Intervention de Jean-Frédéric Poisson

Séance en hémicycle du 11 décembre 2012 à 21h30
Retenue pour vérification du droit au séjour et modification du délit d'aide au séjour irrégulier — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Frédéric Poisson :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, après quelques observations d'ordre général sur le texte, j'en viendrai à deux points sur lesquels je voudrais centrer mon intervention.

Tout d'abord, je veux bien comprendre que l'on profite de cette occasion pour balayer à nouveau l'ensemble de la politique d'immigration du Gouvernement, mais, monsieur le rapporteur, souvenez-vous de ce que nous vous avons dit en commission l'autre jour : l'exercice n'est pas si simple. Au fond, des ruptures sur ce point précis avec les politiques précédentes, certes, il y en a quelques-unes, mais le mécanisme général est maintenu, en dehors des ajustements de droit auxquels il fallait procéder.

J'ai regretté qu'à la tribune, vous ayez évoqué, tout à l'heure, l'incompétence de la majorité sortante. Il faut bien « faire le métier », c'est entendu, mais je voudrais vous rappeler, avec le sourire, que jeudi dernier, alors que nous siégions en séance publique pour étudier quelques propositions de loi, il nous a été annoncé trois textes à peu près définitifs pour le printemps prochain, notamment sur la protection des noms de communes et sur des avancées concernant les gens du voyage. Monsieur le ministre, nous avons débattu de tout cela, mais l'embouteillement du calendrier ne permet pas non plus de tout faire en temps et en heure comme nous le souhaiterions. J'espère que, le moment venu, vous saurez vous en souvenir.

L'objet de notre étude, aujourd'hui, témoigne de ce que notre culture plonge dans les racines judéo-chrétiennes de l'Europe. En effet, si j'en crois la tradition juive, la tradition grecque, le droit des gens latin, la volonté et le devoir d'accueillir l'étranger sont inscrits dans les traditions les plus anciennes de l'ensemble du pourtour méditerranéen, y compris en Corse. Il me plaît de le rappeler, car, de temps en temps, nous évoquons des références dont nous oublions parfois les origines. L'équilibre à trouver entre le droit des personnes et le respect de l'ordre public est au coeur de notre problématique – c'est également un trait de votre fonction, monsieur le ministre. L'exercice est donc difficile, tous les orateurs l'ont rappelé.

J'en viens à deux aspects de ce texte que j'ai déjà évoqués en commission. Le premier tient à la limitation à seize heures de la retenue des étrangers ; le second concerne l'alinéa 4 de l'article 8 relatif au délit de solidarité. Ces deux dispositions me semblent marquées par le même trait commun d'une présomption de bonne volonté des personnes à qui elles s'adressent.

À ma connaissance – mais sans doute le débat permettra-t-il de le préciser –, on ne sait pas très bien comment gérer la situation des personnes pour lesquelles on ne dispose pas, au terme des seize heures de retenue, d'éléments suffisants pour savoir si elles détiennent ou non un titre à séjourner dans notre pays. Ne faudrait-il pas, alors, envisager de prolonger ce délai ? La question a été posée en commission, mais, par crainte que cette retenue ne soit assimilée à la garde-à-vue, la possibilité de prolonger le délai a été écartée. Je ne suis pas certain que, sur le plan opérationnel, cela soit complètement satisfaisant.

La France, conformément à nos traditions les plus anciennes, s'honore à traiter dignement les personnes qui veulent entrer sur son territoire, mais tous ceux qui viennent chez nous ne sont pas nécessairement animés de la meilleure volonté. En l'état, ce texte permet-il de se garantir contre des volontés qui seraient déviantes ou tout simplement incompatibles avec les principes de notre république ? Ce n'est pas certain, et j'espère que le débat nous donnera l'occasion de nous en rendre compte ou de préciser ces éléments.

J'en viens à l'article 8 et à ce fameux délit de solidarité. Je dois vous l'avouer, je ne suis pas très à l'aise avec cette expression.

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