Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, le projet de loi que nous sommes amenés à approuver, portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière vise à transposer trois directives européennes en ce domaine. Il porte donc sur la transposition de la directive du 19 septembre 2009 sur la monnaie électronique ; de la directive du 24 novembre 2010, dite Omnibus I, sur les compétences des autorités européennes de supervision des banques, des assurances et des marchés financiers ; enfin de la directive du 16 février 2011 relative à la lutte contre les retards de paiement dans les transactions commerciales. Il s'inscrit dans les travaux que le Gouvernement mène en faveur d'une supervision financière renforcée, de la lutte contre les fraudes et du soutien aux petites et moyennes entreprises.
Je note tout d'abord qu'il s'agit d'une application tardive exposant notre pays à des sanctions pour défaut de transposition. Ce projet de loi a en conséquence pour objet de nous permettre de transposer dans notre droit les trois directives adoptées par notre pays et ses partenaires de l'Union européenne en septembre 2009, novembre 2010 et février 2011, c'est-à-dire il y a plusieurs mois, voire quelques années, et il ne nous est proposé qu'en cette fin d'année 2012. Tout comme mes collègues, c'est avec étonnement que j'ai découvert le retard accumulé par le Gouvernement Fillon – j'en remets une couche à destination de certains – dans l'application de la directive de 2009, dont l'échéance était fixée au 30 avril 2011.
Cette négligence a pour effet d'exposer notre nation à de lourdes sanctions financières pour défaut de transposition, et nous place par ailleurs dans une certaine instabilité juridique. Pour rappel, la France est le dernier État membre à procéder à la transposition de ce texte !
De même, la directive dite Omnibus I, datant de novembre 2010, avait une échéance de transposition fixée au 31 décembre 2011. Il en va de notre crédit auprès de nos partenaires de faire preuve d'une certaine exemplarité en matière de transposition des directives européennes. En outre, c'est la garantie d'une sécurité juridique pour nos concitoyens et pour nos entreprises à l'heure où les contentieux se développent dans ce domaine. Dans le secteur d'activité fortement concurrentiel et en pleine mutation des opérateurs de monnaie électronique, l'incertitude juridique dans laquelle étaient jusqu'ici plongés nos opérateurs nationaux leur a été fortement préjudiciable, ce que nous ne pouvons que déplorer.
J'en viens au texte proprement dit
La transposition de la directive de 2009 est une sécurisation qui permettra un développement des moyens de paiement électroniques. Elle doit donc se réaliser dans une certaine urgence, permettant à la représentation nationale de se pencher sur un sujet qui concerne tout aussi bien nos concitoyens que les entreprises. Il s'agit en effet de la question des services de paiement.
La réalisation du Marché unique – libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux – entraîne un accroissement des paiements transfrontaliers, tendance qui s'est accélérée avec la création de l'euro, monnaie commune à dix-sept États membres de l'Union européenne, ainsi qu'avec l'essor du commerce électronique.
Dans le même temps, les moyens de paiement ont connu une révolution technologique – paiement par Internet et par téléphone portable – qui rend d'autant plus nécessaire l'évolution et l'harmonisation du cadre juridique dans lequel ils s'inscrivent. Aussi, depuis 2001, un règlement européen a posé le principe de l'égalité des frais pour les paiements transfrontaliers en euros. De ce fait, une banque française ne peut appliquer de frais supérieurs lorsqu'elle effectue un virement en euros selon que celui-ci est réalisé à destination ou en dehors du territoire national.
C'est d'ailleurs dans ce cadre que le projet SEPA – le marché unique des paiements – s'inscrit. Tous les paiements en euros effectués par virement, prélèvement ou par carte seront considérés comme des paiements domestiques dès 2014.
L'étude d'impact menée dans le cadre de la rédaction de la directive fait apparaître que la France procède à 41 millions de transactions annuelles pour un montant représentant 0,24 % de part de marché, soit 0,63 transaction par Français. Ces volumes illustrent un relatif échec du déploiement de la monnaie électronique. Pourtant, ce moyen de paiement est identifié comme un véritable enjeu de modernisation de notre société.
Les attentes des consommateurs, des entreprises et des autorités publiques sont très importantes, ainsi que le révèle un récent rapport sur l'avenir des moyens de paiement, réalisé par la Banque de France en mars dernier. Outre leurs attentes en termes de facilité d'utilisation, les acteurs demandent à leur moyen de paiement, dès lors qu'il prend la forme de monnaie électronique, qu'il soit sécurisé. Les constantes évolutions techniques et les incessantes tentatives de fraudes parfois très sophistiquées rendent nécessaire une mise à jour régulière des dispositifs de sécurité des systèmes.
La fraude s'élève à 1,31 % des transactions internationales. C'est pourquoi, en permettant de reconfigurer le paysage européen des établissements de paiement et en proposant un régime prudentiel adapté et une nouvelle définition de la monnaie électronique, la transposition de la directive de 2009 permettra une protection renforcée des consommateurs, et par conséquent le développement positif de ces moyens de paiement.
Venons-en à la transposition de la directive dite Omnibus I. La crise financière de 2008 aura démontré que les turbulences que subissaient les marchés financiers pesaient de façon systématique sur l'économie réelle. Notre majorité est particulièrement attachée à l'application de mesures en matière de régulation financière européenne. Les dispositions prévues par la directive Omnibus I s'inscrivent concrètement dans ce cadre de régulation des marchés financiers.
En proposant une refonte totale de l'architecture de supervision européenne dès 2010, l'Union européenne s'est dotée d'un véritable système de surveillance financière, par la création de trois autorités de supervision micro-prudentielle : l'Autorité européenne des marchés financiers, l'Autorité bancaire européenne et l'Autorité européenne des assurances. Le Comité européen du risque systémique, instance macro-prudentielle, vient compléter le dispositif.
Il s'agit aujourd'hui d'adapter notre droit national aux modifications introduites par la création de ce nouveau socle de la surveillance européenne financière.
Cette avancée en termes de supervision des services financiers et bancaires européens précède une prochaine proposition de directive qui établira un cadre européen de résolution des crises bancaires, qui sera confié à la Banque centrale européenne. L'Union européenne doit jouer son rôle en matière de prévention des risques financiers et bancaires.
Enfin, la transposition du volet public de la directive de 2011 avant sa date d'échéance, fixée à 2013, est quant à elle un signal fort du Gouvernement à l'attention des PME dans le contexte économique tendu que nous connaissons.
Les délais de paiement propres à l'administration sont fixés à trente jours depuis 2010. Or le rapport annuel de l'Observatoire des délais de paiement, publié depuis 2007, montre que, entre 2008 et 2011, ces délais sont passés de dix-neuf jours et demi à trente-six jours pour les administrations d'État. Ce rapport met en exergue les difficultés auxquelles sont confrontées les PME en cette période de tension de leurs situations de trésoreries.
La sphère publique se doit d'être exemplaire dans ce domaine. La directive de 2011 tend à renforcer les sanctions prévues en cas de retard de paiement des sommes dues en exécution d'un contrat issu d'une commande publique, en instaurant notamment une indemnité forfaitaire qui viendra s'ajouter aux intérêts moratoires. Il est à souhaiter que cette transposition dans notre droit national ait l'effet dissuasif souhaité.
Pour l'ensemble des motifs que je viens de vous énoncer, je me prononcerai, bien entendu, en faveur de ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)