif l'augmentation des dividendes.

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