Intervention de Manuel Valls

Séance en hémicycle du 11 décembre 2012 à 21h30
Retenue pour vérification du droit au séjour et modification du délit d'aide au séjour irrégulier — Discussion générale

Manuel Valls, ministre de l'intérieur :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je n'ai pas pu assister aux interventions qui ont eu lieu en fin d'après-midi, mais Alain Vidalies, qui représentait le Gouvernement, m'a bien évidemment fait part des propos des uns et des autres et j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les intervenants qui sont exprimés ce soir. Je tiens à remercier l'ensemble des orateurs. Je veux également renouveler mes remerciements à Yann Galut pour la qualité de son travail en tant que rapporteur. Il a permis d'apporter des améliorations substantielles au texte, dans un contexte d'apaisement – relevé, à juste titre par M. Le Bouillonnec – qui doit beaucoup au travail du Sénat en première lecture et à la responsabilité des groupes qui ont approuvé ou soutenu ce texte, ainsi qu'au travail de votre commission des lois.

Comme l'ont rappelé le rapporteur ainsi que M. Mennucci et M. Popelin, le présent texte vise à combler un vide juridique qui a été mal anticipé et qui nous oblige à supprimer le délit de séjour irrégulier. Comme eux, je pense que la durée de retenue, de seize heures, est nécessaire et suffisante. Établir, dans le contexte juridique actuel, le droit au séjour d'un étranger nécessite un temps d'échanges approfondis ; ce n'est pas une procédure anodine. Ainsi que beaucoup d'entre vous l'ont indiqué, le Gouvernement est prêt, dans un souci de renforcement des garanties de la personne retenue, à étendre la présence de l'avocat pour lui permettre d'être présent aux auditions. C'est une grande avancée. Comme l'a dit M. Le Bouillonnec, ne vivons jamais la force du droit comme une entrave. Au contraire, elle est à la fois une garantie pour les personnes et un facteur d'efficacité pour notre politique d'immigration.

Je partage le sentiment de Matthias Fekl – dont Mme Mazetier a brossé le portrait, sans citer son nom. L'immigration avait besoin d'apaisement, et c'est le sens de l'engagement du Président de la République. Il faut traiter ce défi pour notre société de manière responsable, car la France s'est enrichie depuis deux siècles, comme je l'ai souligné cet après-midi dans mon intervention. Reconnaissons que nos sociétés, les États nations, vivent avec ces flux migratoires qui sont liés, non plus seulement aux pays voisins ou proches, mais au monde entier. Désormais, on parcourt des milliers de kilomètres et l'immigration change en profondeur les sociétés. Il faut être capable de maîtriser ces changements. M. Coronado a du reste rappelé que nombre de Français, que plusieurs d'entre vous représentent, vivent à l'étranger. L'apaisement que nous appelons de nos voeux passe par un dialogue avec toutes les parties prenantes ; c'est aussi le sens du rendez-vous que nous aurons l'année prochaine. Je salue l'état d'esprit qui a été le vôtre, notamment lors des débats en commission des lois. Il s'agit d'apporter des garanties à la personne retenue – prise en charge des enfants dont elle a la garde et présence d'un avocat –, sans que cela nuise à l'efficacité de la mesure de retenue. Ce texte doit respecter l'équilibre entre efficacité et garanties.

Monsieur Larrivé, je suis d'accord avec vous sur un point : l'immigration est une question complexe qui mérite un débat serein et apaisé. Mais le réalisme que vous appelez de vos voeux passe d'abord par le respect du droit, par l'adaptation de notre législation aux règles de l'Union européenne. À ce propos, je déplore – mais je ne conteste pas que gouverner est un art difficile – que le gouvernement et la majorité précédents n'aient pas fait preuve du réalisme nécessaire pour anticiper la fin de la garde à vue. Le rapporteur et d'autres orateurs ont souligné les alertes – je pense à la jurisprudence – qui auraient dû conduire à cette anticipation.

Mais ce n'est pas là l'essentiel de mon propos. J'appelle, et M. Le Bouillonnec l'a dit avec des mots très forts, tous ceux qui ont gouverné et exercé des responsabilités en la matière à traiter la question de l'immigration avec apaisement et réalisme. Contrairement à ce que certains ont affirmé, le Gouvernement n'a pas pour objectif d'accroître le nombre des personnes immigrées en France. Au reste, plus ils l'affirmeront, plus ils seront débordés par ceux – celle, en l'occurrence – qui considèrent qu'il faudra, demain, une immigration zéro. Plus ils feront de ce sujet un thème de controverse et de confusion, plus ils se retrouveront pris dans la nasse de celles et ceux qui veulent prospérer en exploitant le thème de l'immigration et de l'étranger (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste), car nous trouverons toujours, dans notre pays, des hommes et des femmes qui, à cause de la crise, sont en difficulté.

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