Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, madame la rapporteure pour avis, monsieur le président de la commission des affaires économiques, mes chers collègues, pour offrir leurs programmes et leurs services, la télévision numérique terrestre, la radio et la téléphonie mobile utilisent aujourd’hui des bandes de fréquences qui composent le spectre hertzien.
Il importe de répondre aux besoins croissants qu’ont les services mobiles en termes de spectre, tout en garantissant un accès à une offre de services de télévision qui réponde aux objectifs d’intérêt général tels qu’ils sont définis par la politique audiovisuelle en France. La présente proposition de loi se situe au carrefour de ces deux enjeux majeurs.
La mise à disposition de fréquences supplémentaires pour les services mobiles apparaît essentielle, tant les perspectives de croissance du trafic mobile sont importantes. En effet, le taux de croissance du trafic mobile global est supérieur à 60 % par an, il double chaque année et il est voué à augmenter davantage !
Parallèlement, il convient de garantir la pérennité, le développement et la modernisation de la télévision numérique terrestre. La réception hertzienne demeure en effet le premier mode de réception de la télévision, puisqu’elle concerne plus de 58 % des foyers et que la proportion de foyers ne regardant la télévision que par la voie hertzienne terrestre atteint encore 30 %.
Lancée en 2005, la TNT est devenue une offre gratuite de référence se caractérisant par sa large couverture de la population, sa qualité d’image, sa fiabilité ainsi que son accès à faible coût.
En outre, ainsi que le souligne notre rapporteur, cette offre constitue également le socle du financement de la création audiovisuelle et cinématographique en France. En effet, les chaînes de la TNT, qui bénéficient de l’attribution de fréquences gratuites, doivent en contrepartie satisfaire à des obligations de production audiovisuelle et cinématographique. Par conséquent, il est indispensable de conforter la TNT, alors que le marché européen est assailli par une multitude d’acteurs qui proposent des services de médias audiovisuels sur internet sans être engagés par des obligations en matière de financement de la création.
Afin de dégager un nouveau dividende numérique destiné à garantir le développement du très haut débit mobile, le Président de la République a pris la décision de transférer la bande dite « 700 mégahertz » aux opérateurs de télécommunications pour le développement des réseaux mobiles à très haut débit.
L’affectation nouvelle des fréquences de la bande 700 mégahertz, aujourd’hui utilisée pour la diffusion de la TNT, s’inscrit dans un mouvement international. En Europe, la Finlande, la Suède, le Danemark, les Pays-Bas, le Luxembourg, l’Allemagne, la Suisse et le Royaume-Uni ont d’ores et déjà fait connaître leur intention d’affecter cette bande aux services mobiles. L’Allemagne a quant à elle engagé des procédures de cession de ces fréquences. La France ne peut rester en marge de cette dynamique européenne et doit envisager cette nécessaire transition numérique comme un gisement de productivité, de croissance et d’emplois potentiels.
Les enjeux sont immenses. En effet, les fréquences basses, qui caractérisent la bande 700 mégahertz, sont parfaitement adaptées pour favoriser le déploiement de réseaux mobiles à très haut débit étendus et performants, ainsi que pour accompagner les futures innovations.
L’affectation de nouvelles fréquences constitue également un enjeu majeur en termes de gestion du spectre hertzien – patrimoine immatériel de l’État – et d’équilibre des patrimoines spectraux entre les quatre opérateurs de réseaux qui opèrent actuellement en métropole. N’oublions pas que les ressources espérées, d’un montant de 2,1 milliards d’euros, doivent contribuer au financement des opérations militaires de la France.
Enfin, la poursuite de la modernisation de la plateforme hertzienne, que cette proposition de loi confie aux pouvoirs publics et au Conseil supérieur de l’audiovisuel, est en jeu. La libération de la bande et la généralisation de la norme de compression MPEG-4 pour la diffusion de la TNT, qui s’accompagne de l’arrêt de la diffusion en MPEG-2 et de celui de deux multiplex, comme Mme la ministre l’a rappelé, entraînent de lourdes conséquences non seulement pour le secteur de l’audiovisuel, mais aussi pour 15 % des téléspectateurs et des téléspectatrices qui pourraient être privés de réception – même si Mme la ministre nous a rassurés sur ce point.
À cet égard, notre groupe est préoccupé par le calendrier tendu de la réforme. En effet, la vente des fréquences, le changement de norme, la recomposition des multiplex et les réaménagements de la TNT constituent des opérations lourdes. Par conséquent, nos marges de manoeuvre sont particulièrement ténues, alors même que la réussite de cette transition est impérative.
Aussi, nous serons particulièrement attentifs à ce que l’équilibre final de cette proposition de loi permette de garantir plusieurs points :
La pérennité du modèle économique des diffuseurs audiovisuels, pour qui l’abandon de ces fréquences nécessitera un basculement vers de nouveaux moyens de distribution et de diffusion, ce qui générera nécessairement des coûts ;
La visibilité économique et la sécurité juridique pour les opérateurs engagés dans des programmes d’investissements en faveur du déploiement du très haut débit et de l’amélioration de la couverture mobile sur l’ensemble du territoire ;
La qualité du service proposé au consommateur, que ce soit en matière de très haut débit mobile ou de réception audiovisuelle.
Nous abordons l’examen de cette proposition de loi convaincus qu’il s’agit de préoccupations partagées par notre rapporteur et confiants dans la capacité de l’Assemblée nationale à définir le cadre législatif et réglementaire pertinent pour faire de cette indispensable transition technologique une véritable réussite.
Les articles 1 à 7 de la proposition de loi donnent en effet au Conseil supérieur de l’audiovisuel les moyens d’engager la libération de la bande, tout en apportant des garanties aux acteurs de l’audiovisuel. En outre, s’agissant des téléspectateurs et des téléspectatrices, vous vous êtes engagée en commission, madame la ministre, à ce que soit mis en oeuvre un programme d’accompagnement organisé autour de l’Agence nationale des fréquences.
Nous nous félicitons que des aides financières et un accompagnement technique soient prévus, en particulier à destination des foyers les plus modestes qui devront renouveler leur équipement.
Enfin, nous nous réjouissons que l’examen en commission ait permis de faire évoluer l’obligation faite au CSA de favoriser prioritairement la présence de nouveaux entrants lorsqu’il doit délivrer des autorisations de chaînes de TNT. Cette disposition constitue une avancée qui doit permettre d’enrayer le processus de spéculation financière autour des fréquences hertziennes, dont le seul objectif est de réaliser une forte plus-value dans un délai très court. Nous vous proposerons d’ailleurs un amendement visant à garantir l’effectivité de cette mesure tout en ne l’appliquant qu’au seul secteur audiovisuel, sur lequel j’espère que l’Assemblée portera une attention et un regard bienveillants.
Vous l’aurez compris, chers collègues, le groupe de l’Union des démocrates et des indépendants ne s’opposera pas à l’adoption de cette proposition de loi.