Intervention de Corinne Erhel

Séance en hémicycle du 23 juin 2015 à 15h00
Deuxième dividende numérique et modernisation de la télévision numérique terrestre — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCorinne Erhel, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission des affaires économiques, chers collègues, le spectre est un bien public. Son attribution et sa gestion dans le temps sont un enjeu hautement stratégique aussi bien pour les télécoms que pour l’audiovisuel.

Le texte que nous examinons aujourd’hui doit être vu comme une chance de saisir des opportunités de taille. Opportunité pour moderniser la TNT et développer la télévision en haute définition au service des téléspectateurs français, avec un accès universel et gratuit. Opportunité pour les opérateurs de téléphonie ensuite, afin que ceux-ci disposent du spectre nécessaire à la prise en charge de la croissance exponentielle des données échangées. Mais opportunité aussi, pour tout un secteur industriel autour de l’économie de la donnée, de se développer et de créer de l’emploi et de la croissance.

Il est essentiel que la France, qui entend être un pays moteur sur les questions numériques, s’empare rapidement de ce sujet et s’inscrive dans la dynamique qui a été engagée collectivement au niveau international. Alors que le législateur a pour mission de trouver le juste équilibre entre les différents enjeux et acteurs en présence, il est indispensable de concilier la protection de la réception au service des citoyens, la préservation des acteurs de l’audiovisuel, l’intérêt de la filière des télécommunications, l’aménagement du territoire et, bien entendu, la valorisation du patrimoine de l’État – donc des Français.

Le travail accompli en commission et les engagements pris par Mme la ministre ont déjà permis de clarifier ces points, notamment le premier d’entre eux concernant les téléspectateurs, qu’il sera indispensable d’accompagner dans ce processus ambitieux, comme l’ont rappelé Mme la ministre et M. le rapporteur.

Quant aux acteurs de l’audiovisuel, il me paraît essentiel de rappeler l’important défi technique et financier que représente pour eux cet exercice. En effet, dans un calendrier très contraint et malgré des gains dus notamment à la migration vers la haute définition, c’est un secteur tout entier qui va devoir trouver ses marques. C’est pourquoi il me semble indispensable de bien anticiper l’impact de cette mesure en considérant les différents modèles économiques en présence, et de donner aux acteurs concernés la visibilité nécessaire à la bonne réorganisation de leurs activités et des contrats qui les lient les uns aux autres.

À cet égard, je me félicite du lancement d’une mission d’expertise – Mme la ministre l’a rappelé – sur l’évaluation de l’impact économique pour les acteurs de la diffusion, entre autres, et des coûts liés à l’arrêt anticipé des deux multiplex.

S’agissant des opérateurs mobiles, qui sont les principaux concernés par les articles 8 et 9 dont s’est saisie la commission des affaires économiques, je ne m’attarderai pas sur la nécessité qu’il y a pour eux de disposer de fréquences afin de répondre à des besoins connus de tous et liés à la croissance exponentielle du trafic de données.

En revanche, je soulignerai deux points. Tout d’abord, je me réjouis de l’équilibre de la procédure telle qu’elle est exposée dans ce texte et telle qu’elle est envisagée dans ses ressorts non législatifs. Cet équilibre a trait non seulement au calendrier, qui semble faire la synthèse entre les différents besoins des opérateurs, mais aussi aux modalités d’attribution et d’usage des fréquences soumises par l’ARCEP à la commission consultative des communications électroniques. En effet, la régulation mise en oeuvre à la suite de la procédure d’enchère doit être cohérente, stable et lisible afin de prévenir des crispations semblables à celles nous avions pu constater lors du premier dividende numérique.

Ensuite, en écho à l’actualité et à un potentiel rapprochement entre SFR-Numéricable et Bouygues Télécom, je note que les télécommunications sont un secteur souvent en pleine effervescence où l’on ne s’ennuie jamais. Que de questions et d’incertitudes, cependant, pour l’emploi, pour les salariés de l’ensemble de la filière, pour l’investissement, pour l’innovation, pour le consommateur et pour l’aménagement du territoire ! Ce sont des enjeux qui se trouvent au coeur de la réflexion et des préoccupations du Gouvernement et des parlementaires, et qu’il nous faut anticiper.

Nous sommes donc en droit de nous interroger, madame la ministre, sur le calendrier de ces annonces et sur les conséquences éventuelles d’un tel rapprochement pour le sujet qui nous occupe aujourd’hui – même si, à ma connaissance, la question n’est pas encore tranchée et si la réponse appartient au groupe Bouygues Télécom.

Je conclurai par l’importance que revêt la reconnaissance des enjeux d’aménagement du territoire dans la procédure d’affectation du spectre. Je me réjouis que la commission des affaires économiques et la commission des affaires culturelles, qui était saisie au fond, aient adopté l’amendement consacrant dans le code des postes et des communications électroniques la nécessité de tenir particulièrement compte des impératifs d’aménagement du territoire, tant dans le cas que nous examinons aujourd’hui que, plus généralement, dans toute procédure d’affectation future du spectre. Selon moi, ce point est extrêmement important.

Sous des apparences techniques, ce texte, comme cela vient d’être dit, est un texte déterminant qui nous permet d’accompagner deux secteurs majeurs de l’économie française dans leur dynamique d’avenir et de croissance.

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