Intervention de Patrick Bloche

Séance en hémicycle du 23 juin 2015 à 15h00
Deuxième dividende numérique et modernisation de la télévision numérique terrestre — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Bloche, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation :

Madame la présidente, madame la ministre de la culture et de la communication, madame la rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, mes chers collègues, la commission des affaires culturelles et de l’éducation, saisie au fond sur cette proposition de loi, a adopté, le 17 juin dernier, ce texte que j’ai déposé avec Bruno Le Roux, Corinne Erhel et les députés du groupe socialiste, républicain et citoyen. Cette proposition relative au deuxième dividende numérique et à la poursuite de la modernisation de la TNT a été, en commission, enrichie de plusieurs amendements.

La TNT utilise actuellement des bandes fréquences comprises entre 470 et 790 mégahertz. Au printemps 2013, le Président de la République a pris la décision de transférer aux opérateurs mobiles la bande comprise entre 694 et 790 mégahertz, dite « bande 700 ».

Ce transfert poursuit deux objectifs essentiels : accompagner le développement du très haut débit mobile tout en garantissant dans la durée les intérêts et la modernisation de la TNT qui demeure, je le rappelle, l’offre gratuite de référence et le socle du financement de la création audiovisuelle et cinématographique dans notre pays.

En ce qui concerne les besoins des services mobiles, depuis le lancement de l’internet mobile et l’arrivée des smartphones et tablettes dont nous usons et abusons, les volumes de données échangées sur ces réseaux connaissent une croissance spectaculaire. Selon les études, cette croissance, supérieure à 60 % par an ces dernières années en France, devrait se poursuivre à un rythme exponentiel, de sorte que les opérateurs mobiles auront besoin de fréquences supplémentaires au plus tard en 2020. Il faut donc, dès à présent, créer les conditions pour dégager un nouveau dividende numérique en faveur de ces nouveaux usages en France comme ailleurs.

Le transfert de la bande 700 s’inscrit en effet dans un mouvement international et européen. Dès 2013, la Commission européenne a lancé une réflexion sur l’avenir de cette bande. En septembre 2014, Pascal Lamy lui a remis un rapport qui préconise son transfert en 2020 ou plus tôt, pour les pays qui le souhaiteraient. Une décision européenne demandant aux États membres de libérer la bande 700 avant 2020 pourrait dès lors intervenir dès l’année prochaine. Plusieurs pays européens ont déjà annoncé leur intention de procéder au même transfert. L’Allemagne a déjà engagé, notons-le, la cession des fréquences. En France, leur vente aux opérateurs mobiles devrait avoir lieu en décembre de cette année, après un appel à candidatures en juillet. Pour associer les parlementaires à ce processus, a été créée à notre initiative, par la loi du 15 novembre 2013, la Commission pour la modernisation de la diffusion audiovisuelle – CMDA. Cette commission, dont nous avons été deux membres actifs, Corinne Erhel et moi, s’est réunie deux fois et a rendu son avis public le 13 mai dernier. Nous sommes aujourd’hui le 23 juin : en un mois et dix jours, nous n’avons pas perdu de temps. En cette affaire, le calendrier est très exigeant et chaque semaine gagnée est précieuse.

La libération de la bande par la TNT se fera en deux grandes étapes. Pour diffuser toutes les chaînes avec moins de fréquences, il faudra tout d’abord généraliser une norme de compression dite MPEG-4 qui permettra de regrouper toutes les chaînes de la TNT dans six multiplex au lieu de huit actuellement – ce qui conduira à la disparition des multiplex R 5 et R 8. Cette première étape doit être franchie rapidement et l’échéance d’avril 2016 a d’ores et déjà été envisagée.

Dans un second temps, le CSA devra organiser le dégagement de la bande 700 et le repli de la TNT dans la bande de fréquences restante. Pour ce faire, une campagne de réaménagements de fréquences sera mise en oeuvre zone par zone entre octobre 2017 et juin 2019. En Île-de-France, les réaménagements de fréquences auront lieu dès avril 2016 pour permettre aux opérateurs mobile de les utiliser dès cette date.

La proposition de loi prévoit les évolutions législatives nécessaires à la libération de la bande 700. Elle permet en particulier d’imposer la norme MPEG-4 aux autorisations en cours et facilite la recomposition des multiplex de la TNT.

Afin de ne pas modifier le cadre juridique de la radio numérique terrestre, dont le lancement dans vingt nouvelles zones fait l’objet de consultations par le CSA, la commission a adopté un amendement qui vise à recentrer cette disposition sur la seule TNT.

Au-delà, la proposition de loi offre à la TNT les garanties d’un développement durable et d’une modernisation continue. L’article 2, conformément aux recommandations du rapport Lamy, propose ainsi de sanctuariser la bande de fréquences restante, dite « bande UHF », pour la diffusion de la TNT jusqu’en 2030, avec une clause de rendez-vous en 2025. Cette garantie forte, qui n’a jamais existé jusqu’à présent dans la loi, doit donner à l’ensemble des acteurs du secteur audiovisuel la visibilité dont ils ont besoin pour continuer à investir afin d’assurer le succès de la TNT.

Je tenais ici à souligner que la généralisation de la norme MPEG-4 est une chance pour la TNT, car elle permettra de faire passer l’essentiel, voire la totalité des chaînes en haute définition. Pour l’avenir, la proposition de loi facilite l’introduction de normes encore plus performantes et de nouveaux formats comme l’ultra-haute définition sans avoir à repasser systématiquement par la loi.

Enfin, la proposition de loi prévoit les mesures nécessaires à l’accompagnement des acteurs concernés par la libération de la bande 700.

Pour les téléspectateurs, dont nous sommes ici les représentants, plusieurs dispositifs ont été introduits par la commission, en bonne coordination avec vous, madame la ministre, afin d’assurer la continuité de la réception pour tous. Ces dispositifs, qui ont fait l’objet d’amendements identiques en commission, sont calqués sur ceux mis en place avec succès au moment de ce qu’on a appelé « l’extinction du signal analogique », c’est-à-dire du passage au tout numérique, en 2009.

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