Intervention de Ségolène Neuville

Réunion du 17 juillet 2012 à 17h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSégolène Neuville, rapporteure pour avis de la délégation aux Droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes :

C'est en effet dans l'urgence que la commission des Lois et notre délégation ont travaillé en commun. Mme Pascale Crozon et moi-même avons tenu nos auditions la semaine dernière et il nous a été d'autant plus facile de tomber d'accord que le texte nous convenait déjà tel que nous l'avons reçu, le Sénat ayant effectué un travail remarquable.

Mme la ministre des Droits des femmes a souligné le décalage entre l'ampleur prise par le phénomène du harcèlement, qu'il concerne 2, 15 ou 40 % des femmes – les estimations divergent – et le nombre très faible de plaintes qui aboutissent – environ 80 par an. L'objectif de notre délégation est donc de faciliter le long parcours des victimes et nous sommes très favorables à la campagne de sensibilisation que vous avez annoncée pour l'automne, car elle fera connaître à la fois aux victimes et aux auteurs qu'il s'agit d'un délit.

L'enquête nationale sur les violences faites aux femmes (ENVEFF) datant de 2000, nous sommes également très favorables à la réalisation d'une nouvelle enquête nationale, car nous avons besoin de chiffres actualisés. Nous souhaitons enfin la création d'un observatoire national sur ces violences faites aux femmes, observatoire qui devrait prendre la forme d'un réseau partant des multiples initiatives locales. En effet, de nombreuses collectivités territoriales mènent déjà des actions en ce sens – l'observatoire de Seine-Saint-Denis en est un exemple – et il est temps de mutualiser les expériences afin d'aller plus loin.

S'agissant du texte de projet de loi, notre délégation est d'accord avec l'essentiel de ce qu'a dit Mme Crozon et propose le même amendement visant à supprimer de la partie II de l'article 1er, qui traite du délit « assimilé au harcèlement sexuel », les termes d'« ordres », de « menaces » et de « contraintes ». Les associations qui s'occupent du harcèlement – notamment la principale d'entre elles, l'Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT) – craignent en effet qu'en l'état actuel du projet, des agressions sexuelles ou des tentatives de viol, restées au stade d'un début d'exécution ou seulement d'actes préparatoires, puissent être déqualifiées en harcèlement sexuel. C'est pourquoi nous proposons de ne retenir que l'expression « toute forme de pression grave ».

Nous proposerons deux autres amendements. Le premier concerne les conséquences du harcèlement sur la santé physique ou mentale des victimes. Pour le moment, en effet, les seules conséquences prises en compte dans le I de l'article 1er sont l'« atteinte à [la] dignité en raison [du] caractère dégradant ou humiliant des agissements » en cause, et la création d'une « situation intimidante, hostile ou offensante ». Cet amendement devrait faciliter la charge de la preuve car, pour beaucoup de femmes, celle-ci est difficile à apporter en l'absence de témoins. Leur permettre de présenter un arrêt de travail pour dépression ou un certificat médical leur facilitera la tâche.

Le deuxième amendement vise à inscrire parmi les facteurs aggravants l'orientation sexuelle et l'identité de genre de la victime. Il fera certainement l'objet de discussions sur le point de savoir si l'on considère que l'homophobie et la transphobie sont plus graves que le sexisme, mais il aura le mérite d'ouvrir le débat au sein de notre Assemblée.

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