Vous avez tout à fait raison et nous nous sommes posé cette question à plusieurs reprises. Il n'existe pas vraiment, au sein des différents ministères, de service spécifique de la francophonie : les crédits y sont éclatés, à la différence du ministère des Affaires étrangères où ma direction couvre le périmètre du programme 185 – du moins presque puisque nous avons récupéré le budget d'Atout France.
Si l'on voulait avoir une approche globale, il faudrait également, au sein des ministères de l'Éducation nationale et de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, prendre en compte le coût des personnels détachés dans le réseau scolaire, et prendre en considération le fait que la direction générale de la Recherche et de l'innovation et la direction générale de l'Enseignement supérieur ont chacune leurs propres crédits dédiés. On doit en outre savoir qu'il existe une Mission de coordination interministérielle entre les deux, qui dispose également de crédits d'intervention dans le domaine qui nous intéresse, mais que se trouve aussi, toujours au sein de ce ministère, la Délégation aux relations européennes et internationales et à la coopération… Il conviendrait d'identifier de façon très fine les crédits qui concourent directement à la francophonie. Le ministère de la Culture et de la communication est également concerné
Nous avons évoqué la question avec les magistrats de la Cour des comptes à l'occasion de l'audit du réseau culturel français, eux-mêmes souhaitant qu'on établisse une telle cartographie. Il faudrait, dans un premier temps, savoir précisément ce qui est consacré à l'ensemble de l'action extérieure de l'État, qui contribue à sa façon au rayonnement de la langue française. Cette mesure semble impossible ; reste que le ministère des Affaires étrangères peut sans doute se prévaloir de disposer de la vision la plus globale.
Nous travaillons en bonne intelligence avec l'OIF pour nous assurer d'un retour sur investissement de notre contribution, de la bonne rationalisation de nos actions et de la complémentarité de nos travaux. Lorsque Mme Benguigui, la précédente ministre déléguée chargée de la Francophonie, avait lancé son projet « 100 000 professeurs de français pour l'Afrique », l'initiative en revenait également à l'OIF qui travaillait déjà sur le sujet. Nous organisons des réunions régulières. L'une d'entre elles, après la nomination de la nouvelle Secrétaire générale, a été plus particulièrement consacrée à l'identification des tâches de chacun. Dans les mois qui viennent, nous entendons remettre à plat cette approche et l'objectiver.
Quant aux autres opérateurs, nous travaillons essentiellement avec l'AUF et TV5 Monde. L'AUF est l'opérateur de l'OIF, voué par excellence à la promotion de la francophonie universitaire et linguistique ; il est donc essentiel pour nous d'agir avec cette agence, dans un esprit de complémentarité, afin de produire un effet de levier. C'est d'autant plus nécessaire que notre cadre budgétaire est contraint. Il s'agit aussi de relever le défi démographique à venir, principalement sur le continent africain. Or, l'AUF concourt directement à nos intérêts culturels, économiques et politiques. En outre, elle contribue à la formation des élites – un public que nous avons privilégié. L'AUF octroie des bourses à des étudiants en master ou en doctorat dont 1 500 viennent en France chaque année. Cela complète l'investissement du ministère des Affaires étrangères qui délivre, entre le réseau diplomatique et la DCUR, 70 millions d'euros de bourses. Le partenariat est réel avec un vrai retour pour la France puisque notre pays est une destination privilégiée du public visé par l'AUF.
Nous souhaitons travailler davantage avec l'AUF sur le numérique, secteur dans lequel la France accuse quelque retard. Au reste, la plateforme France université numérique (FUN) a sans doute été lancée un peu vite aux dépens du contenu. Notre objectif est de développer un contenu qui ne soit pas américain. Cet outil doit en effet servir la politique nationale française mais aussi, plus largement, la francophonie d'où la nécessité de co-fabriquer des contenus avec des pays francophones. À cet égard l'AUF est une tête de pont grâce à ses campus numériques et à son expertise sur le fonds.
Par souci de cohérence politique, c'est la DAF, et non pas la DCUR, qui siège à l'AUF et représente la France au sein de l'OIF et de ses instances opérationnelles. Nous n'en demeurons pas moins vigilants sur le fonctionnement de l'Agence, notamment en nous montrant capables de positionner des personnalités françaises au sein de sa direction - l'Agence est courtisée par d'autres pays francophones – et en surveillant de près son budget de 40 millions d'euros, que nous assurons à hauteur de 62 %. Nous avons donc mis en place, en collaboration avec l'Agence, un certain nombre d'indicateurs dans un souci de rationalisation. Il reste sans doute des marges de progression – du côté français en tout cas.